La police paramilitaire d’Obama: la «guerre contre le terrorisme» en sol américain

Le résultat le plus révélateur de la série de rencontres avec des responsables politiques, la police, et des leaders de «droits civiques» organisées par l'administration Obama lundi fut le rejet par le président de toute mesure pour mettre un frein à la militarisation des forces policières locales.

Les rencontres ont été organisées pour feindre de la sympathie par rapport à la colère populaire qui a été provoquée par le refus de porter des accusations contre le policier de Ferguson au Missouri qui a abattu l'adolescent sans arme Michael Brown au mois d'août dernier. Mais cette rhétorique était à l’opposé des mesures qui sont prises en réalité.

La Maison-Blanche a procédé à un examen des programmes pour le transfert d'équipement militaire à la police qui conclut: «Dans l'ensemble, ces programmes ont été utiles et ont offert aux forces de l'ordre d'État et locales de l'assistance pour poursuivre leurs missions importantes pour aider à maintenir la sécurité du peuple américain.» L'examen, ordonné à la suite de la répression policière contre les manifestants pacifiques de Ferguson au mois d'août, a été publié lundi.

Obama a souligné qu'il n'y aurait pas de réduction dans le financement pour le programme 1033 du département de la Défense, dont le mot d'ordre est «de combattant de guerre à combattant du crime», ou tout autre programme fédéral qui a facilité l'armement des autorités policières locales avec plus de 4,3 milliards de dollars en fusils d'assaut, véhicules blindés et même des appareils d'aviation militaires.

D'année en année, la distinction entre la police et le militaire devient de plus en plus floue, alors que la police est équipée de matériel qui, dans beaucoup de cas, provient directement du champ de bataille. L'usage d'équipes «de choc» (SWAT) a augmenté de façon exponentielle dans les dernières décennies, la police – en armure protectrice et armée de fusils d'assaut – exécutant entre autres les mandats de perquisition. Les rafles SWAT, accompagnées de violence arbitraire et de destruction de propriété, sont devenues des pratiques opérationnelles normales.

À Ferguson, les équipes de police SWAT ont travaillé aux côtés de la garde nationale pour faire des arrestations de masse, créant ainsi un précédent pour des opérations communes du militaire et de la police pour réprimer toute opposition politique au pays.

De sa manière typiquement orwellienne, Obama a cherché à présenter l'augmentation de mesures d'État policier comme des initiatives pour les «droits civiques». Des niveaux grotesques de mensonge et d'hypocrisie sont d'usage avec ce président.

«Trop de personnes, en particulier les jeunes de couleur, trouvent qu'elles sont traitées injustement», a déclaré Obama à la suite de ses rencontres lundi. Ainsi, le problème ne serait pas que la violence et l'abus policiers, souvent mortels, sont des occurrences quotidiennes dans les villes et les municipalités à travers les États-Unis, mais que ses victimes n’acceptent pas ce traitement.

La solution? Obama a conclu ses remarques en déclarant qu'il introduirait de nouvelles initiatives qui «vont augmenter de façon significative le financement et la formation de la police locale».

Sa proposition de mettre en place un «groupe de travail sur la police du 21e siècle» provient de la même stratégie que la Maison-Blanche a utilisée en réponse au scandale d'espionnage de la NSA en 2013. Le gouvernement avait alors utilisé un comité d'examen chargé d'augmenter la « transparence» et de rétablir la «confiance du public» afin de normaliser et d'étendre l'espionnage gouvernemental anticonstitutionnel.

Des universitaires libéraux renommés et des publications prodémocrates telles que le magazine the Nation avaient été recrutés pour présenter la fraude de la «réforme» de la NSA comme étant sincère et pour cacher la réalité de la normalisation de plus en plus profonde et étendue de méthodes d'État policier.

Des tactiques identiques sont employées en réponse au meurtre de Michael Brown par la police et l'exonération de son meurtrier. Obama dit qu’il faut rétablir la «confiance du public» en la police en augmentant la «transparence» pendant même que l'administration travaille main dans la main avec les autorités d'État et locales pour imposer un quasi-état de siège à Ferguson.

L'administration utilise la politique raciale et identitaire pour éviter les questions démocratiques et politiques fondamentales. Elle a fait d’Al Sharpton, l'animateur de télévision multimillionnaire et fraudeur d'impôt, son porte-parole de facto à St-Louis et recruté une panoplie de «leaders des droits civiques» afin de confiner l'opposition à la violence policière dans l’orbite du Parti démocrate.

L'assaut sur les droits fondamentaux et le recours de plus en plus fréquent à la répression étatique représentent la réponse de l'aristocratie financière américaine à l'augmentation des tensions sociales. Six ans après le krach financier de 2008, le chômage de masse continue pendant que les salaires stagnent. Cependant, la fortune des super-riches a doublé depuis 2009.

La classe dirigeante et les deux partis politiques de la grande entreprise n'ont rien à offrir pour alléger la détresse sociale de larges couches de la population. Aucune section de l'establishment politique ne fait appel à restreindre la criminalité corporatiste ou à une distribution plus démocratique de la richesse. Au lieu de cela, les deux partis font pression pour des attaques de plus en plus profondes contre les programmes d'aide sociale. Ceci est accompagné par l'intensification de guerres extrêmement impopulaires en Irak et en Afghanistan, et des préparatifs pour d’autres guerres encore plus sanglantes dans l'avenir immédiat.

La militarisation de la police n'a rien avoir avec la «sécurité du peuple américain» comme le prétend la Maison-Blanche. Il s'agit de renforcer l'appareil de répression pour le diriger contre toute opposition sociale et politique à l'intérieur des États-Unis.

C'est la «guerre contre le terrorisme» en sol américain. Les méthodes anti-insurrectionnelles développées pour les guerres et les occupations de l'Irak et de l'Afghanistan sont de plus en plus employées contre la population américaine.

La démocratie est incompatible avec les niveaux d'inégalité sociale existants, qui sont à leur tour ancrés dans le système capitaliste. Les droits démocratiques ne peuvent qu'être défendus sur la base d'un mouvement de masse de la classe ouvrière armé d'un programme socialiste pour satisfaire les besoins sociaux, et non pas pour augmenter les profits et fortunes des riches et super-riches.

(Article paru d’abord en anglais le 3 décembre 2014)

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