La Russie interrompt ses livraisons de gaz naturel à l’Ukraine

N’ayant reçu aucun paiement pour les livraisons des mois à venir, la société d’Etat russe Gazprom a annoncé mercredi qu’elle interrompait l’approvisionnement en gaz naturel de l’Ukraine. «Gazprom ne livrera pas de gaz à l’Ukraine à n’importe quel prix sans prépaiement», a dit le PDG du groupe, Alexeï Miller.

Naftogaz, la compagnie publique ukrainienne, avait annoncé la veille la suspension de ses achats de gaz à la Russie après la rupture des négociations à Vienne sur les prix, parrainées par l’Union européenne.

Les négociateurs ukrainiens ont refusé l’offre russe d’environ 247 dollars (222 euros) par 1.000 mètres cubes de gaz, offre inchangée par rapport au second trimestre et représentant une remise de 40 dollars sur le prix de référence. Kiev voudrait arriver à une entente à plus long terme avec la Russie qui durerait jusqu’à mars 2016, une durée bien plus longue que celle des deux contrats précédents qui n’avaient porté que sur trois mois. L’Ukraine refuse aussi une clause du contrat l’obligeant à acheter une quantité fixe de gaz indépendamment de la demande.

En dépit de ces divergences, le vice-président de la Commission européenne chargé de l’Energie, Maros Sefcovic, a dit mercredi aux journalistes qu’il croyait qu’un accord sur les livraisons de gaz était à portée de main. «Finalement, nous ne sommes pas si loin les uns des autres. Ce qu’il faut c’est une volonté politique nette de vouloir le faire», a-t- il déclaré. «Nous jouerons jusqu’au bout le rôle du médiateur impartial.» Une nouvelle série de pourparlers entre les ministres russes et ukrainiens de l’Energie est prévue en septembre, sous la médiation de la Commission européenne.

Dès que l’arrêt des livraisons de gaz à l’Ukraine fut connu, les organes de presse russes ont rapporté que le groupe énergétique ukrainien Ukrenergo avait annoncé tard mardi soir qu’il couperait son approvisionnement électrique de la Crimée dès mercredi à minuit. Le ministère ukrainien de l’Energie et du Charbon a depuis démenti tout projet de stopper les approvisionnements à la Crimée, annexée par la Russie en mars 2014 suite à un référendum populaire peu de temps après le coup d’Etat de l’extrême-droite organisé par les Etats-Unis qui a évincé le gouvernement pro-russe de Victor Ianoukovitch. L’électricité continue d’être acheminée vers la région qui abrite, dans le port de Sébastopol, l’un des plus grands ports d’eau douce de la Russie. Cependant, selon RIA Nowosti, Ukrenergo a déclaré ne pas être obligé d’informer la Russie quant à ses projets concernant l’approvisionnement énergétique de la Crimée.

En l’absence de livraisons de gaz de la Russie, le gouvernement ukrainien chercherait à s’approvisionner auprès de la Slovaquie, de la Pologne et de la Hongrie pour les 7 milliards de mètre cubes de gaz qu’il devrait acheter à la Russie entre juillet et la prochaine série de négociations. «Actuellement nous disposons d’un solide mécanisme de flux inversé de gaz, nous sommes bien mieux préparés au niveau de l’approvisionnement en énergie», a précisé Sefcovic. «Nous avons la capacité, le temps et le gaz pour garantir un d’approvisionnement suffisant.» Toute diminution des livraisons de gaz aura peu d’impact à court terme car la demande de gaz naturel est considérablement plus faible pendant les mois d’été que les mois d’hiver.

Naftogaz a donné mercredi des assurances que la Russie continuerait de fournir du gaz au reste de l’Europe via l’Ukraine. L’Union européenne compte sur la Russie pour environ 30 pour cent de ses approvisionnements en gaz. L’année dernière, près de la moitié du gaz naturel russe vers l’UE a transité par des gazoducs ukrainiens.

Le gaz russe livré à l’Europe via des gazoducs ukrainiens avait été totalement coupé en janvier 2009 suite à un différend avec le gouvernement ukrainien au sujet du paiement d’amendes infligées par l’Ukraine à Gazprom.

La livraison de gaz russe à l’Ukraine avait été suspendue en juin 2014 et reprise en décembre lorsque qu’un accord à court terme fut conclu prévoyant que Kiev reçoive du gaz de la Russie après avoir fourni un paiement anticipé et accepté de verser 3,1 milliards de dollars d’arriérés que Naftogaz devait à Gazprom.

La décision de l’Ukraine d’arrêter les achats de gaz russe et la menace annoncée contre la Crimée constituent les dernières d’une série d’actions provocatrices du régime de Kiev, et de ses patrons impérialistes occidentaux, visant à augmenter la pression sur Moscou.

L’année dernière le régime pro-occidental mené par le président Petro Porochenko avait lancé une guerre civile contre les séparatistes pro-russes de la région du Donbass qui s’opposaient au coup d’Etat. L’ONU estime que plus de 6.500 personnes ont été tuées dans le conflit, 16.385 autres blessées et plus de 2 millions de personnes déplacées.

La semaine passée Porochenko a approuvé des amendements à la loi permettant à des armées étrangères de s’installer sur le territoire ukrainien et facilitant le déploiement de forces américaines et de l’OTAN dans le pays. Porochenko a déjà soumis des propositions pour le déploiement d’une force de maintien de la paix de l’ONU et de l’UE dans la région du Donbass.

Des conseillers militaires américains se trouvent déjà dans le pays pour former les membres de la Garde nationale ukrainienne, qui a enrôlé des éléments d’extrême-droite, dont des combattants des bataillons néofascistes Azov. Le Canada et la Grande-Bretagne se préparent à envoyer dans les semaines à venir des conseillers en Ukraine pour contribuer à la formation des forces de la Garde nationale.

La semaine dernière, les Etats-Unis ont annoncé qu’ils vont déployer des chars d’assaut, de l’artillerie lourde et d’autres équipements militaires partout en Europe de l’est, y compris dans les Etats baltes de la Lituanie, de la Lettonie et de l’Estonie. Au même moment, l’OTAN a annoncé qu’il allait tripler la taille de sa force de réaction rapide visant la Russie, en la portant à 40.000 hommes.

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