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Pour contrer l'assaut sur l'éducation au Québec, une nouvelle perspective politique est nécessaire

Déclaration de l'Internationale étudiante pour l'égalité sociale
16 janvier 2008

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Alors que les premières assemblées générales étudiantes se réunissent en ce début de session pour discuter des mesures à prendre contre l'assaut frontal sur l'éducation lancé par la classe dirigeante, la question centrale posée aux étudiants est celle de la perspective politique qui doit guider leur lutte.

La grève partielle de l'automne 2007 à l'UQAM (Université du Québec à Montréal) a révélé l'existence parmi une large couche d'étudiants d'un fort sentiment d'opposition aux tentatives de l'élite dirigeante de restreindre l'accès aux études supérieures. Ce sentiment doit être nourri d'une compréhension des enjeux politiques de la lutte pour le droit à une éducation postsecondaire.

Le dégel des frais de scolarité annoncé l'an dernier par le gouvernement libéral de Jean Charest fait partie d'un assaut plus large sur tous les programmes sociaux. Partout dans le monde, les élites dirigeantes, confrontées à une profonde crise du système de profit, cherchent à reprendre ce qui reste des concessions historiquement faites aux travailleurs. Sur la scène internationale, cette crise se traduit par un tournant vers le militarisme où les États-Unis et les autres puissances occidentales, y compris le Canada, cherchent à s'emparer des ressources vitales de la planète telles que le pétrole.

Au Canada, ce processus s’est accéléré avec l’élection en 2006 du gouvernement conservateur de Stephen Harper. Le gouvernement libéral de Chrétien/Martin qui l’avait précédé, avait lui-même été très à droite en coupant notamment dans les transferts aux provinces destinés aux dépenses sociales et en baissant massivement les impôts pour les riches. Jean Chrétien avait aussi commencé à refaçonner la politique étrangère canadienne en la rendant plus agressive. Son gouvernement a envoyé des troupes au Kosovo dans le cadre d’une mission de l’OTAN, puis s'est joint aux États-Unis dans l'invasion de l'Afghanistan.

Depuis son entrée en fonction, le gouvernement Harper a cherché à mettre au rancart l’image de « gardien de la paix » que le Canada s’était donné après la Deuxième Guerre mondiale. Il a augmenté de façon considérable les dépenses militaires et il a poursuivi l’occupation de l’Afghanistan entamée sous Chrétien en faisant des Forces armées canadiennes un des principaux contingents de l’OTAN. L'objectif avoué de cette politique est d'affirmer la présence militaire canadienne dans le contexte d'une rivalité accrue entre les grandes puissances pour un nouveau partage du monde. Dans cette entreprise, Harper a eu l’aide des leaders du mouvement souverainiste québécois. Le chef du Bloc québécois, Gilles Duceppe, est allé jusqu'à saluer l’occupation de l’Afghanistan comme étant une « noble cause ».

Au Québec, la classe dirigeante a aussi pris un tournant marqué vers la droite. Après le référendum sur la souveraineté du Québec en 1995, le Parti québécois de Lucien Bouchard, avec l’appui des syndicats et au nom du « déficit zéro », avait entamé de sauvages coupes de plusieurs milliards de dollars dans de nombreux programmes sociaux, notamment en éducation et en santé, contribuant ainsi à la pénurie de main-d’œuvre à laquelle fait face aujourd’hui le système de santé québécois. En 2003, le Parti libéral nouvellement élu de Jean Charest lança son programme de « réingénierie » de l’État, qui consistait en partenariats public-privé, baisses d’impôts et coupes majeures dans les programmes sociaux.

La hausse des frais de scolarité présentement en cours s’inscrit dans ce contexte. Le gouvernement libéral de Jean Charest va augmenter les frais de scolarité universitaires de 100 dollars par année pour chacune des cinq prochaines années, soit une hausse totale de 30 à 40 pour cent. De plus, avec le dégel des frais de scolarité, la voie est grande ouverte pour une augmentation encore plus drastique dans les années subséquentes, condamnant les étudiants à une situation de plus en plus précaire.

De plus, les universités du Québec souffrent de sous-financement chronique et leurs administrations cherchent à tout prix de nouvelles sources de financement. C'est ce qui a poussé l’UQAM dans des aventures financières qui l'ont plongée dans une dette de plusieurs centaines de millions de dollars. Pour le gouvernement, c'est aux étudiants et aux employés de l’UQAM de faire les frais de ce déficit financier. Le nouveau recteur de l’UQAM, Claude Corbo, a écrit dans son « plan d’action pour l’UQAM » qu’ « il faut procéder, par les mécanismes appropriés, aux révisions et aux changements nécessaires, des activités tant académiques qu’administratives ».

En opposition à toutes ces mesures de droite, une majorité d'étudiants de l’UQAM est entrée en grève à l’automne 2007. À de nombreuses reprises, ces étudiants en grève ont été rudement bousculés par les policiers, les administrateurs de l’UQAM (et du Cégep du Vieux-Montréal) n’hésitant pas à faire appel à la police antiémeute au moindre geste de protestation étudiante.

