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WSWS : Nouvelles et analyses : Asie

De tragédies à propagande pour la guerre

Par Bill Van Auken
21 novembre 2009

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L’administration Obama étant à la veille d’annoncer une escalade qui enverra presque certainement des dizaines de milliers de soldats de plus à la guerre en Afghanistan, l’opposition populaire à la guerre continue de croître.

Selon un sondage mené par CNN cette semaine, 58 pour cent de la population américaine est opposée à la guerre. De l’autre côté de l’Atlantique, les sentiments anti-guerre en Grande-Bretagne, qui possède le deuxième contingent en importance en Afghanistan, sont encore plus importants. Le dernier sondage révèle qu’à peine 21 pour cent soutiennent la guerre et que 63 pour cent sont en faveur d’un retrait des troupes britanniques.

Le nombre de victimes a grimpé en flèche cette année : 288 soldats américains et 95 soldats britanniques ont été tués. Beaucoup d’autres ont été blessés, ce qui s’exprime par de nombreux cas d’amputations et de lésions cérébrales.

L’intervention menée par les Etats-Unis a essuyé un revers après l’autre. La résistance armée s’est étendue à travers le pays et des régions entières sont maintenant sous le contrôle des talibans et de milices locales opposées à l’occupation. Politiquement, la frauduleuse et grotesque élection présidentielle n’a servi qu’à mettre en lumière la corruption du gouvernement fantoche de Washington dirigé par Hamid Karzaï et aviver l’hostilité de la population afghane à l’égard de son régime.

Le commandant en chef des Etats-Unis en Afghanistan, le général Stanley McChrystal, a soutenu qu’il fallait gagner « les cœurs et les esprits » du peuple afghan en leur apportant supposément la sécurité et en réduisant le nombre de frappes aériennes pour limiter les pertes civiles. Deux récents rapports indiquent cependant que ces affirmations ne sont que des feuilles de vigne pour masquer une importante escalade militaire.

Les Afghans, auxquels les forces américaines voudraient supposément apporter la « sécurité », fuient ces dernières en grand nombre. Le Wall Street Journal a cité jeudi dernier le ministère afghan des Réfugiés et du Rapatriement, rapportant que « 150.000 personnes, et peut-être beaucoup plus, ont été forcées de quitter leurs maisons en raison des combats » qui ont éclaté depuis que les troupes américaines ont été envoyées dans le sud du pays. Le Journal a rapporté les paroles d’un réfugié âgé de 60 ans qui a critiqué les « frappes aériennes étrangères », ajoutant, « Nos enfants ont été tués; nos récoltes ont été détruites ; nos maisons ont été endommagées. Il n’y avait plus rien pour nous là-bas. »  

Ces frappes aériennes se sont à nouveau intensifiées, en dépit des déclarations de McChrystal. L’Air Force Times, citant l’Air Forces Central Command, a rapporté que les avions de guerre américains et de l’OTAN ont largué 647 bombes sur l’Afghanistan le mois dernier et procédé à 2539 sorties de soutien rapproché. C’était la plus importante quantité de bombes larguées depuis juillet 2008.

C’est dans ce contexte de sentiments anti-guerre qui ne font que s’accentuer et d’une crise frappant l’intervention menée par les Etats-Unis qui s’intensifie que l’armée américaine a souffert d’un désastre sans précédent, lorsque le Major Nidal Hasan a tué 12 soldats et un civil à Fort Hood au Texas.

L’évènement était un sous-produit de la guerre elle-même. Hasan, un psychiatre de l’armée, était opposé aux guerres d’Afghanistan et d’Irak, apparemment traumatisé par ses six années d’intervention auprès des soldats blessés et mentalement affectés à l’hôpital de l’armée Walter Reed, et dérangé par le harcèlement anti-musulman subi dans l’armée. D’anciens collègues cités par la radio nationale publique se sont décrits comme étant « profondément troublés » par le comportement de Hasan, qu’ils ont caractérisé de « déconnecté, distant, paranoïaque, belligérant et schizoïde ».

Au lieu d’intervenir pour empêcher Hasan de faire du mal à lui-même et aux autres, l’armée a décidé de l’envoyer en Afghanistan, sachant qu’il était désespéré d’éviter d’aller en guerre. Jeudi dernier, Hasan a craqué, et s’est lancé dans sa fusillade mortelle.

