Mélenchon et le NPA émettent des critiques en trompe-l’œil de l’austérité d’Hollande

La présentation par Hollande de son pacte de « responsabilité » a levé toute ambiguïté sur le programme économique anti-ouvrier qu'il a mis en œuvre. La décision de Hollande d’avancer ouvertement un programme néo-libéral souligne le rôle réactionnaire joué par des tendances de la pseudo-gauche, comme le Front de gauche (FdG) de Jean-Luc Mélenchon et le Nouveau parti anticapitaliste (NPA).

En appelant en 2012 à un vote pour Hollande, à présent le président le plus impopulaire de la Vème République à cause des politiques d’austérité qu’il a déjà menées, ces partis ont joué leur rôle de défenseurs des banques et de la réaction sociale contre les travailleurs.

Les intentions clairement affichées de Hollande—un cadeau de dizaines de milliards d’euros au patronat, financé par une hausse de la fiscalité et une baisse des dépenses sociales—réjouissent les représentants de la bourgeoisie. La mise en place d'un pacte de « responsabilité » fut à l'origine demandée à François Hollande par le patron du Medef, Pierre Gattaz. Ce dernier se dit maintenant « prêt à jouer le jeu ».

La droite aussi est satisfaite du président. L’ancien premier ministre Jean-Pierre Raffarin a ainsi admis qu’il s’agissait d’un « changement de discours bienvenu » et d’« une vision lucide de la situation économique mondiale ». L’ancien ministre du budget, François Baroin, a émis un avis semblable : « Si c'est une prise de conscience solide sérieuse, on ne peut qu'accompagner cette démarche. ».

Ces déclarations constituent une confirmation sans appel des analyses du WSWS qui montraient que la pseudo-gauche jouait un rôle réactionnaire en aidant à faire élire Hollande et que la classe ouvrière serait obligée de lutter à la fois contre le PS et la pseudo-gauche. A présent, ces groupes essaient de se distancer verbalement du président qu’ils ont aidé à faire élire et de se poser en alternative au Parti socialiste (PS). Ils veulent ainsi bloquer un mouvement du prolétariat contre Hollande.

D’un côté, par le biais de son personnel dans la bureaucratie syndicale, la pseudo-gauche peaufine le « pacte de responsabilité » de Hollande, qu’elle compte imposer aux travailleurs. Les syndicats demandent seulement en échange « la généralisation de la conditionnalité des aides et exonérations fiscales aux entreprises à la mise en œuvre d’objectifs d’investissement économique et d’investissements sociaux ». C’est-à-dire que les syndicats demandent impuissamment au patronat d’avancer quelques promesses de créer des emplois pour tenter de faire accepter l'attaque sociale aux travailleurs.

De l’autre, les dirigeants politico-médiatiques de la pseudo-gauche tentent hypocritement de présenter quelques critiques de Hollande. Mélenchon, qui l’année dernière s’offrait à Hollande d'être son premier ministre, a écrit sur son blog : « Nous, les militants politiques, les citoyens éclairés, nous sommes peu surpris. Nous savions à quoi nous en tenir sur le fond ». C’est dire que le FdG a soutenu Hollande en conscience de cause.

A part l’arrogance petite-bourgeoise de Mélenchon, qui se targue, sans raison, d’être un « citoyen éclairé », le trait le plus remarquable de cette tentative est son cynisme. Evoquant les déboires de Hollande, notamment son silence initial sur ses relations avec l’actrice Julie Gayet, il écrit : « Je crois aussi qu’au PS comme dans notre gauche, nombreux sont ceux qui auraient préféré que l’ambiguïté demeure pour faciliter les petits arrangements. ».

Le FdG comme le NPA étaient parfaitement conscients de ce que représentait Hollande. De temps en temps, pour se donner des airs, Mélenchon le nommait même « Hollandréou », comparant son programme à la politique d’austérité dévastatrice du premier ministre social-démocrate grec, Georges Papandréou. Espérant profiter de l’élection de Hollande aux dépens des travailleurs, la pseudo-gauche a fait son « petit arrangement » habituel en soutenant Hollande et son programme d’austérité.

Ceci trouve son écho dans la réaction du NPA au discours présidentiel: « Hollande et son gouvernement n’ont pas d'autre choix que d’accentuer les attaques contre les salariés et, en conséquence, il ne peut plus manier un bluff auquel plus personne ne croit. Il est contraint de dire plus crûment les choses ». En fait, le « bluff » de Hollande dépendait du rôle du NPA et Cie, qui ont appelé à voter PS en donnant l'illusion qu'avec le PS au pouvoir, ils pourraient faire pression pour des politiques alternatives—chose à laquelle ils n'ont jamais cru.

