World Socialist Web Site www.wsws.org

WSWS : Nouvelles et analyses : Europe

WikiLeaks et le parti allemand La Gauche

Par Peter Schwarz
29 décembre 2010

Retour | Ecrivez à l'auteur


Le parti allemand La Gauche (Die Linke) a fait preuve d’une remarquable modération dans ses commentaires sur les révélations publiées sur le site internet WikiLeaks et sur la persécution de son fondateur Julian Assange.

Bien que le groupe parlementaire du parti ait publié un communiqué daté du 15 décembre dans lequel il condamne « les tentatives de censurer l’information de WikiLeaks et de faire pression sur la plateforme, » ce faisant il se distance de WikiLeaks.

Ce même communiqué réclame « un vaste débat public sur la confidentialité » en disant : « Les documents politiques ne devraient pas être publiés si la vie, la santé ou la liberté des gens est mise en péril. » Le communiqué reproche à WikiLeaks de devenir « un acteur politique lorsqu’il décide par exemple quels sont les documents à diffuser, à quel moment et quelle presse dominante recevra en exclusivité par avance les documents. »

Il est maintenant apparu clairement qu’il existe aussi des raisons personnelles concrètes pour l’attitude ambiguë du parti La Gauche. Le président du groupe parlementaire, Gregor Gysi, fait partie des politiciens que l’ambassadeur américain en Allemagne, Philip Murphy, avait rencontrés pour collecter des « ragots » sur la politique interne de son parti. C’est ce qu’avait rapporté le site Spiegel Online d’après une dépêche secrète publiée par WikiLeaks.

Gysi est en bonne compagnie. Avant les révélations le concernant, Helmut Metzner, chef de cabinet du dirigeant du Parti libéral démocrate (FDP), Guido Westerwelle, avait lui aussi été identifié comme informateur secret de l’ambassadeur américain. Contrairement à Gysi, toutefois, Metzner avait dû quitter ses fonctions.

Apparemment, Gysi a rassuré le représentant official du gouvernement américain et dit qu’il ne devait pas se faire de souci quant à l’attitude de La Gauche à l’égard de l’OTAN. Le projet de programme du parti, qui est actuellement débattu, réclame « le démantèlement de l’OTAN et son remplacement par un système de sécurité collective impliquant la Russie. »

Gysi a dit à l’ambassadeur américain comment la position officielle du parti réclamant la dissolution de l’Alliance militaire atlantique devait vraiment être comprise comme un engagement de l’Allemagne à rester dans l’OTAN !

Selon Der Spiegel, Gysi a expliqué à l’ambassadeur la dialectique de cette contradiction de la manière suivante: La revendication est une manœuvre tactique pour calmer les représentants de l’aile gauche du parti. Autrement, ceux-ci exigeraient que l’Allemagne quitte l’OTAN, ce qui serait bien plus dangereux. Contrairement au retrait de l’Allemagne, la dissolution de l’OTAN est irréaliste parce que cela requerrait le consentement de la France, de la Grande-Bretagne et des Etats-Unis. Toutefois, à croire l’argumentation de Gysi, aussi longtemps que l’OTAN existera, La Gauche soutiendra l’adhésion de l’Allemagne.

Questionné par Der Spiegel, Gysi n’a pas nié avoir rencontré l’ambassadeur américain. Il a affirmé qu’il ne se souvenait plus mot à mot de l’entretien en mettant en avant une erreur de traduction parce que la conversation s’était faite en allemand. Mais ceci correspond à tout sauf à un démenti.

Les représentants de gauche du parti ont exprimé leur indignation. Si la conversation de novembre a eu lieu telle qu’elle a été rapportée, « ce serait de l’aventurisme et un affront aux représentants de la gauche du parti, » a dit à Spiegel Online la député parlementaire Ulla Jelpke. Dans le quotidien Junge Welt, le journaliste Werner Pirker a exprimé son indignation sur le fait que Gysi a confié à l’ambassadeur américain des informations sur « les sales tours qui sont employés pour tromper la base du parti. »

Quelle comédie! Trois ans et demi après la fondation officielle du parti, chaque membre du parti devrait à présent voir clairement la manière dont le parti La Gauche fonctionne. Ce n’est pas seulement dans le domaine de la politique étrangère que La Gauche fait exactement le contraire de ce qu’elle proclame officiellement dans son programme et ses campagnes électorales. Elle fait la même chose dans tous les autres domaines politiques que ce soit le démantèlement des emplois dans le secteur public, la privatisation du logement et des services publics ou l’application au niveau local des attaques contre les chômeurs et les bénéficiaires des aides forfaitaires en application de la loi « Hartz ».

Les soi-disant membres de gauche du parti tentent de dissimuler cette politique droitière par une rhétorique apparemment de gauche. Les révélations de WikiLeaks ont exposé la nudité de leurs tentatives de camoufler la politique réactionnaire de Gysi.

(Article original paru le 22 décembre 2010)

Untitled Document


Copyright 1998 - 2012
World Socialist Web Site
Tous droits réservés