Le président français Hollande adopte en Israël une position belliqueuse contre l’Iran

Lors d’une visite officielle de trois jours en Israël entamée dimanche 17 novembre, le président français François Hollande a assuré l’élite dirigeante israélienne qu’il voulait continuer de faire pression pour l’imposition de sanctions économiques et pour exercer des pressions militaires contre l’Iran sur la base d’allégations non fondées du développement par ce pays d’armes nucléaires.

Après avoir été chaleureusement accueilli par les dirigeants israéliens, Hollande a déclaré en hébreu : « Je suis votre ami et je le resterai toujours. »

Après avoir poussé à la guerre contre la Syrie en septembre, Hollande pousse maintenant à l’adoption d’une position belliqueuse contre l’Iran. Il a dit, « Tant que nous n’aurons pas la certitude que l’Iran a renoncé à l’arme nucléaire, nous maintiendrons toutes nos exigences et les sanctions… [l’]Iran [est] une menace sur Israël, sur la région, à l’évidence, une menace pour le monde entier. »

La visite de Hollande a eu lieu après que l’intervention de la France ait fait échouer à Genève la première ronde de pourparlers entre le gouvernement iranien et les six principales puissances du soi-disant P5+1 (les Etats-Unis, la Grande-Bretagne, la France, la Russie, la Chine et l’Allemagne) sur le programme nucléaire iranien.

Lors des négociations de Genève, ces puissances ont exigé que l’Iran mette un terme à son programme présumé de développement nucléaire et que le gouvernement iranien nie poursuivre. Selon l’accord proposé, l’Iran aurait suspendu son programme nucléaire et obtenu en échange un allègement des sanctions imposées par les Etats-Unis et l’Union européenne, qui ont déjà lourdement frappé l’économie iranienne, miné les exportations pétrolières et provoqué une inflation galopante.

La France a adopté une ligne dure à l’encontre de l’Iran, rejetant au bout de trois jours d’intenses négociations le premier accord de dernière minute. « Il y a quelques points sur lesquels nous ne sommes pas satisfaits, » a dit le ministre français des Affaires étrangères à France Inter en citant le réacteur d’Arak « extrêmement proliférant » et la question de l’enrichissement de l’uranium. « Il y a tout un stock enrichi à 20 pour cent, c’est beaucoup. Comment redescendre pour ce stock vers 5 pour cent, ce qui est beaucoup moins dangereux? »

Fabius a dit qu’à moins que cette question soit résolue il « ne sera pas possible » de conclure un accord. Il a mis les six puissances du P5+1 en garde contre « un jeu de dupes. »

Le gouvernement israélien a acclamé la décision de dernière minute de la France de torpiller l’accord avec Téhéran après avoir réagi par un accès de colère à la décision des Etats-Unis de négocier avec l’Iran.

S’exprimant dimanche lors d’une conférence de presse avec Hollande contre l’accord avec l’Iran, le premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu a dit : « Je suis très inquiet, que cet accord aboutisse et ne réduise d’un coup de crayon les sanctions contre l’Iran – des sanctions qui avaient nécessité des années pour être mises en place – et, en contrepartie, l’Iran ne donne pratiquement rien. »

Hollande, après avoir poursuivi la politique de son prédécesseur conservateur, Nicolas Sarkozy, qui avait œuvré pour aligner la politique étrangère française et américaine sur une politique de guerre au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, fait actuellement pression sur Washington pour intensifier la confrontation avec l’Iran. Il fut aussi embarrassé par la décision prise en septembre par Washington de reporter une guerre avec la Syrie pour laquelle la France avait publiquement et activement fait pression.

Les gouvernements d’Obama et de Hollande ont tous deux soutenu l’opposition syrienne qui est en grande partie constituée d’éléments d’al Qaïda et qui vise le renversement d’Assad et l’installation de l’opposition comme partie d’un régime néocolonial, pro impérialiste en Syrie. Des divisions au sein de l’establishment de la politique étrangère américaine et des préoccupations au sujet d’une massive désapprobation populaire de la politique guerrière ont toutefois conduit le gouvernement Obama à revenir sur son attaque militaire projetée contre la Syrie.