Mélenchon et le NPA font croire que maintenant, ils vont monter une opposition à Hollande, ce qui est totalement faux. Ces deux organisations sont en train de préparer des alliances pour les élections municipales, pour présenter un programme dit de « véritable gauche » pour sanctionner un «PS qui ne joue plus son rôle et se droitise». Ce programme ne sanctionnera aucunement le PS, bien sûr. Le FdG et le NPA se regroupent pour défendre le PS, l’accompagnant dans sa préparation d’attaques contre la classe ouvrière.

Dans son blog, Mélenchon attaque la politique de Hollande de manière malhonnête, comme étant « le coup de barre à droite le plus violent d’un gouvernant de gauche depuis Guy Mollet, élu pour faire la paix en Algérie, et qui envoya le contingent au combat.».

Cette référence au gouvernement Mollet de 1956-1958 est une tentative malhonnête de Mélenchon d’escamoter son soutien pour des mesures anti-ouvrières. Dans la liste des grandes trahisons politiques du prolétariat par la « gauche » bourgeoise française, Mélenchon saute allègrement le « tournant de la rigueur » de 1982-1983 opéré par le Président François Mitterrand, dont Mélenchon et Hollande étaient des aides au PS à l’époque. Fermant des dizaines d’usines et privatisant des entreprises nationalisées, le PS a attaqué les sections les plus combatives de la classe ouvrière avec le soutien tacite des syndicats.

Même la tentative de Mélenchon de s’afficher en critique de Mollet est malhonnête. En fait, un fil étroit relie Mélenchon, son héros politique François Mitterrand, et Guy Mollet, dont le nom est resté synonyme du renoncement cynique et calculé des principes que l’on fait semblant d’avancer—une tradition que continuent le FdG et la NPA aujourd’hui.

Le protecteur politique de Mélenchon au PS, François Mitterrand, était le Garde des Sceaux du gouvernement Mollet, après avoir été fonctionnaire décoré sous le régime collaborationniste de Vichy. Mitterrand était chargé par le Conseil des ministres de défendre le projet de loi remettant les pouvoirs spéciaux à l'armée qui ont permis l’usage massif de la torture par les forces françaises. Il a défendu de nombreuses sentences de mort prononcées par les tribunaux d'Alger, permettant l'exécution de quarante-cinq militants algériens.

Tirant le rideau sur les crimes de la social-démocratie française, Mélenchon essaie de rejeter la responsabilité pour l’austérité sur Hollande et son parcours politique depuis 1983 : « Inconnu à l’époque, ses premières tribunes de presse l’alignaient sur ce courant’ démocrate’, parti des Etats-Unis, qui a connu ensuite une escalade de surenchères libérales. De Tony Blair à Gerhard Schröder, une pente a été prise par la social-démocratie européenne, dont Hollande a été l’instrument en France. ».

En fait, le « tournant néo-libéral » de la social-démocratie française ne date pas de l’élection de Hollande, ou même de celle de Tony Blair en 1997. Hollande et Mélenchon eux-mêmes sont le produit de trois décennies pendant lesquelles le PS a mené des politiques anti-ouvrières, comme les autres partis sociaux-démocrates européens. Les forces de pseudo-gauche, dont le FdG et le NPA en France, se sont intégrées de plus en plus directement dans leur orbite au courant de cette période.

Mélenchon écrit que la social-démocratie européenne « s’est déployée jusqu’à la déchéance totale, avec la capitulation de Papandréou en Grèce devant l’assaut de la finance, mais aussi avec les gouvernements de grande coalition à répétition en Allemagne et dans plusieurs pays d’Europe ».

Le cynisme de Mélenchon tient à ce que les forces politiques de pseudo-gauche qu’il représente en France ont donné leur aval à toutes ces attaques contre le prolétariat. Il faut rappeler que Rifondazione Comunista a voté l’envoi de troupes en Afghanistan et des coupes budgétaires pour le gouvernement de coalition italien de 2006-8, et que le Bloc de Gauche portugais a voté en faveur de l'imposition des coupes budgétaires à la Grèce par l'UE.

Un gouffre social sépare la classe ouvrière de cette pseudo-gauche au service de la bourgeoisie.

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