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WSWS : Nouvelles et analyses : Asie

La crise financière internationale expose la vulnérabilité de l’économie indienne

Par K. Ratnayake
18 octobre 2008

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La crise financière mondiale et la récession qui se profile à l’horizon ont rapidement exposé la faiblesse de l’économie indienne en fracassant les illusions dans le soi-disant miracle économique du pays. Au cours de la semaine passée, le Sensex, principal indice de la bourse de Bombay (BSE), a plongé de près de 16 pour cent et la roupie s’est dévaluée davantage encore par rapport au dollar au milieu des craintes d’un net ralentissement économique.
Le BSE Sensex avait chuté vendredi de près de 10 pour cent avant que n’intervienne pour la deuxième fois en l’espace d’une semaine la Banque de réserve de l’Inde (RBI) pour baisser d’un pour cent et ramener à 7,5 pour cent le taux des réserves de liquidités en injectant 600 milliards de roupies (environ 13 milliards de dollars US) dans le système financier. Le BSE Sensex a clôturé la journée à 10 527,85, une baisse de 7,1 pour cent et l’indice National Stock Exchange (NSE) Nifty a perdu 6,65 pour cent.
Le premier groupe financier privé de l’Inde, la ICIC Bank, a dégringolé jusqu’à 28 pour cent avant de terminer la journée en baisse de 20 pour cent. Ses actions avaient chuté de 46 pour cent depuis fin septembre au milieu des craintes quant aux vastes opérations du groupe sur les marchés financiers mondiaux. La première entreprise de téléphones mobiles, Reliance communications, a chuté de 21 pour cent tandis que le plus important promoteur immobilier DLF Ltd a baissé de 8,8 pour cent et le premier fabricant indien d’équipements d’ingénierie personnalisés Larsen & Toubro a perdu 8 pour cent.
La RBI avait déjà baissé lundi de 0,5 pour cent le taux des réserves de liquidités ou le pourcentage des dépôts détenus par la banque centrale lorsque le BSE Sensex tombait de 725. Le même jour, la bourse indienne a levé les restrictions concernant les investisseurs institutionnels étrangers [intermédiaires financiers non bancaires] et qui avaient été imposées en octobre de l’année dernière pour soutenir la roupie faiblissante. La roupie est tombée vendredi à 49 face au dollar, contre 39 roupies pour un dollar en janvier.

Les cours de la bourse ont plongé vendredi en dépit des assurances du gouvernement. En sortant jeudi de la réunion ministérielle, le ministre des Finances P. Chidambaram a déclaré qu’il n’y avait aucune raison de céder à la panique. « Les banques indiennes sont très bien capitalisées et financièrement solides », a-t-il dit. Derrière les portes closes, toutefois, le conseil des ministres avait décidé de mettre sur pied un comité d’urgence des finances et avait discuté pour savoir si le premier ministre Manmohan Singh devait s’adresser à la nation.

Le quotidien Times of India a rapporté samedi que la Fédération des compagnies aériennes indiennes (FIA) avait demandé un prêt d’un milliard de dollars US sans intérêt ainsi que d’autres concessions pour renflouer la compagnie aérienne. Lors d’une rencontre avec le premier ministre, des responsables de la FIS ont exprimé leurs inquiétudes quant à l’impact du resserrement international de crédit, d’une concurrence mondiale féroce et d’un nombre de passagers en baisse.

Le BSE Sensex a chuté de près de 50 pour cent au cours de cette année, d’un haut niveau de 20.873 le 8 janvier pour terminer vendredi à 10.528. La capitalisation cumulative des valeurs indiennes qui avait été de 1,8 billion de dollars en janvier, a régressé de façon plus dramatique encore à 760 milliards de dollars que la roupie s’est dévaluée.

Les investisseurs étrangers ont déserté le marché indien en vendant pour 9,6 milliards d’actions indiennes dans les premiers neuf mois de cette année. Il s’agit là d’un net revirement par rapport à l’afflux record de l’année dernière de 17,2 milliards de dollars sur le marché financier indien. Certains experts prédisent que la sortie de capitaux en 2008 pourrait atteindre 13,5 milliards de dollars.

Les statistiques économiques pour le mois d’août publiées vendredi dernier révèlent que l’économie a déjà ralenti. Le rendement du secteur de l’infrastructure n’a progressé que de 2,3 pour cent contre 9,5 pour cent en août de l’année dernière. La croissance industrielle en août a ralenti à 1,3 pour cent contre 10,9 pour cent l’année dernière.

M. Govinda Rao, un membre du conseil consultatif économique auprès du premier ministre, a reconnu que les chiffres indiquaient une « récession industrielle. » Il a admis que le taux de croissance du produit national brut (PNB) pourrait baisser à 7 pour cent l’année prochaine en ajoutant : « Nous allons avoir un problème bien plus sérieux encore. » Depuis 2003, l’économie indienne avait progressé en moyenne de 8,7 pour cent et le gouvernement avait précédemment prévu 9 pour cent cette année, pour passer à 10 pour cent en 2012.

