Les États-Unis dépassent la plupart des pays en termes d'inégalité des soins de santé

Être pauvre aux États-Unis est un bon indicateur que les soins que vous recevrez seront largement inférieurs à ceux de vos concitoyens plus aisés. Cette réalité, documentée dans une récente étude publiée par le Health Affairs, ne surprendra guère les travailleurs et les pauvres qui luttent quotidiennement pour avoir accès à des soins de santé et qui paient pour ces derniers.

À l'autre bout du spectre, les soins de santé de qualité supérieure reçus par les super-riches sont directement corrélés avec la capacité de ces derniers à payer pour les meilleurs soins que l'argent peut offrir.

La nouvelle étude, intitulée «The United States Leads Other Nations in Differences by Income in Perceptions of Health and Health Care», utilise des données provenant d'autoévaluations en lien avec la santé personnelle et les soins de santé selon le groupe de revenus. L'étude s'étale de 2011 à 2013 et regroupe 32 pays aux revenus moyens et élevés.

La période de l'étude ne prend pas en compte l'implémentation du Affordable Care Act (ACA), en particulier son expansion de Medicaid, le programme d'assurance pour les pauvres. Toutefois, contrairement aux affirmations du Parti démocrate, l'Obamacare n'a pas amené une amélioration de la qualité des soins médicaux pour la plupart des Américains, et dans plusieurs cas il a plutôt réduit la qualité des soins tout en en augmentant le coût. L'administration Trump est actuellement en train d'intensifier son assaut sur les soins de santé, avec des projets de coupures dans le programme Medicaid de 1,4 trillion de dollars sur 10 ans.

Les États-Unis affichent parmi les plus grandes inégalités d'accès aux soins de santé basées sur le revenu au sein des pays étudiés. Plus de la moitié des personnes sondées considéraient que les inégalités d'accès aux soins de santé attribuables au revenu étaient injustes. Ces personnes étaient aussi significativement plus enclines que les autres à soutenir une réforme en profondeur du système de santé.

Les pourcentages de répondants dans les 32 pays qui ont évalué leur santé comme étant moyenne ou médiocre, selon trois catégories de revenus, et les différences de pourcentage entre les catégories du haut et du bas. [credit: Health Affairs, June 2017, Vol. 36, Issue 6]

L'étude retrace les disparités dans les soins médicaux et les attitudes entre les différentes catégories de revenus (trois) des répondants. La première mesure correspond à la perception qu'a la personne de sa propre santé. Les résultats démontrent que 38,2% des personnes faisant partie du groupe de revenu le plus bas indiquaient avoir une santé moyenne ou médiocre, comparé à 21,4% pour les répondants de la catégorie de revenu du milieu et à 12,3% pour celle du sommet.

Cela signifie qu'il y avait 25,9 points de pourcentage qui séparaient les plus riches et les plus pauvres en termes de perception de leur santé. Les auteurs de l'étude considèrent 10% comme une grande disparité. Seulement le Portugal (26,7%) et le Chili (33%) ont démontré des disparités plus importantes de degré avec lequel les riches et les pauvres perçoivent leur propre santé.

Bien que les chercheurs n'ont pas documenté la variété de problèmes de santé qui affligent les pauvres aux États-Unis, les taux de diabètes, d'obésité, d'asthme, de maladies cardiaques, de cancer, d'abus de drogue, de violence conjugale, et une myriade d'autres maux surviennent à une fréquence plus élevée chez les populations à faible revenu.

Presque un quart des personnes dans la catégorie de revenu inférieure aux États-Unis indiquaient ne pas avoir accès aux soins médicaux dont ils avaient besoin à cause des coûts, c'est 16,5% de plus qu'au sein du groupe de revenu le plus élevé. C'est seulement dans les Philippines, avec 20,1%, que l'on retrouvait une plus grande disparité entre les riches et les pauvres dans l'accès aux soins à cause du coût.

À la question: «À votre avis, combien y a-t-il de personnes aux États-Unis qui n'ont pas accès aux soins de santé dont ils ont besoin?», 68% des Américains ont répondu «beaucoup». Devant la question: «Est-il juste ou injuste que les personnes avec les plus importants revenus puissent se procurer de meilleurs soins de santé que les personnes avec de bas revenus?», 54% ont répondu «passablement injuste» ou «très injuste».

Le manque d'accès à des soins médicaux de qualité contribue au déclin de la santé et de l'espérance de vie de millions d'Américains, qui est documenté par ces statistiques frappantes :

* Les décès attribuables à des overdoses de drogue aux États-Unis ont fait un bond jamais vu en 2016, selon des données compilées par le New York Times. Approximativement 59.000 personnes seraient décédées de cette manière, en hausse de 19% comparativement à 2015.

* L'espérance de vie aux États-Unis a diminué entre 2014 et 2015, pour la première fois depuis 1993, selon le Lancet. Les Américains aisés peuvent désormais s'attendre à vivre jusqu'à 15 ans de plus que leurs homologues les plus pauvres.

* Une étude faite par des économistes de l'Université Princeton démontre que l'augmentation du taux de mortalité des travailleurs blancs d'âge moyen aux États-Unis est entrainée par les «décès du désespoir» – causés par des overdoses de drogue, des complications dues à l'alcoolisme et le suicide.

* Une étude effectuée par l'American Medical Association a trouvé un impressionnant écart de 20,1 années entre la plus basse et la plus haute espérance de vie à l'échelle de tous les comtés américains.

* Le taux de mortalité maternelle aux États-Unis a cru de 27% entre 2004 et 2014 selon la revue Obstetrics & Gynecology.

Reflétant la crise actuelle de l'accès à des soins médicaux, le mois dernier plus d'un millier de personnes ont bravé la pluie, les vents violents et la basse température afin de faire la file devant la Remote Area Medical Clinic dans le comté de Smyth, dans l'État de Virginie, dans le but de recevoir des soins gratuits. Des gens sont venus d'aussi loin que les États de New York, du New Jersey, du Connecticut et du New Hampshire pour y recevoir des soins médicaux et dentaires dont ils auraient dû se passer autrement.

De l'autre côté, dans un nombre grandissant de villes à travers les États-Unis, on assiste à la croissance de pratiques médicales «sur mesure» qui pourvoient aux besoins des super-riches. Les personnes fortunées peuvent payer de 40.000$ à 80.000$ annuellement par famille pour profiter d'un accès immédiat à leur médecin, aux meilleurs spécialistes, aux meilleures suites dans les hôpitaux – que ce soit dans leur ville ou à travers le pays.

La crise des soins de santé est vouée à s'aggraver de manière dramatique. La pièce maitresse du American Health Care Act (AHCA) républicain, promulguée par la Chambre des représentants le mois dernier, est l'éviscération du programme Medicaid. Le projet de budget de l'administration Trump intègre les coupes dans Medicaid et appelle à des coupes de 1,4 billion de dollars dans les programmes de santé pour les pauvres, en plus d'autres coupures massives dans les programmes sociaux.

Tout comme Obamacare, le plan républicain prend comme point d'assise l'idée d'un système de santé basé sur la subordination des besoins médicaux de la vaste majorité de la population aux impératifs de profitabilité de l'industrie médicale et de Wall Street.

Une solution socialiste à la crise du système de santé, et aux immenses inégalités sur lequel il repose, doit prendre comme point de départ les besoins des travailleurs et de la société en général, et non les intérêts financiers des grandes compagnies d'assurance et des banques, dans le cadre d'une réorganisation de l'économie selon des principes socialistes.

(Article paru en anglais le 9 juin 2017)

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