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WSWS : Nouvelles et analyses : Europe

Allemagne : le congrès de Die Linke affiche son soutien pour l’UE

Par Dietmar Henning
13 mars 2009

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Le congrès européen du parti Die Linke (La Gauche) qui eut lieu le week-end dernier à Essen, dans la région de la Ruhr, s’est prononcé sans équivoque en faveur de l’Union européenne. Ce faisant, Die Linke remplissait une condition de base pour son éventuelle participation au gouvernement après les élections fédérales qui doivent se tenir en septembre prochain.

Tous les intervenants, y compris les deux présidents du parti, Lothar Bisky et Oskar Lafontaine, ont précisé que le rejet du parti du Traité de Lisbonne n’était lié à aucune hostilité en tant que telle envers l’UE. Bisky, qui a été désigné tête de liste pour les élections européennes en juin prochain par plus de 93 pour cent des délégués, a dit : « Die Linke ne tient ni à abolir l’Union européenne ni à revenir à une exclusivité des Etats-nations. » Lafontaine a tenu des propos similaires. « Il n’y a pas d’ennemis de l’Europe à ce congrès », a-t-il dit. Il n’est nullement contre l’Union européenne mais est plutôt en quête d’une « UE différente ».

Avant le congrès, un débat vigoureux s’était engagé au sein de Die Linke au sujet du Traité de Lisbonne qui avait été élaboré pour remplacer la constitution européenne qui échoua en étant définitivement rejetée par les électeurs français et néerlandais lors des référendums de 2005.

Die Linke est l’un des trois groupes à avoir déposé une plainte contre le Traité de Lisbonne auprès de la Cour constitutionnelle fédérale (Bundesverfassungsgericht). Deux membres de Die Linke qui sont tous deux des députés allemands de longue date au parlement européen, Sylvia-Yvonne Kaufmann et André Brie, ont exprimé leur soutien au Traité de Lisbonne. En raison de leur soutien au traité, ils ont tous deux été évincés de la liste des candidats retenus par la direction du parti pour les élections européennes de cette année.

De ce fait, certains médias avaient reproché à Die Linke d’être « anti-européen » (FAZ) et de représenter une opposition « radicale » et « une attitude critique vis-à-vis du système » de l’UE (West Allgemeine Zeitung (WAZ) et Die Welt). Bisky et Lafontaine se sont efforcés tous deux de réfuter ses affirmations.

L’Union européenne avec son énorme appareil bureaucratique de Bruxelles représente sans ambiguïté les groupes financiers et économiques les plus puissants d’Europe. Au nom de la libre concurrence, l’UE impose la suppression des droits des travailleurs, applique une redistribution fondamentale des ressources sociales au profit des riches et défend aussi les intérêts des grandes puissances européennes par des moyens militaires. Le travail de l’UE est dicté par une armée de membres de groupes de pression à Bruxelles et ses institutions opèrent en se soustrayant pratiquement à tout contrôle démocratique.

Die Linke ne rejette pas l’Union européenne. Au contraire, il essaie de draper l’UE du manteau de la démocratie. C’est en cela que réside la véritable signification de la plainte juridique déposée contre le Traité de Lisbonne.

Lafontaine réclame un référendum sur le traité, davantage de droits pour le parlement européen, un « gouvernement économique » européen ainsi que des niveaux minimums pour les impôts et les questions sociales. De plus, il critique le fait que le « déploiement de forces militaires par l’Union européenne ne soit pas expressément lié à un contrôle parlementaire ».

Die Linke n’est pas le seul plaignant à élever des objections contre le Traité de Lisbonne. D’autres plaignants comprennent le politicien de droite Peter Gauweiler (Union chrétienne-sociale, CSU) et un groupe dirigé par Franz Ludwig Graf Stauffenberg (CSU), le fils de l’homme qui avait tenté d’assassiner Hitler. Ils sont aussi d’avis que le traité « n’est plus compatible avec les structures essentielles d’un Etat démocratique constitutionnel » (Stauffenberg). Même la Cour constitutionnelle fédérale admettait dans ses auditions initiales que les plaignants pourraient avoir gain de cause en faisant appel.

Lafontaine qui était le président de 1995 à 1999 du Parti social-démocrate pro-UE a des liens étroits avec la France. En 2005, lorsque la constitution européenne fut rejetée par deux nations communautaires, en dépit du soutien reçu par les principaux partis politiques européens, Lafontaine fut la seule personnalité politique allemande influente à avoir participé aux réunions appelant à voter contre la constitution.

L’Union européenne est également fortement impopulaire dans beaucoup d’autres pays. Partout où la population a eu l’occasion d’exprimer son opinion, elle a rejeté la constitution européenne et le Traité de Lisbonne. Les interventions militaires européennes en Afghanistan et ailleurs rencontrent une opposition tout aussi farouche de la part de l’opinion publique.

