Les déclarations de Julian Assange démentent les allégations de viol

Le fondateur de WikiLeaks, Julian Assange, incarcéré dans l’ambassade équatorienne depuis quatre ans et demi, a publié une transcription de la déclaration qu’il a faite aux enquêteurs suédois le mois dernier.

Celle-ci donne plus de détails sur la relation sexuelle sur laquelle les fausses allégations de « viol » ont été fondées. Elle présente un examen dévastateur de la campagne menée par les États-Unis contre lui, ce qui souligne le caractère politiquement motivé et concocté de ces calomnies.

Assange a publié la déclaration après qu’il a enfin été interrogé par les autorités suédoises, sur ordre de la procureuse Marianne Ny, après des années de faux-fuyants et de retard. Dans sa déclaration de 19 pages, Assange révèle des violations flagrantes de la loi suédoise par Ny.

La loi suédoise exige la conduite d’une « enquête préliminaire aussi rapidement que possible et lorsqu’il n’y a plus de raison de poursuivre l’enquête, elle sera abandonnée ». 

Toujours selon le droit suédois, personne ne doit être « exposé à des soupçons ou à des coûts ou des inconvénients inutiles ». Cependant, suivant Assange, Ny « a délibérément suspendu son travail en cours pour avancer et mener à terme l’instruction », malgré les offres répétées d’Assange pour un nouvel entretien suite à son interrogatoire volontaire initial du 30 août 2010.

Assange a décrit les circonstances extrêmement étranges de l’entrevue de novembre. Son avocat suédois n’a pas été autorisé à être présent, en dépit du fait que l’entrevue faisait partie d’une instruction criminelle suédoise. L’avocat équatorien d’Assange n’a pas accès au dossier et ne comprenait pas le suédois. Assange n’a pas été en mesure de lire des textos clés en possession des autorités suédoises, qui confirment qu’il est innocent des allégations portées contre lui.

Néanmoins, le fondateur de WikiLeaks s’est senti « obligé de faire ma déclaration aujourd’hui pour qu’il n’y ait plus d’excuses pour que la procureuse suédoise Marianne Ny fasse continuer ma détention illégale indéfinie, qui est une menace pour ma santé et même pour ma vie ». « Je n’accorderai à cette procureuse aucune excuse pour éviter d’enregistrer ma déclaration, car je crains qu’elle l’utilise comme un moyen de prolonger indéfiniment mon traitement cruel, inhumain et dégradant ».

Sur les circonstances de son voyage à Stockholm en 2010, Assange a expliqué que plus tôt cette année-là Hillary Clinton, en tant que Secrétaire d’État (ministre des affaires étrangères) des États-Unis, avait lancé une enquête « sans précédent quant à son échelle et sa nature » contre WikiLeaks. Dirigée par le Bureau fédéral des enquêtes [FBI], l’enquête s’est étendue à « une douzaine d’autres agences, y compris la CIA [Agence centrale de renseignements], la NSA [Agence de sécurité nationale] et la Defense Intelligence Agency [renseignements militaires]». Qualifiée d’enquête « de tout le gouvernement », l’affaire implique également un jury d’accusation (Grand Jury) à huis clos, la lanceuse d’alerte et prisonnière politique Chelsea Manning a subi la torture et fut condamnée à la prison pour 35 ans dans le cadre de cette tentative d’impliquer Assange et WikiLeaks

Wikileaks a publié les Afghan War Diaries (Journaux de guerre afghans) en juillet 2010. Ils ont révélé une guerre brutale d’assujettissement colonial impliquant des ravages par le personnel de l’armée, des assassinats ciblés, des bombardements aveugles et des attaques de drones sur des villages entiers, la destruction d’un pays appauvri.

Les journaux ont provoqué une chasse aux sorcières médiatique internationale orchestrée par l’État contre WikiLeaks et ont relayé les menaces d’arrêter ou de tuer Assange. La déclaration cite Marc Thiessen dans le Washington Post, dont l’article intitulé « WikiLeaks doit être stoppé » a appelé à la des pressions diplomatiques sur les gouvernements pour mettre Assange en détention. Un autre article décrit un bureau près du Pentagone avec 120 analystes, du FBI et d’autres agences, travaillant 24 heures sur 24 « sur les lignes de front de la guerre secrète contre WikiLeaks »

Assange s’est rendu à Stockholm sous une énorme pression, et en grand danger, afin d’assurer la sécurité des serveurs de publication de WikiLeaks, dont certains étaient en Suède. La télévision publique suédoise s’est plaint du fait que la présence de WikiLeaks en Suède mettait en danger la relation stratégique du pays avec les États-Unis. Pendant le séjour d’Assange, ses cartes bancaires personnelles ont été bloquées et le compte Moneybookers de WikiLeaks n’était pas accessible. Plus tard dans l’année, cela est devenu un « blocage économique judiciaire concerté contre WikiLeaks par des sociétés de services financiers américaines, dont VISA, Mastercard, PayPal, Bank of America, Western Union et American Express ».

