Observations complémentaires sur l’inégalité sociale et la politique de la pseudo-gauche

Dans sa perspective du 18 janvier intitulée « Wealth distribution in the United States and the politics of the pseudo-left » (La distribution de la richesse aux États-Unis et la politique de la pseudo-gauche – NDT : pas encore traduit en français), le World Socialist Web Site citait un rapport de décembre 2016 de l’Université de Berkeley pour souligner l’écart entre les 10 % de la population, y compris les « 9 pour cent suivants »(environ 21 millions d’Américains qui composent la couche privilégiée et mieux payée après le premier 1 pour cent) par rapport aux 90 pour cent en dessous d’eux.

Beaucoup de lecteurs ont réagi par des commentaires, y compris une minorité qui s’opposait à l’établissement d’une distinction entre les intérêts des 9 pour cent suivants et les 90 pour cent inférieurs. Certains commentateurs se sont dits préoccupés par le fait que le WSWS repoussait ces 9 % du socialisme en affirmant que leurs intérêts étaient opposés à ceux de la classe ouvrière.

Un commentateur, George Gonzalez, a écrit que l’article « se lit comme si la totalité de ces 9 pour cent était en collusion active avec le 1 pour cent », tandis que ben franklin [pre death] a écrit, « mettre tous ceux qui sont dans ces 9 % dans le même panier et les attacher à la classe capitaliste n’est pas seulement erroné, c’est dangereux. En isolant les travailleurs dans ces tranches de revenu, vous ajoutez à la fragmentation que la bourgeoisie et ses représentants de l’état incitent chaque jour. »

D’autres commentateurs ont affirmé que l’utilisation par l’article de données sur la richesse et les inégalités de revenu était une base incorrecte pour déterminer le caractère de classe des segments les plus riches de la société. Human6 a affirmé que l’article était basé sur une méthode « erronée libérale empirique […] empiriste, pragmatique, petite-bourgeoise » parce qu’elle utilisait « des montants en dollars et des centiles pour tenter de déterminer la pseudo-gauche et les couches qu’elle représente […] », Human6 a prétendu que le WSWS ignorait les travailleurs des 9 ou même 5 pour cent suivants, y compris les chirurgiens (dont le revenu est de 247 520 dollars), les psychiatres (193 000 dollars), les dentistes (177 130 dollars), les infirmières anesthésistes (160 250 dollars), les pilotes de ligne, les copilotes et les mécaniciens du bord (136 400 dollars) […] » qui, selon le commentateur, « acquièrent leur revenu par le travail, par la production de biens et de services à acheter et à vendre. »

Le WSWS est heureux de recevoir une discussion de grande envergure dans sa section de commentaires et est reconnaissant des contributions, à la fois de soutien et critiques. Ces commentaires soulèvent des questions importantes sur les relations de classe et l’orientation politique du mouvement révolutionnaire. Le but de cette chronique est d’examiner les questions sociales et politiques soulevées dans cette discussion. 

Tout d’abord, nous estimons que les données sur les revenus tirées du rapport Piketty, Saez et Zucman méritent une étude extrêmement approfondie. Il jette un éclairage critique sur la position occupée par les 9 % suivants, tant par rapport aux 90 % inférieurs qu’aux 1 % supérieurs.

Le rapport comprend une ventilation du revenu individuel avant impôt moyen par centile. L’utilisation du revenu individuel par rapport au revenu du ménage marque une avancée majeure dans l’étude des inégalités, car elle permet une présentation beaucoup plus complète du niveau de stratification sociale et des contrôles des variables importantes liées aux changements démographiques comme le vieillissement de la population, la taille des ménages, l’entrée à long terme des femmes sur le marché du travail.

En 2014, le seuil d’entrée dans le 90 centile (c’est-à-dire le membre le moins riche du 90 centile) était un revenu individuel avant impôts de 122 691 dollars, contre un seuil de 184 329 dollars pour le 95 centile. Le membre le moins riche du 98 centile gagnait alors un peu moins de 471 968 dollars. 

