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WSWS : Nouvelles et analyses : Europe

Débat électoral en France : Royal et Sarkozy s’affrontent sur leurs programmes droitiers respectifs

Par Antoine Lerougetel
5 mai 2007

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Mercredi, le débat télévisé de deux heures et demie entre Nicolas Sarkozy, candidat de l’UMP gaulliste au pouvoir (Union pour un mouvement populaire) et ancien ministre de l’intérieur, et Ségolène Royal du Parti socialiste, dans l’opposition, était une joute entre deux défenseurs impitoyables des intérêts de l’impérialisme français et du patronat.

Le débat a été suivi par 20 millions de personnes, soit plus que la finale de la Coupe du monde de football, et cependant les opinions sont partagées quant à savoir lequel des deux a remporté la rencontre. L’éditorial de Libération dit, « Nicolas Sarkozy n’a pas perdu. Mais Ségolène Royal a gagné. »

Le débat était presque exclusivement centré sur la France. Un commentateur a fait remarquer, « extraordinairement hexagonal ! » Il n’a été fait aucune mention des guerres en Irak (pour laquelle la France fournit un soutien logistique crucial), en Afghanistan (où la France a des soldats et a subi des pertes), au Liban ou dans d’autres pays africains où la France est impliquée dans des interventions militaires actives pour y défendre ses intérêts impérialistes.

Il existe un accord tacite au sein de l’establishment politique, allant de l’extrême gauche à l’extrême droite, de ne pas faire du rôle de l’impérialisme français ou de l’alternance entre rivalité et complicité avec le militarisme américain, une question de querelle politique. C’est surtout le cas en période d’élections présidentielles, bien que le président soit, de par la constitution, responsable de la politique étrangère et des affaires militaires.

Une question était au cœur du débat, la question de l’immigration. Les deux candidats sont ouvertement opposés à toute régularisation massive des sans-papiers et s’accordent à penser que toute régularisation doit se faire au cas par cas.

Sarkozy a dit, « La France ne peut pas accueillir toute la misère du monde. » Royal en a convenu et dit qu’il s’agissait d’un « problème très difficile et humainement très douloureux. »

Royal a accusé Sarkozy d’être responsable d’une affaire largement médiatisée où un grand-père chinois sans papiers avait été arrêté alors qu’il venait chercher ses deux petits-fils à l’école. Sarkozy lui a demandé si elle maintenait toujours la position qu’elle avait alors énoncée, pour ensuite se rétracter, selon laquelle tous les parents et grands-parents d’enfants sans-papiers scolarisés en France recevraient automatiquement des permis de séjour. Elle a été contrainte de reconnaître que sa politique, dans la ligne du programme du PS, consistait à examiner chaque situation au cas par cas : « Je n’ai jamais demandé la régularisation globale et générale de générations, » a-t-elle affirmé.

Sarkozy de répliquer, « Comme je l’ai fait, on est d’accord. »

Ségolène Royal: « Oui, sur le cas par cas, on est d’accord. »

Sarkozy a clairement démontré l’inhumanité de sa politique d’immigration dont un aspect rend quasiment impossible le regroupement familial, une politique que Royal accepte aussi. « Je n’autoriserai plus quelqu’un à faire venir sa famille s’il ne prouve pas qu’il a un logement, a-t-il dit, qu’il a un revenu de son travail et non pas des allocations sociales… je souhaite que les membres de la famille qui vont venir le rejoindre apprennent le français avant de venir en France. »

Un peu plus tard dans le débat, Royal a saisi l’opportunité d’attaquer un geste de Nicolas Sarkozy et de le critiquer pour avoir transgressé ses propres lois sur l’immigration. Elle a constaté, « Vous êtes allé récemment dans un foyer de femmes battues et avez promis à toutes les femmes battues étrangères d'avoir des papiers. » Elle lui a demandé « Aujourd'hui, ces femmes ont-elles eu ces papiers ? Cela vaut-il pour toutes les femmes battues sans-papiers en France ? » 
 
Sarkozy, gêné a répondu, « J'étais dans une association remarquable, qui s'appelle "Coeur de femmes" qui s'occupe de femmes au bout du bout de la détresse. Il y en avait 12 dans la salle. Je connais très bien la dirigeante de cette association avec qui je travaille depuis très longtemps. J'ai confiance dans cette femme. Je sais que, quand elle me soumet des dossiers, ce sont des dossiers qui ont été réfléchis et ce sont des situations dramatiques. J'assume. Je tiendrai mes promesses… ce sont des femmes poursuivies, violées, battues et que la France que j'imagine est une France généreuse et accueillante. » 
 
