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France : Déclaration du comité de rédaction du WSWS - la journée d'action du 4 octobre 2005

 

Toutes les confédérations syndicales et les partis de gauche appellent à une journée de grèves et de manifestations partout en France aujourd'hui, 4 octobre, contre la politique libérale du gouvernement du président Jacques Chirac et de son premier ministre Dominique de Villepin.

Ces mobilisations, contre la destruction des lois protégeant les salariés, contre les coupes budgétaires dans les services sociaux, la perte de pouvoir d'achat et les privatisations d'entreprises publiques, ont, selon les sondages, le soutien de trois quarts de la population. On s'attend à ce que la journée d'action soit fortement suivie. Les transports en commun risquent d'être très perturbés.

Voici le texte d'un tract [pdf] que les sympathisants du WSWS vont distribuer dans les manifestations.

Déclaration du comité de rédaction du WSWS ­ 4 octobre 2004

A l'offensive mondiale libérale et impérialiste il faut opposer l'internationalisme socialiste

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Les travailleurs qui, dans tous les domaines, essaient de lutter contre des attaques néolibérales se voient confrontés à un gouvernement qui ne reculera devant rien pour détruire leurs droits. C'est pourquoi les travailleurs ont besoin d'une nouvelle perspective politique qui leur permette de gagner sur ce gouvernement et ses alliés dans le monde politique.

Cet état de fait fut souligné par le spectacle choquant qui se déroula le matin du 28 septembre quand des hélicoptères militaires transportant un commando de forces spéciales GIGN sont intervenus pour prendre d'assaut le ferry « Pascal Paoli » que des marins et du personnel en grève avaient occupé.

L'arraisonnement militaire du ferry qui appartient à la compagnie publique SNCM (Société nationale Corse-Méditerranée) a, à juste titre, été comparé à la célèbre scène du massacre d'un village vietnamien par l'intervention d'hélicoptères de l'armée américaine dans le film sur la guerre du Vietnam de Francis Ford Coppola « Apocalypse Now ».

Le recours à l'armée pour intervenir dans une action tout à fait légitime de salariés du ferry, non armés et protestant contre une privatisation imminente de leur entreprise et se trouvant devant la perspective de perdre leur emploi, leurs droits et conditions de travail, représente une nouvelle étape dans l'imposition de mesures néolibérales. Ordonnée par de Villepin, avec l'approbation du président Chirac et du ministre de l'Intérieur, Nicolas Sarkozy, cette intervention laisse entrevoir jusqu'où la classe capitaliste et l'Etat iront afin d'être compétitifs sur le marché mondial et de briser la résistance des travailleurs contre la destruction de leurs droits.

Le syndicat CGT (Confédération générale du Travail), entretenant des liens étroits avec le Parti communiste, ainsi que les nationalistes corses du syndicat STC (Syndicat des Travailleurs corses), représentant les employés du ferry sont déjà en train de négocier une solution de compromis qui accepte la privatisation ainsi qu'une réduction de l'effectif malgré le soutien considérable apporté par les travailleurs portuaires et malgré la fermeture du port de Marseille.

Les salariés ne devraient pas oublier le rôle joué en 2003 par le dirigeant de la CGT, Bernard Thibault, et Gérard Aschiéri de la FSU (Fédération syndicale unitaire), et que le président Chirac et l'ancien Ministre des Affaires Sociales, du Travail et de la Solidarité, François Fillon, avaient félicités pour avoir contenu et étouffé le mouvement de grève pour la défense du système de retraite, étouffement auquel avaient aussi participé les autres confédérations syndicales.

Le traitement infligé par l'armée à la population civile de son propre pays et comparable à celui infligé aux ennemis étrangers est en passe de devenir une caractéristique généralisée du capitalisme mondialisé où toute entrave au profit, à savoir des salaires et des conditions de travail convenables et des services sociaux, doit être supprimée.

