Effusion de colère contre l’incendie de Grenfell Tower au rassemblement de Londres contre l’austérité

Londres, samedi, des dizaines de milliers ont défilé lors d’une manifestation contre le gouvernement conservateur titré : « Pas un seul jour de plus ».

La marche a commencé au siège de la BBC, Broadcasting House, à Portland Place et s’est rendu sur la Place du Parlement. Il y a eu des allocutions des orateurs, y compris le chef du Parti travailliste, Jeremy Corbyn, le secrétaire général du Congrès des syndicats (TUC), Frances O'Grady des Verts et le secrétaire général du syndicat Unite, Len McCluskey.

Une partie de la manifestation à Londres

Le rassemblement a été organisé par l’Assemblée du peuple, une organisation pro-Parti travailliste. Son but était de promouvoir la formation d’un gouvernement travailliste comme réponse aux mesures d’austérité des conservateurs (torys).

Au début de juin, le chancelier fantôme de l’opposition officielle, John McDonnell, a appelé un million de personnes à « sortir dans les rues » pour la protestation. Il fallait faire pression sur la Première ministre, Theresa May, pour appeler une autre élection « le plus tôt possible. Ce dont nous avons besoin, c’est que le TUC soit mobilisé, chaque syndicat soit mobilisé, et sortir dans les rues. Imaginez si le TUC lançait cet appel – que nous voulons être un million dans les rues de Londres dans deux semaines », a-t-il déclaré.

Le rassemblement aurait pu être beaucoup plus grand qu’il ne l’était – l’estimation la plus élevée par l’Assemblée du peuple elle-même était de 100 000 personnes. C’était la première grande manifestation nationale depuis que les torys ont subi un effondrement électoral humiliant lors des élections générales du 8 juin. Tout en restant au pouvoir dans une alliance instable avec le Parti unioniste démocratique (Irlande du Nord), les conservateurs ont perdu leur majorité en raison d’une augmentation du soutien au Parti travailliste, fondée sur l’affirmation par Corbyn que le Parti travailliste était un parti anti-austérité. Après la défaite du Parti travailliste aux élections générales de 2015, le rassemblement de l’Assemblée du peuple de cette année a attiré 250 000 personnes.

John McDonnell

Mais contrairement à McDonnell, les syndicats et le Parti travailliste lui-même ont fait très peu de mobilisation pour la manifestation. Le TUC ne s’est même pas gêné de faire connaître la démonstration sur son site web. Leur but primordial est de veiller à ce que, si les torys tombent, cela ne résultera pas dans un mouvement de masse de la classe ouvrière que le Parti travailliste ne peut pas réorienter sur des voies parlementaires.

Toutefois, alors que les organisateurs essayaient de promouvoir une atmosphère de kermesse, soutenus par des chants adulateurs de « Oh Jeremy Corbyn », beaucoup de participants étaient en colère et l’enfer de la Grenfell Tower du 14 juin était la principale motivation pour ces personnes.

Beaucoup de pancartes portaient des appels comme « Justice pour Grenfell », et lorsque la marche a atteint la place du Parlement, une minute de silence a eu lieu « pour la mémoire et le respect » de ses victimes.

Le chancelier de l’ombre, John McDonnell, a promis à ses victimes : « Nous allons rester avec vous et vos familles tout du long. Nous vous apportons de la sympathie, mais, plus important encore, nous vous apportons la solidarité ». Mais sa seule proposition pratique était que le Parti travailliste garantirait que « chacune de ces familles est bien logée dans la communauté dans laquelle elles veulent vivre ».

Lindsey German

Lindsey German de Counterfire, parlant en tant que celle qui a lancé la coalition « Arrêtez la guerre » (Stop the War), a déclaré que trois semaines après les élections générales, « Nous sommes ici aujourd’hui pour dire à Theresa : on vous prévient ».

« Nous avons besoin d’un changement de système », a-t-elle déclaré, avant de souligner, « Nous avons besoin d’une élection. Mais nous ne pouvons pas attendre jusque-là. Nous avons besoin de plus de manifestations et d’assemblées populaires ».

