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WSWS : Nouvelles et analyses : Europe

Mort accidentelle du leader de droite Jörg Haider

Par Markus Salzmann
6 novembre 2008

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Jörg Haider, gouverneur de la province autrichienne de Carinthie et président du BZÖ (Alliance pour le futur de l’Autriche) s’est accidentellement tué en voiture à Klagenfurt aux premières heures de la journée du 11 octobre.

Haider revenait d’un meeting politique à bord de sa voiture officielle, une Volkswagen Phaeton. Il a perdu le contrôle de sa voiture, a heurté un pylône et sa voiture a fait plusieurs tonneaux. Au moment de l’accident, il roulait à 142 kilomètres-heure, plus du double de la vitesse autorisée sur cette route.

Pendant plus de 20 ans, Haider a été le personnage principal à l’extrême droite autrichienne. Il a transformé le FPÖ (Parti  libéral autrichien) — qui comprenait des éléments d’extrême droite et ouvertement fascistes — en parti de gouvernement et il a été pendant dix ans gouverneur de la province de Carinthie.

Les déclarations de la classe politique autrichienne à la mort de Haider méritent d’être notées. Presque unanimement, des hommes politiques, y compris des hommes politiques soi-disant de « gauche » se sont gardés de toute critique et nombre d’entre eux ont rendu hommage à Haider.

Selon Gabi Burgstaller, leader du SPÖ (Parti social-démocrate autrichien) pour Salzburg, « l’Autriche perd (avec Haider) un de ses hommes politiques  les plus talentueux de ces récentes décennies ».

Le président du SPÖ (Parti social-démocrate) et probablement futur chancelier, Werner Fayman, a aussi déclaré que Haider avait été un politicien exceptionnel qui avait façonné la politique en Carinthie et dans toute l’Autriche. Un hommage similaire est venu de l’ancien chancelier, Alfred Gunsbauer du SPÖ.

Le président des Verts, Alexander Van der Bellen, a rendu un hommage dithyrambique à Haider en déclarant : « Jörg Haider était un homme politique exceptionnel, vraiment doué pour inspirer les gens et les gagner à sa cause. »

Il n’est guère surprenant de voir qu’aucun politicien autrichien bien établi n’est prêt à analyser en profondeur le personnage et le rôle politique qu’il a pu tenir. L’ascension de l’homme d’affaires multi-millionnaire Haider à un poste politique de premier plan est inséparablement liée au déclin des deux forces politiques principales de la Deuxième République autrichienne, l’ÖVP (le Parti du peuple) et le SPÖ (Parti social-démocrate).

Haider est né en 1950 dans un petit village de Haute Autriche. Ses parents étaient de fervents nazis. Même avant l’Anschluss, le père de Haider était un membre clandestin du parti nazi, le NSDAP. Sa mère était membre active au sein de la fédération nazie des jeunes femmes allemandes.

Haider étudia le droit à l’Université de Vienne, où il occupa un poste de maître assistant  jusqu’en 1976 à l’Institut de droit public et administratif. Il avait déjà commencé la politique en 1971 en devenant le président du RFJ (Cercle des jeunesses libérales). C’était le plus jeune délégué quand il entra en 1979 au Nationalrat (Conseil national autrichien) et il commença rapidement son ascension au sein du FPÖ (Parti libéral autrichien) qui à cette époque était plus un parti conservateur qu’un parti d’extrême droite.

En 1986, grâce à l’aide de l’aile nationaliste du parti, Haider réussit un putsch contre le leader de son parti, Norbert Steger et il prit sa place comme président pour transformer son parti en organisation d’extrême droite. A ce moment-là, le chancelier fédéral social-démocrate, Franz Vranitsky décida de quitter la coalition gouvernementale avec le FPÖ.

Haider fut en mesure d’utiliser sa fortune considérable pour accroître son influence au sein du FPÖ. Dans le passé, un grand oncle de Haider avait utilisé sa position nazie pour s’emparer de la fortune d’une riche veuve juive. En 1986, Haider reçut en héritage approximativement 15 millions sans devoir payer un seul centime de taxe. A partir de cette date, Haider a fait partie de la classe des riches en Autriche.

Après une campagne ouvertement raciste et anti-immigrés, Haider fut élu gouverneur de Carinthie en 1989, grâce à l’aide de l’ÖVP. Néanmoins, deux ans plus tard, Haider fut forcé de démissionner après avoir reconnu publiquement son admiration pour Adolf Hitler et avoir déclaré que le « programme d’occupation des nazis » avait été « exemplaire ».

Nullement décontenancé, il poursuivit sa carrière politique au niveau fédéral. En 1993, il lança un referendum sous la bannière « L’Autriche d’abord ! » Il réclamait l’expulsion des étrangers et des demandeurs d’asile et il promit de « combattre l’invasion de l’Autriche par les étrangers ».

