Le Front de Gauche promeut la guerre au Mali

Le Front de Gauche (PG) soutient la décision du président François Hollande de lancer une guerre contre le Mali. Le Front de Gauche, coalition comprenant le Parti communiste français stalinien (PCF), le Parti de Gauche (PG) de l’ancien ministre du Parti socialiste, Jean-Luc Mélenchon, et d’anciens membres du Nouveau Parti anticapitaliste (NPA) pabliste, avait soutenu Hollande et son Parti socialiste (PS) lors des élections en 2012.

Le Front de Gauche et ses alliés politiques sont spécialistes dans la formulation de critiques cyniques et limitées de la politique du gouvernement français, critiques qui ne dépassent aucunement les limites de la politique capitaliste et les débats de stratégie dans les milieux dirigeants diplomatique et militaires. Tout en se présentant comme des critiques de Hollande, ils sont toutefois les plus fervents défenseurs de l’impérialisme français.

Mélenchon dont la campagne présidentielle avait été louée par l’ensemble de la « gauche » petite bourgeoise européenne, a formulé des critiques tactiques de la décision de Hollande d’entrer en guerre pour soutenir la junte malienne réactionnaire du capitaine Amadou Sanogo à l’encontre des rebelles touaregs et islamistes. Il a dit, « En décider seul, sans en saisir préalablement ni le gouvernement ni le parlement, est condamnable. » S’exprimant sur France Info, il a réclamé une plus grande participation africaine à la guerre : « Puis-je poser la question : il n’y a pas d’armée qui soit au niveau dans cette zone ? Il n’y a pas un pays qui s’appelle l’Algérie ? C’est le rôle des Africains [d’agir], les Africains sont des adultes. Nous sommes en train de reprendre l’habitude d’intervenir par ci par là. » Ces critiques sont à la fois creuses et cyniques. Le parlement qui est dominé par le PS, aurait soutenu la guerre s’il avait été consulté. En fait, comme les députés du Front de Gauche l'ont rapidement fait savoir, le Front de Gauche lui-même la soutenait pleinement.

Appelant d’autres pays africains, et notamment le brutal régime algérien, à fournir de la chair à canon pour la guerre de la France, Mélenchon est en train de s’engager dans un débat actuellement en cours sur la stratégie impérialiste. Il est significatif de noter qu’en dépit du caractère anti-américain de ses rassemblements et de son matériel de propagande, le Front de Gauche reprend les positions de Washington et notamment celles du Département d’Etat américain.

Dans les pages du New York Times, l’ancienne ambassadrice américaine au Mali, Vicki Huddleston, a exposé plus franchement que Mélenchon les raisons pour lesquelles Paris et Washington veulent l’aide de l’Algérie dans cette guerre. Huddleston écrit : « L’Algérie est le seul pays sur le continent disposant d’une capacité militaire, d’officiers chevronnés, d’une expérience de la lutte contre le terrorisme et d’une proximité géographique pour prendre la relève de la France dans le rétablissement de la paix au Mali. Les dirigeants militaires de l’Algérie connaissent les tactiques des extrémistes ainsi que leurs chefs. Elle les a vaincus dans une guerre civile qui a duré de 1991 à 2002 et a eu pour résultat que les extrémistes ont monté des opérations terroristes dans le Nord Mali. L’Algérie a un devoir moral d'agir mais si elle continue de rester en marge, alors le Maroc ou un autre pays d’Afrique du Nord devraient monter au créneau, avec le soutien du Niger, de la Mauritanie, du Mali et du Tchad, qui, comme l’Algérie, combattent al Qaïda au Maghreb islamique depuis huit ans. »

Les députés du Front de Gauche ont soutenu avec enthousiasme la guerre de Hollande lors du débat sur la guerre au Mali qui s’est tenu le 16 janvier à l’Assemblée nationale. Leur rôle a été de se faire l’écho de tous les mensonges réactionnaires avec lesquels le gouvernement Hollande justifie l’intervention militaire de la France au Mali.

