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Québec solidaire se rapproche davantage du Parti québécois

Par Louis Girard
11 février 2012

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Une série de révélations parues dans les médias québécois démontre que Québec solidaire (QS), un parti qui se réclame de la gauche, est en fait entièrement orienté vers le parti de la grande entreprise qu'est le Parti québécois (PQ).

Les révélations portent sur les discussions secrètes qui sont en cours depuis plusieurs mois entre QS et le PQ en vue d'un pacte électoral, dans un contexte où le Parti québécois et tout le mouvement indépendantiste de la province sont en profonde crise.

Voyant que ces révélations viennent miner leur prétention à représenter une alternative aux partis traditionnels de l'establishment québécois, les dirigeants de QS ont cherché à en minimiser la portée.

Amir Khadir, l'unique député de Québec solidaire, a démenti les affirmations de Nicolas Girard, un député péquiste, qui a déclaré vers la fin janvier que Khadir avait « approch[é] la moitié du caucus du PQ (l'automne dernier) pour leur indiquer qu'il souhaite une alliance. » Khadir a répliqué que c'était plutôt deux péquistes qui l'avaient approché tout en admettant qu'il avait communiqué avec trois péquistes à l'automne pour les inviter à se joindre à QS.

Mais ce démenti n'est pas crédible. En automne dernier, Khadir avait lui-même réclamé un pacte avec le Parti québécois. « Si le PQ n'en veut pas, de François Legault et des libéraux », avait affirmé Khadir, « Québec solidaire n'en veut pas non plus. On dit [dans les comtés électoraux] où il y a des libéraux actuellement, on essaie de faire quelque chose. »

L'autre dirigeante de Québec solidaire, Françoise David, a aussi cherché à nier tout rapprochement entre QS et le PQ en vue des prochaines élections. Elle a déclaré à la mi-janvier qu'il « n'y a eu l'automne dernier et il n'y a présentement aucune négociation entre la direction de QS et celle du PQ quant à des pactes électoraux ».

Puis elle a ajouté : « Depuis notre fondation, nous avons cependant indiqué à maintes reprises notre ouverture à entendre d'éventuelles propositions de la direction péquiste. » David a beau nier telle ou telle négociation tactique avec le PQ, elle avoue que dès sa formation, Québec solidaire est stratégiquement orienté vers le Parti québécois.

Lors de la dernière année et particulièrement depuis la débâcle électorale du Bloc Québécois, le parti frère du PQ au niveau fédéral, QS a courtisé d'anciens députés du PQ qui avaient récemment quitté le parti et a développé ses liens avec divers groupes dissidents partisans de l'indépendance du Québec.

Quant au PQ, il a été prudent devant la main tendue de Québec solidaire. Il ne veut pas s'associer trop ouvertement à un parti qui se dit de gauche, car cela pourrait miner ses efforts de convaincre la grande entreprise qu'il est le meilleur véhicule pour intensifier l'assaut sur les conditions de vie des travailleurs.

En automne dernier, le PQ a envoyé Jean-François Lisée à titre d'émissaire afin de prendre le pouls de la direction de Québec solidaire concernant de possibles alliances. Lisée a déjà été conseiller des ex-premiers ministres péquistes Lucien Bouchard et Bernard Landry et est une personnalité très importante au sein du PQ. Si le PQ fait une offre à QS, il veut s'assurer qu'elle sera acceptée pour ne pas perdre la face.

QS dit qu'il veut pactiser avec le PQ pour défaire la droite, mais que représente le Parti québécois ? Tout autant que les Libéraux, c'est un parti de la grande entreprise. Lorsqu'il a été au pouvoir, le PQ est entré en conflit direct avec la classe ouvrière. En 1982-83, le gouvernement péquiste de René Lévesque a imposé de vastes coupes dans les contrats de travail des travailleurs du secteur public. Quant aux gouvernements péquistes de Lucien Bouchard et de Bernard Landry (1995-2003), ils ont éliminé des dizaines de milliers d'emplois en santé et en éducation.

Dans les dernières années, sous la pression de la classe dirigeante, le PQ s'est orienté encore plus vers la droite. Sous Pauline Marois, il a attaqué le gouvernement libéral de Jean Charest pour ne pas réduire le déficit provincial assez rapidement. Il multiplie aussi de plus en plus les appels chauvins, ayant réussi à faire pression sur le gouvernement libéral pour qu'il présente un projet de loi interdisant la prestation de services publics à des femmes musulmanes qui porteraient le niqab ou la burqa.

Québec solidaire prône l'illusion qu'il existe une différence autre que tactique entre le Parti Québécois et les autres partis de l'establishment politique québécois, le Parti libéral du Québec et la Coalition Avenir Québec. Mais c'est justement parce que le PQ a pu se présenter, avec l'appui de la bureaucratie syndicale, comme un parti « social-démocrate » ayant un préjugé favorable aux travailleurs, qu'il a pu jouer un rôle de premier plan dans l'assaut contre les travailleurs.

Comme le Parti québécois, QS soutient que la principale division dans la société canadienne est celle qui existe entre les fédéralistes et les souverainistes québécois, et non le gouffre entre l'élite patronale qui domine la vie économique et la classe ouvrière qui est exploitée par cette élite. Aujourd'hui, alors que le Parti Québécois est de plus en plus discrédité, QS cherche à raviver le programme réactionnaire d'une République capitaliste du Québec.

Québec solidaire compte en son sein divers groupes pseudo-socialistes, tel que Gauche socialiste, qui endossent entièrement le programme bourgeois de la souveraineté du Québec et lui donnent une aura de gauche.

Bernard Rioux, principal leader de Gauche socialiste et membre fondateur du site web Presse-toi à gauche, qui fonctionne comme un groupe de réflexion de l'ex-gauche petite-bourgeoise québécoise, s'est opposé à une alliance électorale entre QS et le PQ. Cependant, il écrit dans un article que « cela ne signifie pas que nous ne pouvons pas faire des alliances tactiques sur des objectifs partagés et précis autour de mobilisations précises. »

Lors d'un congrès de trois jours tenu en décembre, Gauche socialiste et d'autres pseudo-socialistes ont refusé de défier Khadir et David pour avoir violé une résolution adoptée en mars dernier par les membres de Québec solidaire qui stipulait que QS ne devait prendre part à aucune alliance électorale.

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