Les travailleurs des plantations au Sri-Lanka déclenchent une grève illimitée pour obtenir une augmentation de salaire de 100 pour cent

Des centaines de milliers de travailleurs des plantations ont entamé une grève indéfinie mercredi, exigeant un doublement de leur salaire journalier. Des travailleurs de tous les districts de plantations de thé du Sri Lanka, y compris Nuwara-Eliya, Badulla, Kandy, Kegalla, Ratnapura, Kalutara et Colombo, y participent.

Le 26 novembre, les travailleurs ont débrayé, insistant sur leur revendication de longue date d’une augmentation de 100 pour cent. Les travailleurs des plantations, qui comptent parmi les secteurs les plus opprimés de la classe ouvrière de l’île, ne travaillent actuellement que pour 500 roupies (2,45 euros) par jour.

Dans une tentative de faire dérailler la lutte, les syndicats des plantations, y compris le Ceylon Workers Congress (Congrès des ouvriers de Ceylon/Sri Lanka – CWC) dirigé par Arumugam Thondaman, ont tenu une nouvelle série de discussions futiles avec les dirigeants de compagnies mardi, mais les employeurs ont catégoriquement refusé de doubler le salaire minimum.

Même après avoir appelé à contrecœur à une grève illimitée, les dirigeants du CWC ne voulaient pas que les travailleurs s’engagent dans des manifestations. Néanmoins, des piquets de grève, des réunions et des manifestations ont éclaté dans plusieurs domaines.

Ligne de piquetage des travailleurs devant une usine du domaine d'Abbotsleigh

Des membres de syndicats rivaux, dont le Syndicat national des travailleurs (NUW), le Front populaire démocratique (DPF) et le Front populaire de la région des plantations (UPF), se sont joints à la grève, défiant les appels de leurs dirigeants de ne pas la soutenir.

Lors de manifestations organisées indépendamment des syndicats, les travailleurs ont scandé des slogans contre les Compagnies régionales des plantations (RPC) et le gouvernement.

Cette lutte des travailleurs aggravera la crise politique de l’élite dirigeante, qui est déchirée par une intense lutte de factions et fait face à une opposition sociale croissante.

Lorsque le président Maithripala Sirisena a inconstitutionnellement limogé Ranil Wickremesinghe de son poste de premier ministre et l’a remplacé par l’ancien président Mahinda Rajapakse le 26 octobre, Thondaman, chef de la CWC, a rejoint le gouvernement Rajapakse. Thondaman a justifié son action en citant la promesse totalement bidon de Rajapakse d’augmenter le salaire journalier à 1.000 roupies.

Les membres du Parti de l’égalité socialiste (SEP – Socialist Equality Party) ont visité les plantations des montagnes, où les travailleurs ont exprimé leur colère envers les syndicats et leurs dirigeants.

Dans l’une des quatre divisions du domaine d’Abbotsleigh, à cinq kilomètres de Hatton, environ 70 travailleurs qui se sont rassemblés près de l’usine ont écouté avec enthousiasme les orateurs du SEP expliquer la nécessité d’une stratégie internationale et de nouvelles formes d’organisation pour que les travailleurs obtiennent leurs revendications.

Les membres du SEP ont souligné que les employeurs sur les plantations n'étaient pas prêts à augmenter les salaires, et insistaient plutôt sur une productivité accrue pour surmonter la crise de l'industrie et en tirer des bénéfices par l'exploitation impitoyable des travailleurs.

Thevarajah du SEP s'adressant aux travailleurs

Thevarajah du SEP a déclaré: «Des luttes ouvrières ont éclaté dans tous les pays contre les attaques imposées par les classes capitalistes. Les travailleurs sri lankais doivent s'unir à leurs frères de classe internationale pour lutter pour un programme socialiste».

Thevarajah a exhorté les travailleurs à établir des comités d’action démocratiquement élus sur les lieux de travail et les domaines. Les comités devaient être totalement indépendants des syndicats, devenus les agents des entreprises.

«Les travailleurs doivent prendre le contrôle des grands domaines, des grandes industries, des grandes entreprises et des banques et organiser la production et la distribution dans l'intérêt des travailleurs et des pauvres, et non pour les profits des riches», a déclaré l'orateur du SEP.

«Ce n'est qu'alors que les travailleurs pourront défendre leurs droits sociaux et démocratiques. Le rejet par les entreprises de plantation des revendications des travailleurs, avec le soutien du gouvernement, montre que les travailleurs ne peuvent obtenir leurs droits que dans le cadre d'une lutte politique et en s'unissant aux travailleurs de tous les secteurs et au niveau international».