Les montants des seuils pour l’entrée dans les déciles inférieurs montrent une baisse drastique du revenu individuel. Pour entrer dans le 80 centile, 81 983 dollars sont requis (soit 66,8 % du seuil du 90 percentile), suivi de 61 542 dollars pour le 70 percentile (50,2 % du seuil du 90 percentile), 47 706 dollars pour le 60 percentile (38,9 %) et 36 492 dollars pour le 50 percentile (29,7 %). Les revenus individuels de ceux qui sont au sommet des 9 pour cent suivants (les plus riches au 98 centile) sont nettement plus élevés que ceux des 80 (~ 6 fois), 70 (~ 8 fois), 60 (~ 10 fois) et 50 percentiles (environ 13 fois).

La moitié la plus pauvre de la population ne possède strictement rien. Le revenu individuel moyen des 117 millions d’Américains les plus pauvres est d’environ 16 200 dollars. Un cinquième entier de la population – environ 45 millions de personnes, par définition plus du double que dans les « 9 % suivants » – reçoit moins de 12 000 dollars par an en revenu individuel avant impôts. 

La polarisation sociale croissante est plus évidente lorsque ces chiffres sont étudiés au fil du temps. De 1980 à 2010, la croissance annuelle du revenu a été en moyenne de 1,5 pour cent pour le seuil du 90 centile, de 1,7 pour cent pour le 95 et de 2,2 pour cent pour le 99. Le revenu a diminué en moyenne pour les trente pour cent les plus pauvres et a augmenté de moins de 1 pour cent pour ceux situés entre le tiers inférieur et le 70 centile. La croissance du revenu pour le 90 centile était plus d’un tiers plus élevée que pour le 70 centile, a doublé le taux au 60 centile, triplé celui du 50 percentile, et était sept fois plus élevé que le taux de croissance du 40 centile.

La recherche menée par Piketty, Saez et Zucman fournit un matériel crucial pour la critique du capitalisme américain et pour la compréhension de ses structures politiques. Mais Human6 prétend que l’accent mis sur ces données dans l’analyse de la société américaine est « empiriste » et « anti-marxiste ». Human6 confond la critique marxiste de l’empirisme philosophique avec l’opposition à l’investigation empirique qui exige la collecte minutieuse et l’examen des données factuelles. Ce processus de recherche est essentiel à toute science, y compris le marxisme. 

Les données de Piketty, de Saez et de Zucman citées dans la perspective du 18 janvier révèlent des niveaux stupéfiants de richesse et de concentration des revenus au sommet de la société, à la fois dans le premier 1 % et, plus largement, parmi les 10 % les plus riches. En montrant la manière dont la richesse est distribuée, les données ont permis au WSWS de souligner les caractéristiques clés des relations économiques qui sous-tendent la vie politique aux États-Unis.

Que montrent les données ? En résumé, la classe dirigeante a procédé à une redistribution massive de la richesse et du revenu des 90 pour cent inférieurs vers les 10 pour cent supérieurs au cours des 40 dernières années, un pillage social qui a produit un gouffre sans précédent séparant la vie des gens aisés et riches des masses ouvrières. 

Le WSWS n’a pas choisi arbitrairement cette ligne de partage, comme certains l’ont suggéré. Si ces catégories sociologiques sont inexactes et ont naturellement leurs limites, la division entre les 10 pour cent supérieurs et les 90 % inférieurs ressort des données elles-mêmes, c’est-à-dire des niveaux actuels d’inégalités sociales et de l’état réel des relations de classe.

Il est vrai que le niveau de revenu ne résout pas tout les problèmes de l’analyse des classes, mais la part relative que les différents segments de la société reçoivent de la richesse totale produite par le processus de travail n’est guère une question sans conséquence. Les socialistes ne sont pas tellement perdus dans les brumes des abstractions théoriques qu’ils sont indifférents à la question « Qui reçoit quoi ? » En dernière analyse, l’appropriation des moyens de production et l’extraction de la plus-value dans le processus de travail trouvent leur expression, directement et indirectement, dans la répartition du revenu national. 

Le revenu des 10 premiers pour cent a augmenté au cours des 40 dernières années aux dépens du revenu des 90 pour cent inférieurs, qui a diminué. Les 10 pour cent supérieurs acquièrent de plus en plus leur revenu et leur richesse par la spéculation financière alors que les 90 pour cent inférieurs possèdent moins d’actions. Les 50 pour cent inférieurs ont été dévastés économiquement et ne possèdent rien. Les 50 au 90 centiles ont vu leur revenu stagner, leur part de revenu et de la richesse diminuent, et leur position par rapport aux 10 pour cent supérieurs a diminué de façon significative, mais à un rythme un peu plus lent que celle de la moitié la plus pauvre.

