Il y a maintenant 70 ans, l’éruption de la Seconde
Guerre mondiale enclencha une série d’événements qui devaient entraîner
la mort de près de 70 millions de personnes. Durant les six années suivantes,
la guerre fut le théâtre d’une barbarie inimaginable : les horreurs du
front russe, la destruction de Tokyo et Dresde aux moyens de bombes
incendiaires, le massacre de six millions de juifs européens et la destruction
d’Hiroshima et de Nagasaki par la bombe atomique sont quelques événements
qui viennent immédiatement à la mémoire.
On dit souvent que la vérité est la première victime de la
guerre. Sept décennies plus tard, tous les organes officiels créant
l’opinion publique travaillent encore d’arrache-pied pour masquer
les causes de la guerre et les leçons que l’on devrait en tirer.
Contrairement aux mythes qui prévalent, ce n’était
pas une guerre de la démocratie contre le fascisme, pas plus que la Première
Guerre mondiale n’était une « guerre pour mettre fin à toutes les
guerres ». C’était une guerre impérialiste menée par les grandes
puissances capitalistes, tant « démocratiques » que fascistes, pour
la division du monde et ses ressources dans les intérêts du profit.
Après l’éruption de la Première Guerre mondiale,
Lénine avait mis en garde qu’à moins d’un renversement de
l’ordre capitaliste par la classe ouvrière dans une révolution
socialiste, d’autres guerres allaient inévitablement suivre. Il insista
que, toute « paix » entre les puissances impérialistes ne serait
qu’un intermède avant l’éruption du prochain conflit. Son
avertissement allait être confirmé.
La cause immédiate de la guerre fut l’invasion nazie
de la Pologne le 1er septembre 1939. L’année précédente, à
l’infâme conférence de Munich, le gouvernement britannique du premier
ministre Neville Chamberlain avait accédé aux demandes allemandes pour la
Tchécoslovaquie. Espérant que l’expansion de l’Allemagne allait se
limiter au centre de l’Europe, Chamberlain était revenu de Munich
déclarant qu’il avait négocié la « paix à notre époque ». Onze
mois plus tard seulement, il déclarait la guerre.
L’invasion de la Pologne avait clairement indiqué que
l’Allemagne ne cherchait pas qu’à améliorer sa position en Europe,
mais aspirait à devenir une puissance mondiale. Cela était une possibilité que
la Grande-Bretagne, en tant que principale puissance colonisatrice mondiale,
dominant le sous-continent indien ainsi que de vastes régions d’Afrique
et soutirant les ressources matérielles et financières de chaque coin du globe,
ne pouvait tolérer.
Un an avant l’éruption de la guerre, la Quatrième
Internationale était fondée. Elle entreprit la tâche de résoudre la crise de
direction de la classe ouvrière et préparer la révolution socialiste, sans
laquelle, comme le déclara la nouvelle Internationale, « toute la culture
de l’humanité est menacée de catastrophe ».
Les perfides directions de la classe ouvrière (les partis
sociaux-démocrates et staliniens) étaient directement responsables de
l’éruption de la guerre. La Révolution espagnole déclenchée en 1936
eut-elle été victorieuse, cela aurait entraîné une reprise des luttes
révolutionnaires à travers l’Europe qui auraient même menacé le régime
nazi apparemment puissant.
De la même façon, la grève générale de 1936 en France
eut-elle entrepris une lutte directe pour le pouvoir politique, elle aurait
altéré dramatiquement l’équilibre des forces. Mais ces deux mouvements
révolutionnaires furent étranglés par les leaderships staliniens et
sociaux-démocrates.
Ainsi, comme l’expliqua Trotsky, la bourgeoisie
« s’était convaincue qu’avec de tels « chefs
ouvriers » à sa disposition, elle pouvait faire n’importe quoi, même
procéder à un autre massacre de peuples ».
Dans un manifeste publié en mai 1940 alors que les armées
allemandes envahissaient la France, la Quatrième Internationale expliqua la
signification sociale fondamentale d’Hitler et du mouvement fasciste
qu’il dirigeait.
« Les gouvernements démocratiques qui en leur temps
ont salué Hitler comme un champion de la croisade contre le bolchevisme, en
font maintenant une sorte de Satan surgi à la surprise générale des profondeurs
de l'enfer et qui viole la sainteté des traités, des frontières, des règles et
des règlements. S'il n'y avait pas Hitler, le monde capitaliste fleurirait
comme un jardin. Quel mensonge misérable ! Cet épileptique allemand, avec
une machine à calculer dans le crâne et un pouvoir illimité entre les mains,
n'est pas tombé du ciel ni surgi de l'enfer : il n'est rien d'autre qu'une
personnification de toutes les forces destructives de l'impérialisme.
