Les syndicats français discutent la vague de licenciements après l’élection présidentielle

A l’occasion de discussions entre le gouvernement PS (Parti socialiste) et les syndicats, les représentants syndicaux ont annoncé que de nombreuses fermetures d’usines étaient prévues avec pour conséquence la perte de dizaines de milliers d’emplois.

La CGT (Confédération Générale du Travail) a dit que 46 firmes prévoyaient d’arrêter leurs opérations, menaçant directement quelques 45.000 emplois. Selon ce syndicat, le nombre total de pertes directes et indirectes d’emplois résultant de ces fermetures serait d’environ 90.000.

Le ministre du Travail du gouvernement intérimaire Michel Sapin fit ce commentaire : « C'est un chiffre qui est réaliste… Je ne peux pas vous dire ça à 100 ou à 1.000 ou même à 10.000 près mais il y a des inquiétudes réelles, il y a des urgences dans un certain nombre d'entreprises, et à ces urgences-là, il faut s'attaquer en construisant l'avenir dans le dialogue », a-t-il dit. Parlant du taux de chômage il ajouta : « Il m'étonnerait que l'évolution soit bonne ».

Ces révélations publiques soudaines sont le résultat de discussions en continu entre les associations patronales et les directions syndicales. Comme l’a dit le représentant de la CGT Mohammed Oussédik au journal Le Parisien : « Nous avons réuni nos fédérations la semaine dernière pour pointer tous les dossiers en cours dans toutes les régions de France »

La liste qui suit ne fait état que d’une fraction des suppressions d’emplois envisagées.

  • Dans l'industrie automobile, PSA, le plus grand producteur automobile français, envisage de supprimer 6.000 emplois en Europe, principalement en France. A Aulnay-sous-Bois, ville au Nord-Est de Paris, 3.300 travailleurs craignent la fermeture de leur usine quand finira la fabrication de la Citroën C3. L'avenir de l'usine de Valencienne, dans le Nord, est incertain.
  • Renault, envisage des licenciements dans ses usines de Maubeuge et de Douai (Nord) où sont produits les modèles Scénic et Kangoo. L’usine General Motors de Strasbourg où travaillent un millier de salariés est, elle aussi, menacée
  • L’usine d’Arcelor Mittal à Florange (Moselle) est menacée de fermeture avec la perte de 5 000 emplois dont 3 000 ayant des contrats CDI.
  • Air France a annoncé un plan de transformation prévoyant des suppression pouvant aller jusqu’à 5000 emplois. D'autres suppressions d'emplois sont envisagées dans l'aviation et le transport, y compris la Société Nationale Corse-Méditerranée (SNCM). Privatisée en 2006 après négociation avec la CGT pour devenir une filiale de Veolia, elle menace à présent de supprimer 800 emplois sur 2 000.
  • La grande distribution envisage aussi des suppressions d’emplois à grande échelle. Selon des informations du syndicat Force Ouvrière, Carrefour, Leclerc, Casino, Intermarché, Système U, entre autres, prévoient l’élimination d’un total de 12.000 emplois.
  • Trois grandes banques ont annoncé la suppression à cours terme de 6.000 emplois. Le Crédit Agricole veut supprimer 2 350 emplois sur 160 000 dans le monde, dont 850 en France, la Société Générale 1.580 postes dont 880 en France et la BNP 1.400 dont 370 en France.
  • L’industrie énergétique (la raffinerie LyondellBasell), le nucléaire (Areva), la téléphonie, le tourisme, la distribution de la presse sont aussi touchés.

Après l'élection de François Hollande, les annonces de plans de licenciements se sont multipliées dans de nombreux secteurs. Elles avaient été maintenues sous le boisseau, le temps de la campagne, pour faciliter l’élection d’un gouvernement d’austérité de « gauche ». On a déjà recensé 106 fermetures d’usines pour les quatre premiers mois de 2012 contre 66 sur la même période en 2011. Depuis le début de l'année 2012, on assiste à la perte nette d'une dizaine d'usines par mois.

Des chiffres publiés par Le Figaro font état de la perte prévue de 307.000 emplois sur les deux prochaines années, ce qui porterait le taux de chômage en France à 10.6 pour cent.

Alors qu’Hollande tente de remporter l’élection législative du 17 juin pour constituer à long terme un gouvernement dirigé par le PS, ce parti et ses alliés essaient de présenter Hollande et l’actuel gouvernement intérimaire comme leur meilleur chance d’empêcher les licenciements. Les syndicats en ont appelé à Hollande pour qu’il sauve tous les emplois actuellement menacés de suppression.

Hollande a nommé dans son gouvernement d'intérim Arnaud Montebourg ministre du « Redressement productif », un ministère nouvellement créé et dont la mission selon le Journal officiel est de « préparer et mettre en œuvre la politique en matière de compétitivité de l'économie française … » Montebourg fait actuellement le tour des usines menacées de fermeture et de licenciements à la recherche de soutien pour Hollande.

Cette promotion est d’une entière mauvaise foi. Le but de Hollande est d’extraire le maximum de soutien électoral en échange de vagues promesses d’aide aux usines ciblées ; après les élections il se mettra à imposer des concessions pour justifier tout soutien financier qu’il offrirait.

Malgré les immenses fortunes amassées par les parasites financiers dans la classe dirigeante, ont dira aux travailleurs qu’ils ne peuvent garder leurs emplois que s’ils acceptent des réductions de salaire et des prestations sociales correspondant aux conditions de pauvreté dictées par le marché du travail au niveau mondial. La classe ouvrière ne peut défendre ses emplois qu’au moyen d’une lutte de classe contre le capitalisme, dirigée en France contre le Parti socialiste et ses alliés politiques des autres partis bourgeois « de gauche » et de la bureaucratie syndicale.

Montebourg lui-même a très nettement dit qu’il n’avait pas l’intention de se servir des ressources de l’Etat pour défendre le niveau de vie des ouvriers. Durant sa visite du 25 mai à l’usine Fralib près de Marseille, elle aussi menacée de fermeture, il a déclaré : « Nous ne souhaitons pas soutenir artificiellement des entreprises qui seraient condamnées par avance. »

C’est aussi l’opinion régnant dans le PS et les autres partis bourgeois “de gauche”. Dans un article du 28 mai intitulé « Mission: sauver une industrie française en perdition » Le Monde du 28 mai cite ainsi des dirigeants socialistes anonymes parlant de Montebourg : « Il risque de devenir le ministre des usines qui ferment. »

Quant aux syndicats qui ont soutenu Hollande dans la récente élection présidentielle, il est clair à présent qu’ils l’ont fait ayant une parfaite connaissance des pertes d’emplois continuelles et du caractère anti-ouvrier des projets du PS.

Un de ces projets est la nouvelle loi que le gouvernement Hollande veut faire passer cet été au nom de la « lutte contre la délocalisation ». Elle ferait que les propriétaires d’entreprises à la recherche d’une rentabilité accrue hors de l’hexagone seraient légalement tenus de les vendre à un repreneur censé poursuivre l’activité en France. Cette loi qui ne protège pas les salaires ni les conditions de travail est essentiellement une mesure protectionniste. Elle ne remet pas en question la propriété de l’entreprise, ni n’imposera de conditions au « repreneur » qui rendra l’entreprise restant en France « concurrentielle », sur le dos des salariés.

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