Le vice-président américain lance un avertissement menaçant à la Chine

Dans un discours militariste et intimidant prononcé mercredi à Sydney, le vice-président américain Joe Biden, a réitéré en termes non équivoques la détermination de l’impérialisme américain à maintenir sa domination économique et stratégique en Asie par tous les moyens, y compris et si nécessaire, par la guerre. 

Le discours de Biden n’était pas seulement un avertissement menaçant envers la Chine à la suite de la décision la semaine dernière de la Cour permanente d’arbitrage (CPA) de La Haye contre les réclamations chinoises en mer de Chine méridionale. C’était également destiné à montrer à Canberra et à d’autres alliés régionaux que Washington ne tolèrerait aucune ambivalence dans leur soutien aux États-Unis au moment où leurs préparatifs de guerre s’accélèrent dans la région Indo-Pacifique.

Biden a cité les remarques faites par le président Obama en annonçant le « pivot vers l’Asie » en novembre 2011 devant le Parlement australien: « Dans la région Asie-Pacifique au 21e siècle, les États-Unis d’Amérique y vont à fond. »

« Nous avons respecté notre promesse, » a-t-il déclaré. « Nous avons montré notre engagement à diriger dans la région, encore et encore. Toute personne qui s’interroge sur l’engagement de l’Amérique et son pouvoir de rester dans la région Asie-Pacifique ne fait pas attention. »

Biden a ensuite vanté la force militaire « sans rivale » de l’Amérique : « Nous continuons à devancer nos concurrents, dépenser plus pour notre défense globale que les huit prochaines nations du monde réunies. Nous avons les forces terrestres les plus capables du monde, une capacité inégalée de projeter la puissance navale et aérienne dans tous les coins du monde et en même temps... Et nous nous sommes engagés à mettre plus de 60 pour cent de notre flotte et de nos capacités militaires les plus avancées dans le Pacifique d’ici 2020. »

Le renforcement militaire agressif de l’Administration Obama en Asie et les opérations « liberté de navigation » provocatrices qui défient les revendications territoriales chinoises dans la mer de Chine méridionale, se sont faits sous le prétexte de défendre un système international basé sur des règles – autrement dit, un ordre mondial dans lequel Washington établit et fait appliquer les règles.

Biden a cependant carrément déclaré que si les États-Unis maintenaient leur « détermination à assurer l’avenir de la région Asie-Pacifique » ce n’était pas pour « rendre service à quiconque. C’est massivement dans notre propre intérêt. » Il insista à nouveau: « Notre volonté de jouer un rôle dans l’élaboration de l’avenir de cette région dynamique est réelle. Comme l’a dit le Président, nous y allons à fond. Nous y sommes et nous y restons ».

Biden a répété le mensonge que la présence américaine dans la région « est essentielle pour maintenir la paix et la stabilité, sans laquelle la croissance économique et la prospérité s’écrouleraient, je crois. L’Amérique est la cheville ouvrière. Et nous voulons garantir que les voies maritimes soient sécurisées et que le ciel reste ouvert. »

En réalité, l’impérialisme américain a été le principal facteur de déstabilisation dans la région Asie-Pacifique. Dans le sillage de la Seconde Guerre mondiale, il a maintenu sa domination en Asie en menant deux guerres néocoloniales sanglantes en Corée et au Vietnam, qui ont coûté la vie de millions de personnes, ainsi qu’en incitant et soutenant des dictatures militaires dans toute la région, comme en Indonésie où au moins un demi-million de personnes ont été abattues dans le coup d’État de 1965 à 1966, soutenu par la CIA.

Maintenant, sous prétexte de protéger la « liberté de navigation » dans la mer de Chine méridionale, la marine américaine a considérablement accru sa présence dans les eaux contestées et envoyé de façon irresponsable des navires de guerre dans la limite territoriale des 12 milles marins autour des îlots contrôlés par la Chine à trois reprises. De telles provocations navales s’accéléreront sans aucun doute suite à la décision de la CPA, ce qui accroît le risque de conflit avec l’armée chinoise. Les États-Unis y exigent aussi l’engagement de ses alliés, en particulier de l’Australie.

