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WSWS : Nouvelles et analyses : Europe

Derrière la crise du Parti socialiste français

Par Alex Lantier
29 novembre 2008

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L’élévation de Martine Aubry, maire de Lille, au poste de première secrétaire lors du Conseil national du Parti socialiste a mis un terme à quatre jours de lutte politique intestine acerbe qui a dominé les manchettes en France.

Le Parti socialiste (PS), le principal parti bourgeois de la gauche en France et à la tête de l’opposition parlementaire au président conservateur Nicolas Sarkozy, est venu bien près de se fracturer au moment de déterminer qui allait diriger et gérer l’image politique du parti.

Lorsque le Congrès du PS, tenu du 14 au 16 novembre à Reims, échoua à produire une plateforme majoritaire, c’est aux membres qu’incomba l’élection d’un premier secrétaire. Trois candidats se présentèrent au premier tour du 20 novembre : Aubry, la candidate présidentielle pour le PS en 2007 Ségolène Royale ainsi que Benoît Hamon, membre du parlement européen et de la faction « de gauche » du PS, le Nouveau Parti socialiste. Ils obtinrent respectivement 35, 43 et 23 pour cent du vote. Hamon appela ensuite ses supporters à voter pour Aubry le jour suivant.

Il y eut pratiquement égalité entre Royal et Aubry, cette dernière obtenant 42 votes de plus sur un total de 137 000. Les deux candidates se réclamèrent de la victoire et commencèrent à s’accuser réciproquement de tenter de gonfler les votes.

Des supporters de Royal tels que le député de l’Essonne Manuel Valls et le secrétaire national du PS François Rebsamen ont accusé le camp Aubry d’augmenter artificiellement leurs votes dans le Nord, autour de Lille. Valls déclara que le camp Aubry « vole la victoire » de Royal et appela à une « révolte des membres », entre autres à des manifestations devant le siège social du PS à Paris.

Dans le camp Aubry, Claude Bartolone a réagi en menaçant d’entamer des poursuites pour diffamation et ajoutant que les seuls cas de « triche à un niveau industriel » étaient survenus dans la section du PS de la région de la Guadeloupe, qui avait voté pour Royal.

Le problème fut porté devant le Conseil national du PS où les partisans d’Aubry détiennent la majorité. Le 25 novembre, lors d’un vote de 159 contre 76, le Conseil national déclara Aubry victorieuse.

Le Parti socialiste présente maintenant un étrange spectacle au public : quelques jours seulement après des accusations réciproques de falsification de votes, ses membres dirigeants tentent ensemble de présenter le PS comme le meilleur parti démocratique parlementaire pour diriger la France. Les divisions au sein de la direction du PS vont d’ailleurs inévitablement émerger de nouveau dans la lutte pour le choix d’un candidat présidentiel en 2012.

Une grande part de la frustration populaire envers les conflits dans le PS tournait autour de l’absence de différence de principe entre les deux sections. Sur un ton approbateur, le Financial Times britannique cita des initiés du PS affirmant que l’élection du leadership était « basée sur la personnalité plutôt que les politiques ». Cependant, des conflits en apparence personnels possèdent inévitablement un caractère politique.

Dans la mesure où l’on peut discerner la politique de cette mare d’ambition insignifiante et d’opportunisme systématique dominant les procédures entourant l’élection du leadership du PS, les différences semblaient être celles-ci : Royal tente d’abandonner tous liens formels avec la classe ouvrière, s’orientant vers une alliance avec les partis bourgeois de droite, tel le Mouvement démocrate de François Bayrou, comme elle l’a fait lors de la campagne électorale de 2007. Bien que n’étant pas opposée en principe à des alliances de la sorte, les ayant exploitées dans une administration locale à Lille, Aubry croit que ce n’est pas recommandable dans un cadre d’action plus large, car cela créerait un grand vide politique à gauche.

Aubry a appelé à « ancrer » le PS « à gauche » et est connue principalement pour son rôle dans la mise en œuvre, par le Parti socialiste, de la semaine des 35 heures, maintenant abrogée.

