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WSWS : Nouvelles et analyses : Asie

La guerre au Pakistan alimente les tensions internationales

Par Peter Symonds
12 mai 2009

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Le caractère insouciant de l’escalade militaire de l’administration Obama au Pakistan a été souligné par les commentaires de l’ambassadeur chinois faits à Islamabad jeudi dernier. En faisant pression sur Islamabad pour qu’il mène une offensive militaire majeure contre les insurgés islamiques dans la vallée de Swat et les districts voisins, Washington ne fait pas que déstabiliser le Pakistan mais il augmente en plus les tensions dans une région hautement instable.

S’adressant à d’importants hommes d’affaires pakistanais, l’ambassadeur chinois Luo Zhaohui a ostensiblement fait part de ses inquiétudes quant à la croissance d’une « influence extérieure » dans la région. Ciblant les Etats-Unis en particulier, il a affirmé que la Chine était soucieuse des politiques américaines et de la présence d’un grand nombre de soldats en Afghanistan. Bien qu’exprimant à nouveau le soutien de la Chine pour « la guerre contre le terrorisme », Luo a déclaré que les stratégies américaines avaient besoin de « mesures correctives ». « Ces questions inquiètent sérieusement la Chine », a-t-il ajouté.

Luo a fait ces remarques exceptionnellement directes un jour seulement après l’entretien entre le président des Etats-Unis Barack Obama et son homologue chinois, le président Hu Jintao. Bien que plusieurs questions aient été abordées, celle de l’escalade de la guerre au Pakistan était clairement prioritaire. Le premier appel téléphonique public entre les deux hommes est survenu alors qu’Obama rencontrait les présidents de l’Afghanistan et du Pakistan au sujet de la stratégie américaine dans les deux pays. Même si Hu aurait offert sa coopération, les commentaires de Luo expriment les craintes de la Chine quant au développement de l’influence américaine en Asie du Sud.

Le sommet trilatéral qui a pris place à Washington la semaine dernière est le signal d’une importante intensification de la violence militaire en Afghanistan et au Pakistan. Sous les pressions considérables des Etats-Unis, l’armée pakistanaise a déclenché une offensive majeure contre les militants dans la vallée de Swat. Déjà, des centaines de personnes ont été tuées et des centaines de milliers de civils ont été forcés de fuir la région. Au sommet, il n’a cependant pas été question que de coopération militaire, mais aussi de plans détaillant l’intégration économique et stratégique plus étroite des deux pays dans une zone d’influence américaine.

La Chine, qui entretient des liens de longue date avec le Pakistan, est évidemment troublée par ces développements. Comme l’a affirmé Luo devant son auditoire d’hommes d’affaires, plus de 60 compagnies chinoises sont impliquées dans 122 projets au Pakistan. Il a souligné le « contact étroit » avec le Pakistan concernant la sécurité des 10 000 ingénieurs et experts techniques chinois dans le pays. En fait, Pékin avait menacé de représailles l’enlèvement et le meurtre de citoyens chinois par des militants Pakistanais et d’actes militaires les séparatistes islamiques ouïghours de l’ouest de la Chine trouvant refuge au Pakistan.

Plus fondamentalement, Pékin voit Islamabad comme un partenaire crucial pour sa propre stratégie régionale. La Chine a investi énormément pour faire du Pakistan un contrepoids à l’Inde après la guerre frontalière sino-indienne de 1962. Le Pakistan est le plus important acheteur d’armes chinoises et, selon le Pentagone, le récipiendaire de 36 pour cent des exportations militaires chinoises entre 2003 et 2007. L’assistance technique de la Chine a été essentielle aux programmes d’armes nucléaires et de missiles balistiques du Pakistan.

En retour, la Chine a obtenu l’autorisation de construire d’importantes installations portuaires, navales et commerciales, à Gwadar, un village côtier du Baloutchistan. Ce port est à la base de la stratégie du « collier de perles » de Pékin visant à développer l’accès pour sa marine à une série de ports le long de voies maritimes à travers l’océan Indien, avant tout pour protéger l’approvisionnement en pétrole et en gaz en provenance du Moyen-Orient et de l’Afrique. Les Etats-Unis, qui voient quant à eux la Chine comme un rival économique et stratégique qui gagne en importance, sont déterminés à maintenir leur supériorité militaire et navale.