Cette concentration de Washington sur la mer de Chine méridionale n’a rien à voir avec la protection de routes commerciales vitales à travers l’Asie du Sud-Est. Les États-Unis sont plutôt déterminés à maintenir leur suprématie dans les eaux voisines de la Chine continentale à cause de la stratégie de guerre du Pentagone qui comprend un blocus naval qui paralyserait l’économie chinoise.

Le voyage impromptu de Biden en Australie suite à la décision de La Haye était pour s’assurer du soutien infaillible du gouvernement nouvellement élu du premier ministre Malcolm Turnbull dans la confrontation qui s’accentue de Washington avec la Chine. En 2011 et 2012, Turnbull avait critiqué publiquement le « pivot », reflétant l’inquiétude de sections de l’élite dirigeante australienne que les relations économiques avec la Chine, le plus grand partenaire commercial du pays, seraient compromises. Tout en soutenant pleinement la décision de La Haye, le gouvernement Turnbull ne s’est pas engagé publiquement à mener des opérations australiennes de « liberté de navigation. »

Dans son discours, Biden a souligné non seulement les liens économiques et culturels étroits, mais surtout l’alliance militaire américano-australienne et l’histoire commune de guerres réactionnaires. « L’histoire qui a forgé les bases de notre alliance dans le fer et l’a baptisé dans le sang a longtemps lié le sort de nos nations », a-t-il déclaré. La remarque est particulièrement effrayante dans la mesure où les États-Unis insistent sur un soutien australien à ses provocations irresponsables contre la Chine, qui pourraient précipiter une guerre entre puissances nucléaires.

Le vice-président a souligné l’intégration complète des forces australiennes dans l’armée américaine, citant les principaux exercices navals RIMPAC actuellement en cours comme preuve de l’engagement de Canberra à « répondre aux menaces dans le Pacifique avec un front uni et interopérable. » Il a remarqué qu’un officier australien, le major général Greg Bilton, avait été « intégré dans notre chaîne de commandement » et qu’il « commandait directement des troupes américaines, » ajoutant, « nous ne laissons pas cela se produire très souvent. »

En effet, les forces et les bases militaires australiennes, y compris les bases d’espionnage critiques comme Pine Gap en Australie centrale, sont si intégrées dans les plans de guerre du Pentagone qu’elles seraient automatiquement impliquées dans toute guerre avec la Chine.

Biden a rappelé délibérément l’influence économique américaine à ceux qui dans l’élite économique australienne s’inquiètent du commerce et de l’investissement avec la Chine. « J’ai lu vos éditoriaux... La question était qui nous sommes, avons-nous le pouvoir de rester? Avons-nous la capacité économique? » s’est-il interrogé, avant de répondre : « Je ne dis pas cela pour me vanter, mais pour rassurer. Les États-Unis vont rester la plus forte économie du monde. »

Dans ce qui équivalait à une menace à peine déguisée, Biden a déclaré : « Si je devais parier quel pays va diriger sur le plan économique au 21e siècle... Je parierais sur les États-Unis. Mais je le dirai d’une autre façon: ce n’est jamais un bon pari que de parier contre les États-Unis. » En d’autres termes, à tous ceux qui tentent de préserver les liens économiques avec la Chine au détriment des États-Unis, attendez-vous à des représailles américaines...

Malgré les déclarations du contraire par Biden, les États-Unis sont en déclin historique en tant que puissance mondiale dominante et ils ont eu recours à la puissance militaire à maintes reprises au cours des 25 dernières années dans un effort désespéré pour consolider leur position. Face à une crise économique mondiale qui s’aggrave, le discours de Biden indique clairement que l’impérialisme américain redouble d’efforts pour maintenir son hégémonie en cherchant à subjuguer la Chine, menaçant dans le processus de plonger toute la région, et le monde, dans une guerre catastrophique.

(Article paru d’abord en anglais le 21 juillet 2016)

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