La ligne dure prise par la France contre l’Iran a encouragé le gouvernement Netanyahu à la considérer comme un partenaire fiable au Moyen-Orient. L’attitude agressive de Hollande à l’égard de l’Iran et de la Syrie est également appuyée par les couches de l’establishment politique américain qui réclament des sanctions plus dures contre l’Iran et un changement de régime en Syrie.

Le sénateur de Caroline du Sud, Lindsey Graham, adepte d’une attitude dure contre l’Iran, a dit à CNN : « Remercions Dieu pour la France. Les Français sont en train de devenir de très bons dirigeants au Moyen-Orient. »

Le sénateur républicain de l’Arizona, John McCain, un autre ‘faucon’, a salué le rejet français de l’accord en écrivant sur Twitter : « La France a eu le courage d’empêcher un mauvais accord sur le nucléaire iranien. Vive la France. »

Le 10 novembre, le magazine Foreign Policy écrivait : « Le gouvernement socialiste du président français François Hollande a adopté une politique étrangère musclée qui le range à droite du gouvernement Obama en ce qui concerne la Libye, le Mali, la Syrie et à présent l’Iran. Ce faisant, il est aussi devenu le principal allié européen d’Israël – après les Etats-Unis – probablement son ami le plus proche au monde. »

Paris est vivement préoccupé par le soudain changement de la politique militaire de Washington au Moyen-Orient et sa décision de négocier avec l’Iran. Il considère Washington comme un garant crucial des intérêts impérialistes français sur le plan international et craint que la décision d’atténuer les menaces de guerre n’indique un désengagement dangereux des Etats-Unis au Moyen-Orient.

Le gouvernement Hollande pense aussi que le fait d’attiser l’hystérie de la guerre est indispensable à sa politique domestique réactionnaire. En raison de sa politique d’austérité et de ses attaques contre l’emploi et les salaires de la classe ouvrière, il est extrêmement impopulaire dans le pays. Les responsables du gouvernement Hollande ont dit s’inspirer de la poursuite de la politique d’austérité de Margaret Thatcher, la premier ministre britannique, après la victoire de son gouvernement dans la guerre des Malouines en 1982. (Voir : « La France profite du meurtre des journalistes de RFI pour intensifier sa guerre au Mali »)

Leurs remarques révèlent le caractère du Parti socialiste (PS) au pouvoir dont la politique n’a rien à voir avec le socialisme, fait qui fut brièvement reconnu en 2000 par l’ancien premier ministre PS, Lionel Jospin. Elles exposent aussi la politique en faillite des partis petits bourgeois, comme le Nouveau Parti anticapitaliste (NPA) qui a soutenu l’élection de Hollande. Ces derniers sont complices de la continuation du militarisme à l’extérieur et de la guerre sociale contre les travailleurs à l’intérieur.

Il y a deux semaines, Fabius avait exigé une intervention américaine agressive au Moyen-Orient et critiqué la politique étrangère de Washington après sa reculade face au lancement de la guerre contre la Syrie et sa décision de négocier avec l’Iran.

Dans un discours prononcé pour marquer les 40 ans de la création du Centre d’analyse, de prévision et de stratégie (CAPS), Fabius a dit : « Les Etats-Unis semblent ne plus vouloir se laisser absorber par des crises qui ne correspondent pas à leur vision nouvelle de leurs intérêts nationaux. » Il a critiqué la « non réplique » de Washington en Syrie – c’est-à-dire la décision du gouvernement Obama de reporter la guerre avec la Syrie.

Il a poursuivi, « Un désengagement américain [au Moyen-Orient], compte tenu de la puissance des Etats-Unis, c’est un désengagement tout court. Ce qui peut laisser des crises majeures ‘livrées à elles-mêmes’ ».

(Article original paru le 22 novembre 2013)

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