Les tensions entre les Etats-Unis et la Chine sur le Pakistan montrent le rôle très déstabilisant de l’intervention agressive de Washington, tout d’abord lorsqu’il a envahi l’Afghanistan et aujourd’hui alors qu’il cherche à contrôler plus directement le Pakistan. Le conflit montant au Pakistan est le produit direct de l’invasion de l’Afghanistan menée par les Etats-Unis, invasion pour laquelle il a exigé le soutien du Pakistan sous peine de devenir lui-même la cible de son armée. L’opposition générale au Pakistan et en Afghanistan aux actions des Etats-Unis nourrit une insurrection croissante qui menace non seulement l’occupation américaine de l’Afghanistan, mais la guerre civile au Pakistan même.

L’impérialisme américain, sous l’administration Obama, est déterminé à exploiter les désastres qu’il a lui-même créés pour défendre ses intérêts dans la région, particulièrement en Asie centrale qui est riche en pétrole. En agissant ainsi, Washington vient altérer de façon fondamentale l’équilibre stratégique, déjà précaire, et menace d’entraîner avec lui d’autres grandes puissances.

La Chine n’est pas la seule à craindre les visées des Etats-Unis en Asie centrale et la présence de nombreux soldats en Afghanistan. Depuis que l’URSS s’est effondrée en 1991, les Etats-Unis ont cherché à établir des alliances militaires et des liens économiques avec les républiques d’Asie centrale nouvellement fondées. Washington a exploité son invasion de l’Afghanistan pour la première fois établir des bases militaires en Asie centrale. L’Afghanistan et le Pakistan offrent aussi la possibilité de construire des pipelines pour acheminer les richesses énergétiques de la région. En réponse, la Chine et la Russie, qui considèrent toutes deux cette région comme leur arrière-cour, se sont réunies dans le Groupe de coopération de Shanghai pour contrer l’influence grandissante des Etats-Unis dans la région.

L’Inde surveille aussi les événements au Pakistan avec trépidation. Bien qu’elle applaudisse tranquillement la pression que fait Washington sur Islamabad pour qu’il entreprenne la guerre contre le « terrorisme », New Delhi est inquiète que l’incorporation plus étroite du Pakistan sous le parapluie américain puisse mener à une dégradation du partenariat stratégique entre les deux pays, un partenariat qui ne s’est développé que depuis la fin des années 1990. L’affaiblissement de son rival pakistanais, avec qui l’Inde a eu trois guerres, est sans l’ombre d’un doute accueilli à New Delhi. Mais si c’est pour en faire un Etat client des Etats-Unis, ou pire encore, s’il s’effondre dans le chaos, l’establishment indien fera face à de grandes incertitudes.

Toute la région peut exploser. Les certitudes de la Guerre froide qui ont divisé le monde entre le bloc soviétique et le bloc occidental ont été remplacées par de nouvelles tensions et rivalités. Les tentatives de l’Inde et du Pakistan de résoudre leurs disputes de longue date, particulièrement sur la question du Cachemire, sont maintenant embourbées. Les efforts de la Chine et de l’Inde pour améliorer leurs relations avancent péniblement. Chacun des deux pays continue à se méfier de l’autre et à tramer des intrigues pour affaiblir la position de son rival au Népal, au Sri Lanka et en Birmanie.

L’ingrédient le plus explosif dans ce mélange volatil est la tentative de l’impérialisme américain d’utiliser sa supériorité militaire pour contrecarrer son déclin économique de longue date. Loin de signifier une diminution des tensions, l’arrivée au pouvoir de la nouvelle administration Obama a plutôt signifié un nouveau virage vers la guerre en Afghanistan et au Pakistan en ligne avec les ambitions américaines. Les commentaires qu’a faits l’ambassadeur de la Chine la semaine passée sont un autre signe que les gestes de Washington rencontreront de l’opposition.

(Article original anglais paru le 11 mai 2009)


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