France: Des groupes d'autodéfense et des manifestations d’extrême-droite ciblent les Roms

A Marseille un groupe d'autodéfense et à Lille une manifestation d’extrême-droite ont ciblé des campements de Roms tandis que se poursuit la persécution des Roms par le gouvernement français du Parti socialiste.

Vendredi, 28 septembre, un groupe de 30 riverains a forcé les Roms à abandonner un campement à la cité des Créneaux à Marseille – l’un des quartiers les plus pauvres de la ville et peuplé majoritairement d’immigrés. Le campement a été incendié. Sur les lieux, des journalistes ont pris des photos de lits et d’autres meubles brûlés.

Ce groupe d'autodéfense avait contacté les autorités locales avant de procéder à la destruction du campement. Selon la maire socialiste de l’arrondissement concerné, la sénatrice Samia Ghali, « Des habitants sont venus me voir jeudi matin, ils étaient excédés par la présence des Roms. »

Cependant, la police de Marseille ne les a pas retenus et des rapports de police établis après les faits disent qu’aucune violence n’a été exercée durant l’expulsion.

Samia Ghali fait campagne sur des thèmes sécuritaires droitiers. Le 6 août, elle avait demandé que l’armée française intervienne à Marseille pour réprimer le trafic des stupéfiants et proposé que des jeunes chômeurs sans diplômes soient envoyés à l’armée. Le 6 septembre à l’Elysée, ces commentaires auraient suscité des discussions au niveau ministériel parmi les responsables PS.

Le 29 septembre, à Cysoing dans la banlieue de Lille quelque 700 habitants menés par les responsables locaux ont défilé contre l’arrivée de Roms dans la ville. L’un des manifestants, qui a affirmé être un ancien soldat, a dit que s’ils arrivaient dans la ville, ils seraient chassés comme à Marseille qui a créé un précédent.

Une contre-manifestation plus petite a été organisée et des passants ont qualifié la manifestation de « raciste » ou de « fasciste ».

La manifestation à Cysoing se produit au moment où les autorités du PS à Lille cherchent à trouver de nouveaux logements pour plusieurs centaines de Roms qu’elles ont expulsés d’autres campements de la région. Jeudi, deux camps Roms près de Lille ont été démantelés. Le campement de Hellemmes, qui abritaient entre 150 et 200 personnes, a été évacué au petit matin par un convoi de police escorté par les CRS. La communauté urbaine de Lille (LMCU, Lille Métropole Communauté urbaine) dont Martine Aubry est la première secrétaire, se partage la propriété des sites avec l’Etat français. Elle aurait intenté une action en justice pour démanteler les camps.

Le gouvernement a pour projet d'installer les Roms dans des soi-disant « villages d’insertion » où ils seraient obligés de vivre dans des logements préfabriqués très bon marché en étant surveillés par les forces de sécurité de l’Etat. Selon Le Monde, il existe cinq villages de ce type à Lille et trois autres sont en construction. Les soi-disant « villages d’insertion » sont des ghettos qui ne disent pas leur nom.

L’explosion d’agissements racistes contre les Roms est un réquisitoire politique contre le gouvernement PS du président François Hollande et les forces petites bourgeoises de « gauche » telles le Front de Gauche et le Nouveau Parti anticapitaliste (NPA) qui avaient appelé à voter pour Hollande lors des élections de mai dernier. Une fois au pouvoir, le PS a poursuivi la politique de l’ancien président conservateur, Nicolas Sarkozy, consistant à cibler les Roms pour les expulser des campements et les déporter en masse. Il porte la responsabilité politique pour ces faits.

Le PS recourt à cette chasse aux sorcières pour détourner la colère de masse contre l’austérité, la hausse du chômage et des vagues de licenciements et de fermetures d’usines.

