La violente tempête qui durant le
week-end a fait des ravages partout en Europe de l’Ouest a causé les plus
gros dégâts en France durant la nuit du 27 au 28 février. Mardi soir le bilan
était de 52 morts. En Vendée, elle a coûté la vie à 33 personnes et en
Charente-Maritime 11 personnes ont trouvé la mort, le plus souvent par noyade.
Huit personnes sont portées disparues.
La tempête, appelée Xanthia, a été
la plus meurtrière que la France ait connue depuis la tempête de 1999 qui avait
provoqué la mort de 92 personnes.
Des rafales de vent atteignant
jusqu’à 160 km/heure ont soufflé. Au sommet de la Tour Eiffel, la vitesse
du vent a atteint 175 km/heure. Air France a annoncé l’annulation d'une
centaine de vols au départ et à l’arrivée de l’aéroport
Paris-Charles de Gaulle.
Une marée exceptionnellement forte a
rompu des digues inadéquates et a inondé des maisons, dont beaucoup avaient été
construites dans des zones désignées comme à haut risque etinondables.
Les gens ont été surpris dans leur sommeil par l’eau qui montait
rapidement. Lundi en fin de matinée, 10.000 agents de la sécurité civile
étaient à la recherche de survivants sur le littoral atlantique.
Des milliers de personnes sont sans
abri sur le littoral. Les industries locales ont été durement touchées, la
pêche, l’ostréiculture et les commerces détruits, les récoltes anéanties
et des milliers d’hectares de terres agricoles contaminés par de
l’eau de mer salée. Les habitants ont été les premiers à proposer leur
aide aux victimes en fournissant un abri à ceux qui avaient perdu leur foyer et
des vêtements et de la nourriture à ceux qui ont trouvé refuge dans des
gymnases mis à leur disposition.
La tempête a aussi causé des dégâts
considérables à l’intérieur des terres, notamment dans les Pyrénées et
les Alpes où plusieurs stations de sports d’hiver ont été touchées.
Le gouvernement a débloqué une aide
de 3 millions d’euros.
Dimanche, environ 1 million de
foyers étaient privés d’électricité parce que les fils électriques
avaient été arrachés par des chutes d’arbres et d’autres objets.
L’intervention rapide des agents EDF a permis de réalimenter en
électricité 500.000 foyers dès dimanche soir. Quelque 222.000 foyers restaient
sans électricité lundi midi et EDF prévoit de pouvoir rétablir le courant
partout d’ici mardi soir ou mercredi, sauf dans les régions fortement
inondées.
La colère monte face à la qualité
défectueuse et au manque d’entretien correct des 7 à 10.000 kilomètres de
digues protégeant les côtes françaises notamment la côte Ouest où sont situés
les départements de Charente-Maritime et de Vendée qui ont subi les dégâts les
plus importants.
Comme dans le cas de l’ouragan
Katrina qui avait ravagé la Nouvelle-Orléans en 2005, du tremblement de terre
du 12 janvier en Haïti et du tremblement de terre qui a frappé le Chili le
week-end dernier, ces tempêtes ont révélé la nature de classe de la société
française. Bien que le bilan des morts soit nettement plus faible en France,
dans chacune de ces catastrophes la priorité avait été donnée aux profits
plutôt qu'aux aménagements pour la sécurité et le bien-être de la population,
ce qui a sérieusement exacerbé les dégâts causés par ces catastrophes
naturelles.
Le secteur le plus durement touché a
été L’Aiguillon-sur-Mer en Vendée où 25 corps ont été retrouvés après la
rupture d’une digue. La BBC a rapporté qu’: « Un élu local a
dit que les murs remontaient au temps de Napoléon et avaient besoin
d’être remplacés par des digues plus hautes », tandis que les urbanistes
« sont accusés de construire des lotissements aussi près de la vieille
digue. »
L’agence Reuters a rapporté
lundi que « la rupture de digues sur la façade Atlantique a entraîné de
multiples noyades dans les habitations, souvent sans étage, situées dans des
lotissements construits à proximité de la mer. » Selon la secrétaire
d’Etat à l’Ecologie de Sarkozy, Chantal Jouanno, de nombreuses
digues en France datent du 17e siècle. Elle a estimé qu’environ 1.000
kilomètres de ces digues peuvent être considérées « à risque ».
Alors que « Météo France avait
lancé dès vendredi un bulletin d’alerte rouge, une démarche rarissime,
sur les départements concernés », un autre rapport dit, « Aucune
mesure d’évacuation ne semble pourtant avoir été décidée dans les
communes proches de la mer. »
Des preuves existent qui laissent
supposer que les autorités françaises étaient parfaitement au courant des
dangers que représentaient les inondations. Le Parisien a écrit mardi
que le ministère de l’Ecologie et du Développement durable avait constaté
en 2008 que « le premier risque naturel en France est
l’inondation, » avec 16.000 communes et 5,1 millions
d’habitants à risque.
