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Les pourparlers en vue d'une coalition en Grèce se poursuivent tandis que l'UE exige des mesures d'austérité

Par Christoph Dreier
11 mai 2012

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Les élections de dimanche dernier en Grèce ont constitué un référendum populaire sur les mesures d'austérité dictées par l'Union européenne. La coalition dirigeante précédente composée du PASOK et de Nouvelle Démocratie (ND), partis responsables de l'application des mesures d'austérité, n'a recueilli qu'un tiers des suffrages. De plus, près de 40 pour cent des électeurs n'ont pas pris la peine d'aller voter.

Les représentants de l'UE ont réagi à l'élection grecque en insistant agressivement pour que soient introduites les mesures d'austérité sans se soucier du sentiment populaire. Ils ont clairement fait entendre qu'ils n'accepteront pas de renégociation du pacte fiscal mais qu'ils préfèrerait voir le pays le pays expulsé de la zone euro.

« Si elle veut rester membre de la zone euro, la Grèce doit savoir qu'il n'y a pas d'alternative au programme de restructuration qui a été adopté, » a dit au journal Handelsblatt, Jörg Asmussen, membre du directoire de la Banque centrale européenne.

Le président de la commission européenne, José Manuel Barroso, a menacé le pays d'un « défaut de paiement désordonné » s'il n'acceptait pas les décisions de l'UE. Le président du parlement européen, Martin Schulz (du Parti social-démocrate allemand), a spécifiquement fait référence aux négociations de coalition : « Les partis grecs devraient être conscients qu'un parti stable qui respecte les accords est une condition préalable à tout nouveau soutien de la part des pays de la zone euro. »

Selon le Süddeutsche Zeitung, la troïka, qui rassemble la Commission européenne, la Banque centrale européenne et le Fonds monétaire international, a annulé sa visite prévue mi-mai à Athènes. Entre-temps, le Fonds européen de stabilité financière (FESF) a annoncé qu'il retiendrait un milliard d'euros sur la tranche de prêt prévue de 5,2 milliards d'euros et qui sera allouée jeudi.

L'UE a menacé que tout nouveau gouvernement, quelle que soit sa composition, devra se conformer à ses dictats. L'alternative est une faillite de l'Etat aux conséquences catastrophiques. Les retraites, les salaires et les prestations sociales ne pourraient plus être versés. L'expulsion de la zone euro aurait pour résultat une hyperinflation, anéantissant du jour au lendemain les économies et les salaires.

La manière dont les représentants de l'UE refusent de regarder les résultats des élections pointe en direction de formes gouvernementales dictatoriales et autoritaires. Ceci soulève la nécessité de la mobilisation de la classe ouvrière à travers l'Europe en opposition au patronat et à l'élite financière. Toutefois, aucun des partis ayant remporté dimanche des sièges au parlement n'est prêt à s'opposer aux exigences dictatoriales des banques. Au lieu de cela, des négociations ont lieu sur la manière de mettre en place un gouvernement stable dans l'intérêt de l'UE et de la classe dirigeante grecque.

Lundi on a demandé en premier à Antonis Samaras, président du parti conservateur Nouvelle Démocratie, de former un gouvernement. ND n'a émergé que de justesse comme le parti le plus fort, avec son pourcentage de votes chutant de 33,8 pour cent en 2009 à seulement 18,8 pour cent. Malgré ce quasi effondrement, il remplace le PASOK social-démocrate en tant que parti recueillant le plus de voix. En vertu de la loi antidémocratique du pays ceci signifie qu'il bénéficie de 50 sièges supplémentaires au parlement.

En conséquence, et bien que Nouvelle Démocratie ait perdu de la moitié de ses suffrages, le nombre de ses sièges au parlement est passé de 91 à 108. Ceci lui confère plus d'un tiers des 300 sièges et un droit de veto effectif sur n'importe quelle coalition gouvernementale. Les deux partis de l'ancienne coalition, ND et PASOK, tout en ayant été répudiés à l'élection et totalisant à peine 30 pour cent de voix à eux deux, contrôlent 149 des 300 sièges, soit une quasi majorité.

Samaras n'a pas vraiment cherché lundi à sérieusement persuader un autre parti de rejoindre le gouvernement. Au bout de quelques heures seulement, il a dit que ses efforts avaient échoué et a sollicité le président de demander au parti arrivé second de constituer le gouvernement. Ce parti est la Coalition de la Gauche radicale (SYRIZA), dirigée par Alexis Tsipras.

Mercredi soir, les médias ont rapporté que les ouvertures faites par Tsipras avaient échoué et qu'il transférait la responsabilité de la formation d'un nouveau gouvernement à Evangelos Venizelos du PASOK, le troisième plus fort parti. S'il échoue lui aussi, des négociations finales dirigées par le président Karolos Papoulias auraient lieu entre les représentants de tous les partis. Au cas où ces négociations échoueraient elles aussi, alors de nouvelles élections devraient se tenir, au plus tard le 17 juin.