Lors des élections locales de 1998, Haider et le FPÖ parvinrent à chasser le SPÖ de sa position dominante en Carinthie et ils revinrent aux affaires du land. En 1999, lors des élections nationales, l’extrême droite vint en deuxième position derrière le SPÖ, ce qui résulta en une coalition gouvernementale entre le FPÖ de Haider et l’ÖVP.

Haider se retira officiellement du gouvernement quelques mois après la formation de celui-ci, mais il continua à agir en coulisse.

Les quelques mois où il était aux affaires n’ont fait que mettre au grand jour la vraie nature du FPÖ. Allié avec l’ÖVP (Parti du peuple), le FPÖ entreprit une série d’attaques contre la classe ouvrière, comme des attaques sur les retraites, le système de santé ou les droits démocratiques ou la mise en place de frais d’inscription à l’université. Ces attaques s’accompagnaient d’une politique sécuritaire et d’une politique d’immigration et d’asile prohibitive.

Suite à cela, le parti perdit du soutien populaire. Toute une série d’élections se révélèrent catastrophiques pour le FPÖ. Le parti lui-même était déchiré par des luttes intestines. Après les élections locales de Basse Autriche, où le FPÖ avait remporté 3 pour cent des suffrages, Haider rompit avec le FPÖ et créa le BZÖ (Alliance pour l’avenir de l’Autriche).

En 2006, le BZÖ de Haider réussit à réunir suffisamment de suffrages pour être représenté au Nationalrat. Néanmoins, l’organisation reçut un regain de vitalité par la politique droitière de la large coalition au pouvoir composée du SPÖ et de l’ÖVP. Lors des élections fédérales de fin septembre, l’extrême droite enregistra ses meilleurs résultats depuis 1945. Le FPÖ et le BZÖ obtinrent à eux deux le même nombre de voix que le SPÖ.

La montée de Haider pendant les années 80 fut liée à la politique de ces deux partis qui dominaient la vie politique en Autriche depuis longtemps : le SPÖ et l’ÖVP.

Après la défaite et la chute du régime nazi, l’establishment autrichien avait essayé moins encore que l’establishment allemand de faire le point par rapport à sa compromission avec le national – socialisme. L’objectif de tous les partis officiels avait été de maintenir l’ordre capitaliste et de reprendre une vie normale le plus rapidement possible. Pour ce faire, la Deuxième République autrichienne avait adopté la constitution d’avant-guerre de la Première République.

Entre la fin de la guerre et 1966, l’Autriche avait été en permanence gouvernée par une coalition large dirigée par l’ÖVP, même si pour stabiliser l’ordre bourgeois le SPÖ avait joué un rôle plus important. La classe capitaliste s’était tellement discréditée pendant la période du Troisième Reich qu’elle ne pouvait se maintenir au pouvoir qu’en faisant des concessions sociales et politiques à la classe ouvrière.

Ceci avait permis au SPÖ aussi bien qu’à l’ÖVP, dont les programmes relevaient pour l’un comme pour l’autre de la social-démocratie, de contrôler le paysage politique. En 1945 et 1999, le SPÖ avait été représenté dans tous les gouvernements en coalition avec l’ÖVP, sauf pendant quatre années de 1966 à 1970.

Tant que de telles coalitions supposaient des concessions à la classe ouvrière, cette forme de gouvernement conduisit à une situation politique relativement stable en Autriche. Mais les « réformes » introduites au cours des années 80 modifièrent la donne.

Comme dans tous les autres pays d’Europe, les acquis sociaux de la classe ouvrière ont été énergiquement attaqués et le climat social s’est détérioré. L’ouverture de l’Union européenne à l’Europe de l’Est, l’adhésion de l’Autriche à l’Union européenne et les conséquences de la mondialisation, ont diminué les possibilités de concessions envers la classe ouvrière dans le cadre du système autrichien de « partenariat social ».

Alors que tous les gouvernements successifs menaient de nouvelles attaques contre le système de sécurité sociale du pays, le réseau des bureaucrates de parti et d’Etat à la direction des cercles économiques et politiques resserrait son emprise sur la société, encourageant par là le développement de la corruption. En même temps le système proportionnel de représentation visait à préserver le pouvoir des plus grands partis politiques et à empêcher l’émergence de toute opposition à la politique gouvernementale.

Dans ces circonstances, des pans de la classe moyenne ont eu le sentiment que leur statut social et leur bien-être matériel étaient menacés. C’est au sein de cette catégorie que le FPÖ a recueilli de nouveaux soutiens et de nouveaux suffrages. Haider et le FPÖ ont mélangé la démagogie sociale au racisme et à la xénophobie, faisant porter aux immigrés la responsabilité des problèmes des autrichiens.

Les sociaux-démocrates ont réagi à la montée de l’influence de Haider en adoptant ses slogans réactionnaires, afin de le rendre « redondant » pour reprendre leurs termes. En faisant cela, le SPÖ a joué un rôle capital dans la dissémination du poison du racisme dans toute la société autrichienne et en effectuant un virage à droite continu dans la politique autrichienne.

(Article original anglais paru le 16 octobre 2008)


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