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WSWS : Nouvelles et analyses : Europe

France : Des centaines de milliers de personnes font grève et manifestent contre les attaques sur l’éducation

Par notre équipe de reporters
25 novembre 2008

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La moitié de tous les enseignants de France, soit quelque 400 000 personnels de l’éducation nationale ont fait grève et 200 000 ont défilé dans les rues d’une centaine de villes jeudi dernier lors de la quatrième journée d’action en l’espace de deux mois dans l’éducation. Ont aussi participé à ce mouvement quelques enseignants du privé.

C’était une grève à l’appel de tous les syndicats de l’éducation pour protester contre les attaques sur l’éducation perpétrées par le gouvernement du président Nicolas Sarkozy, dont les suppressions draconiennes de postes d’enseignants. Ils ont été rejoints par des lycéens, des étudiants et des parents d’élèves.

Après avoir supprimé 11 200 postes d’enseignants en 2008, le ministre de l’Education Xavier Darcos prévoit d’en supprimer 13 500 supplémentaires en 2009. La suppression de 3000 postes de RASED (Réseaux d’aides spécialisées aux élèves en difficulté) a tout particulièrement indigné les enseignants du primaire. Dans les lycées, enseignants et élèves sont concernés par les réductions d’heures de cours dans diverses matières qui permettent au gouvernement de supprimer des postes.

Darcos a fait une série de déclarations laissant entendre qu’il y a beaucoup trop d’enseignants ayant une formation trop poussée. Il a suggéré qu’il n’était pas nécessaire d’avoir un diplôme universitaire pour s’occuper d’enfants en maternelle où l’on dispense un enseignement public gratuit, souvent avant l’âge de trois ans. Il a proclamé, « les enseignants n’ont pas besoin d’être à bac +5 pour faire faire des siestes à des enfants ou leur changer les couches. »

Dans une déclaration provocatrice faite jeudi, il a ajouté, « La question n’est pas de savoir combien ils sont mais comment ils vont. Les courbes qui m’intéressent, ce sont les courbes des résultats, ce ne sont pas les courbes de nombre des enseignants. »

De telles déclarations sont tout à fait dans la ligne de la politique de Sarkozy qui avait écrit dans une lettre aux enseignants en 2007: « Dans l'école que j'appelle de mes vœux où la priorité sera accordée à la qualité sur la quantité, où il y aura moins d'heures de cours, où les moyens seront mieux employés parce que l'autonomie permettra de les gérer davantage selon les besoins, les enseignants, les professeurs seront moins nombreux. »

Un aspect sinistre de cette journée d’action a été la tentative du gouvernement d’appliquer la loi sur le service minimum d’accueil (SMA) forçant les communes à organiser l’accueil des élèves du primaire dont les enseignants sont en grève. Les communes à majorité socialiste ou communiste ont, en grande partie, refusé de prendre cette responsabilité. Darcos a menacé de sanctions les communes récalcitrantes. Mais les tentatives des préfets d’engager des poursuites judiciaires contre elles ont été rejetées par les tribunaux. Les communes conduites par l’UMP (Union pour un mouvement populaire) ont organisé cet accueil avec du personnel municipal n’ayant aucune formation pour s’occuper de jeunes enfants.

Durant ces dernières décennies, il y a eu toute une série de mouvements de masse contre les attaques sur l’éducation de la part de gouvernements successifs. Les syndicats ont étouffé, isolé et fragmenté ces mouvements, de celui contre Claude Allègre (ministre de l’Education nationale du gouvernement de la gauche plurielle de Lionel Jospin) et son projet de « dégraisser le mammouth, » jusqu’à la défaite de la grève de six semaines en 2003 pour la défense des retraites. Il y a eu ensuite en 2006 l’opposition à ce qui s’appelle la Loi sur l’égalité des chances lors du mouvement anti CPE (Contrat première embauche), puis une succession de journées d’action séparées à l’appel des syndicats depuis l’élection de Sarkozy en mai 2007.

Le principal syndicat de l’éducation, la FSU (Fédération syndicale unitaire) qui a des liens avec le Parti communiste (PCF) est le premier responsable de cet état de fait avec la CGT (Confédération générale du travail, proche du PCF), la CFDT (Confédération française démocratique du travail, proche du Parti socialiste), FO (Force ouvrière) et l’UNSA (Union nationale des syndicats autonomes, proche du Parti socialiste.)

Le NPA (Nouveau Parti anticapitaliste) d’Olivier Besancenot a produit un tract qui ne fait aucune référence aux trahisons des syndicats ni à la crise économique et ne donne aucune perspective socialiste pour renverser le capitalisme. Le tract se contente de déclarer que la grève du 20 novembre doit fournir « l’occasion de construire une convergence  d’action pour la défense des services publics, entre usagers et salariés ».

Tous les syndicats collaborent étroitement avec Sarkozy et ses ministres depuis son élection. Cette dernière grève fait partie d’une longue série de protestations consciencieusement séparées les unes des autres avec pour objectif d’empêcher que de nombreuses grèves en cours ne se cristallisent en un mouvement unifié contre le gouvernement.

Cette semaine en est un exemple significatif. Lundi les pilotes d’Air France en étaient à leur quatrième et dernière de grève journée contre le passage de l’âge du départ à la retraite de 60 à 65 ans. Samedi les travailleurs de la Poste manifestaient contre la privatisation, les fermetures de bureaux de poste et la dégradation des conditions de travail.

