Ceux qui ont besoin de preuves supplémentaires pour réfuter
l'affirmation du premier ministre David Cameron, selon laquelle tout le monde
en Grande Bretagne souffre de la même manière des mesures d'austérité, n'ont
qu'a jeter un coup d'oeil à la dernière liste en date des plus grandes fortunes
publiée par le Sunday Times.
Le journaliste du Times, Philip Beresford explique
que " la période d'austérité n'affecte pas les Anglais les plus riches
dont la fortune collective a augmenté de 18% au cours de l'année
dernière". Il ajoute: "Tous ensemble, les 1000 multimillionnaires de
la liste de riches possèdent 60,2 milliards de livres (une livre: 1,15euro) de
plus qu'en 2010."
Les 1000 personnes les plus riches d'Angleterre possèdent aujourd'hui
la somme colossale de 396 milliards de livres.
Selon Beresford, la richesse amassée maintenant par
l'oligarchie financière basée en Grande Bretagne "se rapproche de très
près du montant le plus important qu'elle ait jamais atteint, celui d'avant la
crise en 2008 qui était de 413 milliards de livres."
Le crash économique de 2008 a tout d'abord diminué les
revenus et la richesse des super riches dont on a pu constater les pertes dans
la liste de 2009. Mais la collaboration avec d'abord le parti travailliste qui
a donné presque mille milliards de livres de fonds publics aux banques et
maintenant avec la coalition des libéraux démocrates et des conservateurs, leur
a permis de prospérer en transférant le fardeau sur les épaules des
travailleurs.
Alors que les salaires des travailleurs britanniques vont
baisser au cours des quatre prochaines années, pour la première fois depuis la
première "grande dépression" des années 1870, la fortune des super
riches devient astronomique. Le sort économique et la part de richesse globale
des masses anglaises et ceux de la toute petite minorité de 1% les plus riches
prennent deux directions opposées.
Pile, les responsables de l'oligarchie financière gagnent,
face, les masses perdent. Les activités financières qui les ont rendu
indécemment riches ont provoqué un crash économique dont ils ont encore profité
en baissant les salaires, en réduisant leur personnel et en se débarrassant de
la concurrence.
L'Institut national de recherche économique et sociale
prévoit, et c'est une prévision optimiste, que la production anglaise ne
retrouvera pas son niveau d'avant la crise avant trois ans. Mais l'oligarchie
financière, elle, exhale un parfum de roses.
Le pays tout entier est mis au service d'une poignée
d'individus super riches. Les gouvernements successifs ont fait de Londres leur
terrain de jeu et la politique de tous les partis officiels est calculée pour
satisfaire leurs moindres désirs.
La composition de la liste des plus grandes fortunes reflète
les secteurs dominants du capital. La richesse issue de la construction a pris
un coup et il y a huit noms de moins sur la liste pour ce secteur, et
l'industrie n'a amené que cinq noms supplémentaires. Une fois de plus, les
gains les plus importants ont été réalisés par les capitalistes financiers y
compris les directeurs de hedge fund, dont le nombre a augmenté de onze,
passant de 169 à 180.
La liste des riches de cette année contient un nombre record
de directeurs de hedge fund, de négociants de matières premières et autres
personnes du même genre. 55 d'entre eux figurent sur la liste représentant 5,5
pour cent de la richesse totale répertoriée. Le roi de ce groupe est le
financier Nat Rothschild dont la conduite imprudente et criminelle a fait
l'effet d'un catalyseur de la crise économique actuelle; sa fortune personnelle
a augmenté d'un milliard de livres en seulement un an, ce qui est incroyable.
Le nombre de milliardaires a considérablement augmenté. La
liste de l'année dernière comptait 53 personnes dont la fortune était
supérieure à un milliard de livres. Aujourd'hui il y en a 20 de plus, ce qui
fait monter leur nombre à 73 milliardaires résidant dans les Iles britanniques
soit seulement deux de moins que le record de 2008 en Angleterre, qui était de
75 milliardaires.
La moitié au moins des 1000 personnes les plus riches de
Grande Bretagne vivent dans la capitale et les comtés avoisinants.
Fait remarquable, mis à part le supplément magazine
entièrement consacré à la liste des riches, on ne trouvait dans les pages
intérieures du Sunday Times qu'un seul article sur le sujet et qui était
consacré aux 100 femmes qui se trouvaient pour la première fois sur la liste
des 1000 plus grandes fortunes. Et comble du ridicule, le journal présentait
cela commeservant la cause de l'égalité.
Il n'y a pas eu beaucoup d'articles dans les autres médias
sur la manière dont les super riches ont réussi à contourner la récession. Cela
ne peut être qu'un signe de nervosité quant à la réaction qu'une pareille
cupidité risque de provoquer dans la population.
Le Sunday Times a essayé, sans y croire vraiment,
d'apaiser les lecteurs en leur promettant des lendemains qui chantent:
"L'augmentation de la prospérité des riches devrait bientôt se faire
sentir dans les échelons inférieurs de l'échelle sociale. L'expérience montre
que lorsque les riches se sentent plus riches, ils se mettent à dépenser
davantage et alors il y a une reprise de l'activité économique dans son
ensemble."
Beresford ne s'encombre pas trop de faits historiques.
Depuis le gouvernement Tory dirigé par Margaret Thatcher dans les années 1980,
le dogme selon lequel la richesse des super riches ruisselle dans toutes les
classes sociales et finit par profiter aux classes laborieuses, porte le nom de
"trickle down"[effet de ruissellement]. C'est de la pure
propagande: laissez les riches faire ce qu'ils veulent, supprimez toutes les
règles au sein de l'entreprise ainsi que les règles commerciales qui ligotent
ceux qui génèrent la richesse et ils créeront assez de richesse pour tout le
monde, prétendaient les tenants de ce dogme.
Ce qui s'est réellement passé et qui a été mis en lumière en
2008 c'est que la richesse amassée par l'élite, principalement par la
spéculation et des méthodes criminelles, menace de détruire l'économie de pays
entiers ainsi que leur population. La richesse ne " ruisselle pas jusqu'en
bas" ("trickle down") bien au contraire, les nombreux milliards
de livres de renflouement accordés aux banques coulent dans la direction
opposée et inondent les plus riches.