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WSWS : Nouvelles et analyses : Afrique

L’insécurité alimentaire s’aggrave en Afrique

Par Barry Mason
11 Septembre 2006

(Article original anglais paru le 6 septembre 2006)

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Un rapport de l’association internationale d’aide caritative, Oxfam, « Les causes de la faim : un examen des crises alimentaires secouant l’Afrique », constate que la crise alimentaire continue de s’aggraver en Afrique. Dans les années 1960, Oxfam avait contribué à la mise en place de la campagne Freedom from Hunger lancée par l’Organisation pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) de l’ONU et dont l’objectif était de réduire l’insécurité alimentaire. Cette campagne a lamentablement échoué en Afrique.

Selon le rapport d’Oxfam, la moyenne de la sous-alimentation est de 33 pour cent en Afrique subsaharienne alors qu’elle est de 18 pour cent dans le « monde en voie de développement ». En Afrique centrale elle est de 55 pour cent. En moyenne, le nombre des alertes alimentaires a triplé en Afrique depuis le milieu des années 1980.

Le rapport indique que la situation n’est pas allée en s’améliorant. Il constate qu’« un nouvel échec pointe à l’horizon. L’engagement… de réduire de moitié, d’ici 2015, la faim dans le monde comme le premier des objectifs du Millénaire pour le Développement (ODM), ne sera pas atteint en Afrique au vu du taux de progrès actuel. »

La principale raison pour laquelle la situation ne s’est pas améliorée est selon Oxfam que les principales puissances ont manqué de réagir rapidement et de façon adéquate aux situations alimentaires d’urgence. Pour ne citer en exemple que le cas du Niger le rapport remarque : « Bien que [dans ce cas] les premiers avertissements arrivèrent fin 2004, ce n’est que quand des photos d’enfants souffrant de carence alimentaire furent montrées à la télévision, en juin 2005, que la communauté internationale s’activa. Et lorsque l’aide est arrivée, 3,6 millions de personnes souffraient de la famine. »

Il arrive fréquemment que l’on réagisse lentement et partiellement à des appels urgents à l’aide financière lancés par des organisations telles que les Nations unies. « La plupart des appels d’urgence de l’ONU ne rassemblent que 30 pour cent des fonds demandés durant le premier mois, » précise le rapport.

En début d’année, par exemple, l’ONU a lancé un Fonds central d’intervention d’urgence (CERF) dans le but d’accélérer la réaction à de futures urgences; avec le système précédent, les fonds devaient être collectés avant qu’une action puisse être entreprise. L’ONU a suggéré que pour cela 500 millions de dollars étaient nécessaires, mais Oxfam dit que le chiffre devrait être au moins d’un milliard de dollars. Selon un récent rapport de l’ONU, le fonds a rassemblé un peu plus que 260 millions de dollars.

« L’ONU pense que 16 millions de personnes font face à un risque immédiat dans dix crises d’urgence humanitaire en Afrique qui restent oubliées, pour lesquelles il n’y a que peu d’argent et comprenant les tragédies qui durent au nord de l’Ouganda et dans la République démocratique du Congo », remarque le rapport d’Oxfam.

La majeure partie de l’aide fournie à l’Afrique est donnée sous forme de nourriture et en général on ne subvient pas aux besoins d’urgence non alimentaires. Les livraisons d’aide alimentaire peuvent prendre entre quatre et cinq mois. Alors que le fait d’acheter la nourriture sur place serait une méthode moins chère et plus efficace pour apporter de l’aide, les gouvernements des pays donateurs ont par contre leurs raisons propres d’acheminer l’aide alimentaire : « Pour certains pays donateurs c’est une bonne occasion d’écouler leurs surplus de récoltes et de procurer des bénéfices commerciaux à leurs propres entreprises agricoles et maritimes : 79 pour cent de l’ensemble de l’aide alimentaire provient des pays donateurs. Dans le cas du riz et du blé par exemple, l’achat de stocks de nourriture à des fins d’aide humanitaire constitue une forme de subventionnement au niveau national qui peut porter préjudice aux fermiers dans les pays en développement. »

L’accroissement de la pauvreté est un facteur clé de la crise alimentaire. Dans certaines crises alimentaires, la nourriture est peut-être disponible mais simplement inabordable. Depuis 1981, le nombre de personnes subsistant avec moins d’un dollar par jour en Afrique subsaharienne a doublé, pour passer à plus de 310 millions de personnes. Une crise alimentaire qui a surgi en 2005 dans le nord-est du Kenya a tout particulièrement touché les populations pastorales. Alors que le pays a vu son taux de récolte s’accroître de 15 pour cent et son Produit Intérieur Brut de 5 pour cent, le pourcentage de la population vivant avec moins d’un dollar par jour est passé lui, de 40 pour cent en 1990 à 66 pour cent aujourd’hui.