Sans accès à des fonds, Assange a dû compter sur des gens qu’il connaissait à peine pour « la nourriture, la sécurité et pouvoir téléphoner ». Il a prononcé un discours sur la guerre en Afghanistan auquel une femme, « SW », a assisté au premier rang. SW, écrit-il, « semblait être concernée par mon sort et semblait également avoir un intérêt romantique pour moi ». Le couple est allé au Musée national, où « SW » a dit qu’elle travaillait et où « elle m’a embrassé et mis mes mains sur ses seins ».

Ils se sont rencontrés deux jours plus tard. « SW » a invité Assange chez elle, où elle « a clairement dit qu’elle voulait avoir des relations sexuelles avec moi ». Assange souligne que « il se sentait préoccupé par l’intensité de l’intérêt de “SW” ». Elle connaissait « une quantité inhabituelle de détails » sur Assange. Ils ont eu des relations sexuelles consensuelles « à quatre ou cinq reprises ».

Il poursuit : « Le matin, elle est sortie pour chercher le petit déjeuner pour nous deux. Après avoir pris le petit déjeuner ensemble, j’ai quitté sa maison en bons termes. Elle n’a exprimé à aucun des moments où j’étais avec elle qu’elle trouvait que je lui avais manqué de respect d’une manière quelconque ou que j’avais agi contrairement à ses souhaits autrement que quand mon attention pour elle passait après ma sécurité ou mes tentatives de dormir. Elle m’a raccompagné à la gare à vélo et nous nous sommes embrassés en nous disant au revoir ».

Au cours des jours suivants, ils se sont parlé au téléphone et SW lui a dit s’inquiéter au sujet des maladies sexuellement transmissibles (MST). Elle s’est rendue à la police suédoise pour obtenir des conseils en matière de MST et lui a demandé de subir un test de dépistage des MST. Il a accepté et a déclaré : « Vous pouvez imaginer mon incrédulité quand je me suis réveillé le lendemain matin à la nouvelle que j’avais été arrêté en mon absence pour “viol” et que la police me “cherchait” partout à Stockholm ».

Des SMS de SW à une amie et vus par les avocats d’Assange révèlent que l’allégation de viol est fausse. Assange affirme que les SMS « ont été envoyés à ses amis au cours de la soirée où j’étais chez elle et pendant cette semaine, la police suédoise les a recueillis sur son téléphone. Bien que la procureuse ait lutté pendant des années pour m’empêcher moi, le public et les tribunaux de les voir, mes avocats ont été autorisés à les voir au poste de police et ont été en mesure d’en noter un certain nombre, y compris (comme cités directement par Assange) :

Le 14 août 2010, SW a envoyé le SMS suivant à un ami : Je le veux. Je le veux. Suivi par plusieurs autres contenus similaires (tous se rapportant à moi) avant les événements en question (13 :05) ;

• Le 17 août, SW a écrit que nous avions eu de longs préliminaires, mais rien ne s’est passé (01 :14) ; Alors cela s’est amélioré (05 :15) ;

• Le 17 août, après que toutes les relations sexuelles se soient produites, SW a écrit à un ami que ça s’est bien passe sauf le risque de MST / grossesse (10 :29) ;

• Le 20 août, SW, au poste de police, a écrit qu’elle « ne voulait pas porter d’accusations contre Julian Assange », mais que « la police était désireuse de lui mettre la main dessus » (14 :26) ; Et qu’elle fut « choquée quand ils l’ont arrêté » parce qu’elle « ne voulait que lui faire faire un test »(17 :06) ;

• Le 21 août, SW a écrit qu’elle « ne voulait accuser Julian Assange de rien », (07 :27) ; Et que ce sont les « policiers qui ont inventé les accusations » (22 :25) ;

Le reste de la déclaration fait état des méthodes extraordinaires et toujours plus agressives, non démocratiques, illégales et intimidantes utilisées par les gouvernements américain, suédois et britannique pour faire taire Assange et WikiLeaks

En novembre 2010, immédiatement après la diffusion par WikiLeaks des centaines de milliers de câbles diplomatiques américains exposant d’autres crimes et conspirations politiques menés par Washington et le Pentagone, les États-Unis ont créé une « Salle de guerre » du Département d’État contre WikiLeaks. Le 30 novembre, un Avis Rouge d’Interpol a été envoyé à 180 pays pour l’arrestation d’Assange pour une « enquête préliminaire » suédoise qui n’a pas atteint le stade de la mise en examen. Quelques jours plus tard, un mandat d’arrêt européen a été émis et Assange a été arrêté à Londres. Il a été détenu dans une prison de haute sécurité, puis en résidence surveillée pendant près de deux ans avant de demander l’asile diplomatique à l’ambassade équatorienne à Londres en juin 2012, où il demeure.

Le mois dernier, le gouvernement britannique a perdu son appel pour que soit jugé « irrecevable » un verdict juridiquement contraignant rendu plus tôt cette année par le Groupe de travail des Nations Unies sur la détention arbitraire (UNWGAD). Selon celui-ci, « compte tenu de toutes les circonstances de l’affaire, le recours adéquat consisterait à assurer le droit de libre circulation de M. Assange et à lui accorder un droit à réparation, conformément à l’article 9 (5) du Pacte international relatif aux droits civils et politiques ».

La déclaration complète de Julian Assange est accessible ici

(Article paru en anglais le 13 décembre 2016)

 

 

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