C'est ce qui a été particulièrement bien illustré par l'incapacité du pays le plus riche du monde, le modèle pour tous ceux qui veulent jouer le jeu de la concurrence selon les règles du capitalisme mondialisé, à faire face aux dégâts causés par le cyclone Katrina.

La Nouvelle Orléans

La catastrophe sociale de la Nouvelle Orléans a été cruellement révélée par Katrina. Elle était le résultat de décennies durant lesquelles l'infrastructure civile et sociale connut une dégénérescence dangereuse dans l'ensemble des Etats-Unis à la fois par les gouvernements des Partis républicain et démocrate. Devant la détresse de la population, en particulier les handicapés, les pauvres et les noirs, on déploya des troupes armées jusqu'aux dents ayant la même mission et attitude que celles des troupes d'occupation d'Irak.

« L'ouragan a mis en lumière certains éléments essentiels de la crise profonde de ce système: la privation sociale vécue par des dizaines de millions de personnes aux États-Unis et le vaste gouffre séparant l'énorme majorité des gens (ceux travaillant pour un salaire) d'une oligarchie fabuleusement riche qui contrôle les deux principaux partis politiques

« La négligence et l'indifférence criminelles affichées par l'administration Bush envers la population de la Nouvelle-Orléans sont liées à la criminalité et au sadisme de la guerre américaine en Irak, qui a maintenant coûté la vie à plus d'une centaine de milliers d'Irakiens et à plus de 1.900 soldats américains.

« Tout comme la dévastation sur la côte du Golfe du Mexique n'était pas simplement le produit d'une catastrophe naturelle, la guerre elle-même n'est pas qu'une aberration, une conspiration fomentée par une poignée d'idéologues de droite. Il s'agit plutôt du produit inévitable d'une société capitaliste américaine en profonde crise

« L'usage de la force pour s'emparer de ressources et de marchés vitaux va main dans la main avec la destruction des programmes sociaux et avec les attaques sur les salaires en termes réels pour financer les immenses diminutions d'impôts pour les riches aux États-Unis mêmes. C'est la même politique de pillage à l'intérieur comme à l'étranger. » (WSWS, 23 septembre 2005, « Katrina, la guerre en Irak et la lutte pour le socialisme »)

L'impérialisme européen et américain

Les efforts des puissances européennes, organisées au sein de l'Union européenne, pour concurrencer les Etats-Unis sur le plan commercial, économique et géostratégique, ainsi que la Chine et l'Inde expliquent l'énergie implacable de tous les états ainsi que de leurs organisations nationales à faire baisser le coût du travail à travers la destruction du niveau de vie de la classe ouvrière au-delà des barrières et idéologies nationales.

La France, l'Allemagne et le Royaume ­Uni sont à présent engagés dans une offensive géostratégique commune, aux côtés des Etats-Unis, contre l'Iran sur la question du droit de développer l'énergie nucléaire, offensive qui porte la marque d'une préparation à une intervention militaire similaire à l'intervention en Irak. Le but en est le contrôle impérialiste de cette région stratégique riche en pétrole et gaz.

Que les autorités essaient d'accuser les grévistes du Pascal Paoli d'être des pirates, autrement dit des terroristes, est tout à fait en phase avec les intentions du gouvernement français de criminaliser la résistance au libéralisme et de s'engager dans la voie d'un état policier.

Dans le prolongement du gouvernement de coalition de Gauche de Lionel Jospin, comprenant le Parti socialiste, le Parti communiste et les Verts, le gouvernement de Villepin poursuit les attaques contre les droits sociaux et les services publics. Les malades, les chômeurs et les personnes âgées devront mettre la main au porte-monnaie pour financer le déficit de la Sécurité sociale ; le budget ne prévoit pas de ressources adéquates pour résoudre la crise du logement ; les salariés du secteur privé, de l'éducation, des services sociaux sont forcés de travailler plus pour des salaires dont le pouvoir d'achat diminue.