Durant les deux dernières décennies l’Afrique sub-saharienne a vu « sa dette insuffisamment annulée, une aide en déclin et de qualité médiocre, des conseils erronés de la part des donneurs ; on a assorti l’aide de conditions qui ont forcé ces pays à adopter une politique agricole qui leur était néfaste et des règles commerciales injustes. »

Le rapport constate que la principale cause de la précarité alimentaire permanente de l’Afrique est le manque d’investissement dans la production agricole. L’Afrique sub-saharienne a une économie principalement rurale, 70 pour cent de la population vivant dans des régions rurales et fournissant la nourriture aux deux tiers de la population. Alors que, dans les années 1990 l’aide alimentaire immédiate en provenance de l’Occident a augmenté, l’aide à la production agricole a elle, baissé de 43 pour cent.

Selon l’organisation NEPAD (Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique), il faudrait un investissement de dix-huit milliards de dollars par an dans l’infrastructure rurale africaine pour que soit réalisé l’objectif du Sommet alimentaire mondial qui est de réduire de 50 pour cent la faim sur ce continent. Une grande partie de l’agriculture africaine reste un agriculture dépendant uniquement des précipitations et les projets d’irrigation existants sont concentrés dans les grandes entreprises commerciales agricoles.

Un autre facteur important de la crise alimentaire est l’épidémie permanente de SIDA, qui influe sur l’insécurité alimentaire, entraînant un soi-disant «nouveau variant de la famine». Il y a, dans la région sub-saharienne, vingt-six millions de personnes porteuses du virus, ce qui a entraîné en 2005 près de deux millions et demi de décès dus à cette maladie.

Il s’est créé un cercle vicieux, la maladie frappant de jeunes adultes travaillant à la campagne. « La mort empêche les parents de transmettre leur savoir-faire, agricole ou autre, à leurs enfants » note le rapport. « Ceux qui ont la maladie sont affaiblis, leur capacité de cultiver la terre est diminuée, entraînant ainsi une précarité alimentaire qui exacerbe à son tour les symptômes de la maladie ».

«La production de maïs dans les fermes communales est tombée de 54 pour cent entre 1992 et 1997, ce qui est dû en grande partie à la maladie du SIDA et aux morts [qu’elle entraîne]», explique Oxfam.

Malgré les effets dévastateurs de la maladie, la réaction des principales puissances a été négligeable. «Seul un africain sur dix ayant besoin de médicaments contre le SIDA en a obtenu en 2005. Assurer la prévention, le traitement et les soins coûtera au moins 55 milliards de dollars dans les trois prochaines années… Les donneurs doivent accroître fortement leur assistance financière. »

Le rapport a également constaté que la politique commerciale internationale a eu un impact singulièrement négatif sur le continent africain. «La pauvreté des régions rurales de l’Afrique sub-saharienne est exacerbée par le fait qu’ils dépendent de l’exportation d’un petit nombre de marchandises agricoles, dont beaucoup sont affectées par des prix volatiles et en baisse. En 2002-2003… un effondrement des prix du café a contribué à la crise alimentaire éthiopienne qui s’est produite cette année. »

Des organisations caritatives engagées dans l’Aide et le Développement comme Oxfam pensent que la politique du « commerce équitable » est un moyen de s’attaquer à la pauvreté dans les pays sous-développés. Ce slogan eut la vedette lors d’une campagne intitulée « Faites de la pauvreté une chose du passé » et lancée au moment du sommet du G8 qui s’est tenu à Gleaneagle en Ecosse l’an dernier. L’effondrement récent du cycle de négociations de Doha sur le commerce mondial signifie cependant que le « commerce équitable » ne figurera plus, même pour la forme à l’ordre du jour des principales puissances mondiales.

Un autre facteur d’exacerbation de la crise de la production alimentaire sur le continent africain est le changement affectant le climat dans le monde. Une étude réalisée par le Département du développement international du gouvernement britannique sur les effets des modifications climatiques en Afrique prédit qu’en 2050 ceux-ci se traduiront par des changements profonds en Afrique méridionale, au Sahel, dans la région des grands lacs et dans les zones côtières de l’Afrique occidentale et orientale.

Le journal britannique Independent cita ainsi le principal conseiller scientifique de ce département, Gordon Conway : « Il s’agit d’un phénomène se produisant dans un monde qui est déjà débordé. C’est particulièrement vrai là où une pauvreté largement répandue, la faim et un mauvais état de santé affecte des millions de personnes. Tous les pronostics suggèrent que le changement climatique leur rendra la vie encore plus difficile. »

Selon le rapport d’Oxfam une hausse de la température de 2.5 degrés en 2080 menacerait de famine 60 millions de personnes supplémentaires en Afrique. Une hausse encore supérieure menacerait 80 millions de personnes supplémentaires. Un autre rapport de l’organisation Christian Aid estime que le changement climatique pourrait entraîner 185 millions de morts supplémentaires dues à la maladie à la fin du siècle.

Le rapport d’Oxfam se termine par un appel aux principales puissances pour qu’elles s’engagent à fournir une assistance d’urgence plus importante et plus rapidement, à acheter des aliments localement et à assurer une aide à plus long terme au niveau de l’investissement agricole. Toutefois, comme cette organisation l’a elle-même montré dans un rapport récent sur le dernier sommet du G8 de Gleaneagle, la plupart des promesses faites par les gouvernements occidentaux ne se sont pas concrétisées. Ceux-ci feront aussi la sourde oreille à son présent appel.

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