Le gouvernement français créé une banque publique pour les PME

Le gouvernement français du Parti socialiste a annoncé le lancement de sa Banque publique d’Investissement (BPI) pour aider les petites et moyennes entreprises à développer l’« innovation » et être compétitives sur les marchés d’exportation mondiaux.

Etant donné que les banques privées refusent le financement des petites entreprises, le gouvernement utilisera des fonds publics tout en poursuivant la réduction des dépenses publiques en vue d’atteindre d’ici 2017 l’objectif du déficit de 3 pour cent seulement du produit intérieur brut (PIB) fixé par l’Union européenne (UE).

La BPI sera opérationnelle en janvier prochain. Son président, Jean-Pierre Jouyet, a immédiatement fait savoir que l’objectif de la banque n’était pas de sauver les emplois. Dans une réponse à la question de savoir si la banque financera la production de l’usine sidérurgique de Florange, dans l’Est de la France, où 600 emplois sont menacés, Jouyet a dit que la banque ne servait pas à financer les « canards boiteux. »

Par contre, le gouvernement est intervenu à hauteur de 7 milliards d’euros pour secourir une autre banque, la Banque PSA Finance (BPF), qui fait partie du groupe automobile PSA-Citroën et qui finance les crédits accordés aux acheteurs de voitures. PSA, qui licenciera 8.000 travailleurs avec la fermeture de son usine d'Aulnay-sous-Bois, a obtenu le feu vert de l’Etat pour lancer une attaque contre les emplois et encourager la compétitivité industrielle. L’argent était indispensable au sauvetage de BPF qui avait dû faire face à la menace d’une dégradation de sa note par les agences de notation.

En contrepartie, PSA a accepté de réduire de quelques centaines le nombre licenciements en autorisant des membres de la direction syndicale à participer au conseil de surveillance de BPF. Telle a été l’une des exigences formulée par le dirigeant de la CGT, Bernard Thibault, dans le but de faciliter une plus grande participation du syndicat aux conseils d’administration des principaux groupes.

La BPI est une extension du précédent Fonds stratégique d’Investissement (FSI) établi par l’ancien président de droite, Nicolas Sarkozy. Elle est dotée d’un capital de 42 milliards d’euros, deux fois celui de FSI, afin de servir « d’outil offensif », aux dires du ministre de l’Economie, Pierre Moscovici.

Le premier ministre Jean-Marc Ayrault a comparé le rôle de la BPI à celui de la banque publique allemande KfW (Kreditanstalt für Wiederaufbau) qui a distribué, depuis 2009, 14 milliards d’euros à quelque 20.000 entreprises. Des responsables syndicaux siègent au comité national d’orientation aux côtés des employeurs pour proposer des domaines d’investissement dans des entreprises de tailles moyenne.

La banque BPI sera lancée dans une tentative désespérée de stimuler l’industrie française qui depuis 1990 a perdu près de la moitié de sa part du marché mondial en chutant de 6,2 pour cent à 3,6 pour cent du commerce mondial. Le déficit commercial de la France a atteint un record de 73 milliards d’euros en 2011. Le gouvernement français vise à accroître la compétitivité industrielle en tirant vers le bas les salaires et les dépenses sociales – notamment les cotisations patronales qui financent les dépenses sociales.

Cette politique est liée à une campagne de protectionniste chauvin pour acheter des produits « fabriqués en France », et menée par le ministre du Redressement productif, Arnaud Montebourg. Montebourg s’est insurgé contre des smartphones fabriqués à partir de pièces produites en Chine par Foxconn pour le compte d’Apple, Nokia et Sony. La France et l’UE, a-t-il dit, doivent « restrei[ndre] les importations » fabriquées en Chine et qui sont, dit-il, fondées sur des « entreprises esclavagistes. »

La campagne menée sous le slogan « fabriqué en France » est une fraude réactionnaire, compte tenu surtout que près de la moitié des pièces des produits « fabriqués en France » sont elles-mêmes d’origine étrangère.

L’Observatoire français des Conjonctures économiques (OFCE) a présenté le 18 octobre ses perspectives de 2013 pour la France. Il prévoit une hausse du chômage à un taux historique de 11 pour cent et une croissance économique nulle. Le 9 septembre, le président François Hollande avait déclaré que la France « devait inverser la courbe du chômage d’ici un an. »

En même temps que le PS contribue à imposer l’austérité à la classe ouvrière grecque, il laisse le chômage grimper en flèche en France.

La liquidation judiciaire de la raffinerie Petroplus près de Rouen a été annoncée mardi dernier avec à la clé la perte de 550 emplois.

Selon le quotidien l’Humanité, qui est proche du Parti communiste français, les syndicats dirigés par la CGT sont à la recherche d’un nouvel investisseur pour reprendre l’usine : « On a parlé des repreneurs potentiels, NetOil (dont le siège est à Dubai, NDLR) et Alafandi Petroleum Group (APG, basé à Hong Kong), » a annoncé Vincent Nicolas de la CGT.

« On a rappelé ses devoirs à Hollande [le président], » a-t-il dit en promettant que « l’accompagnement du gouvernement va être très fort. » Les syndicats chez Petroplus ont plaidé pour que la banque BIP intervienne, « On a besoin d’un pour cent des 42 milliards de la BPI pour moderniser l’outil qui produira 8 pour cent des besoins de raffinage en France, » a dit Vincent.

L’équipementier en télécommunications Alcatel-Lucent a annoncé la semaine passée la suppression de 5.500 emplois dans le monde. En Europe, 3.300 postes doivent être supprimés dont 1.430 en France ; l’usine de Vélizy employant 2.500 personnes est condamnée à la fermeture en 2014. L’unique plan dont dispose le gouvernement au milieu de ce carnage économique et social est de proposer cyniquement des recherches généralement infructueuses de repreneurs potentiels.

Cette politique est soutenue par tous les syndicats au nom de la sauvegarde de l’industrie française. Le résultat est une augmentation des marges bénéficiaires de l’élite dirigeante et un nivellement mondial vers le bas dans les pays qui se font concurrence pour proposer la main d’oeuvre la moins chère.

(Article original paru le 25 octobre 2012)

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