Le député PCF, André Chassaigne, qui avait brièvement rivalisé avec Mélenchon pour devenir le candidat présidentiel du Front de Gauche, a dit : « Une intervention internationale était urgente et nécessaire pour stopper l’offensive des fanatiques islamistes. »

Ces arguments pro-guerre ont été plus longuement élaborés par le député PCF François Asensi. Celui-ci a dit : « La position des députés du Front de Gauche, communistes et républicains, est claire : abandonner le peuple malien à la barbarie des fanatiques aurait été une erreur politique et une faute morale. La non-intervention aurait été la pire des lâchetés. »

Ce passage reflète la perspective de toute une couche de la « gauche » bourgeoise européenne issue de milieux stalinien ou petit bourgeois. Ils considèrent instinctivement les sales guerres impérialistes de la France comme un devoir moral et un acte de courage politique. Leurs dénonciations de l'islamisme puent l'hypocrisie politiquement motivée, tout comme leur approbation de l'intervention militaire minimise l'histoire catastrophique des guerres impérialistes françaises en Afrique.

Les éléments djihadistes et ceux liés à al Qaïda qui sont actuellement actifs au Sahel étaient des alliés majeurs de la France, des Etats-Unis et de tous les membres de l’OTAN lors de la guerre menée en 2011 contre la Libye pour le renversement du colonel Mouammar Kadhafi. A présent, des forces réactionnaires similaires sont soutenues en Syrie par la France et les Etats-Unis pour évincer le président Bachar al-Assad. Le Front de Gauche avait néanmoins soutenu la guerre en Libye, tout comme il soutient la guerre impérialiste par procuration menée en Syrie sous le prétexte de la défense des « droits humains. »

La crise au Mali résulte directement de la guerre libyenne. Après la chute de Kadhafi, des Touregs lourdement armés qui avaient combattu aux côtés des soldats de Kadhafi sont rentrés au Nord du Mali et ont aidé les groupes rebelles des Touaregs du Nord du Mali, tel le Mouvement national de Libération d'Azawad (MNLA), à vaincre l'armée malienne. La chute du Nord du Mali a provoqué une crise politique dans la capitale Bamako et un coup militaire a renversé le Président Amadou Toumani Touré en Mars 2012. Au début, Paris a tenté d'évincer le gouvernement militaire du capitaine Amadou Sanogo, qui s'est vu obligé de céder le pouvoir à un gouvernement intérimaire. Cependant, finalement Paris a décidé de soutenir la junte de Sanogo, qui a évincé le gouvernement intérimaire et qui joue à présent un rôle dominant à Bamako, malgré sa grande impopularité.

Un point majeur de l'intervention d'Asensi à l'Assemblée nationale a été de demander davantage de participation internationale dans la guerre française. Il a dit: « La communauté internationale, nos alliés, font assaut de déclarations pour saluer notre engagement, sans apporter de solidarité en actes... Cet attentisme est consternant.»

Il a aussi appelé l'Union européenne (UE) à jouer un rôle militaire plus important au Mali: « Où est l’Union européenne ?... Son inertie illustre l’impasse actuelle de sa construction. »

De telles remarques illustrent la politique militariste d'Asensi ainsi que son hostilité profonde envers la classe ouvrière européenne. Depuis le début, l'UE est un instrument de l'aristocratie financière et qui mène des attaques massives contre le niveau de vie des travailleurs de par l'Europe. Au moment où des travailleurs toujours plus nombreux viennent à mépriser l'UE du fait de sa politique sociale destructrice en Grèce et ailleurs, Asensi prône la continuation de sa « construction », et sa consolidation en la faisant aider la France à mener ses guerres impérialistes.

Avec la guerre commencée il y a tout juste 10 jours, la France prévoit de faire passer son déploiement actuel de 1 800 soldats à 4 000. Mélenchon et ses collaborateurs gardent un silence assourdissant quant à l'impact que la guerre aura sur l'Afrique du nord et les implications pour la population française d'être entraînée dans une intervention militaire grandissante au Mali, en Algérie et la région du Sahel. La France a des intérêts industriels et géo-stratégiques vitaux dans toute cette région, dont la plupart des pays sont d'anciennes colonies françaises, et elle a pour objectif de reconquérir la région militairement pour défendre ses intérêts contre l'influence grandissante de puissances rivales telle la Chine. Tandis que la France s'engage dans des guerres néo-coloniales de par l'Afrique et le Moyen-Orient, le Front de gauche fonctionne en outil de l'impérialisme.

(Article original publié le 22 janvier 2012)

 

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