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WSWS : Nouvelles et analyses : Etats-Unis

Après les pourparlers de Genève les Etats-Unis continuent de faire pression sur l’Iran

Par Peter Symonds
12 octobre 2009

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A la suite des pourparlers internationaux de Genève, le président américain Obama réitéra les menaces de Washington vis-à-vis de l’Iran, disant en guise d’avertissement que les Etats-Unis étaient « prêts à prendre des mesures pour augmenter la pression » si Téhéran n’« agissait pas avec célérité » afin d’honorer ses engagements sur le plan nucléaire. Participaient aux pourparlers de hauts responsables du soi-disant P5 +1 (Etats-Unis, Grande-Bretagne, France, Russie, Chine et Allemagne) ainsi que le négociateur nucléaire iranien en chef, Saeed Jalali.

Les Etats-Unis, soutenus par la Grande-Bretagne et la France, ont augmenté la pression sur l’Iran au moyen d’une « révélation » mélodramatique selon laquelle celui-ci possédait une usine d’enrichissement d’uranium près de la ville de Qom. Téhéran avait déjà informé l’AIEA (Agence internationale de l’énergie atomique) de l’existence de ce site qui est encore en construction, quatre jours auparavant. Washington a fixé au mois de décembre un délai pour des négociations, menaçant le gouvernement de Téhéran de sanctions sévères s’il refusait de se plier à ses exigences.

Durant les pourparlers, Jalali réitéra l’intention de l’Iran d’ouvrir sous peu l’usine de Qom aux inspecteurs de l’AIEA et insista une fois de plus pour dire que les programmes nucléaires de son pays avaient des objectifs pacifiques. Téhéran maintient qu’il a honoré ses obligations du Traité de non-prolifération nucléaire en notifiant l’AIEA du début des opérations 180 jours avant. Le chef de l’AIEA, Mohammed El Baradei doit arriver à Téhéran demain pour discuter l’accès des inspecteurs au site de Qom.

L’Iran accepta également le principe d’un plan de l’AIEA prévoyant le transfert de la plus grande partie de son stock existant d’uranium faiblement enrichi en Russie puis en France pour enrichissement supplémentaire et la transformation en crayons combustibles de celui-ci pour un petit réacteur près de Téhéran qui produit des isotopes médicaux. Pour l’instant, le stock d’uranium iranien a été enrichi à quatre pour cent – le niveau requis pour un réacteur nucléaire, mais les crayons combustibles destinés au réacteur de Téhéran exigent un enrichissement de vingt pour cent.

Si ce plan est réalisé, il confirmerait la déclaration de l’Iran selon laquelle il n’est pas en train de construire une arme nucléaire. Les médias américains ont décrit à maintes reprises le stock d’uranium faiblement enrichi de l’Iran, produit à sa centrale de Natanz, comme « suffisant pour construire une bombe ». En fait, l’uranium servant à la construction d’une bombe doit être enrichi à environ 90 pour cent. Si le gros de son stock était transféré en Russie, cela prendrait des mois à l’Iran pour reconstituer un stock dans le pays.

Au cours de la réunion d’hier, Jalili eut aussi des discussions en tête-à-tête avec le sous-secrétaire d’Etat américain William Burns. La rencontre représentait le contact au plus haut niveau entre les Etats-Unis et l’Iran depuis la révolution iranienne de 1979 et le premier sur les questions nucléaires. Sous l’administration Bush, les ambassadeurs des Etats-Unis et de l’Iran à Bagdad avaient tenu plusieurs réunions, mais limitées aux efforts américains pour s’assurer le soutien des Iraniens pour leur occupation de l’Irak.

Selon le porte-parole du département d’Etat américain, Robert Wood, Burns dit à son homologue iranien que l’Iran devait « prendre des mesures et réaliser des démarches pratiques qui sont en rapport avec ses obligations internationales ». La discussion comportait aussi « un échange sincère sur d’autres questions, parmi lesquelles celle des droits démocratiques ». Jalili est aussi secrétaire de l’organisme puissant qu’est le Conseil de sécurité national iranien, directement responsable auprès du chef suprême, l’ayatollah Ali Khamenei.

Tous les participants qualifièrent les pourparlers de Genève de « constructifs ». Le chef de la politique étrangère européenne, Javier Solana, dit que toutes les parties s’étaient « mises d’accord pour intensifier le dialogue dans les semaines à venir » et de tenir une seconde réunion avant la fin du mois d’octobre. Malgré la tournure positive donnée à la réunion cependant, la réaction de l’administration Obama montre l’approche agressive des négociations de la part de Washington.

Tout en décrivant les pourparlers comme un « début constructif », Obama fit état de nouveaux délais que l’Iran devrait respecter, insistant pour que l’AIEA obtienne un « accès illimité… en l’espace de deux semaines » à l’« usine nucléaire secrète » se trouvant près de Qom. « Parler pour le plaisir ne nous intéresse pas » dit Obama et il averti une fois de plus de ce que « [sa] patience a des limites ». Comme l’administration Bush dans la période précédant la guerre contre Irak, Obama réagit aux concessions faites par l’Iran en fixant de nouveaux ultimatums.

