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WSWS : Nouvelles et analyses : Europe

L’Ukraine abandonne la candidature à l’OTAN

Par Niall Green
17 juin 2010

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Lors du vote le 3 juin, le parlement ukrainien a abandonné l’engagement antérieur du pays de rejoindre l’alliance militaire de l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN) dominée par les Etats-Unis. Le projet de loi soumis par le président Viktor Ianoukovitch stipule que l’Ukraine est un pays non aligné bien qu’il puisse coopérer avec l’OTAN et les autres blocs militaires tels l’Organisation du traité de sécurité collective (CSTO) menée par la Russie.

Lors d’une autre action destinée à améliorer les relations stratégiques avec Moscou, Ianoukovitch a consenti en avril à un nouvel accord avec le président russe Dmitri Medvedev sur l’avenir de la Flotte de la mer Noire basée dans le port de Sébastopol en Crimée, une province d’Ukraine. La flotte russe restera stationnée dans cette base au moins encore pendant 25 ans après l’expiration du bail en 2017.

Ianoukovitch avait refusé de proroger le bail russe de la base de Sébastopol au-delà de cette date. La Russie maintient depuis 1783 une flotte dans ce port.

L’adhésion de l’Ukraine à l’OTAN a toujours été refusée par une solide majorité de la population.

En échange, la Russie accordera une réduction du prix du gaz naturel qu’elle livre à l’Ukraine. Kiev paiera à présent 230 dollars les 1.000 mètres cube de gaz sibérien, soit 100 dollars de moins que précédemment. L’on estime que la baisse du prix du gaz, en plus du montant du loyer que la Russie verse pour la base, pourrait correspondre à 40 milliards de dollars pour l’économie ukrainienne durant les 25 prochaines années.

Alors que certains commentateurs ont qualifié l’accord de Sébastopol comme un signe qu’Ianoukovitch a réintégré l’autorité de Moscou, la démarche semble avoir pour but de permettre à Kiev de se mouvoir plus efficacement entre la Russie et l’Union européenne (UE) à l’Ouest. « Nous voulons nous tourner vers l’occident, » selon les propos d’un porte-parole du ministère ukrainien des Affaires étrangères, « Mais la meilleure façon de le faire est de bénéficier du gaz venant de l’Est. »

« Le principal facteur de la prévisibilité et de la cohérence de la politique étrangère de l’Ukraine est son statut de non-alignement, » a dit le premier ministre Mykola Azarov au parlement.

Ianoukovitch, un représentant du patronat ukrainien de la partie orientale du pays, occupait le poste de premier ministre de 2001 à 2004 sous l’ancien président Leonid Kuchma. Puis il a perdu les élections présidentielles de 2004 en faveur d’Iouchtchenko après un troisième tour de scrutin et des accusations de fraude électorale.

Ianoukovitch a été élu à la présidence en janvier en remplacement de Viktor Iouchtchenko. Iouchtchenko, dirigeant de la « Révolution orange » de 2004, l’une des soi-disant révolution de couleurs soutenues par Washington en vue de mettre en place des régimes pro américains dans les anciens Etats soviétiques, était un fervent défenseur de l’adhésion ukrainienne à l’OTAN.

La Russie est profondément opposée à une plus grande expansion de l’OTAN à l’intérieur de l’ancienne URSS et elle était tout particulièrement hostile aux efforts entrepris par Washington et Iouchtchenko d’incorporer l’Ukraine, de par sa population la deuxième plus grande république ex-soviétique, dans l’OTAN. Jusqu’à la prise de pouvoir du gouvernement Iouchtchenko, l’Ukraine et la Russie maintenaient des industries de défense hautement liées et partageaient les installations militaires.

L’abandon de la demande d’adhésion de l'Ukraine à l’OTAN ne visait pas seulement à apaiser Moscou. Les principales puissances européennes, notamment l’Allemagne, étaient opposées à l’entrée dans l’alliance de l’Ukraine et de l’autre ancien candidat soviétique à l’adhésion, la Géorgie. Berlin ne voulait pas contrarier Moscou avec lequel il entretient des relations commerciales et stratégiques vitales concentrées dans le secteur énergétique.

Ce fut tout particulièrement après la guerre de 2008 entre la Russie et la Géorgie initiée par l’attaque lancée par le président géorgien Mikheil Saakashvili contre les troupes russes stationnées dans la région séparatiste de l’Ossétie Sud, qu’il devint clair que Berlin et Paris n’étaient pas disposés à soutenir l’entrée de deux nouveaux régimes pro américain et anti russe dans l’alliance.

La première visite à l’étranger effectuée par Ianoukovitch après son entrée en fonction a été consacrée à rencontrer les dirigeants de l’Union européenne (UE) à Bruxelles. Tout comme le gouvernement Iouchtchenko, Ianoukovitch cherche à engager le pays sur la voie de l’adhésion à l’UE et de laquelle l’économie ukrainienne s’efforce d’obtenir des investissements directs à grande échelle, notamment dans les secteurs énergétique et industriel.

En dépit de l’amélioration des relations avec la Russie, l’élite ukrainienne reste méfiante à l’égard des ambitions du Kremlin. Ianoukovitch a repoussé dernièrement une offre de fusion du géant de gaz naturel Gazprom contrôlé par l’Etat pour Naftogaz, la plus grande compagnie énergétique d’Ukraine. L’offre russe aurait conféré un rôle dominant à Gazprom dans le réseau de gazoducs de l’Ukraine par lequel transite la majorité des livraisons de gaz naturel de la Russie à l’UE.