Les ouvriers sur le piquet criaient des slogans: «Travailleurs de tous les pays, unissez-vous!» «Construisez des comités d’action sur les politiques socialistes internationales» et «Luttez pour un gouvernement ouvrier et paysan». Après discussion avec les membres du SEP, les travailleurs d’Abbotsleigh ont décidé de former un comité d’action.

Kanakasapai, 57 ans, qui travaille dans le domaine depuis 42 ans, a déclaré aux correspondants du WSWS: «Les responsables syndicaux nous coupent délibérément du monde extérieur, empêchant la collaboration avec d’autres travailleurs et bloquant la connaissance de la cause profonde de nos problèmes. Tous les travailleurs devraient connaître les problèmes auxquels les travailleurs des plantations font face. Si les travailleurs s’unissent, alors ils peuvent gagner leurs droits».

Sivapakyam, 60 ans, qui travaille dans la plantation depuis 30 ans, a commenté: «Nous ne demandons pas une vie luxueuse. Nous demandons simplement un salaire journalier de 1.000 roupies pour nourrir nos familles et éduquer nos enfants. Les médecins nous conseillent de donner des vitamines à nos enfants, car ils ne sont pas en bonne santé. Comment trouver des vitamines alors qu’il est difficile de gagner assez pour un repas quotidien? Nous sommes prêts à aller dans d’autres divisions et à organiser les travailleurs».

Les travailleurs du domaine de Hanthana, près de Kandy, ont également critiqué les syndicats.

Nawaratne a dit: «Le vrai problème, c’est que nous n’avons pas de direction. Nous n’avons foi en aucun syndicat. Les syndicats ne s’inquiètent plus des travailleurs des plantations. Je pense que les travailleurs doivent former de nouvelles organisations pour défendre leurs droits. Nous accueillons un tel mouvement».

Kumaraswami, un travailleur récemment retraité de la même propriété, a expliqué: «Les propriétaires de l’entreprise ferment de nombreux domaines et les transforment maintenant en hôtels et autres commerces. Des hommes d’affaires multimillionnaires s’emparent d’hectares de terre pendant que les ouvriers des plantations réclament quelques lots [25 mètres carrés] pour construire des maisons où vivre.

«Les seules organisations que nous connaissions pour présenter nos revendications étaient les syndicats. Mais maintenant, je n’y crois plus. Les travailleurs appuieront sûrement un mouvement qui fournira un programme approprié».

Cette lutte salariale a atteint un stade critique. Les entreprises ont insisté sur le fait que les travailleurs doivent accepter le système de partage des revenus des employeurs. Dans le cadre de ce système, les travailleurs se voient allouer environ 1.000 théiers pour travailler, ce qui les transforme en métayers. Des familles entières doivent travailler d’arrache-pied les parcelles attribuées.

Dans les domaines où le programme a été mis en œuvre, les travailleurs ont commencé à remettre les parcelles aux entreprises parce que le système est devenu un fardeau énorme pour les familles des travailleurs. Dans d’autres domaines, les entreprises n’ont pas réussi à mettre en œuvre le régime en raison de la résistance des travailleurs.

Comme le montre l'appartenance de Thondeman au gouvernement de Rajapakse, les syndicats agissent en tant qu'agents des entreprises et des gouvernements.

Des dirigeants de la NUW, du DPF et de l’UPF – P. Digambaram, Mano Ganeshan et P. Radhakrishnan – étaient ministres dans le gouvernement précédent de Sirisena et Wickremesinghe. Au fur et à mesure que les gouvernements vont et viennent, les bureaucraties syndicales changent d’allégeance pour obtenir des privilèges et réprimer les luttes des travailleurs.

Les syndicats se sont alignés d’un côté ou de l’autre de la lutte entre les factions rivales de la classe capitaliste, l’une dirigée par Sirisena et Rajapakse, et l’autre par Wickremesinghe. Thondaman soutient Sirisena et Rajapakse, et les autres syndicats soutiennent Wickremesinghe.

Confrontées à une révolte des travailleurs au Sri Lanka et à l’échelle internationale, ces factions se préparent à écraser cette résistance. Comme l’ont souligné les orateurs du SEP, la seule alternative est la lutte pour un gouvernement ouvrier et paysan sur la base du socialisme international. Cela signifie qu’il faut adhérer au SEP et en faire un parti révolutionnaire de masse.

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