L’administration a fait d’importants efforts avant la réunion de Genève afin enjôlant et rudoyant à la fois d’autres membres du P5+1 pour qu’ils soutiennent des mesures fortes contre l’Iran de la part du Conseil de sécurité des Nations Unies. Les sanctions actuelles, soutenues à contrecœur par la Russie et la Chine, sont en grande partie dirigées contre des individus et des sociétés liés aux programmes nucléaires iraniens. Les mesures punitives discutées actuellement à Washington comprennent elles, des sanctions à grande échelle qui pourraient frapper l’accès de l’Iran au financement, au crédit commercial et à l’assurance et bloquer les importations de produits pétroliers raffinés dont le pays a grand besoin.

Dans une mesure calculée pour s’assurer le soutien de la Russie contre l’Iran, Obama a récemment annoncé certaines modifications du bouclier anti-missile balistique prévu par les Etats-Unis. Cela comprendra l’annulation des bases prévues en Pologne et en République tchèque et auxquelles Moscou s’était fortement opposé. Après une rencontre avec Obama jeudi dernier, le président russe Dmitri Medvedev avait indiqué assez nettement que Moscou soutiendrait des mesures fortes contre Téhéran. La déclaration était destinée à mettre l’Iran sur la défensive, celui-ci ayant, dans le passé, compté sur la Chine et la Russie afin de bloquer de telles sanctions.

Malgré que les pourparlers de Genève aient eu lieu en petit comité, plusieurs articles de journaux notèrent un changement de la position russe. Le Times de Londres commenta ainsi, s’appuyant sur des sources internes : « On dit que la Russie a joué un rôle déterminant dans le fait d’avoir concentré à nouveau l’attention de l’Iran sur le problème nucléaire alors qu’il essayait de l’esquiver en mettant en avant ses discours bien rôdés sur les injustices historiques. Moscou semble avoir enlevé la responsabilité d’éviter des sanctions des épaules de l’Occident et l’avoir placée sur celles de l’Iran ».

Cette « Realpolitik » sordide, pour laquelle le sort du peuple iranien est un pion dans un marché cynique à propos d’intérêts économiques et stratégiques rivaux, souligne le fait que la confrontation actuelle n’a pas pour objet principal le programme nucléaire iranien. Celui-ci est bien plutôt le prétexte d’une campagne américaine dont l’objectif est de mettre en place un régime qui soit plus favorable aux ambitions de Washington pour la domination économique et stratégique du Moyen-Orient et de l’Asie centrale. La concession accordée par rapport au bouclier anti-missile d’Europe de l’Est est simplement la monnaie de la pièce pour l’assistance donnée par les Russes aux plans concernant l’Iran.

Dans toute la campagne destinée à faire peur et menée dans les médias américains sur les usines nucléaires « secrètes » de l’Iran, certains articles isolés semblent proposer un marché à Téhéran pour qu’il normalise ses relations en retour d’assurances mutuelles sur la sécurité. Un commentaire de mardi dans le New York Times par Flynt et Hillary Leverett, deux critiques de l’administration Bush, avertissaient du danger de confrontation et appelaient à une volte-face stratégique par rapport à l’Iran, semblable au rapprochement opéré par le président Nixon avec la Chine en 1972.

Après avoir noté les parallèles existant entre les positions agressives de Bush et d’Obama vis-à-vis de l’Iran, les auteurs de l’article écrivent : « Au lieu de continuer l’erreur que des sanctions donneront à l’Amérique une influence sur les prises de décision iraniennes – une stratégie qui aboutira soit à la frustration soit à la guerre – l’administration devrait rechercher un réalignement stratégique aussi profond avec l’Iran que celui effectué par Nixon avec la Chine. Cela requerrait que Washington fasse la démarche, en premier lieu, d’assurer Téhéran qu’un rapprochement servirait les besoins stratégiques de l’Iran. »

Il faut se demander cependant qui serait le premier bénéficiaire d’une stratégie de normalisation des relations avec l’Iran. Comme dans le cas de l’Irak, ce sont les puissances européennes, ainsi que la Chine et la Russie qui ont déjà des relations diplomatiques et économiques bien établies avec l’Iran, dont des contrats d’exploitation de ses immenses réserves de pétrole et de gaz naturel. Les Etats-Unis qui ont coupé toutes relations avec Téhéran peu après la révolution iranienne, seraient obligés de repartir à zéro. En alimentant les tensions en permanence, même au risque d’une guerre, les Etats-Unis sont capables de saper les relations de leurs rivaux avec l’Iran tout en essayant d’installer à Téhéran un régime plus favorable à leurs intérêts.

C’est pourquoi une campagne d’escalade des menaces et des provocations de la part des Etats-Unis et de leurs alliés dans les mois à venir est plus vraisemblable qu’un plan général de la réduction des tensions et de l’établissement de relations économiques et diplomatiques avec l’Iran.

(Article original anglais publié le 2 octobre 2009)


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