Les 9 pour cent suivants contrôlent une plus grande part du revenu national qu’à n’importe quel moment depuis 1940. La position sociale de cette couche a gagné considérablement au détriment des 90 pour cent inférieurs. En même temps, la part de la richesse des ménages des 9 % suivants a diminué par rapport au premier 1 %, malgré le fait qu’ils contrôlent encore plus de richesse que les 90 % inférieurs.

Ces données ont un contenu vivant. Elles s’expriment à travers tous les aspects de la vie personnelle, politique et culturelle. Personne ne nie que des sections substantielles des 9 pour cent suivants soient assaillis de pressions économiques réelles. Mais la nature et l’intensité de ces pressions sont d’un caractère qualitativement différent de celles vécues par ceux qui sont dans les 90 pour cent les plus bas, et encore plus parmi les 70 ou les 50 pour cent inférieurs.

Avec un degré variable d’urgence, la vie quotidienne de la grande partie des 90 % les plus pauvres est dominée par une lutte constante pour l’accès aux soins de santé, à une alimentation saine, au logement, à l’eau potable, à l’éducation, au transport pour se rendre au travail, à la prise en charge des jeunes enfants et des personnes âgées, et d’autres besoins de base pour la survie. Pour l’essentiel de cette partie de la population, l’échec peut entraîner la mort, le dénuement, la toxicomanie et l’alcoolisme, la prison, la confiscation de leurs enfants par les services publics de protection de l’enfance ou la privation de logement.

Les 9 pour cent suivants se préoccupent d’une toute autre sorte d’inquiétude sociale. Si ces pressions sociales ne sont pas liées à la survie physique quotidienne immédiate, les socialistes ne nient pas qu’elles existent pour cette couche, et nous ne prétendons pas qu’elles sont sans importance.

Ceux qui ont un revenu individuel brut de 122 000 dollars (le 90 centile) vivent des pressions matérielles réelles qui peuvent être la source d’un stress psychologique immense et de malheur personnel. Ils vivent en grande partie dans les zones urbaines et quartiers aisés, où ils sont physiquement séparés de la classe ouvrière, faisant leurs courses dans des épiceries différentes, fréquentant des restaurants différents, envoyant leurs enfants dans des écoles différentes. Il y a dans leur conscience sociale, plus ou moins, la crainte qu’un renversement soudain et dévastateur des chances ne les précipite dans la classe ouvrière.

En effet, le fait d’être conscient des limites de leur propre sécurité financière, en particulier par rapport à celle dont jouissent les 5 % supérieurs, motive un sentiment d’envie et de ressentiment. Bien que les membres de la classe moyenne supérieure prospère n’aient pas à s’inquiéter pour payer le prochain repas, ils comprennent très bien la différence, en ce qui concerne le mode de vie, entre un salaire de 125 000 dollars et un revenu annuel d’un million ou plus.

Le mécontentement social collectif à l’égard de la répartition « injuste » de la richesse au sein des 10 % supérieurs, c’est-à-dire avec sa concentration extrême dans le plus riche 1 et 0,1 %, s’exprime sous une forme hautement vocale de la petite bourgeoisie centrée sur l’ethnie, le genre et l’identité sexuelle. Son objectif n’est pas l’expropriation de la classe capitaliste et la réalisation de l’égalité sociale pour tous. Elle s’efforce plutôt de mettre en place un système de privilèges qui : 1) donne aux individus chanceux la possibilité d’intégrer les 10 pour cent supérieurs ; et 2) permette une répartition plus raisonnable de la richesse dans ces strates.

Les politiques d’admission aux universités et écoles supérieures, l’embauche et le licenciement des professeurs, les postes d’avocat, les nominations des juges et d’autres postes gouvernementaux et professionnels sont de plus en plus réglées par la politique de l’identité. De cette façon, la combinaison du revenu, du pouvoir politique et du prestige professionnel accélèrent le rôle joué par la politique identitaire dans la psychologie sociale et la politique de ces 9 pour cent qui suivent les plus riches.