La hausse des frais de scolarité est une mesure qui est depuis longtemps désirée par l'élite québécoise et qui fait partie notamment du « manifeste pour un Québec lucide », un document préconisant une politique draconienne de droite. Sentant le moment venu pour implanter une telle politique, la classe dirigeante veut tuer dans l’œuf tout mouvement d’opposition. Dans les mots du rédacteur en chef de La Presse, André Pratte, lui-même co-signataire du manifeste : « Devant un gouvernement qui... se tient debout, les étudiants n’ont pas le gros bout du bâton. »

Pour faire avancer le mouvement d’opposition qui se prépare contre l'assaut sur l'éducation, les étudiants doivent tirer les leçons de la grève du printemps 2005. Une des plus longues dans l’histoire du mouvement étudiant au Québec, cette grève faisait partie de la forte opposition aux mesures de droite du gouvernement Charest qui avait mûri parmi de larges couches de la population laborieuse à travers le Québec.

Après son élection au printemps 2003, le gouvernement libéral de Jean Charest a tenté d’imposer rapidement son programme de « réingénierie » de l’État. Les travailleurs s’opposèrent aussitôt à ce programme, organisant en décembre 2003 de nombreuses manifestations de masse. Les chefs syndicaux, craignant de perdre contrôle du mouvement, imposèrent une « trêve » durant les fêtes de fin d'année.  C'est ainsi que fut sabotée la première vague de soulèvements populaires contre le gouvernement Charest.  La deuxième vague est venue avec la grève étudiante du printemps 2005. Dans cette grève, la bureaucratie syndicale a aussi joué un rôle clé pour désamorcer le mouvement. Henri Massé, le chef de la Fédération des travailleurs du Québec (FTQ), la plus grosse centrale syndicale du Québec, a appelé les étudiants à faire des « compromis », c'est-à-dire à accepter les coupes de 103 millions de dollars dans le système des prêts et bourses qui avaient déclenché le mouvement de grève.

La seule stratégie qui aurait pu assurer le succès de la grève était un large appel politique à l'ensemble de la population laborieuse pour une lutte commune contre la politique de démolition sociale menée par le gouvernement Charest et toute l'élite dirigeante. Un tel tournant des étudiants vers les travailleurs, la seule force sociale capable de réorganiser la société sur une base progressiste, aurait demandé de démasquer la politique pro-capitaliste de la bureaucratie syndicale et sa subordination politique des travailleurs au parti de la grande entreprise qu'est le Parti québécois. Mais cette voie a été rejetée par la CASSÉÉ, l'association étudiante qui dirigeait la grève et qui s'est limitée à une politique de pression axée autour des coupes de 103 millions $ sans remettre en question l'ordre social existant.

Partout dans le monde aujourd'hui, les luttes des travailleurs contre leurs élites respectives s’intensifient. Aux Etats-Unis, les scénaristes sont en grève depuis plus de trois mois contre le monopole exercé par quelques grandes compagnies de télévision. En Allemagne, une partie des conducteurs de train mènent une grève courageuse depuis plusieurs mois pour obtenir de meilleures conditions de travail. En France, peu après qu’il ait révélé son caractère profondément anti-ouvrier, le gouvernement de Nicolas Sarkozy a fait face à un mouvement de masse contre ses attaques sur ce qui reste de l’Etat-providence.

Les véritables alliés des étudiants au Québec ne sont pas les bureaucrates syndicaux, défenseurs endurcis de l'ordre établi qui leur assure leurs nombreux privilèges, mais la classe ouvrière internationale. Pour faire avancer la lutte pour la défense de l'éducation, les étudiants doivent rompre avec la politique de pression et ne pas se laisser berner par les soi-disant partis de gauche comme Québec solidaire, qui est orienté vers le Parti québécois et opposé à tout mouvement indépendant de la classe ouvrière. Les étudiants doivent plutôt élargir leurs demandes et étendre leur mouvement de résistance à l'ensemble de la population travailleuse dans une lutte commune pour l'égalité sociale. En opposition aux tentatives de monter les travailleurs et les jeunes du Québec contre ceux du Canada anglais et d'ailleurs au moyen du nationalisme québécois, nous appelons à l'unité internationale des travailleurs contre l'ennemi commun représenté par le système de profit.

Adhérez à l’Internationale étudiante pour l’égalité sociale ! Joignez-vous à la lutte pour le socialisme ! Établissez l’IEES dans votre cégep ou dans votre université !

 

L’IEES tiendra prochainement une réunion publique à Montréal :

Le mercredi 23 janvier, de 19h à 21h
à l’Université du Québec à Montréal (UQAM)

Pavillon Judith-Jasmin
405, rue Ste-Catherine Est
Local J-1120

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