Pour Aubry, pas moins que pour Royal, les saluts dirigés vers la classe ouvrière sont malhonnêtes et hypocrites. Sa rhétorique de gauche reflète des inquiétudes dans le leadership du PS quant à l’émergence d’une menace provenant de la gauche. Jean-Luc Mélenchon a récemment quitté le PS pour fonder un parti de gauche, citant l’exemple du politicien allemand Oskar Lafontaine et de die Linke (Parti de gauche). On s’inquiète aussi qu’Olivier Besancenot et la Ligue communiste révolutionnaire (LCR) puissent profiter de ce virage à droite du PS. La presse a régulièrement présenté Hamon comme une « arme anti-Besancenot » pendant la campagne pour le leadership.

Tout cela a eu lieu dans le cadre d’une crise grandissante du capitalisme mondial qui a fait explosé la crédibilité des politiques de libre-échange. Ayant dépensé 360 millions d’euros pour un sauvetage des banques et faisant face à des congédiements et des grèves dans plusieurs industries, Sarkozy s’est adapté aux politiques du nouvel environnement, appelant à une politique industrielle nationale et à une stratégie d’investissement. Il n’y a pas longtemps, Sarkozy se présentait comme étant le défenseur du capitalisme de libre échange à l’américaine. Mais maintenant, avec un cynisme qui a stupéfait même les blasés médias français, Sarkozy a déclaré devant le parlement français qu’il était « peut-être » un socialiste !

Dans ce contexte, le soutien presque unanime pour Aubry au sein de la haute direction du PS, y compris celui des anciens premiers ministres Laurent Fabius et Michel Rocard et de Dominique Strauss-Kahn, qui a été placé à la tête du FMI sous recommandation de Sarkozy, vaut la peine d’être mentionné. Royal, qui aspirait l’an dernier à mener le PS vers l’acceptation entière du libre marché, n’est plus à la mode. Selon ces défenseurs consommés du capitalisme français, un vote pour Aubry représente une meilleure ligne de défense contre le danger à gauche.

Clairement, la situation est extraordinairement prometteuse pour un mouvement véritablement socialiste. On voit que l’opposition de masse envers l’establishment politique s’intensifie et que des millions de personnes cherchent de nouvelles voies politiques.

Toutefois, c’est précisément ce moment que choisissent la LCR et Besancenot, surfant sur une vague de popularité gracieuseté des médias, pour répudier officiellement tout vestige politique de leur association avec le socialisme révolutionnaire. A cette fin, la LCR est sur le point d’être dissoute dans le soi-disant « Nouveau Parti anticapitaliste » (NPA). Comme le démontre le débat au sein de la direction de la LCR sur cette transformation, le NPA sera basé sur un programme réformiste bourgeois. Alain Krivine, François Sabado et d’autres dirigeants de la LCR ont souligné que leur nouveau parti n’aura aucune affiliation politique avec le trotskysme, c’est-à-dire avec la perspective de la révolution socialiste.

Pour la LCR, qui espère utiliser sa popularité pour asseoir sa position sur le flanc gauche du PS, le développement rapide et l’ampleur de la crise du PS représentent une mauvaise nouvelle. Besancenot a affirmé que la crise du Parti socialiste offrait un « triste spectacle » et que « les seuls qui peuvent se réjouir » de cette situation, « c'est probablement la droite ». 

Les socialistes en France et en Europe doivent sérieusement réfléchir à ce que révèle la crise du PS. La situation rappelle ce que Trotsky avait écrit dans Où va la France : « La tendance générale des masses travailleuses, y compris des masses petites-bourgeoises, est évidente : elles vont à gauche. L'orientation des chefs des partis ouvriers n'est pas moins évidente : ils vont à droite. » La perspective du Comité international de la Quatrième Internationale est de lutter, comme Trotsky l’a fait, pour la formation d’un parti révolutionnaire socialiste en France.

(Article original anglais paru le 27 novembre 2008)

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