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  WSWS : Nouvelles et analyses : Canada

Canada : la réponse de droite du gouvernement à l’arrivée d’un navire de réfugiés tamouls

Par Keith Jones
31 août 2010

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Le ministre de la Sécurité publique du Canada, Vic Toews, a déclaré encore une fois hier que les lois du pays allaient devoir être renforcées pour empêcher que des navires chargés de gens désespérés fuyant la persécution et la pauvreté ne viennent demander l'asile au Canada.

Jeudi dernier, le gouvernement conservateur du Canada a mis en oeuvre une opération majeure de l'armée et des autres forces de sécurité au large de la côte ouest du pays, faisant appel à une frégate et à des avions des Forces armées canadiennes (FAC) pour intercepter un cargo battant pavillon thaïlandais qui transportait 492 Tamouls sri lankais.

Cette opération, acclamée dans les médias, avait pour but de présenter l'arrivée des Tamouls, parmi lesquels se trouvaient de nombreuses femmes et enfants, comme une grave menace à la sécurité et de rejeter leur demande d'asile comme un « court-circuit » illégitime du processus d’acceptation des immigrés.

En fait, selon le droit canadien et international, le Canada est dans l'obligation juridique d'offrir le refuge à ceux fuyant la persécution politique et de donner à ceux qui demandent l'asile la chance de démontrer le bien-fondé de leur requête.

Après s'être emparées du navire, le MV Sun Sea, l'armée et les forces de sécurité du Canada l'ont escorté vers une base navale des FAC qui se trouvait à proximité. Les « réfugiés de la mer » y ont ensuite été interrogés avant d'être transférés vers deux prisons, en attendant les audiences sur leur requête de statut de réfugiés politiques.

Sans présenter la moindre preuve, Toews et d'autres représentants du gouvernement ont dit à maintes reprises que le voyage du MV Sun Sea vers le Canada avait probablement été planifié par les Tigres de libération de l'Eelam tamoul (LTTE), dans l'intention d'amener des terroristes au Canada et de trouver du financement. Les passagers auraient payé de 40 000 à 50 000 dollars pour le voyage.

Le gouvernement conservateur et la plupart des médias ont insisté pour que le gouvernement réponde à cette prétendue menace à la sécurité en rendant les lois canadiennes sur les réfugiés encore plus restrictives.

Alors que le gouvernement n’a pas encore fait de propositions fermes, ils ont suggéré que les lois pourraient être changées de façon à dépouiller ceux qui arrivent au Canada par bateaux non autorisés d’une partie ou de tous les droits accordés aux demandeurs d’asile.

S’exprimant dimanche, Toews a indiqué que le gouvernement pourrait aussi utiliser les lois anti-terrorisme du pays afin de poursuivre tout Canadien d’origine tamoule qui a aidé à financer le voyage de leurs proches vers le Canada à bord du MV Sun Sea. En vertu des lois draconiennes anti-terrorisme du Canada, il est illégal de donner de l’argent à une organisation qui, comme les LTTE, a été officiellement désignée comme organisation terroriste par le gouvernement fédéral.

La presse, sans nul doute avec le soutien des conservateurs en arrière-plan, a proposé une série d'autres mesures réactionnaires, dont beaucoup sont calquées sur celles prises par l'Australie. Il s'agit notamment d’utiliser la marine afin d’intercepter les navires en haute mer de manière à empêcher les réfugiés d'entrer sur les mers territoriales du Canada, et établir des camps de détention pour les demandeurs d’asile en des endroits inhospitaliers, loin de tout centre urbain, voire même à l’extérieur du Canada.

Il convient de noter que le premier ministre Stephen Harper a exprimé à plusieurs reprises son admiration pour l'ancien premier ministre d’Australie et proche allié de George W. Bush, John Howard. Dans le but de justifier l’intensification des pouvoirs répressifs de l'État et d’utiliser le chauvinisme pour détourner la frustration sociale grandissante vers des canaux réactionnaires, Howard a monté à plusieurs reprises de virulentes campagnes anti-immigrés et anti-réfugiés. Plus infâme encore, il y a des preuves qui suggèrent que son gouvernement a délibérément retardé l'organisation d'une opération de sauvetage d'un navire de réfugiés en provenance d'Indonésie, à une époque où Howard et ses libéraux étaient en quête d’une réélection basée sur une plate-forme de la « ligne dure » contre les réfugiés.

Il n'y a aucun doute que le gouvernement minoritaire de Harper s'est servi de l'arrivée du MV Sun Sea pour promouvoir son propre programme anti-crime et anti-terroriste réactionnaire et pour faire diversion. Il espère ainsi attiser ouvertement les préjugés anti-immigrés.