Die Linke veut créer une soupape de sécurité pour ce mécontentement tout en maintenant l’Union européenne. Le parti redoute, tout comme la bureaucratie syndicale, qu’il sera plus difficile de contenir et de canaliser l’opposition publique lorsque les pouvoirs quasi dictatoriaux de l’UE seront renforcés avec l’entrée en vigueur du Traité de Lisbonne.

Kaufmann et Brie ont compliqué la situation pour Die Linke en soutenant ouvertement le Traité de Lisbonne. Ils jouissent d’un soutien substantiel au sein du parti. Ils ont tous les deux bénéficié d’un soutien considérable de la part des délégués quand ils s’étaient portés candidats et ce en dépit de toute recommandation de la direction du parti. Tous deux ne peuvent compter que sur le soutien des fédérations de l’ancien Parti du socialisme démocratique (PDS, le prédécesseur de Die Linke) qui sont actives dans les municipalités en Allemagne de l’Est et qui reçoivent des subventions de Bruxelles.

Kaufmann avait rejoint en 1976 le SED (Parti socialiste unifié d’Allemagne, SED, le parti stalinien unique de l’ancienne Allemagne de l’Est et prédécesseur du PDS) ; elle fut l’une des candidates tête de liste du PDS lors des élections européennes en 1994, 1999 et en 2004. Elle avait personnellement participé à l’élaboration du Traité de Lisbonne (recevant la Croix fédérale du mérite pour services rendus) et avait voté pour le traité au parlement européen.

Brie fait partie du SED depuis 1970 et fut un membre dirigeant du PDS, beaucoup le considèrent comme l’un des « idéologues en chefs » du parti. Il a occupé un bon nombre de postes dans le parti notamment en tant que directeur de campagne électorale, de membre de la commission des principes fondateurs du parti et de vice-président. Tout comme Kaufmann, il siège au parlement européen depuis 1999 et plus récemment comme membre du Comité de la sécurité et de la défense des droits de l’homme. Contrairement à la ligne du parti, il soutient également l’actuel déploiement des troupes allemandes en Afghanistan.

Ces deux soi-disant « politiciens réalistes » (Realpolitiker) ont tiré la seule conclusion logique du soutien de Die Linke de l’Union européenne : si l’on soutient l’UE en principe, alors l’on doit s’engager pour la poursuite de ses objectifs au sein de ses comités. Kaufmann et Brie ont précisément fait cela au cours de ces dernières années.

Lors du congrès du parti, le président Bisky a expressément remercié Kaufmann pour son « engagement » au parlement européen. Le Traité de Lisbonne, selon Bisky, représente aussi un pas en avant. Il « a élargi les droits du parlement européen et des parlements nationaux, il a introduit un autre mode de vote au Conseil, et il a ancré l’engagement de la charte des droits fondamentaux de l’UE ainsi que les premiers pas de la démocratie participative ». Ceci est bien loin de toute opposition fondamentale aux traités de l’UE.

Compte tenu du vaste soutien dont bénéficient Kaufmann et Brie en Allemagne de l’Est, Lafontaine a exigé des membres du parti qu’ils respectent le système proportionnel entre les candidats de l’Est et de l’Ouest du pays.

« Les listes ont un sens parce qu’elles contribuent à nous souder ensemble », a expliqué Lafontaine avant le vote. « C’est pourquoi nous avons essayé de réaliser un équilibre entre l’Est et l’Ouest entre femmes et hommes. Ce ne serait pas bien si des candidats supplémentaires de l’Est venaient à exclure de la liste des candidats de l’Ouest. Evitez s’il vous plaît ceci, il n’est question que d’Est contre Est ou Ouest contre Ouest, rien d’autre. »

Jusque-là, le SPD a justifié son refus d’envisager une coalition au niveau fédéral avec Die Linke sur la base de la politique étrangère de ce dernier et de son refus des missions internationales de l’armée allemande. Le niveau relativement élevé de soutien pour Kaufmann et Brie prouve que si l’occasion se présentait pour Die Linke d’entrer au gouvernement, il se rallierait rapidement à la ligne pro-UE du gouvernement et de l’establishment allemands.

L’opposition du parti au militarisme n’est qu’une autre carte entre les mains de sa direction et qu’elle pourra jouer lors de futures négociations de coalition. Ceci apparaît avec évidence même aux commentateurs conservateurs. Samedi dernier, l’édition on-line du journal FAZ écrivait : « L’exigence de retrait des troupes allemandes d’Afghanistan reste une position centrale de Die Linke, du moins jusqu’aux élections fédérales en septembre. »

(Article original paru le 5 mars 2009)


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