Sarkozy fit une déclaration des réelles intentions de la bourgeoisie française dans son discours de clôture de l'université d'été de l'UMP, le 3 septembre. Il rejeta catégoriquement l'égalité comme étant un principe de la vie politique et sociale française en proposant «Un modèle où le nivellement, l'égalitarisme, le saupoudrage n'auront plus leur place, un modèle où le travail sera la base de tout La république ce n'est pas donner à chacun la même chose. C'est pour l'Etat de donner à chacun selon ses handicaps et selon ses mérites. C'est par l'équité que l'on arrive à l'égalité...».

Voilà un appel aux forces les plus réactionnaires et arriérées de la société française. Non seulement c'était un encouragement pour des attaques encore plus massives contre les droits des travailleurs et un renforcement supplémentaire des pouvoirs des employeurs et de l'Etat, mais correspondait à une attaque ouverte contre l'idéologie de l'Etat français en répudiant la devise centrale de la République française, le lien symbolique avec le siècle des Lumières et la confiance dans le progrès remontant à la Révolution française : « Liberté, Egalité, Fraternité ».

Les politiciens français rompent ouvertement avec ces aspirations, plutôt ignorées par les gouvernements bourgeois successifs, dans les cas où ils espèrent rallier les forces contre-révolutionnaires, renonçant au consensus politique et à la démocratie bourgeoise pour les remplacer par la coercition et la dictature. Le défi lancé par Sarkozy au consensus social va de pair avec l'affirmation de Margaret Thatcher : « Et bien, savez-vous, la société, ça n'existe pas. Il y a des individus, hommes ou femmes et puis il y a des familles ». Le dernier régime en date à avoir pratiqué ceci était celui du maréchal Philippe Pétain, chef du régime de Vichy qui avait collaboré avec les nazis entre 1940 et 1944.

Les pouvoirs arbitraires de l'état

Sarkozy et le ministre de la justice, Clément, encouragent l'hystérie sur la question des menaces terroristes d'Al Qaida et certains cas de récidive par des violeurs récemment libérés de prison, afin d'accroître considérablement les pouvoirs arbitraires de l'état et d'empiéter sérieusement sur les libertés civiles. Ils sont en train de mettre sur pied des lois rétroactives violant les principes de la Déclaration des droits de l'homme selon laquelle « Nul ne peut être punie qu'en vertu d'une loi établie et publiée avant le délit, et légalement appliquée ». Les pouvoirs de surveillance de la police seront aussi grandement accrus, imitant les Lois patriotes réactionnaires imposées par l'administration Bush.

L'éviction brutale et sans relogement, sur ordre de Sarkozy, de familles de mal-logés à Paris, condamnés à vivre, faute de logements sociaux adéquats, dans des immeubles dangereux et insalubres indique une dérive vers la situation de la Nouvelle-Orléans. Les incendies tragiques et la mort de 48 Africains, que Sarkozy a mis sur le dos d'une immigration excessive et qui lui a servi d'excuse pour accroître les mesures de répression contre l'immigration, furent la conséquence d'années de négligence de la part des administrations gouvernementales nationales et locales, de Gauche comme de Droite. La démission de la responsabilité de l'état envers les sans domiciles, et la politique de s'en remettre aux associations caritatives trouvent un écho dans la réaction initiale de George Bush devant la catastrophe de la Nouvelle-Orléans : Il lança un appel à faire des dons aux associations caritatives pour venir en aide aux citoyens de la ville.

Une stratégie internationale

La riposte aux licenciements massifs et au chantage à la délocalisation n'est pas le nationalisme économique que l'élite politique toute entière, ainsi que les syndicats, soutiennent. On voit clairement ce que ce concept signifie dans les négociations entreprises par les syndicats français avec la multinationale américaine Hewlett-Packard qui a annoncé le licenciement de 6 000 salariés en Europe, dont 1 240 en France, et bien d'autres encore dans le monde entier. Au lieu d'organiser une lutte contre les licenciements dans toute la compagnie multinationale, les syndicats font pression pour que la compagnie limite à 15 pour cent la réduction planifiée de ses salariés en France, moyenne dans les autres pays européens, au lieu des 25 pour cent proposés.