« En effet, La-Faute-sur-Mer et
L’Aiguillon-sur-Mer, qui ont enregistré le plus de victimes (27), sont
situées dans la zone côtière à risque, » précise le journal. « Une
étude présentée en octobre 2008 par la Direction départementale de
l’équipement (DDE) de Vendée affirmait que la commune de la Faute-sur-Mer
avait été construite "sur de vastes espaces gagnés sur la mer, ne tenant
pas compte de la mémoire d’un réseau de digues vieillissant" »
L’étude prévenait que la
conjonction de facteurs comme la crue des rivières et la submersion marine
« pourrait avoir un impact très important sur les zones densifiées à
l’arrière d’un réseau de digues vieillissant. » Le Parisien
a remarqué aussi que Chantal Jouanno avait également insinué que « les
mairies cédaient ainsi souvent devant la volonté des promoteurs de construire
en bord de mer ou des rivières. […] depuis 1999, 100.000 logements ont
été édifiés sur les zones inondables de 424 grandes communes, dont 8.000 dans
les Alpes-Maritimes, le Var et le Val-de-Marne, et ce malgré les risques
encourus. »
Feignant la surprise, le président
Sarkozy a déclaré lors de son passage dans les zones dévastées, « Il faut
qu’on s’interroge pour savoir comment en France au 20ème
siècle des familles peuvent être surprises dans leur sommeil et être noyées
dans leurs maisons. […] c’est inacceptable. » Mais le
gouvernement Sarkozy a démenti toute responsabilité avec le secrétaire
d’Etat aux Transports, Dominique Bussereau niant « tout
dysfonctionnement de l’Etat dans la catastrophe. »
Durant la campagne présidentielle de 2007, Sarkozy lui-même
s’était prononcé pour un assouplissement la Loi littoral pour la
construction en zones inondables. « Je crois qu’il faut à la fois la
renforcer pour mieux lutter contre les cas de détournement qui ont été
constatés, et l’assouplir pour ne pas entraver le développement normal
des communes, tout en conservant l’objectif général de protection de
l’environnement, » avait dit Sarkozy dans une interview publiée le 3
avril 2007 dans Le Marin.
En pleine campagne pour les élections régionales de la
mi-mars, les partis de « gauche » et de droite ont appelé à une trêve
informelle afin d’éviter toute discussion sur la question de savoir qui
porte la responsabilité dans cette catastrophe. Ségolène Royal, la candidate
vaincue du Parti socialiste lors des élections présidentielles de 2007 et
présidente de la région Poitou-Charentes, a répété l’affirmation de
Sarkozy qu’il « ne s’agit pas de lancer des polémiques,
c’est le moment du deuil. » Les ex partis de gauche français ont été
à la tête de nombreuses municipalités et de régions où des permis de construire
en zones douteuses ont été délivrés à des entreprises locales.
Le gouvernement veut utiliser cette catastrophe pour détourner
l’attention de son offensive politique à l’encontre de la classe
ouvrière. La popularité de Sarkozy est au plus bas en raison de ses projets de
réduire la vaste dette nationale et le déficit budgétaire au moyen de coupes
sévères dans les dépenses gouvernementales allouées aux services sociaux. Ces
mesures sont imposées par l’Union européenne à travers le continent pour
financer le plan de sauvetage des principales banques et d'éviter
l’effondrement de l’euro. Sarkozy et la chancelière allemande
Angela Merkel mènent l’offensive de l’UE en exigeant
qu’Athènes appauvrisse la classe ouvrière grecque dans le but d’empêcher
une faillite de l’Etat.
On peut comparer cette incompétence du gouvernement avec les
progrès scientifiques récents faits dans le domaine de la météorologie et sur
lesquels se fonde le service de prévisions météorologiques de Météo-France qui
a épargné à la France un désastre bien pire encore. Dans une interview accordée
par le météorologiste Hubert Dreveton au Parisien, ce dernier a dit que
de grands progrès ont été réalisés depuis la tempête de 1999. Cette fois-ci,
Météo-France a prévu aussi bien l’intensité que le positionnement de la
tempête. Pour celle de 1999, « le système d’alerte vigilance
n’existait pas, » a-t-il précisé. « En l’espace de 12
ans, on a vraiment progressé, on a beaucoup plus d’observation satellite
et des modèles numériques bien plus performants. »
Les agents des centres de Météo-France luttent depuis 2008
contre les projets de suppression de 500 postes et de fermeture de la moitié de
leurs centres dans les communes. Ces projets font partie du programme
d’austérité du gouvernement consistant à réduire les dépenses publiques
pour compenser les milliards octroyés aux grandes institutions bancaires en
France.