Les Roms sont des citoyens de l’Union européenne (UE) et souvent français. L’on estime qu’entre 15.000 et 20.000 Roms vivent dans des campements situés en bordure des grandes villes françaises, dont près de 4.000 à Paris. Durant la Deuxième Guerre mondiale, ils furent internés par le régime fasciste de Vichy en France. La commissaire européenne à la Justice, Viviane Reding, avait comparé les expulsions de Sarkozy aux déportations qui eurent lieu durant la Deuxième Guerre mondiale et avait menacé de poursuivre en 2010 la France devant la Cour de justice européenne, mais elle s’était rétractée.

La brutalité de la populace et les protestations contre les Roms révèlent au grand jour le cynisme des affirmations du PS de ne démanteler les campements que parce qu’ils constituent un risque pour la santé publique. Au début de l’année, durant la campagne présidentielle toutefois, Hollande avait écrit aux organisations de défense des droits des Roms en leur promettant que sous son gouvernement des solutions alternatives seront offertes en cas de démantèlement d’un campement insalubre.

Ceci n’était qu’une couverture politique pour une campagne raciste qui est en train d’attiser une haine anti-Roms et des violences extrajudiciaires et qui se font avec un soutien officiel tacite.

Les incidents survenus à Marseille et à Lille font suite à d'autres déclarations anti-Roms du gouvernement. Le ministre de l’Intérieur, Manuel Valls, a fait remarquer mercredi dans un communiqué que les décisions de justice d’évacuation de camps illégaux seraient exécutées avec « fermeté ». Des campements insalubres sont inacceptables a-t-il dit, en ajoutant qu’ils représentaient une menace pour le « vivre ensemble » dans les régions ouvrières où ils sont souvent implantés.

Le 31 juillet, il déclarait au micro d’Europe1 : « Les préfets ont pour mission de démanteler les camps de Roms uniquement « quand il y a eu une décision de justice. Les choses sont simples. Oui, quand il y a une décision de justices, il y aura démantèlement de ces campements. »

Le 21 septembre, Valls s’était rendu, en compagnie de la garde des Sceaux, Christiane Taubira, dans la région de Ghalia à Marseille – les 15ème et 16ème arrondissements –. Ils ont tous deux tenus des discours sécuritaires devant la mairie de Ghali. Taubira a déclaré : « Il faut que ça s’installe dans les têtes que l’Etat ne s’en va pas, que l’Etat est revenu, » à Marseille.

Une semaine après que Taubira a déclaré que l’Etat était « revenu » à Marseille, un groupe d'autodéfense attaquait un campement de Roms. Ceci n’a cependant pas suscité la moindre critique de la part du gouvernement. Au contraire, les autorités de Marseille ont demandé le 30 septembre que les Roms expulsés de la cité des Créneaux soient évacués de façon permanente.

Le caractère de l’autorité d'Etat que le PS apporte à Marseille est révélé par le fait qu’il est compatible avec la violence extrajudiciaire pratiquée par la populace droitière. Après avoir succédé à Sarkozy, le PS est en train d’intensifier ses attaques contre les droits démocratiques fondamentaux.

Entre-temps, les expulsions des Roms par la police française se poursuivent. Au cours du weekend, 240 Roms d’Europe de l’Est ont été embarqués à Lyon dans un avion en partance pour Bucarest, après que trois camps ont été éliminés dans la région lyonnaise, affectant plus de 200 Roms. Les organisations de défense des Roms ont dit à la presse, que ceci se produit après des mois de pression concernant les campements et les évictions et que ces rapatriements volontaires sont des expulsions déguisées.

Au début de la semaine passée, un campement de 150 personnes à Vaulx-en-Velin et un campement de 100 personnes à Villeurbanne, tous deux situés dans la banlieue lyonnaise, ont été démantelés par la police. Cinquante prétendus squatters se trouvant près du camp Rom deVilleurbanne ont également été expulsés. Ces familles seraient actuellement en train d'errer dans les rues de la région métropolitaine de Lyon alors que la police les empêche de s’installer quelque part.

Mercredi, après le dernier démantèlement de campements Rom dans les banlieues de Paris, une expulsion a eu lieu dans le 19ème arrondissement.

(Article original paru le 2 octobre 2012)

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