S'il se sent obligé de mettre de l'avant de tels appels manipulateurs, c'est parce qu'il reconnaît qu'il y a en fait un faible appui populaire pour son programme de coupes dans les services publics, pour ses diminutions d'impôts pour la grande entreprise et les riches et pour le réarmement de l'armée afin qu'elle soit déployée dans des guerres à l'étranger. Au même moment, la construction d'un appareil de sécurité nationale va main dans la main avec la criminalisation de la dissidence. Cela fut exemplifié par une opération de police provocatrice et massive orchestrée contre les manifestations anti-G20 à Toronto il y a moins de 2 mois.

Aussi sérieux et sinistre que cela puisse être, le gouvernement Harper, en soulevant la colère contre les « boat people » tamouls, ne veut pas seulement pousser plus avant son programme réactionnaire. Il donne aussi un appui au gouvernement autoritaire et communautariste du Sri Lanka — un gouvernement qui est impliqué dans des crimes de guerre horribles.

Dans les jours et les semaines précédant l'arrestation du MV Sun Sea par l'armée canadienne la semaine dernière, le régime sri lankais a fortement encouragé le gouvernement canadien à prendre des mesures contre celui-ci sur la base que c'était un bateau terroriste.

Gotayaba Rajapakse, le ministre de la Défense sri lankais et le frère du président du pays, Mahinda Rajapakse, a dit lors d'une conférence de presse organisée par la marine sri lankaise au début du mois que le MV Sun Sea faisait partie du réseau international terroriste des LTTE.

Même si le gouvernement sri lankais se vante de sa victoire militaire contre les LTTE, il est déterminé à continuer de se présenter comme étant sous une menace terroriste, incluant une menace provenant des émigrés tamouls ou de la diaspora, pour deux raisons. Premièrement, parce qu'il a besoin d'un prétexte pour maintenir le vaste appareil répressif et les restrictions sur les libertés civiques. Le gouvernement sri lankais est en train d'introduire des mesures destinées à faire payer les travailleurs du Sri Lanka cinghalais et tamouls pour les énormes dépenses réalisées lors des trente ans de guerre civile et à leur faire payer la présente crise économique. Deuxièmement, il veut délégitimer toute opposition à ses politiques chauvines anti-tamoules.

Le World Socialist Web Site a toujours insisté qu’il était opposé aux politiques ethno-communautaristes des LTTE ainsi qu’à leur campagne pour la formation d’un État capitaliste séparé au nord et à l’est de l’île du Sri Lanka. Mais malgré cette opposition, nous avons toujours affirmé que c’était la bourgeoisie cingalaise qui portait la responsabilité pour trente ans de guerre civile, car elle a attaqué la minorité tamoule pendant des décenies au moyen d’une série de mesures discriminatoires et des vagues de violence communautariste de plus en plus importante. A la racine de ces politiques communautaristes, on ne trouve pas que la lutte pour monopoliser les ressources de l’Etat. C’est aussi une façon de détourner les tensions sociales qu’a générées le régime bourgeois et de diviser la classe ouvrière.

La fin de la guerre civile n’a rien changé à cet état de fait.

Comme quelques réfugiés du MV Sun Sea l’ont expliqué dans une lettre qu’a obtenue le National Post : « Le gouvernement sri-lankais a dit que le conflit ethnique au Sri Lanka était maintenant terminé. Toutefois, ni la Loi contre le terrorisme [qui permet l’arrestation arbritaire des civils] ni l’Acte des réglements d’urgence n’ont été abolis. Les Tamouls innocents emprisonnés n’ont pas été libérés. Les civils déplacés n’ont pas été réinstallés dans leurs foyers. Ce que l’on voit plutôt, c’est une multitude de disparations, de massacre de masse et d’extorsions. »

De telles politiques communautaristes ne sont en rien limitées au Sri Lanka. En fait, elles sont depuis des dizaines d’années un des aspects du régime bourgeois dans pratiquement tous les pays capitalistes pauvres de l’Asie et de l’Asie.

L’attaque en règle du gouvernement Harper contre les réfugiés fait partie d’un mouvement plus large se développant dans les pays capitalistes avancés, allant de la militarisation de la frontière entre les Etats-Unis et le Mexique par l’administration Obama jusqu’à l’interdiction de la burqa en France, consistant à diaboliser les réfugiés, les immigrants et les musulmans.

Dans le contexte de la crise s’approfondissant, la bourgeoisie des pays historiquement privilégiés prépare ses propres formes de politiques communautaristes, tout ceci au même moment que les droits démocratiques en général sont sous attaque constante.

(Article original paru le 17 août 2010)

 

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