Exactement comme Gengis Khan et Tamerlan apparurent aux peuples pasteurs plus
faibles comme les fléaux destructeurs de Dieu, alors qu'en réalité, ils ne
faisaient qu'exprimer le besoin de toutes les tribus de pasteurs de plus de
terres à pâturage et de pillages des régions habitées, de même Hitler,
ébranlant jusqu'à leurs fondations les puissances coloniales, ne fait que
donner une expression plus achevée à la volonté de pouvoir impérialiste. »
La guerre a débuté comme un conflit européen, mais
s’est rapidement étendue à toute la planète. Au 19e siècle,
les puissances capitalistes ont fait compétition entre elles sur la base
d’un marché mondial qui s’élargissait. Mais, la Grande Dépression
et la contraction du marché mondial ont été suivies de la division de
l’économie mondiale en deux blocs rivaux.
Le Japon, voyant ses marchés d’exportation
disparaître, a cherché à sortir de son état de crise avec la conquête de la
Chine et l’établissement d’un empire en Orient. Les Etats-Unis,
cherchant à étendre leur influence dans le Pacifique, ne pouvaient accepter
cela et la guerre entre les deux pays était inévitable. L’attaque du
Japon sur Pearl Harbor en décembre 1941 n’a été que le détonateur d’une
guerre en préparation depuis dix ans.
Quant à l’impérialisme allemand, les
ressources de l’Europe centrale et de l’Europe du Sud-Est ne
suffisaient pas pour lui permettre de concurrencer la plus grande puissance
capitaliste, les Etats-Unis. L’invasion de l’Union soviétique qui
débuta le 22 juin 1941 avait pour objectif d’établir une base économique assez
large pour que l’empire allemand puisse soutenir sa position en tant que
puissance mondiale.
Les Etats-Unis avaient, eux, développé leur
puissance sur la base des vastes ressources du continent américain. Mais cette
fondation n’était déjà plus suffisante pour qu’ils puissent
maintenir leur position, comme l’avait démontré la Grande Dépression qui
avait frappé son économie de plein fouet. Les marchés du monde devaient s’ouvrir
aux exportations américaines, aux investissements américains et à la
technologie américaine pour assurer les profits américains. C’est ce qui
donna lieu à la politique de la « porte ouverte » des Etats-Unis. Cette
perspective était incompatible avec les tentatives de l’Allemagne et du
Japon de construire leurs empires tout comme elle entrait en conflit avec les
intérêts de l’empire existant de l’allié de Washington, la Grande-Bretagne.
Sur la base de sa capacité économique et de
la grande supériorité dont il jouissait par rapport à ses rivaux exténués, les Etats-Unis
ont pu stabiliser le capitalisme mondial à la fin de la Deuxième Guerre
mondiale. Le boum d’après-guerre et la Guerre froide avec l’Union
soviétique qui l’ont suivi ont formé un cadre dans lequel pouvaient se
résoudre les rivalités entre puissances impérialistes qui avaient explosé deux
fois en guerre mondiale en une trentaine d’années.
Aujourd’hui, les fondements de cet
équilibre d’après-guerre n’existent plus. L’éruption de la
plus grande crise économique et financière depuis la Grande Dépression crée de
nouveau les conditions pour transformer la concurrence sur les marchés mondiaux
en un conflit féroce de chacun contre tous.
La crise profonde du capitalisme américain et
son recours de plus en plus fréquent à la solution militaire pour contrecarrer
sa perte de puissance économique, la montée des nouvelles puissances et le
développement de l’appétit des puissances déjà existantes, tout cela
jette les bases d’un nouveau conflit impérialiste, qui sera encore plus
terrible que le dernier.
Il faut tirer les leçons. Ce n’est qu’en
renversant le système de profit capitaliste et en établissant une économie
socialiste mondiale planifiée, régulée rationnellement et démocratiquement pour
satisfaire les besoins humains, que la menace d’une guerre impérialiste
disparaîtra pour toujours. C’est la perspective du parti mondial de la
révolution socialiste, le Comité international de la Quatrième Internationale.
(Article original anglais paru le 3
septembre 2009)