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Le gouvernement libéral brise la grève des postiers

 

Au début du mois de décembre, à la demande du premier ministre Chrétien, le Parlement canadien a adopté une loi spéciale pour forcer le retour au travail des 45 000 postiers en grève depuis deux semaines. La grève a paralysé le service postal à travers le pays et coûté des millions aux entreprises chaque jour.

La loi impose des augmentations salariales de $1000 de moins sur trois ans que la dernière offre salariale de Poste Canada. Les autres questions en litiges vont être envoyées en médiation et si après 90 jours les parties ne se sont pas entendues le médiateur aura le pouvoir d'imposer les termes du contrat.

A Toronto, des employés ont occupé les bureaux de Postes Canada pour protester contre la loi de retour au travail, et à Halifax, des grévistes ont ralenti le trafic aérien à l'aéroport et bloqué l'accès d'un pont près de Darmouth. Cependant, le président du Syndicat Canadien des Travailleurs des Postes (SCTP), Darrell Tingley, a indiqué que la direction officielle n'allait pas défier la loi.

Cette grève est la dernière en liste d'une série de luttes importantes menée par la classe ouvrière au Canada. Deux semaines plus tôt, 126 000 professeurs ontariens étaient en grève, la plus importante grève de professeur de l'histoire en Amérique du Nord.

Les employés de Poste Canada étaient sans contrat de travail depuis le 31 juillet 1997. Le plan de restructuration des opérations de Poste Canada, visant à sauver $140 millions sur une période de cinq ans, était au coeur du litige. L'une des propositions vise à prolonger les routes et le nombre de lettres que doivent livrer les facteurs, un changement qui va provoquer l'élimination de près de 4 000 emplois à temps plein et préparer le terrain pour la privatisation du service postal.

La grève a éclaté en dépit des efforts des dirigeants du SCTP pour prolonger la période de négociation. Lorsque la direction de Poste Canada a commencé à imposer des mises à pied, des dizaines de grèves spontanées ont éclaté. Dans une autre provocation, le négociateur en chef de Poste Canada a frappé le négociateur syndical en face d'un journaliste.

Les négociations ont repris le 24 novembre sous les auspices d'un médiateur fédéral, Chrétien ayant décidé de ne pas immédiatement tenter de forcer un retour au travail, préférant compter sur la direction syndicale pour mettre un terme au conflit.

La direction du Nouveau Parti démocratique (NPD) a, dès le début, refusé de divulguer sa position face à une loi de retour au travail. Alexa McDonough, chef du NPD, s'adressant aux journalistes, a dit: « Comment un législateur responsable peut-il faire des commentaires sur sa position concernant un projet de loi qu'il n'a même jamais vu ? »

Le gouvernement a adopté des lois de retour au travail en 1991 et en 1987. En 1978 le dirigeant de l'époque du SCTP, Jeau-Claude Parrot, avait défié la loi et passé deux mois en prison.

Contrairement aux grèves précédentes, Poste Canada n'a pas tenté d'engager des briseurs de grève. Pour sa part, le SCTP n'a rien fait pour élargir la grève ou encourager des actions militantes comme le piquetage de masse. Le congrès de la Fédération du travail de l'Ontario, tenue à Toronto durant la seconde semaine de la grève à Poste Canada, n'a pris aucune action en relation avec la grève, et n'a pas non plus tenté de lier cette grève à la lutte en cours contre les compressions budgétaires imposées par l'actuel gouvernement conservateur ontarien de Mike Harris.

Plusieurs des questions soulevées par le conflit à Poste Canada sont similaires à celles soulevées par la grève des travailleurs de la United Parcel Service (UPS) l'été dernier aux États-Unis. Des 45 000 travailleurs de Poste Canada, 18 000 sont engagés à temps partiel même s'ils travaillent des semaines de 40 heures. Ces travailleurs ont généralement des conditions de travail inférieures, comme par exemple, des routes plus longues. Bien que les temps partiels aient le même salaire horaire que les employés à temps plein, ils n'ont pas de sécurité d'emploi, pas d'avantages sociaux et sont sur appel 24 heures sur 24.

La restructuration de Poste Canada a commencé en 1986 sous le régime conservateur de Mulroney et a continué sous les libéraux. La restructuration vise à faire de Poste Canada une entreprise profitable selon les critères de l'entreprise privée. Des appels à la privatisation ont été lancés dans le Parlement, mais le gouvernement chrétien a, jusqu'à maintenant, refusé d'agir en ce sens. Un récent rapport, préparé pour le gouvernement, recommandait fortement à Poste Canada d'abandonner le service du courrier pour concentrer ses activités sur le service de livraison postale.

La direction de Poste Canada insiste sur le fait qu'elle ne peut plus demeurer compétitive face à la concurrence croissante du secteur privé, sans augmenter la flexibilité du travail. Un récent article publié dans le Toronto Star déclarait: « Poste Canada lutte pour devenir une entreprise rentable capable d'être compétitive dans l'ère des e-mail, du courrier privé et de la technologie moderne. »

Beaucoup de compagnies ont tenté de contrecarrer les effets de la grève en faisant affaire avec des compagnies de courrier privées. Les compagnies qui vendent par le biais du service postal, les organismes de charités, les maisons de publication et les entreprises de cartes de souhait ont été les plus touchées par la grève. La grève a coûté 32 millions par jour.

La Presse Ouvrière a discuté avec Adrien Dupuy, un travailleur en grève de Poste Canada à Montréal. Il a dit: « La compagnie est en train de restructurer les routes. Il y a cinq ans, elle a changé les routes illégalement. Elle a perdu en cour, mais durant deux ans elle a sauvé beaucoup d'argent en salaires. »

« Depuis des années que la compagnie coupe. Maintenant elle se prépare à éliminer 4 000 emplois et à augmenter de 30% la charge de travail des employés restants. Les accidents de travail augmentent mais les accidentés ne peuvent plus rester à la maison, ils sont envoyés au centre de changement d'adresse. »

« Ils veulent privatiser la compagnie. Les coupures sont faites parce qu'ils veulent la vendre. 20 % des employés ont déjà été mis à pied. Ils veulent en éliminer un autre 10 %. Au bureau de poste où je travaille, par exemple, nous ne sommes plus que 25 employés sur 37. Ils ont aussi fermé beaucoup de bureaux de postes dans les régions à l'extérieur de Montréal. »

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