Bien sûr, ce groupe de revenu est hétérogène. Il y aura des individus parmi les 9 pour cent suivants, même parmi le 1 pour cent, pour appuyer les luttes de la classe ouvrière. Les meilleurs éléments parmi les artistes et les spécialistes seront attirés vers la classe ouvrière si celle-ci est dotée d’une direction résolue.

Mais le fait de nier l’importance de la répartition de la richesse et du revenu comme un facteur très important dans le développement des opinions sociales et de l’orientation politique sert à dissimuler la signification essentielle des niveaux massifs d’inégalité qui caractérisent la société américaine. De plus, il sert à légitimer la subordination des intérêts de la grande masse de la classe ouvrière à ceux des couches les plus aisées de la classe moyenne.

Une analyse des inégalités sociales et de la stratification des classes a toujours été l’unité fondamentale d’analyse pour les marxistes.

Cette analyse a formé un élément central du travail de l’œuvre de Vladimir Lénine sur l’Impérialisme, et dans tous ses écrits sur l’effondrement de la Deuxième Internationale. Il a établi, par un usage détaillé des statistiques et des faits, que le développement de l’impérialisme et l’acquisition des superprofits par les grandes puissances capitalistes avaient des conséquences de grande envergure dans la structure de la société.

L’accumulation de super-profits a permis de « corrompre les chefs ouvriers et la couche supérieure de l’aristocratie ouvrière. […] Cette couche d’ouvriers embourgeoisés ou de l’ « aristocratie ouvrière », entièrement petits-bourgeois par leur mode de vie, par leurs salaires, par toute leur conception du monde, est le principal soutien de la IIᵉ Internationale, et, de nos jours, le principal soutien social (pas militaire) de la bourgeoisie. Car ce sont de véritables agents de la bourgeoisie au sein du mouvement ouvrier, » écrivait-il.

Lénine ne s’intéressait pas seulement à la bureaucratie syndicale, mais à une couche de travailleurs qui, « par leurs revenus » et par leurs conceptions du monde, constituaient le principal soutien social de la IIᵉ Internationale, le principal agent de la bourgeoisie. Ces couches étaient encore des ouvriers, contraints de vendre leur main-d’œuvre pour des salaires, mais ils occupaient une position sociale différente par rapport au reste de la classe ouvrière, une position qui dépend notamment du niveau de leurs revenus.

Cette analyse était de la plus haute importance pour la mise en place de la IIIᵉ Internationale en réponse à l’effondrement et à la trahison du Second car, comme le disait Lénine :

« Si l’on n’a pas compris l’origine économique de ce phénomène, si l’on n’en a pas mesuré la portée politique et sociale, il est impossible d’avancer d’un pas dans l’accomplissement des tâches pratiques du mouvement communiste et de la révolution sociale à venir. » [Lénine, les Œuvres complètes vol 22]

En mettant le cap de cette lutte, Lénine a fait une autre remarque décisive qui n’a rien perdu de sa pertinence. Contrairement à Karl Kautsky, le chef théorique de la social-démocratie allemande, dont l’orientation était tournée vers la bureaucratie et l’aristocratie ouvrières au motif qu’il fallait rester proche des masses organisées, Lénine a souligné qu’au XIXᵉ siècle Engels avait déjà fait la distinction entre ce qu’il appelait le « parti ouvrier bourgeois des anciens syndicats » – une minorité privilégiée – et la « masse inférieure », la vraie majorité.

Lénine conclut : « Et notre devoir, par conséquent, si nous voulons rester des socialistes, est d’aller plus bas et plus profond, vers les masses véritables : là est toute la signification de la lutte contre l’opportunisme et tout le contenu de cette lutte. » [Lénine, les Œuvres complètes vol 23]

La question de l’inégalité et de la stratification des revenus était également une préoccupation centrale dans l’analyse que fit Trotsky de l’Union soviétique. Une partie importante de La Révolution trahie est consacrée à l’examen de l’inégalité en URSS, et son rapport avec l’émergence d’une dictature totalitaire brutale. Trotsky définit la bureaucratie soviétique comme des « gendarmes » dont le but était de « réguler les inégalités » en Union soviétique. Il a étudié avec beaucoup de soin le revenu et la différenciation sociale au sein de la classe ouvrière soviétique, notant que le régime stalinien a cherché à cacher les données factuelles critiques. Répondant aux partisans du stalinisme qui prétendait que la concentration sur le revenu était un abandon de l’insistance marxiste sur la primauté du processus de production, Trotsky a écrit :

