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France : Les travailleurs de Total à Dunkerque poursuivent la grève après l'appel de la CGT à mettre fin au mouvement national

Par Antoine Lerougetel
1er mars 2010

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Mercredi dernier, la CGT (Confédération générale du travail) dominée par le Parti communiste a appelé à la fin de la grève nationale en opposition à la fermeture de la raffinerie Total Les Flandres de Dunkerque. Toutes les six raffineries françaises du géant pétrolier étaient en grève.

Malgré la trahison de la CGT, qui est intervenue le même jour que la journée de grève générale en Grèce contre les mesures d'austérité du gouvernement et dans le contexte d'autres grèves de par l'Europe, les travailleurs de Dunkerque ont voté mercredi pour la poursuite de la grève.

En France, les contrôleurs aériens ont continué à perturber les vols au dernier jour de leur grève, tandis que les pilotes d'Air France lançaient leur propre grève de quatre jours.

La CGT conduite par les staliniens a appelé à mettre fin à la grève nationale contre Total au sixième jour, au moment où l'impact de la grève commençait à handicaper la compagnie pétrolière. Quelque 10 pour cent des stations-service de Total étaient à court de carburants.

Les travailleurs de Dunkerque étaient en colère face à la démarche de la CGT. Un gréviste a dit au WSWS jeudi, « Il aurait fallu continuer. On aurait pu faire démissionner Sarkozy. »

La CGT a appelé à cesser la grève nationale afin de renforcer le gouvernement Sarkozy et d'éviter un mouvement plus large de la classe ouvrière française et européenne. La fédération syndicale a accepté un accord tripartite avec Total et le gouvernement et qui sacrifie la raffinerie de Dunkerque contre la garantie sans aucune valeur de la compagnie de ne pas diminuer la production ni fermer ni vendre aucune de ses autres raffineries dans les cinq années à venir.

Des travailleurs sur certains sites Total ont résisté au mot d'ordre de reprise du travail de la CGT. Associated Press rapporte: « A Gonfreville, l'assemblée générale avait en milieu d'après-midi décidé de reconduire le mouvement. Puis un nouveau vote a eu lieu après l'annonce de la reprise du travail sur les autres sites, et la grève a finalement été suspendue "à une très courte majorité", précisait-on du côté de la CGT. »

A la raffinerie des Flandres de Dunkerque, les travailleurs ont voté pour continuer leur grève et occupation jusqu'à la réunion du comité central d'entreprise de la compagnie le 8 mars qui se tiendra au siège social de Total à Paris. Les travailleurs de Dunkerque sont en grève depuis le 12 janvier.

L'intersyndicale de la raffinerie a lancé un appel à la solidarité, appelant à « un grand rendez-vous à Paris le 8 mars. » Cet appel réitère que l'objectif de la grève est « le redémarrage de l'entreprise pour permettre sur le site de Dunkerque la préservation de tous les emplois de la Raffinerie des Flandres mais aussi de toute la sous-traitance. »

L'intersyndicale est composée de SUD (Solidarité-Unité-Démocratie) qui est lié aux organisations soi-disant de « gauche » tel le Nouveau Parti anticapitaliste (NPA), de la CGT et de Force ouvrière (FO). SUD avait détrôné la CGT et était devenu le syndicat majoritaire de la raffinerie de Dunkerque il y a deux ans.

Cet appel lancé par l'intersyndicale de Dunkerque se gardait de critiquer de quelque manière la trahison de la CGT, se contentant d'observer que « La grève nationale du groupe Total n'a pas permis d'apporter de réponse à la question posée depuis le 12 janvier. »

L'appel était signé entre autres, par Pascale Montel, tête de liste NPA aux élections régionales, Christian Maheux, secrétaire national de la confédération de Sud, Solidaires et Jean-Pierre Delannoy, leader du syndicat CGT de la métallurgie.

Le NPA a fait, le 24 février, une déclaration sur la grève chez Total évitant toute référence à la trahison de la CGT.

Lors de la réunion publique de jeudi soir organisée par SUD, les intervenants ont eux aussi évité toute critique de la CGT dont le délégué de la raffinerie était à la tribune.