En réplique, l’establishment politique et les médias de la grande entreprise sont intervenus pour transformer la tuerie en une attaque terroriste, démontrant supposément la nécessité d’intensifier la « guerre au terrorisme » tant à l’extérieur du pays qu’à l’intérieur.

Les commentateurs de droite ont initié ce tournant, dénonçant le reste des médias pour leur « conformité politique » dans leur échec à faire en sorte que la croyance du commandant dans l’islam soit la motivation pour la tuerie et la preuve qu’elle constitue un acte de terrorisme. Le fait qu’il fût manifestement dérangé psychologiquement a été écarté comme n’étant pas pertinent.

Dans une chronique publiée jeudi dans le Wall Street Journal, l’éditorialiste adjoint, Daniel Henninger, a blâmé le massacre de Fort Hood sur ceux qui avaient remis en question l’espionnage intérieur, la « simulation de noyade, les restitutions et les prisons secrètes ». La leçon de Fort Hood, a-t-il prétendu, était que « là-bas ou ici à la maison, ils vont continuer d’essayer de nous tuer ».

Le reste des médias a emboîté le pas, concentrant son attention sur les courriels envoyés entre Hasan et un imam au Yémen et sur ses déclarations de convictions religieuses, tout en demandant comment les enquêteurs fédéraux n’avaient pas réussi à poursuivre une enquête de sécurité entourant le commandant.

La douleur causée par les 13 victimes de la tuerie de Fort Hood a été exploitée à fond, les présentateurs de la télévision bien nantis utilisant cette tragédie pour glorifier l’armée et les guerres d’aggression que mène Washington dans le golfe Persique et l’Asie centrale, deux régions riches en pétrole. Obama a, lui, utilisé ces événements pour tenter de renforcer le soutien au militarisme américain, y compris l’escalade prévue en Afghanistan.

Les médias de la Grande-Bretagne ont offert un spectacle du même type, peut-être encore plus de dégoûtant par certains aspects, avec en tête le tabloïde Sun appartenant au magnat de la presse de droite, Rupert Murdoch.

Ici, ce sont les soldats britanniques morts au combat, ayant provoqué une montée de l’hostilité à la guerre en Grande-Bretagne, qui sont exploités pour faire la promotion de l’escalade de la guerre. L’instrument choisi pour cette opération est la mauvaise lettre de condoléances qu’a fait parvenir le premier ministre Gordon Brown à la mère de Jamie Janes, un soldat tué en Afghanistan par un engin explosif sur la route.

Le Sun ne s’est pas limité à publier la lettre de Brown avec la réponse de Jacqui Janes qui blâmait le premier ministre pour n’avoir pas pu écrire le nom de son fils correctement et pour n’avoir pas su équiper adéquatement les troupes britanniques. Il a aussi mis en ligne sur son site web un enregistrement d’une conversation acrimonieuse entre Brown et la mère du soldat enregistrée à l’insu du premier ministre lorsqu’il a tenté de s’excuser par téléphone.

Le but évident de Murdoch et du Sun est de contrer l’opposition à la guerre en affirmant que le problème est l’incompétence du gouvernement travailliste qui serait réglé avec l’élection des conservateurs et l’escalade de la guerre.

L’oncle du soldat, Ian Cox, un vétéran, a exprimé son dégoût devant toute cette affaire, déclarant au quotidien Mirror, « Il est très incorrect de détourner la douleur d’une femme ayant perdu son fils à des fins politiques. »

C’est bien dit, mais de tels « détournements » du sentiment populaire dans le but de faire la promotion du militarisme pour l’étranger et de la réaction sociale au pays est la norme plutôt que l’exception pour les médias de masse. C’est précisément ce qui fut utilisé, de triste mémoire, lors de la campagne concertée de propagande pour faussement lier la guerre en Afghanistan et l’invasion américaine de l’Irak avec le 11-Septembre.

Aujourd’hui, la mort de soldats — ceux tués par un officier dérangé à Fort Hood tout comme ceux tués en Afghanistan — est exploitée dans une tentative d’intimider le sentiment anti-guerre qui règne dans les masses et de faire accepter l’escalade militaire qui signifiera inévitablement encore plus de morts, tant parmi les civils afghans que parmi les soldats américains et britanniques déployés pour supprimer l’opposition à une occupation étrangère.

(Article original anglais paru le 13 novembre 2009)


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