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WSWS : Nouvelles et analyses : Asie

La hausse du prix du pétrole à l’origine de la grève la plus importante jamais organisée par les pêcheurs japonais

Par Eric Des Marais
1er août 2008

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Le 15 juillet, lors de la plus importante grève de l’histoire de l’industrie de la pêche, les pêcheurs japonais ont paralysé les 200 000 bateaux de la flotte de pêche pour protester contre les prix élevés du pétrole qui amputent fortement leurs moyens d’existence. L’on estime que près de 400 000 pêcheurs ont refusé de prendre la mer. A Tokyo, 3 600 marcheurs ont rejoint une manifestation qui avait lieu devant le ministère de l’Agriculture, des Forêts et de la Pêche pour réclamer des réductions d’impôts et une aide financière.

« Les pêcheurs ont dépassé les limites de ce qu’ils peuvent faire seuls et ils sont confrontés dans la présente situation à des pertes croissantes lorsqu’ils partent en mer pour pêcher » a précisé un communiqué de presse publié par la Fédération nationale des Associations coopératives de Pêche. L’on estime que le pétrole représente actuellement entre 25 et 40 pour cent des dépenses globales des pêcheurs.

En juin, une grève plus limitée avait eu lieu contre les coûts du carburant durant laquelle les pêcheurs de calmars étaient restés au port pendant une journée. La protestation était censée n’inclure que 900 bateaux de faible tonnage (entre 10 et 30 tonnes) mais de nombreux propriétaires de bateaux plus petits ont demandé à participer à la grève, portant ainsi le nombre de bateaux à 3 000. Ce qui représente plus de 60 pour cent des 4 700 chalutiers enregistrés pour la pêche au calmar.

L’industrie japonaise de la pêche a été durement touchée au cours de ces dix dernières années par des facteurs convergents. Alors que le poisson a traditionnellement joué un rôle important dans la cuisine japonaise, des changements alimentaires en faveur de la consommation de viande ont fait baisser la demande de poisson. Les stocks de poissons n’on cessé de s’appauvrir en raison de la surexploitation et du fait que la concurrence internationale a tiré les prix vers le bas.

Une vague de grèves identiques ces derniers mois a touché l’Asie, l’Europe et les Amériques. La hausse des prix affecte aussi sérieusement les travailleurs d’autres secteurs fortement dépendants du pétrole, notamment celui du transport.

La hausse des prix du carburant a exacerbé l’inflation. Au Japon, l’indice des prix à la consommation hors denrées périssables a augmenté de 1,9 pour cent sur un an en juin, la plus forte augmentation en dix ans. La ministre d’Etat chargée de la Politique économique et fiscale, Hiroko Ota, a dit qu’elle était d’avis que les chiffres de l’inflation montraient que les entreprises rejetaient la hausse des prix énergétiques sur les consommateurs.

Les pêcheurs, toutefois, ne peuvent pas simplement augmenter les prix. Ils vendent leur poisson aux enchères ce qui ne leur permet pas de rejeter les coûts supplémentaires de carburant sur les consommateurs. Le prix moyen du poisson a chuté de 240 yen (2,30 dollars US) le kilo en 1990 à 178 yen (1,70 dollar US) en 2007.

Le gouvernement rechigne à aider les pêcheurs. Le ministre de l’Agriculture, de la Forêt et de la Pêche, Masatoshi Wakabayashi, a dit à la presse qu’il « compren[ait] la frustration des pêcheurs » mais qu’il serait « difficile de les compenser pour la hausse du prix du pétrole ».

Selon le premier ministre Yasuo Fukuda, le gouvernement envisagerait l’application de mesures supplémentaires. En décembre dernier, le gouvernement avait annoncé une enveloppe budgétaire de 10,2 milliards de yen dans le but d’assister l’industrie de la pêche et de lui permettre de faire face à la hausse des prix du carburant. Le mois dernier un autre projet avait été dévoilé qui incluait des technologies pour l’économie d’énergie.