Mardi, il devait y avoir un appel à la grève d’une partie des conducteurs de train contre les attaques sur les conditions de travail dans le fret, qui préparent à la privatisation et au démantèlement de l’ensemble du service ferroviaire national. Ce mouvement a été reporté à vendredi, dans l’attente du résultat des négociations.

D’autres syndicats de cheminots appellent leurs membres à une grève reconductible sur cette question à partir de dimanche. Néanmoins les syndicats limitent leurs appels à la grève aux seuls conducteurs de train et non pas à tous les 160 000 cheminots, et ils n’envisagent aucunement une grève unifiée, de tous les secteurs affectés, contre la politique d’austérité du gouvernement.

La grève bien suivie de jeudi donne la mesure de la colère de millions de travailleurs et de jeunes. Tandis qu’ils défilaient les bourses du monde entier étaient en chute libre. Le CAC-40 perdait 5 pour cent de sa valeur. La France doit actuellement faire face à de nombreuses fermetures d’entreprises, de mise en chômage partiel et de licenciements dans les secteurs de l’automobile, de la métallurgie, des transports routiers et encore d’autres industries.

La classe dirigeante est contrainte d’accélérer et de poursuivre plus encore ses attaques sur les conditions de vie des travailleurs pour maintenir sa richesse. Alors que le gouvernement refuse d’augmenter le budget de l’éducation qui s’élève à 59 milliards d’euros, il trouve 360 milliards d’euros pour renflouer les banques et les grandes entreprises.

Des équipes de reporters du World Socialist Web Site sont intervenues dans les manifestations de Paris et d’Amiens.

A Paris, jusque 40 000 manifestants, principalement des enseignants accompagnés de forts contingents de lycéens et d’étudiants, ont exigé le retrait du programme de réforme de Darcos.

Des enseignants du lycée Newton défilaient derrière une banderole proclamant : « La réforme Darcos = La fin de l’égalité des chances. » Frank qui tenait une extrémité de la banderole a dit « Je suis là pour m’opposer aux 90 000 suppressions de postes sur six ans. »

Il a parlé de huit professeurs partis à la retraite dans son établissement et qui n’ont pas été remplacés. Son établissement scolaire a aussi été touché par la suppression de la carte scolaire qui exigeait jusqu’ici que les élèves aillent dans l’établissement scolaire proche de leur domicile. Trente élèves qui avaient choisi de s’inscrire ailleurs, n’avaient pas été acceptés là où ils le souhaitaient faute de place. Son établissement avait donc dû les reprendre, ce qui avait surchargé des effectifs de classe déjà bien lourds.

Frank a dit, « Depuis 2003 tout est tiré vers le bas. La gauche et la droite sont soumises aux lois du marché. Je suis pour la nationalisation de l’économie. Tous les plans de sauvetage de l’économie sont une énorme escroquerie. »

Emmy (à gauche) et ses amies

Emmy et ses amies, lycéennes en Seconde au lycée parisien Maurice Ravel ont dit qu’elles pensaient que l’avenir des jeunes était très sombre. « Les diplômes ont de moins en moins de valeur, » a dit Emmy. « C’est le modèle américain. Nous voulons une bonne culture générale. Cette réforme va créer deux sortes de lycées, les bons lycées et les mauvais. »

 « La crise devrait frapper les banquiers, pas les gens ordinaires », a-t-elle dit.


Mathieu, professeur pour enfants
en difficulté


Eva et Anita, étudiantes en droit à l’Université de Paris 2 étaient particulièrement inquiètes des suppressions de postes. Eva a dit, « Les gouvernements de gauche et de droite font leur politique, mais il n’y a aucune remise en question du système capitaliste fondé sur les profits. Ils laissent le système en place. »

Anita a ajouté, « On va devoir réfléchir à comment pouvoir le remplacer. »

A Amiens 3 000 personnes ont manifesté.

Un tract du NPA dénonçant la suppression de 6000 postes d’enseignants cette année ne faisait aucune revendication politique, se contentant d’exiger de : « Poser systématiquement la question de la reconduction de la grève dans les assemblées générales…Le rapport de force doit durer dans le temps et s’élargir à d’autres secteurs. »


Eddy, élève au Lycée Michelis

Mathieu, professeur de RASED, a dit que les enfants en difficulté dans les quartiers défavorisés étaient spécialement vulnérables, du fait des suppressions de postes d’enseignants. « Je ne suis pas syndiqué, mais Marx avait raison sur la crise économique du capitalisme. Je pense que beaucoup de gens s’en rendent compte. Nous avons besoin d’un vrai changement économique avant un changement politique. »

Eddy, scolarisé au Lycée Michelis d’Amiens a dit, « Pour défendre les emplois, les Français doivent se mobiliser et les licenciements doivent être interdits par la loi si les entreprises font des profits. Et les dividendes doivent être partagés avec les salariés. Il faut augmenter leurs salaires autant que ceux des patrons. »


Emilien, 16 ans du Lycée Delambre

Emilien, 16 ans du Lycée Delambre a dit, « On a besoin d’un référendum pour nous débarrasser de ce gouvernement. Trente élèves par classe, ce n’est pas acceptable. C’est le capitalisme, et le Parti socialiste est en train d’exploser, et le PCF de son côté ne vaut plus rien. Quant à Olivier Besancenot, il n’est pas crédible. Il faut qu’on s’unisse parce qu’en temps de crise, les étrangers deviennent les boucs émissaires pour les problèmes sociaux. »

(Article original anglais paru le 22 novembre 2008)


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