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WSWS : Nouvelles et analyses : Amérique du Sud

Au Brésil la crise sociale et politique s’aggrave durant le second mandat de Lula

Par M. Ybarra
19 juin 2007

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Tout juste six mois ont passé depuis que le président du Brésil, Luiz Inácio Lula da Silva, a pris ses fonctions en janvier 2007 pour un second mandat. Comme on pouvait s’y attendre, la crise politique qui affecte l’Etat du Brésil a resurgi avec la même intensité qu’en 2005 lorsqu’une menace de destitution pesait sur Lula. Ceux qui, à gauche comme à droite, croyaient que la crise était surmontée et relevait du passé, se faisaient des illusions.

En moins de six mois, les faux espoirs selon lesquels le pire était passé ou que la crise politique n’avait été provoquée que par une lutte partisane pour la présidence ont d’ores et déjà été anéantis. De nouveaux scandales de corruption ont déjà fait surface mettant en cause divers alliés politiques de Lula et compromettant les réformes promises par son gouvernement (réforme politique, réforme du travail, réforme de l’enseignement supérieur, réforme de l’impôt et une autre réforme de la sécurité sociale.) Dans le même temps, la crise a également mis en doute le projet de pseudo-développement annoncé en grande pompe par son gouvernement, le soi-disant PAC (plan pour accélérer la croissance) destiné à moderniser l’infrastructure productive du pays.

Renan Calheiros, président du sénat et grand allié de Lula, ainsi que tout un cercle de politiciens proches du président, divers députés et des gouverneurs du nord-est du pays, tels Jacques Wagner du Parti des travailleurs de Lula (Partido dos Trabalhadores – PT) sont impliqués dans des scandales mettant en cause de grosses entreprises de construction, notamment Mendes Junior et Gautama.

Dernièrement, il avait été mentionné que Dilma Roussef, la très influente ministre de Casa Civil, poste élevé remplissant une fonction de médiateur entre les pouvoirs exécutifs et législatifs, avait, lors d’un voyage au Salvador, séjourné à bord du yacht du propriétaire de l’entreprise de construction Gautama. Une fois de plus des rumeurs circulent relatives à des pots de vin, des retraits bancaires et des enveloppes ainsi que des valises pleines de billets totalisant la somme de 600 000 reais (environ 300 000 dollars US). Dans le même temps, on a révélé que plus de la moitié des membres du congrès national ont financé leur campagne électorale précisément à l’aide de dons faits par des entrepreneurs impliqués dans le paiement de pots-de-vin.

Le projet controversé de détournement d’eau du fleuve São Francisco, énorme projet d’irrigation devant être entrepris dans la région Nord-Est, implique justement l’entreprise Gautama dont le propriétaire se trouve au centre de diverses tentatives de corruption de députés, de sénateurs et de gouverneurs. Le réseau de corruption de Gautama est en grande partie lié aux projets avancés sous le PAC promis par Lula. L’homme d’affaires Zuleido Veras, propriétaire de Gautama, est déjà qualifié de « Marcos Valério du Nord-Est » en référence au directeur des relations publiques qui avait été au cœur d’un réseau de corruption dont les scandales publics avaient fait grand bruit en 2005.

Parmi les découvertes faites par la police fédérale il y a le versement de 100 000 reais (50 000 dollars US) en espèces au ministre des Mines et de l’Energie, Silas Rondeau, qui fut contraint de démissionner. Des vidéos montrent un directeur de Gautama arrivant et quittant le bureau du ministre, un paquet à la main, paquet qui aurait contenu le prétendu pot-de-vin. La preuve semble irréfutable vu qu’elle correspond à de l’argent retiré durant la même période et au moment des écoutes téléphoniques des conseillers du ministre conseillant à l’employé de Gautama d’utiliser une porte bien précise et d’emprunter l’ascenseur afin de rendre « plus discrète » la remise du pot-de-vin.

Comme si cela ne suffisait pas, lors d’une autre opération parallèle menée par la police fédérale et connue sous le nom de « xeque-mate » (échec et mat) dans une enquête sur un gang qui gère des machines à sous, des conversations téléphoniques furent enregistrées n’impliquant aucun autre que le frère du président, Genival Inácio da Silva, connu sous le nom de Vavá. Les enregistrements téléphoniques révèlent que le frère du président est en négociation avec des membres du gang leur disant « J’ai parlé aujourd’hui à l’homme et il m’a assuré que tout irait bien ». Tout prête à croire que « l’homme » est le président Lula lui-même qui, le jour de l’enregistrement de la conversation, se trouvait dans la ville de São Bernardo où habite son frère Genival.

Et le pire, aussi incroyable que ce soit, est qu’il est à présent clair, grâce à ceci et aux scandales précédents, que le Parti des travailleurs (PT) du président a eu des liens directs avec les jeux illégaux : loterie, machines à sous, etc. Il suffit de rappeler que le premier scandale qui avait éclaté lors du premier mandat de Lula avait justement démarré par la corruption dans les maisons de jeux (l’affaire Waldomiro).

Le gouvernement et le PAC paralysés

Suite à ces révélations successives, le gouvernement et ses principaux dirigeants au congrès ainsi que ses ministres semblent paralysés, ne se souciant en premier lieu que d’éviter des commissions d’enquête parlementaires et cherchant à tout prix à préparer leur défense en consacrant tout leur temps à rechercher des documents qui pourraient les absoudre. Renan Calheiros, le président du sénat s’efforce de prouver que les paiements de loyer et de pension alimentaire à sa maîtresse n’ont pas été faits par Mendes Junior, principale entreprise de construction qui est engagée de façon permanente dans l’exécution de vastes projets de travaux publics. Sa situation est typique de celle d’un grand nombre de politiciens du parti au pouvoir qui passent tout leur temps à entraver les enquêtes menées par la police, le parlement et la justice.