Cependant, Akira Takahama, un porte-parole de la Fédération nationale des Associations coopératives de Pêche, a décrit les projets comme étant flous. « Nous ne pouvons pas gérer la hausse des prix juste au moyen de technologies pour l’économie d’énergie », a-t-il dit.

La fédération a mis en garde que si les prix du carburant continuaient à augmenter, jusqu’à 20 pour cent des entreprises de pêche fermeraient et 85.000 pêcheurs pourraient quitter l’industrie. Elle a prédit que la pêche pourrait diminuer de moitié ce qui ébranlerait la politique japonaise d’après-guerre d’autosuffisance alimentaire.

Tout comme dans les autres pays, les coûts des aliments de base ont augmenté entre 10 et 30 pour cent au cours de l’année passée. Les prix des spaghettis ont augmenté de 33,2 pour cent, les spaghettis de 21,4 pour cent, le pain de 18,5 pour cent et le chocolat de 22,8 pour cent.

Etant donné que le Japon importe 99 pour cent de ses besoins pétroliers et 79 pour cent de ses besoins énergétiques, il est tout particulièrement vulnérable à la hausse internationale des prix du pétrole. Le prix du carburant utilisé par la flotte de pêche a triplé au cours de ces cinq dernières années. Le prix de certains produits pétroliers a augmenté de 23,9 pour cent au cours de cette dernière année. Le prix de l’électricité a grimpé de 3,5 pour cent.

La hausse des prix des carburants a également modifié la donne dans les transports. Selon la société d’autoroutes Metropolitan Expressway Company, qui gère les sections à péage des autoroutes japonaises, le trafic quotidien a baissé de 3 pour cent au cours de l’année passée. L’on a enregistré une diminution de 3,9 pour cent les samedis, de 5, 1 pour cent les dimanches et de 2,4 pour cent en semaine, montrant que les conducteurs japonais ont réduit les trajets en automobile pour leurs loisirs en réaction à la hausse des prix du carburant. La tendance fut d’abord remarquée en décembre 2007 quand le prix du carburant atteignit 150 yen (1,40 dollars US) le litre.

Le Metropolitain Expressway Co. a rapporté que la longueur totale moyenne des « bouchons » sur les routes de Tokyo avait atteint en hiver, aux heures de pointe du matin, 44 km, une baisse significative par rapport aux 56 km enregistrés l’année précédente. L’ouverture d’un nouveau tunnel est en partie responsable de la diminution des « bouchons » mais un responsable des transports a déclaré au quotidien Asahi Shimbun qu’il serait inévitable que les prix élevés des carburants affectent le trafic sur les autoroutes.

Au Japon, le réseau autoroutier est géré par des organismes quasi-gouvernementaux selon un système de péage. Le remboursement de leurs dettes pour la construction des autoroutes au gouvernement a été rendu plus difficile par la diminution des recettes. Il est probable que, dans le but de soutenir les bénéfices, ces entreprises appliquent des réductions de salaire, notamment des primes que reçoivent les travailleurs en été et en hiver. Pour la plupart des salariés japonais, ces primes représentent deux ou trois mois de salaire. 

La hausse des prix pèse sur les salaires et réduit le pouvoir d’achat. La confiance des consommateurs a chuté à son niveau le plus bas en juin depuis au moins 26 ans. On s’attend à ce qu’un rapport devant être publié cette semaine montre une baisse des dépenses des ménages d’environ 2,8 pour cent pour le mois de juin. En mai, les salaires avaient tout juste progressé de 0,8 pour cent.

La grève des pêcheurs n’est qu’un indice de plus des tensions sociales croissantes qui existent au Japon alors qu’à l’inflation s’ajoute une croissance faible et un taux de chômage qui reste élevé en permanence et qui touche de vastes couches de la population laborieuse.

(Article original en anglais paru le 29 juillet 2008)


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