« Des “théoriciens” superficiels peuvent se consoler en se disant que la répartition des biens est un facteur de second plan par rapport à la production. La dialectique des influences réciproques garde pourtant toute sa force. Le destin des moyens nationalisés de production sera décidé en fin de compte par l’évolution des différentes conditions personnelles. Si un paquebot est déclaré propriété collective, les passagers restant divisés en première, deuxième et troisième classes, il est bien compréhensible que la différence des conditions réelles finira par avoir, aux yeux des passagers de troisième, une importance beaucoup plus grande que le changement juridique de propriété. Les passagers de première, au contraire, exposeront volontiers, entre café et cigare, que la propriété collective est tout, le confort des cabines n’étant rien en comparaison. Et l’antagonisme résultant de ces situations infligera de rudes secousses à une collectivité instable. » [La Révolution trahie]

Empruntons l’utilisation brillante par Trotsky de cette métaphore dans le but d’expliquer la signification essentielle de l’appel de la pseudo-gauche petite-bourgeoise à construire un « parti des 99 pour cent. » Sur le bateau de croisière Amérique, un pour cent des passagers occupent des cabines particulières avec vue pittoresque sur l’océan. Ils dînent avec le capitaine Trump dans un restaurant 5 étoiles où ils arrosent leur repas gastronomique avec du vin à 10 000 $ la bouteille. Un autre neuf pour cent des passagers, en fonction de ce qu’ils peuvent se permettre, se contentent de cabines dont la qualité reflète leur prix inférieur. Les moins chères des cabines dans la catégorie des dix pour cent supérieurs n’ont pas de vue sur l’océan et ont des tapis minables et des matelas inconfortable. Et, à moins qu’ils soient disposés et capables de payer un supplément substantiel, les occupants de ces cabines ne sont pas autorisés à utiliser la piscine et le spa réservés aux passagers les plus riches.

Les passagers qui composent les neuf pour cent inférieurs des dix pour cent des plus riches des passagers sont insatisfaits de l’attribution de cabines et des privilèges. Les plus astucieux d’entre-eux suggèrent qu’ils rectifient les injustices en exigeant qu’une partie des meilleures cabines soit attribuée en fonction de l’ethnicité, du genre et des préférences sexuelles des passagers. Bien sûr, pour parvenir à la réalisation de la redistribution souhaitée des cabines, un degré de soutien des masses est nécessaire. Et ainsi, ils se mettent à racoler ce soutien, en employant des expressions démocratiques vagues, auprès des 90 pour cent inférieurs des passagers qui voyagent dans l’entrepont ! De cette façon, le parti des 99 pour cent est lancé à bord du SS America ! Malheureusement, à la suite de cette révolution dans l’allocation des cabines, les 90 pour cent inférieurs des passagers continuent à voyager dans l’entrepont.

La question stratégique centrale qui est posée au mouvement socialiste est celle de son orientation de classe. La question à laquelle il faut répondre est : quelle est la force sociale qui sert de base au renversement du système capitaliste et à l’établissement d’une société socialiste ? Le mouvement socialiste devrait-il fonder son travail sur la grande masse de la classe ouvrière ou doit-il orienter et adapter son programme aux éléments insatisfaits parmi les dix pour cent des plus riches de la population ?

Les 90 pour cent inférieurs de la population américaine comprennent environs 300 millions de personnes. Ceci est certainement une base substantielle pour la construction d’un mouvement socialiste révolutionnaire. C’est de cette vaste couche sociale, qui attirera inévitablement le soutien des éléments les plus socialement conscients et les plus humains parmi les « 9 % suivants », que le mouvement marxiste révolutionnaire doit construire la force qui réglera les comptes avec la classe dirigeante américaine et le système mondial d’oppression capitaliste-impérialiste qu’elle préside.

(Article paru en anglais le 26 janvier 2017)

 

 

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