Dans un contexte où les syndicats ont systématiquement saboté chaque lutte au cours de la dernière décennie contre l’austérité, German a insisté que les travailleurs doivent continuer de soutenir ces organisations pourries, en exhortant : « chaque travailleur du secteur public, à travers son syndicat, doit dire : nous devons faire pression pour des grèves. »

La secrétaire générale du TUC, Frances O'Grady, a déclaré : « Je suis fière de représenter des millions de travailleurs. Qui sait ce qui se passera ensuite. Les gens qui travaillent ont faim de changement. « En utilisant le gouvernement Tory comme excuse pour un refus de se battre, elle a ajouté pathétiquement : « Nous voulons que nos syndicats soient libres de nous défendre pour supprimer le plafonnement des salaires. »

Frances O'Grady

Le conseiller du Parti vert à l’Assemblée de Londres, Sian Berry, a déclaré que les intervenants n’étaient pas tous dans le même parti, mais partagent les « mêmes valeurs », ajoutant que « l’austérité est condamnée ». Elle a dit qu’elle « espérait et faisait confiance » à ce que Corbyn fournirait « des mots solides sur la conduite des conseils municipaux du Parti travailliste et les faire mieux se comporter » en ce qui concerne les coupes d’austérité qu’ils ont menées et « les remettre d’aplomb ».

Corbyn ne fera rien de tel. En réalité, quelques semaines seulement après avoir remporté la compétition pour la direction du Parti travailliste en septembre 2015, Corbyn et McDonnell ont publié une lettre demandant aux conseils municipaux du Parti travailliste qui contrôlent les dépenses publiques dans toutes les grandes villes, de se conformer à la loi et d’imposer des mesures d’austérité exigées par les conservateurs.

Corbyn, lui-même a parlé pendant 10 minutes, en déclarant : « Nous sommes de plus en plus soutenus et nous sommes déterminés à forcer une autre élection dès que possible ».

Jeremy Corbyn

La campagne du Parti travailliste avait été évaluée comme perdue d’avance par « les commentateurs, les journaux intellectuels et la plupart des tabloïds, mais pas tous » et les élections décrites comme « une promenade de santé pour les conservateurs », a-t-il déclaré. Brandissant cela comme la renaissance du Parti travailliste, il n’a fait aucune mention des initiatives de la droite du Parti travailliste contre lui au cours des deux dernières années, les blairistes s’efforçant activement de perdre beaucoup des élections pour hâter sa disparition.

En ce qui concerne l’incendie de Grenfell Tower, Corbyn a déclaré : « Quelque part, il y a un système tout entier qui les a amenés à vivre dans un piège à incendie ».

Il a loué les services d’urgence, mais au milieu de la colère croissante du public face à la perte horrible de vies, il n’a pas retiré son soutien à l’enquête publique fallacieuse de May – ce qui serait le moyen le plus sûr d’accélérer son élimination du pouvoir.

Beaucoup de résidents de Grenfell ont déclaré qu’ils ne coopéreraient pas avec l’enquête après que son chef, l’ancien juge de la Cour d’appel à la retraite Sir Martin Moore-Bick, a déclaré aux médias qu’il croyait que l’enquête et ses recommandations seraient « assez bien limitées » à ce qui avait causé l’incendie et sa propagation rapide et ne conduirait pas à une enquête plus large.

Le rassemblement au Parlement Square

Deux jours avant la manifestation, cela avait incité Corbyn à conseiller poliment May dans une lettre pour que l’enquête soit divisée en deux parties ! Cela garantirait que « la rapidité ne devrait pas être sacrifiée à la rigueur ». La compréhension de la façon dont le feu a commencé était « de la plus haute importance », a-t-il écrit, mais « c’est également clair que l’incendie de Grenfell a des implications beaucoup plus larges pour des questions de politique nationale ».

Le samedi Corbyn a émis un mélange semblable de soporifiques politiques et de rhétorique militante. Plutôt qu’un appel à la lutte politique et sociale ou même à une mesure pratique à prendre contre le gouvernement, il a seulement parlé de Grenfell qui nous a enseigné « un message » de la nécessité d’un logement social décent, de la fin des inégalités en matière de santé et de l’austérité. Les conservateurs et l’austérité étaient « en retrait », a-t-il conclu. « C’est l’époque de l’imagination. C’est l’époque dans laquelle nous atteindrons cette décence et cette justice sociale que nous désirons tous ».

(Article paru d’abord en anglais le 3 juillet 2017)

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