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WSWS : Nouvelles et analyses : Europe

La « grande société » de Cameron : le thatchérisme nouvelle façon

Par Chris Marsden
6 août 2010

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Le programme de la « grande société » du premier ministre britannique David Cameron fournit un justificatif idéologique pour la réalisation par la coalition conservatrice-libérale de 85 à 100 milliards de Livres sterling de coupes budgétaires dans les quatre années à venir.

Le discours qu'il a prononcé à Liverpool à ce sujet était un nouvelle affirmation de l'intégrisme pro-marché thatchérien dont l'objectif est la destruction des prestations sociales permettant à des millions de gens de vivre et à la privatisation complète du secteur public.

En 1987, Margaret Thatcher avait fait cette déclaration restée fameuse : « Je pense que nous sommes passés par une période où on a laissé entendre à trop de gens que s'il y avait un problème, c'était au gouvernement de s'en occuper… Ils projettent leurs problèmes sur la société. Et puis vous savez, la société ça n'existe pas. Il y a des individus hommes et femmes, et il y a des familles. Et aucun gouvernement ne peut faire quoi que ce soit, si ce n'est à travers les gens, et les gens doivent s'occuper d'abord d'eux-mêmes.»

Cameron est l'héritier de Thatcher, mais il ne peut pas montrer la même innocence ou la même malignité, étant donné l'expérience amère faite par des millions de gens avec les résultats de la stratégie de la terre brûlée de Thatcher. Au lieu de cela, il présente de façon cynique les coupes envisagées comme la création d'« opportunités » pour les organisations caritatives et les communautés locales, et la privatisation comme le moyen de faciliter l'avènement d'une « plus grande démocratie locale ».

La pauvreté du véritable programme annoncé par Cameron était inversement proportionnelle à la grandiloquence de sa rhétorique. Décrivant sa « grande société » comme un « énorme changement culturel » et utilisant des mots comme « liberté » et « acquisition de pouvoir » il offrit quatre plans d'« avant garde » pour Liverpool, Eden Valley (Cumbria), Windsor, Maidenhead et pour le district londonien de Sutton. Ces plans comportent des initiatives comme la réouverture d'un bistrot local fermé et un programme de travail non rémunéré dans les musées locaux qui ferait travailler des jeunes au chômage. 

Ces projets et d'autres du même acabit sont sensés être financés en utilisant de l'argent laissé dans des comptes en banques inactifs. Cameron dit qu'ils fourniraient des centaines de millions de livres, mais le Financial Times estime l'argent de ces comptes à tout juste 60 millions de livres. D'autres ont fait remarquer que le financement d'une « Banque de la grande société » de cette manière, pourrait bien être illégale.

Bien plus important que ces modestes propositions est le message douloureux que celles-ci ont seulement pour fonction d'adoucir.

Ce qui est prévu n'est pas seulement un retour aux années 1980. Les conservateurs envisagent des mesures d'austérité qui vont bien au-delà de tout ce que Thatcher avait fait. Le discours de Cameron était une diatribe contre la prestation par le gouvernement de services et de mesures sociales qu'il a rendus responsables du « plus grand déficit budgétaire au sein du G20 ».

Désormais le gouvernement n'allait plus « jeter de l'argent à pleine mains dans des projets gouvernementaux gaspilleurs réalisés de haut en bas » dont Cameron affirma qu'ils faisaient des travailleurs des services publics des « marionnettes désillusionnées et fatiguées » et faisait d'individus capables des « bénéficiaires passifs de l'aide de l'Etat ». Le gouvernement allait maintenant « aider et soutenir une nouvelle culture du volontarisme, de la philanthropie et de l'action sociale ». Il allait « se débarrasser de la bureaucratie centralisée qui gaspille l'argent » et au lieu de cela « ouvrir les services publics à de nouveaux acteurs comme les organisation caritatives, les entreprises sociales et les sociétés privées ». Tout cela allait créer des « communautés avec du punch ».

L'inclusion des organisations caritatives dans le secteur public est une fraude. Celles-ci dépendent pour un tiers de leurs fonds du gouvernement et cet argent subira inévitablement des réductions. Les principaux bénéficiaires des largesses gouvernementales – prélevées sur les impôts payés par la population laborieuse – seront les sociétés privées et les "entreprises sociales " (qui ne sont que des compagnies privées légèrement déguisées). Ceux qui auront à payer seront les millions de gens qui dépendent des services sociaux élémentaires tant pour leurs besoins essentiels que pour leur surie même.