Pendant ce temps, les projets du plan pour accélérer la croissance (PAC) restent bloqués en partie en raison d’une recommandation de la Cour nationale des Comptes (TCU), organe de surveillance et d’investigation qui a constaté que les projets avaient été lancés en violation des provisions de la constitution. Une série d’irrégularités a été mise à jour et qui bloque le démarrage des travaux. Comme le notait la TCU, il y avait des « retards dans le processus d’autorisation environnementale, un retard dans l’obtention de certificat de propriété et une série d’autres obstacles. » Cette situation chaotique touche 29 projets d’infrastructure du PAC, tous connaissant soit des problèmes d’exécution soit n’ont même jamais été lancés.

Selon un article publié cette semaine dans le quotidien Folha de São Paulo, un projet d’étude de la firme conseil Macroplan « prouve que les projets qui ont été retardés, ou qui sont face à un « défi » (un euphémisme employé par le ministère du chef de l’Etat lorsqu’il rencontre des problèmes) sont subventionnés à hauteur de 31,4 milliards de reais (environ 15,5 milliards de dollars US). Ce chiffre correspond à 54 pour cent de la valeur totale des projets d’infrastructure logistique du plan officiel destiné à stimuler l’économie. Les travaux empêtrés dans ces affaires comprennent des projets d’amélioration ou d’extension des autoroutes, d’élimination des goulots d’étranglement ferroviaire, de construction de voies de chemin de fer, de modernisation des ports et d’élargissement des aéroports. »

Par ailleurs, pour contourner ce blocage croissant, le gouvernement recourt à des mesures provisoires, un décret d’urgence relatif au budget qui n’est censé être utilisé qu’en cas de circonstances exceptionnelles. En contradiction avec la constitution, le gouvernement de Lula n’a jamais autant eu recours à de telles mesures pour financer le budget. Selon des rapports de presse, moins de quatre mois après le vote du budget 2007, le gouvernement fédéral a déjà dépensé 1,8 milliards de reais (900 000 dollars US) en adoptant des mesures provisoires.

Selon la constitution brésilienne, les mesures provisoires devraient « couvrir des dépenses imprévues et urgentes, comme en cas de guerre, d’agitation intérieure ou de sinistre public. » Toutefois, eu égard au non fonctionnement du congrès, au fait que les ministres sont assiégés, aux allégations criminelles portées contre le propre frère du président, des mesures provisoires ont été utilisées pour faire avancer certains des projets du PAC. Bien entendu, tout ceci se fait en dehors de toute négociation ouverte pour obtenir l’approbation du congrès national, ce qui de plus ouvre la porte à davantage de corruption vu que les dépenses se font à huis clos, sans aucune information des médias et en mettant à l’écart l’opinion publique.

Tout comme lors de la crise de 2005, la réalité c’est que l’opposition bourgeoise de droite — le PSBD (Parti de la social-démocratie brésilienne), le Parti démocrate (anciennement PFL) — ne fait rien étant donné que bon nombre de leurs propres politiciens sont impliqués dans les mêmes scandales avec les entreprises gouvernementales, comme c’est le cas dans l’affaire Teotônio Vileda (PSDB), gouverneur d’Alagoas, ou dans des cas pires encore.

L’un des politiciens d’opposition le plus influent, par exemple, José Serra (PSDB), gouverneur de São Paolo, a créé un poste de secrétaire de l’enseignement supérieur dans le but d’éliminer l’autonomie des universités d’Etat. Cette tentative a réussi à déclencher une grève des professeurs, du personnel et des étudiants et qui dure depuis plus d’un mois.

Le bâtiment administratif de l’université de São Paolo (USP), principale université du pays, reste occupé par les étudiants depuis le 3 mai et le conflit a entraîné une crise politique croissante pour l’administration de Serra. Il refuse d’abroger les décrets autoritaires privant les universités d’Etat de leur autonomie tout en redoutant une confrontation directe avec les étudiants et le personnel de l’USP car à plusieurs reprises il a annoncé qu’une attaque de la police était imminente, mais sans jamais la mettre en place. En raison de la solidarité des intellectuels, des salariés de la fonction publique et des étudiants de par le pays la situation de Serra est symptomatique de la paralysie générale qui afflige la bourgeoisie brésilienne.

Entre-temps, il y a eu des manifestations dans l’ensemble du pays. Plus de 30 universités participent aux grèves organisées par le personnel, les professeurs et les étudiants. Dans le même temps, un nombre d’usines en faillite sont occupées par des travailleurs. Des contrats favorisant les patrons, même s’ils ont été signés, engendrent en permanence une opposition plus forte dans les grandes usines, telle Volkswagen et d’autres usines du secteur de l’industrie automobile en révélant la crise croissante dans laquelle se trouve le syndicat brésilien CUT (Centrale de l’union des travailleurs) qui partage les vues du gouvernement PT. L’occupation des universités, des établissements scolaires, des bâtiments publics et des usines s’est accompagnée de manifestations rassemblant à São Paolo et dans d’autres centres urbains entre 10 000 et 20 000 personnes.

Parmi les étudiants et les employés de l’université, le PT a perdu son influence politique et est publiquement rejeté. Dans les assemblées générales des étudiants à l’université de São Paolo, par exemple, les membres du PT, en dépit de leur participation au Comité général des étudiants, ont été exclus de la direction des assemblées en raison de leur politique droitière.

Le 15 juin, une manifestation de masse est organisée à l’appel des étudiants, des professeurs et de différents secteurs de salariés de la fonction publique de l’Etat de São Paolo.

(Article original paru le 12 juin 2007)


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