Aucun syndicat n'a cherché à mobiliser à l'échelle mondiale les salariés de HP qui sont licenciés dans tous les pays où la compagnie est implantée afin de résister à cette vague de licenciements.

Le dernier quart de siècle a connu une intégration mondiale sans précédent de la production des entreprises et le développement massif de nouvelles capacités de production dans des régions telle la Chine et l'Inde de la part de groupes vraiment transnationaux. La mobilité mondiale du capital à laquelle s'ajoute la mise en place d'un nivellement international de plus en plus bas des salaires a mortellement touché les syndicats qui ont comme point de départ l'existence du système de profit basé sur la propriété privée des moyens de production et qui, du point de vue de l'organisation et du programme, sont ancrés dans l'Etat-nation. Les syndicats ne sont plus à même de concilier la défense du capitalisme, dont dépendent les privilèges de la bureaucratie ou leur engagement dans le succès de « l'économie nationale », avec une lutte pour assurer de meilleures conditions de travail et des réformes sociales. Au lieu de cela, ils ne sont devenus rien de plus que la police du patronat chargée d'imposer baisses de salaire et cadences accélérées afin de rester compétitifs sur le marché international.

Pour ne pas être mis en compétition avec des salariés moins payés en d'autres coins du monde et pour lutter contre la menace de délocalisation et autres formes d'approvisionnement à l'extérieur, il faut que les salariés adoptent une perspective politique entièrement nouvelle, l'internationalisme socialiste. Le seul moyen pour les salariés européens de défendre leurs emplois c'est l'alliance avec les salariés de Chine et d'Inde, non pas la concurrence avec eux car cela ne sert que les intérêts des employeurs.

La mondialisation de la vie économique apparaît pour le moment aux yeux des travailleurs n'être qu'un développement menaçant. Mais la mondialisation pose les fondations les plus puissantes pour unir la classe ouvrière internationale dans une lutte commune pour un nouveau système économique basé sur une production pouvant satisfaire les besoins sociaux les plus essentiels de la population : emploi, logement, éducation, soins de santé et une retraite convenables.

Le "non" français au référendum du 29 mai sur la Constitution européenne et le rejet, par la masse des salariés et des chômeurs, de l'offensive libérale des principaux partis politiques lors des élections allemandes d'il y a deux semaines expriment la résistance de la classe ouvrière européenne face à la destruction de l'état providence.

Les partis et les politiciens de Gauche qui firent campagne pour le "non" au référendum ne le firent que pour contenir la résistance croissante de la classe ouvrière devant le néolibéralisme. Le gouvernement et le Parti socialiste n'ont aucune intention d'affaiblir la compétitivité du capitalisme européen.

Les dissidents du Parti socialiste (Fabius, Emmanuelli, Montebourg, Mélanchon) soutenus par leurs anciens partenaires de la Coalition de Gauche plurielle, le Parti communiste, travaillent à se remettre avec l'aile majoritaire du « oui » à la Constitution européenne du Parti socialiste pour former une Gauche plurielle bis au cas où la Droite viendrait à perdre le contrôle de la situation et afin d'empêcher que la classe ouvrière ne se libère de 14 années de Mitterrand et 5 de Jospin.

La LCR pseudo-trotskiste tente de bricoler une coalition de gauche avec ses collaborateurs récents dans la campagne du non de gauche pour ériger une autre barrière contre un mouvement indépendant de la classe ouvrière. La dernière chose que la LCR et les radicaux petits bourgeois de LO et du PT veulent c'est de rompre, sur la base de principes vraiment socialistes avec ces forces discréditées.

Une telle rupture, sur les bases de perspective internationalistes socialistes, est essentielle si les salariés veulent vaincre l'offensive néo-libérale coordonnée par l'ensemble de l'establishment politique et syndical. Telle est la tâche du WSWS et des partis du Comité International de la Quatrième Internationale.

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