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WSWS : Nouvelles et analyses : Europe

Une nouvelle législation française traite les délinquants mineurs comme des adultes

Par Pierre Mabut
17 juillet 2007

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Le 5 juillet, le nouveau ministre français de la Justice, Rachida Dati, a présenté au Sénat un projet de loi relatif à la prévention de la délinquance. Il fut adopté et passera à l’Assemblée nationale le 17 juillet.

Cette loi, controversée et rejetée par les magistrats et les collectifs de travailleurs sociaux, fixe automatiquement des peines plancher aux délinquants récidivistes à la fois pour les délits graves et les délits simples. Un jeune délinquant de 16 ans sera dorénavant traité comme un adulte.

Passant pour le défenseur de la victime, Rachida Dati affirme avoir, en raison du programme électoral du président Nicolas Sarkozy, un mandat clair pour une loi pénale dont la fonction première est d’être dissuasive. Elle a déclaré : « Nous devons apporter une réponse ferme à cette France exaspérée dont l’obsession est une demande légitime de sécurité et de tranquillité. »

Dati, juriste de formation, est conseillère de Sarkozy depuis 2003 et membre de l’UMP depuis 2006. Elle a annoncé que la loi visait les « délinquants multirécidivistes ». Elle a dénoncé comme des « caricatures » les critiques de cette loi disant que la conséquence en sera une augmentation du nombre de détenus. Ce que contredisent les juges et les magistrats qui d’ores et déjà prédisent une explosion de la population carcérale.

Alors que la peine moyenne est actuellement de 5,7 mois d’emprisonnement pour un délit mineur fréquent, la nouvelle loi instaure des peines de un an pour les mineurs. Selon les chiffres du ministère de la Justice cités par Dati, la délinquance des mineurs a augmenté de 40 pour cent ces cinq dernières années. Actuellement, le nombre de détenus est de 64.000, dépassant de 12.000 les places disponibles. Ce chiffre comprend 3.150 jeunes entre 16 et 17 ans.

La nouvelle loi limitera considérablement le champ d’intervention du juge pour fixer la peine. La peine prononcée par le juge qui tient compte de la personnalité du délinquant et des circonstances du délit doit à présent être basée sur « une garantie exceptionnelle » que le délinquant peut être inséré dans la société.

La ligne dure adoptée par la nouvelle ministre de la Justice fut l’objet d’attaques émanant de son propre camp. Son directeur de cabinet, Michel Dobkine, a démissionné le 7 juillet en motivant sa décision par des raisons « strictement personnelles ». Cette démission fut suivie quelques jours plus tard par celle de trois conseillers importants dont la conseillère pour « le droit des mineurs. »

Sarkozy affiche son plein soutien à Dati. « J’en ai parlé avec Rachida, je lui ai dit ma solidarité totale », a-t-il précisé. Il a repoussé d’un revers de la main les démissions en disant que cela « fait partie de la vie des cabinets. » Toutefois, selon des sources syndicales rapportées dans le quotidien Libération, « Ca va mal à la chancellerie en ce moment » et ces départs sont « révélateurs d’un certain malaise. »

L’ancien ministre socialiste de la Justice, Robert Badinter, a critiqué la loi au Sénat, en citant comme exemple moral, parmi tous les gens, l’ancien premier ministre britannique, Tony Blair. « Tony Blair avait dit qu’il fallait être dur avec le crime et dur avec les causes du crime. Vous avez oublié le deuxième de ces termes indissociables… Nous savons que le foyer de la récidive, c’est la maison d’arrêt surpeuplée. »

Selon Badinter, « l’inverse de la récidive, c’est la réinsertion réussie. » Ce que le Parti socialiste entend par là fut révélé dans le programme électoral de sa candidate, Ségolène Royal, lors de la récente élection présidentielle. Elle avait prôné un encadrement par l’armée des jeunes délinquants.

Les travailleurs qualifiés, allant de l’avocat, du juge, du psychiatre pour enfants, jusqu’à l’assistance sociale, sont farouchement opposés à la nouvelle loi. Un appel a été lancé sous le titre « Les adolescents ne sont pas des adultes » qui dit que « 15.000 jeunes âgés de 16 à 17 ans sont interpellés plusieurs fois dans l’année. La plupart de ces adolescents sont déscolarisés depuis l’âge de 14 ans, sans qualification; ils ne parviennent pas à accéder à un premier emploi. Se percevant comme inutiles, humiliés par les échecs répétés, ils "traînent", provoquent, commettent ensemble la plupart de leurs infractions. »

L’appel définit l’enfermement « automatique » des mineurs comme « une impasse ». L’une des possibilités à laquelle pourrait être confronté un mineur est par exemple : un « vol de portable, commis après deux précédents vols, pourra conduire, sauf exception, un adolescent de 16 ans à deux ans en prison, peine plancher minimum. » La pétition appelle à « l’ouverture d’un "Grenelle de l’adolescence" pour mener un débat serein sur la délinquance des adolescents, une évaluation des politiques publiques et des réformes législatives successives, pour dégager un consensus sur l’insertion de tous les jeunes. »

La bonne foi de l’appel sous-estime totalement le nouveau gouvernement français mis en place par le président, Nicolas Sarkozy. Avant son élection, Sarkozy entretenait des relations très étroites avec la police et certaines sections de l’appareil d’Etat. La nouvelle législation introduite par sa ministre de la Justice triée sur le volet montre clairement que la politique du tout sécuritaire sera l’empreinte de son mandat.

(Article original anglais paru le 14 juillet 2007)


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