Derrière les projets bidons annoncés par Cameron le programme de coupes budgétaires fera monter le chômage à un niveau situé entre 3 et 4 millions, détruira l'éducation publique à travers l'introduction d'"académies" (écoles semi-privées, ndt.) et d'"écoles libres" à gestion privée et réduira partout les dépenses drastiquement y compris dans le NHS (National Health Service), le système de la Santé publique. 

L'objectif poursuivi par le volontariat est d'imposer une baisse général des salaires, une des principales composantes d'une vaste campagne de privatisation. Dans la seconde semaine de juillet, le journal quotidien Guardian informait de ce que, sous camouflage d'une campagne destinée à augmenter l'efficacité et, en apparence, à augmenter la productivité dans le NHS et ailleurs, des milliards de livres sont ainsi mises à la disposition de sociétés privées.

« Des firmes fournissant des services externalisés se préparent à une manne de contrats de la part des municipalités pour la fourniture de toutes sortes de choses depuis les éboueurs jusqu'aux petits bureaucrates et parlent d'un doublement du nombre de contrats disponibles cette année », écrivait ce journal. « Les entreprises de santé privées elles aussi s'attendent à gagner des milliards de livres grâce à la remise à neuf prévue du NHS dans le cadre de laquelle des médecins traitants prendront la responsabilité de dépenser 70 milliards de livres.» 

Les libéraux-démocrates soutiennent entièrement cette initiative. Une réunion commune avec des organisations caritatives et de volontariat à Downing Street, le dirigeant du Parti libéral- démocrate, le vice-premier ministre Nick Clegg, déclara que la construction de la « grande société » exigeait un « changement radical » et de « mettre fin aux intérêts particuliers ».

Le terme « intérêts particuliers » est devenu la formule standard utilisée dans les milieux dirigeants pour désigner les travailleurs du secteur public.

Le fait que la grande-Bretagne a le plus important déficit des pays du G20 est dû à la somme de presque un billion de Livres sterling déjà donné aux banques du pays, en plus de mesures de relance qui ont presque exclusivement profité aux principaux instituts financiers et aux grands groupes industriels. 

Faisant référence à la « crise de la dette souveraine » résultant de ce pillage des ressources publiques accumulées par des millions de travailleurs, le gouvernement déclare à présent que des sacrifices supplémentaires sont nécessaires pour éviter une faillite de l'Etat et une ruée sur la Livre. Il ne mentionne pas le fait que ces sacrifices supplémentaires seront utilisés pour soutenir les mêmes institutions déjà renflouées et dont les pratiques spéculatives ont déclenché la crise économique. 

La « grande société » est une recette pour un désastre social dont la responsabilité repose sur les épaules du Parti travailliste et des syndicats. Comme avec chaque annonce de coupes budgétaires de la part du gouvernement depuis que celui-ci a pris ses fonctions, le discours de Cameron sur la « grande société » n'a produit que de mièvres banalités de la part des dirigeants syndicaux britanniques. 

En fait de réponse officielle de la part du Parti travailliste, la ministre du « cabinet de l'ombre » Tessa Jowell tenta de revendiquer pour son parti la paternité des initiatives conservatrices – appelant le discours de Cameron « une nouvelle et culottée redéfinition de programmes déjà mis en oeuvre par le gouvernement travailliste ». 

Le favori dans la course à la direction du Parti travailliste ayant lieu en ce moment, David Milliband, s'est donné du mal à souligner que la critique des propositions de Cameron devait se concentrer sur la façon dont ces plans allaient être réalisés plutôt que sur leur contenu ou leur intention. De toute évidence, les travaillistes estiment que ces mesures sont très populaires auprès du grand patronat et qu'elles fourniront une manne financière à nombre de leurs partisans impliqués dans les sociétés et les entreprises du secteur social signant des contrats.

S'appuyant sur les syndicats pour paralyser et décapiter l'opposition de la classe ouvrière, la bourgeoisie se sert de la crise de son système pour mettre en place un système massif de démolition sociale. Son but est d'éliminer les mécanismes sociaux mis en place à la fin de la deuxième Guerre mondiale et d'imposer une redistribution sans précédent dans l'histoire de la richesse de la population travailleuse vers les super riches.

C'est pourquoi la langue de Cameron, avec sa concentration sur le caritatif, la philanthropie et l'altruisme sent à plein nez l'ère victorienne. C'est le seul point de référence a partir duquel l'impact de ces mesures puisse être correctement jugé.

(Article original publié le 20 juillet 2010)

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