Royal a poursuivi son interrogatoire, « Très bien. Donc toutes les femmes victimes de violences pourront avoir accès à des papiers en France ? » Quand Sarkozy a répondu qu’il le ferait pour le foyer « Cœur de femmes », Royal l’a mis sur le banc des accusés, « Vous pensez que la responsabilité de l'Etat est de choisir de façon arbitraire ? » Sarkozy a dû reconnaître les dispositions de sa loi sur l’immigration, « Comme vous l'avez dit : au cas par cas», a-t-il admis. Et Royal de revenir à la charge, « Il faut des règles. Donc, au cas par cas, toutes les femmes victimes de violences. » 

Aucun des deux candidats n’a mentionné les 500 expulsions de sans-papiers par semaine au départ de la France, dont bon nombre sont envoyés vers des privations, des arrestations, la torture et la mort, et qui font partie de l’objectif annuel de 26 000 expulsions annuelles fixé par Sarkozy. Tous deux étaient d’accord sur le fait qu’une régularisation massive était hors de question.

Dans ce contexte, la démonstration de colère de Royal, qui a fait couler beaucoup d’encre, accusant le gouvernement UMP de supprimer l’aide aux enfants handicapés accueillis dans les établissements scolaires sonnait faux et était ignoble. En effet, le manque d’intérêt des deux candidats pour la détresse humaine ne se limite pas aux seuls étrangers.

Tous deux sont d’accord sur la nécessité d’obliger ceux qui dépendent des allocations sociales, tels les chômeurs, à accepter tout emploi proposé, ce qui revient à du travail forcé. Ceci a des connotations sinistres en France où, sous l’occupation nazie, le régime collaborationniste du maréchal Pétain avait enrôlé le STO (Service de travail obligatoire) au service de l’Allemagne. (Des milliers de travailleurs avaient alors rejoint les rangs de la Résistance en opposition au STO et l’avait transformée en un mouvement de masse.)

Royal a affirmé, « Sur la question des droits et des devoirs, un point sur lequel nous sommes d’accord, et dans le programme que je propose, est qu’il n’y a aucun droit nouveau sans contrepartie. »

Sarkozy a affirmé qu’il maintiendrait la réforme des retraites que François Fillon, son principal conseiller et l’un des politiciens les plus détestés de France, avait imposée lorsqu’il était ministre du gouvernement de Jean-Pierre Raffarin. Cette loi sur les retraites avait provoqué une énorme opposition très déterminée. Sarkozy a affirmé, ce qui est faux, que les dispositions actuelles de la loi, qui condamnent déjà les personnes âgées à une diminution de leur qualité de vie, resteraient en l’état. En fait, les dispositions de la loi de Fillon seront revues l’année prochaine, et il est possible que les cotisations mensuelles soient augmentées et les retraites diminuées, non seulement pour les nouveaux retraités mais pour tous les retraités.   

Royal a nié avec véhémence vouloir abolir cette loi : « Remettre à plat ce n’est pas démolir. » Elle a dit qu’elle voulait prendre en compte certaines injustices, notamment concernant les femmes qui ont perdu des annuités en arrêtant de travailler pour élever leurs enfants. « Je ne démantèle pas les lois Fillon, je les remets à plat et je mets fin aux injustices les plus criantes, » a-t-elle dit. Elle a dit que seraient aussi mis à plat les « régimes spéciaux » (régimes de retraite plus avantageux dont bénéficient les travailleurs puissamment organisés des entreprises d’électricité, EDF et des transports ferroviaires SNCF et d’autres entreprises nationalisées) qui sont depuis longtemps dans le collimateur de la droite.

« Tout sera mis à plat, y compris les régimes spéciaux » a-t-elle dit.

Les deux candidats étaient essentiellement d’accord sur la nécessité d’intensifier les mesures répressives contre les jeunes défavorisés et Royal n’a pas mentionné une seule fois le vaste programme législatif que Sarkozy a fait voter au parlement et qui accroît les pouvoirs d’arrestation et de surveillance de la police. Une fois encore elle l’a émis une critique de droite l’accusant de n’avoir pas tenu sa promesse de tolérance zéro en matière de délinquance juvénile.

Une caractéristique frappante de la politique des deux candidats est qu’ils comptent tous deux sur les syndicats pour les aider à imposer leur politique réactionnaire. C’est Royal qui l’a exprimé de façon la plus explicite. « Le deuxième axe de la relance de la croissance est la qualité du dialogue social. » Elle a ajouté, « On sait que tous les pays du nord de l’Europe qui ont réussi à relancer la croissance sont les pays qui ont mis en place un dialogue social de qualité, qui permet aux syndicats de faire des compromis sociaux, » c'est-à-dire d’imposer des baisses de salaires et de conditions de travail à la classe ouvrière.  


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