Ianoukovitch cherche à obtenir des investissements pour le réseau vieillissant de gazoducs de l’Ukraine et est aussi à la recherche d’investissements européens. Le président ukrainien a déclaré que le contrôle des gazoducs du pays « ne peut être concédé qu’en échange d’investissements par la Russie et par l’Europe. »

« De tels investisseurs obtiendraient des parts de propriété. Mais un contrôle russe total, non, ce sont des paroles vides de sens, » a dit Ianoukovitch le 4 mai dans une interview accordée à la presse.

Il y eut une série de querelles entre l’ancien gouvernement Iouchtchenko et la Russie au sujet du prix que l’Ukraine devrait payer pour l’acheminement du gaz naturel à travers son territoire. Comme dans le cas de bien d’autres anciennes républiques soviétiques, l’Ukraine a reçu historiquement du gaz naturel de la Russie à des tarifs bien inférieurs à ceux du marché international et a énormément profité des exportations de ce gaz vers le marché européen. Cependant, à partir de 2005, le Kremlin a augmenté le prix en accusant les entreprises ukrainiennes de voler du gaz ; deux autres conflits majeurs ont eu lieu en 2007-8 et en 2008-9, dont le dernier a laissé une grande partie de l’Europe centrale sans approvisionnement adéquat en gaz naturel pendant plusieurs jours en plein hiver.

Etant donné que la Russie et l’Ukraine ont convenu en octobre 2009 d’un nouvel accord gazier pour l’année à venir, de nouvelles querelles sont probables. La Russie est fortement tributaire des exportations de pétrole et de gaz naturel vers l’Europe, et la baisse des prix de l’énergie incitera Moscou à réclamer des paiements plus élevés de la part des pays de transit de gazoducs tels l’Ukraine et la Biélorussie.

Toute perturbation des approvisionnements de gaz ou une chute de la demande des exportations pétrochimiques et métallurgiques de l’Ukraine pourraient précipiter à nouveau le pays dans une grave récession. Il y a également le risque que l’Ukraine pourrait être ciblée pour connaître le même traitement de la part des marchés financiers mondiaux que la Grèce avec les coûts de l’emprunt forcés à la hausse par les paris des spéculateurs contre l’insolvabilité du pays.

Au cours des deux dernières années le capital étranger s’est retiré de l’Ukraine en raison de la vulnérabilité du pays à la crise économique mondiale qui a éclaté fin 2008. L’économie de l’Ukraine a rétréci de 15 pour cent en 2009 et la croissance économique est restée fragile cette année. Le pays a reçu un prêt de 16 milliards de dollars du Fonds monétaire international (FMI) pour stabiliser sa monnaie et étayer le secteur financier.

Les espoirs d’Ianoukovitch en vue d’un soutien politique et économique de l’UE ont été accueillis par une réponse froide de Bruxelles et des capitales nationales de l’Europe. L’UE s’efforce de maintenir l’unité de ses membres pour empêcher son écroulement et aucun dirigeant de l’UE n’a suggéré de délai pour l’adhésion ukrainienne.

Afin d’encourager une politique européenne plus active en Ukraine par rapport à la Russie, Ianoukovitch a déclaré récemment qu’il « aimerait obtenir la même réponse rapide de l’Union européenne que celle que j’ai reçue de la Russie. » Se plaignant de ce que l’UE traînait les pieds au sujet des visa et des accords commerciaux qui sont considérés comme les premiers pas vers une adhésion à l’UE, Ianoukovitch a dit à la BBC : « Aujourd’hui l’Ukraine est prête à s’associer à l’Europe, à condition que l’Europe soit prête à s’associer à l’Ukraine… Sont-ils prêts ou non ? »

L’Ukraine a une dette publique correspondant à 36 pour cent du produit intérieur brut (PIB) et un déficit budgétaire de 21 milliards de dollars ou 11 pour cent du PIB, en 2009 – un taux similaire à celui de la Grèce.

Le nouveau gouvernement affirme que ce déficit a été réduit de moitié grâce à une augmentation des rentrées d’impôts, une situation qui a été défiée par certains économistes qui croient que les recettes de l’Etat ont été surestimées.

Ianoukovitch a jusque-là rechigné à mettre en avant le genre de réductions des dépenses publiques annoncées par l’Irlande, la Grèce et l’Espagne. Toutefois, confronté aux mesures d’austérité exigées par les agences de notations internationales, les institutions financières et le FMI, Ianoukovitch a annoncé le 3 juin un plan de réformes promettant de réduire le déficit budgétaire d’environ 3 pour cent du PIB d’ici 2013-14.

Il y a eu des appels, à la fois de l’élite patronale de l’Ukraine et de commentateurs internationaux, de réduire radicalement les subventions de l’Ukraine aux particuliers, subventions réduisant les prix d’environ 30 pour cent par rapport au prix du marché. Dans son édition du 3 juin, le magazine Economist a qualifié la subvention du gaz de « lourd boulet pour le trésor public » en mettant en garde Ianoukovitch qu’il devait « appliquer des réformes qui pourraient le rendre impopulaire. »

(Article original paru le 12 juin 2010)

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