L’Inde est vulnérable à un ralentissement mondial. Au cours de ces deux dernières décennies, les gouvernements successifs ont transformé le pays en une vaste plateforme de main-d’œuvre bon marché, notamment pour la technologie d’information high-tech (IT) et les activités qui s’y rattachent. Le premier ministre Singh et le ministre des Finances Chidambaram ont tous deux joué un rôle fondamental dans la mise en application des mesures de restructuration au début des années 1990.

Dans une interview accordée ce mois-ci au quotidien Le Figaro, Singh reconnaissait que le ralentissement mondial « compromettra[it] nos exportation ». L’Amérique du Nord et l’Union européenne qui tous deux se dirigent vers la récession, représentent 16 et 21 pour cent respectivement des exportations de l’Inde. Le secteur à la croissance la plus rapide, IT et les activités connues sous le nom de Business Process Outsourcing (externalisation de processus métier, BPO) et Knowledge Process Outsourcing (externalisation d’activités spécifiques liées à la recherche et au développement, KPO), risque d’être fortement touché.

L’Inde est parfois surnommée « l’atelier du monde » parce que les grosses entreprises de par le monde ont exploité ses universitaires hautement qualifiés et parlant l’anglais afin de réduire les coûts. En 2003-2004, l’industrie BPO et KPO a gagné 3,1 milliards de dollars en revenu lié à l’exportation, atteignant 8,4 milliards de dollars en 2006-2007. Nasscom [association des sociétés de services informatiques] a rapporté que le nombre d’emploi dans ce secteur est passé de 216 000 à 553 000 dans la même période et devrait atteindre 700 000 au cours de l’exercice 2008.

L’année dernière, les exportations indiennes de BPO et KPO vers les Etats-Unis avaient atteint 62 pour cent. Environ 40 pour cent des entreprises classées dans la liste Fortune 500 aux Etats-Unis préconisent l’Inde pour externaliser leurs activités de service. Shahina Mukadam, patron d’IDBI Capital Market services research a prévenu: « Le ralentissement va affecter les entreprises BPO en Inde. Ceci aura finalement pour conséquence un ralentissement général de l’industrie BPO : »

Le journal indien Economic Times expliqué : « En Inde, environ 60 pour cent des entreprises opérant dans le secteur IT-BPO ont travaillé pour des grands groupes financiers américains comme Goldman Sachs, Washington Mutual, Citigroup, Bank of America, Morgan Stanley and Lehman Brothers. Tata Consultancy Services et Satyam Computers a travaillé pour Merrill Lynch, et Wipro compte un certain nombre d’entreprises américaines parmi ses clients qui ont été secouées par l’actuel effondrement. »

L’article ajoute : « Libre à tout le monde de voir que des licenciements vont certainement avoir lieu à Bangalore, Hyderabad, Chennai, Gurgaon, Nioda, etc. » L’article prévenait que 2,3 millions de jeunes employés travaillant dans BPO et d’autres secteurs IT seraient affectés par la crise financière.

Les couches les plus pauvres de la société indienne dont les niveaux de vie ont déjà décliné en raison de près deux décennies de restructuration économique seront les plus durement touchées par la crise économique. En Inde, le gouffre social qui se creuse entre les riches et les pauvres est immense. En mars, le magazine Forbes a rapporté que le nombre de milliardaires avait augmenté pour passer à 53 et que leur richesse combinée correspondait à 31 pour cent du PIB du pays. Dans le même temps, un récent rapport de la Banque mondiale a constaté que 42 pour cent de la population, soit 456 millions de personnes, vivent sous le seuil de pauvreté officiel qui est de 2,25 dollars par jour.

Une récession mondiale sapera d’autres secteurs majeurs d’exportation de l’économie indienne, y compris le textile et l’habillement, en entraînant des licenciements de masse. Pour le moment, 14 millions de jeunes gens entrent tous les ans sur le marché du travail, mais seulement 10 millions d’entre eux trouvent un emploi, la plupart à bas salaire. Les augmentations de prix ont d’ores et déjà érodé les niveaux de vie. En août, le taux d’inflation avait atteint en Inde un niveau inégalé depuis treize ans avec 12,63 pour cent et plafonne autour de 12 pour cent. Une roupie faible entraînera une hausse des prix.

Alors que des milliards de dollars sont canalisés vers le système financier pour l’étayer, la coalition gouvernementale qui est menée par le Congrès n’a aucun projet pour soulager la souffrance de la population rurale et urbaine pauvre. En 2004, le Congrès était sorti victorieux des élections pour avoir exploité la colère largement répandue contre l’impact social des réformes économiques appliquées par le gouvernement précédent et mené par le Bharathiya Janatha Party (Parti du peuple, BJP), mais il n’a mis en vigueur qu’un nombre limité de mesures sociales, y compris un système national de garantie de l’emploi rural.

Inévitablement, avec le gouvernement Singh se proposant de protéger l’élite fortunée des secteurs financiers et industriels, ceux qui paieront la facture seront les centaines de millions de travailleurs qui luttent déjà pour leur survie quotidienne.

(Article original paru le 13 octobre 2008)


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