Mahieux et d'autres intervenants de SUD et du NPA à la réunion ont qualifié de victoire et d'exemplaire la lutte des travailleurs de Continental l'année dernière contre la fermeture de leur usine à Clairoix. En fait, les syndicats avaient négocié l'acceptation de fermeture de l'usine.

Des reporters du WSWS étaient présents à l'assemblée générale des grévistes des Flandres jeudi après-midi au cours de laquelle les représentants de SUD n'ont fait aucune critique de la CGT et ont laissé son principal représentant à la raffinerie, Marc Pigeon, défendre en long et en large la « suspension » de la grève nationale.

Des sympathisants du WSWS ont distribué des tracts de l'article «France: Les syndicats appellent à la fin de la grève chez Total ». Lors de cette réunion publique le soir, Pigeon a essayé sans succès d'empêcher les sympathisants du WSWS d'entrer dans la salle.

L'intervention de Pigeon à la tribune a consisté en grande partie à s'en prendre au WSWS et à l'article distribué qu'il a qualifié de « torchon. » Un sympathisant du WSWS a pris la parole dans la salle et expliqué que les travailleurs avaient besoin d'une nouvelle organisation, indépendante des syndicats, parce que les syndicats collaborent avec les entreprises et le gouvernement.

Il a dit : « Le gouvernement et les syndicats ont entamé le 15 février des discussions sur la manière dont on peut, sans provoquer un soulèvement social, réduire la dette nationale et le déficit budgétaire au moyen d'attaques contre les retraites, les allocations et les services sociaux. La manière dont les syndicats ont procédé avec la grève chez Total est une leçon de chose sur la façon dont ils ont l'intention de procéder. » Cette intervention a été bien accueillie par une partie de l'auditoire qui avait exprimé sa colère devant l'appel à mettre fin à la grève.

Les reporters du WSWS se sont entretenus avec des travailleurs présents à la réunion.

Aldo Tavani est chef d'équipe adjoint. Cela fait 31 ans qu'il travaille à la raffinerie. Il était syndiqué à la CGT puis a perdu ses illusions dans ce syndicat.

Il a dit, « On peut dire qu'on est un peu en colère de voir que la grève a été arrêtée. On aurait dû continuer. Les promesses qu'on nous a faites ne valent rien. Qu'est-ce que les syndicats ont obtenu ? Il y a deux sites qui doivent être délocalisés en Arabie saoudite. Sarkozy avait promis de sauver l'usine Arcelor de Gadrange, et elle a fermé. Ils peuvent envoyer la production en Inde ou au Brésil, comme ils veulent. Cinq ans ! On rêve ! On va reculer de 50 ans et perdre tous nos acquis sociaux. »

Aldo a convenu que la lutte devait être à échelle européenne. « Il faudra quelqu'un pour l'organiser. Il faut un parti dans chaque pays. Il va falloir le construire. On part de zéro. »

David Lenglet, membre de SUD travaille depuis 9 ans à Flandres. Il a dit au WSWS, « La CGT nous a laissés tomber. Encore deux ou trois jours et cela aurait été la pénurie. Maintenant, on continue en solo. Beaucoup d'autres travailleurs seraient venus vers nous. Cela aurait fait boule de neige. Mon amie est infirmière. Il y a beaucoup de mécontentement chez les hospitaliers. Il faut qu'on aille vers un nouveau 1968. 

« Je ne peux pas accepter que notre production parte en Arabie saoudite. On nous a promis qu'on proposerait à tous les travailleurs un emploi dans la compagnie. Certains devront déménager. C'est pas facile, j'ai une famille, des engagements. Je ne peux pas tout quitter comme ça. Les emplois devraient rester en France. Je ne dis pas que les travailleurs d'Arabie saoudite sont nos ennemis. C'est la faute de Total.

« Cela fait six semaines que nous sommes en grève. Les hommes politiques ne sont venus nous voir que la semaine dernière. Il y en avait quelques-uns aujourd'hui. Tout ce qu'ils veulent, c'est des voix aux élections régionales. »

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