Le fait même que Tsipras ait accepté le mandat de former un nouveau gouvernement est significatif. Il cherche à trouver un mécanisme politique pour contrôler la colère populaire grandissante tout en appliquant parallèlement les exigences de l'UE sur la base de quelques changements cosmétiques. C'est ce qu'indique sa volonté de rencontrer, au cours des négociations sur la constitution d'un nouveau gouvernement, le nouveau président français, François Hollande - qui s'est engagé à appliquer les coupes budgétaires en France.

Tsipras a cherché à rassembler une majorité de gauche comprenant SYRIZA, le Parti communiste (KKE) et Gauche démocratique (DIMAR), qui avait fait scission d'avec SYRIZA par la droite. Toutefois, pour obtenir une majorité, une telle coalition aurait besoin besoin du soutien du PASOK et des populistes droitiers Grecs Indépendants, scission de Nouvelle Démocratie.

Mardi, la secrétaire générale du Parti communiste, Aleka Papariga, a dit que le KKE ne voulait pas rejoindre une alliance avec SYRIZA. L'unique option restante pour Tsipras était de collaborer avec le parti conservateur Nouvelle Démocratie qui soutient résolument les mesures d'austérité et qui les a appliquées ces derniers mois en tant que membre du gouvernement sortant.

Suite au refus du KKE, Tsipras a proposé de coopérer à la fois avec ND et PASOK. Avant même les négociations de mercredi soir, il leur a demandé d'envoyer une lettre à la commission de l'UE pour annuler leurs engagements aux mesures d'austérité.

De plus, il a soumis un plan en cinq points comme base aux négociations pour la constitution d'une coalition. Les deux premiers points réclament la cessation de toutes les prochaines coupes sociales et attaques contre les salaires et les conditions de vie. Le troisième point cible l'immunité des ministres qui les protège de poursuites et le quatrième point exige une enquête sur le secteur bancaire. Il devrait aussi y avoir un moratoire sur le paiement des dettes dans l'attente d'une enquête internationale sur les causes de la dette souveraine grecque, a dit Tsipras.

Ce plan révèle les intentions de Tsipras. Durant la campagne électorale, SYRIZA avait déclaré vouloir revenir sur toutes les coupes sociales. A présent, Tsipras exige seulement que soient interrompues les coupes futures. L'orientation politique de SYRIZA est toutefois claire de par sa position sur l'UE. Le parti a, à plusieurs reprises, souligné ne vouloir en aucun cas accepter une sortie de l'UE.

La reconnaissance de l'UE a sa propre logique. Elle signifie la reconnaissance des dictats de la troïka. Alors que les représentants de l'UE refusent de voir les résultats d'un vote démocratique et menacent publiquement les députés élus, Tsipras veut s'asseoir à une table avec eux et renégocier les modalités des mesures d'austérité. Prétendre que ceci est possible est un exercice délibéré de duplicité.

Le fait que Tsipras veuille négocier avec ND et le PASOK montre que son principal souci est de former un gouvernement stable qui soit en mesure de faire passer les coupes requises contre les travailleurs. Il compte en cela, tout comme PASOK, sur les syndicats avec lesquels il a déjà eu des entretiens mercredi.

Cette approche obéit à la logique de toute l'évolution de SYRIZA et qui va de pair avec d'autres partis tels Die Linke en Allemagne ou Rifondazione Comunista en Italie, qui, tous deux, ont déjà été impliqués dans des gouvernements qui ont imposé des coupes sociales. SYRIZA a joué un rôle similaire dans des coalitions locales et régionales avec PASOK.

SYRIZA s'est appuyé sur des couches plus aisées d'universitaires et de la classe moyenne ce qui explique son score électoral traditionnellement faible. Lors de ces élections, le groupe a gagné les voix de vastes couches affectées par les coupes. Il est arrivé en tête à Athènes, au Pirée et à Thessalonique, les trois plus grands centres urbains. Selon le journal Süddeutsche Zeitung, la coalition a fait un bon score parmi les médecins dans les hôpitaux, les pharmaciens et avant tout les fonctionnaires qui votaient précédemment pour PASOK.

Il ne fait pas de doute que l'augmentation des voix pour SYRIZA exprime la profonde opposition à la contre-révolution sociale appliquée au cours de ces dernières années par l'UE et l'élite grecque. SYRIZA ne satisfera pas le moins du monde ces attentes. Tout gouvernement auquel il participera, sera rapidement confronté à une opposition massive de la part de la classe ouvrière.

(Article original paru le 10 mai 2012)

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