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EuropeSpectaculaire augmentation d’infections VIH en
Europe de l’Est
Par Markus Salzmann
23 août 2010
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La propagation rapide du SIDA en Europe de l’Est met en évidence
l’échelle réelle d’anéantissement social suite à la réintroduction du
capitalisme dans l’ex – Union Soviétique et en Europe de l’Est.
Une épidémie de SIDA se propage rapidement en Europe de l’Est et en Asie
Centrale et frappe tout particulièrement les enfants et les adolescents.
L’UNICEF a signalé ces tendances dans un rapport publié mi-juillet. Il
n’existe aucune autre région du monde où le taux d’infection par VIH soit
plus important que dans cette région.
Les Nations Unies estiment pour l’Europe de l’Est à 1.5 millions le
nombre d’infections par VIH, en 2001 ce chiffre s’élevait à 900 000 cas.
Dans certaines régions de Russie, le nombre d’infections par VIH a augmenté
de 700% entre 2006 et 2010. On peut trouver plus de 90% des personnes
contaminées en Europe de l’Est en Russie et en Ukraine.
Sont tout particulièrement touchés les enfants et les jeunes, et tout
spécialement ceux qui vivent dans une pauvreté lamentable – des enfants
placés, des personnes dépendantes de la drogue, des gosses des rues, des
prostitués mineurs. En plus, un cas sur trois de nouvelles infections dans
toute la région frappe les jeunes et les jeunes adultes. 80% des personnes
contaminées ont moins de 30 ans.
A peu près 1,3 millions d’enfants dans la région sont placés dans des
foyers, où les conditions de vie sont le plus souvent épouvantables, et ils
finissent pour la plupart dans la rue.
A Saint Petersbourg, une étude récente a montré que sur 300 gosses des
rues, 40% étaient séropositifs. A Odessa et à Donetsk, des données
semblables ont été trouvées. L’UNICEF a fait une enquête en Ukraine et
établi que, sur 800 enfants et adolescents qui passaient la moitié de la
journée dans la rue, 57% des filles pratiquaient la prostitution au moins
occasionnelle.
L’augmentation de l’utilisation des stupéfiants est un autre signe de
déclin social. Le mode de transmission le plus courant du VIH est le partage
d’aiguilles contaminées. De nombreux gosses des rues utilisent des drogues
dures dès l’âge de 12 ans.
La raison d’être de cette étude et de cette critique c’est le tabou avec
lequel le virus VIH et le SIDA sont considérés. En 2008, par exemple, le
Turkménistan a déclaré officiellement 2 cas de SIDA – même si l’épidémie
avait frappé le pays longtemps auparavant.
Mais c’est le changement des conditions sociales et politiques dans ces
pays qui est la vraie raison de la propagation spectaculaire du VIH/ SIDA.
La propagation du virus a un lien direct avec la destruction du système de
santé et de l’infrastructure sociale entrepris au début des années 90 au nom
du libéralisme.
Reinhard Kurt, le directeur de l’Institut Robert Koch à Berlin a
déclaré : « La propagation du HIV a débuté au milieu des années 90 en
Ukraine et en Belarus ». Le VIH s’est ensuite rapidement propagé au nord et
à l’est. Entre temps ce sont l’Asie Centrale et le Caucase qui sont
particulièrement touchés par la pandémie.
Un employé du Ministère Autrichien des Affaires Etrangères, qui est
médecin en poste à Moscou, insiste sur une
relation directe entre la propagation du virus et la crise sociale à l’Est.
Le Dr Wolfgang Luster a écrit dans un communiqué : « Jusqu’à l’effondrement
de l’Union Soviétique, les pays d’Europe de l’Est et l’Union Soviétique
étaient peu touchés par l’infection VIH. On avait l’impression que cette
région avait été épargnée par l’épidémie mondiale du SIDA/ VIH ».
Depuis lors, la situation a radicalement changé. Luster écrit : «
Suite à l’effondrement de l’Union Soviétique, il s’est produit une
transformation en profondeur dans les structures de l’Europe de l’Est et des
pays de l’ancienne Union Soviétique. Malgré la diversité de ces régions, on
pouvait constater de nombreuses similitudes dans tous les pays concernés.
De nombreux pays ont expérimenté des transformations spectaculaires dans
leur système public de santé. Très souvent, il y a un manque de personnel ou
bien le personnel n’est pas payé. Les investissements ou les mesures de
préventions – quand ils existent - sont souvent insuffisants. La
privatisation du système de santé public a souvent mené à un système de
santé à deux vitesses, dans lequel une partie de la population ne bénéficie
d’aucune protection sociale.
Des centaines d’hôpitaux et de centres de soins ont été fermés depuis les
changements politiques de 1989-90, ou sont tombés dans un état de
délabrement par manque de financement de l’Etat. Maintenant, ce processus se
poursuit de plus belle, suite à la crise économique mondiale. Par exemple,
en Lettonie, il ne restera d’ici la fin de l’année qu’un tiers du nombre des
hôpitaux de 2009.
Dans toute l’Europe de l’Est, l’espérance de vie a diminué en moyenne de
7 ans par rapport à ce qu’elle était en 1989 suite à ce déclin social.
Les programmes sanitaires et les campagnes de prévention très nécessaires
sont inexistants ou pâtissent des restrictions budgétaires. Le rapport
conclut : « les systèmes de santé dans les 27 pays de la région ont
déjà échoué dans leur lutte contre le VIH », tout en réclamant un changement
de politiques sanitaires et sociales pour la lutte contre le SIDA dans la
région.
Mais les appels aux instances gouvernementales ne rencontrent aucun écho.
Les gouvernements de la région qui sont le plus souvent des régimes
totalement antidémocratiques et autoritaires mènent la destruction des
acquis antérieur sur injonction et avec le soutien du Fond Monétaire
International (FMI) et de l’UE dans le but d’ « attirer les investisseurs ».
Tout en étant parfaitement conscients que le seul moyen de stopper la
pandémie est de favoriser l’accès aux médicaments sur le plan mondial, et
d’améliorer les soins de santé et l’éducation à la santé, les gouvernements
occidentaux diminuent leurs dépenses pour la lutte contre le VIH/ SIDA à
l’étranger.
Alors que les coûts du traitement augmentent sans cesse, les fonds
disponibles diminuent. Selon les Nations Unies, les fonds mis à disposition
par les pays du G8 pour étudier le VIH s’élevaient à 7.6 milliards de
dollars en 2009, moins que les dépenses de 2008 qui s’élevaient à 7.7
milliards de dollars. L’Autriche, par exemple, a complètement réduit sa
contribution, avançant que les dépenses gouvernementales sont trop élevées.
(Article original publié le 10 août 2010)