Bernie Sanders et Elizabeth Warren glorifient le défunt président Bush

Parmi les commentaires les plus notables sur la mort du président républicain qui a supervisé d'innombrables crimes de guerre, il y avait deux éminents démocrates «progressistes»: le sénateur du Vermont Bernie Sanders et la sénatrice du Massachusetts Elizabeth Warren.

Sanders a tweeté tôt samedi matin: «Le président George H.W. Bush a servi notre pays honorablement. On se souviendra de lui et de Barbara pour leur humble et dévoué service au pays qu'ils aimaient. Jane et moi envoyons nos plus sincères condoléances à toute la famille Bush.»

Warren a commenté dans la même veine sur Twitter: «George H.W. Bush était un patriote américain qui a vécu sa vie et a servi notre pays avec dignité. Depuis son entrée dans la Marine pendant la Seconde Guerre mondiale jusqu'à la présidence, son dévouement au service du public a été sans égal. Bruce et moi envoyons nos sincères condoléances à sa famille.»

Il convient également de noter que sur les 25 nouveaux démocrates du Congrès qui se sont identifiés comme «progressistes», tous, à l'exception de quatre d'entre eux, ont tweeté les louanges et les condoléances de feu Bush. Beaucoup sont même allés jusqu'à retweeter la déclaration officielle d'Obama.

La qualification de George H. W. Bush comme un «patriote américain» qui a servi «honorablement» et avec «dignité» n'a pas besoin d'être réfutée. Tout compte rendu véridique de sa présidence confirmera sans l'ombre d'un doute qu'il était un criminel de guerre responsable de la mort de milliers d'innocents au pays et à l'étranger.

Il est peut-être surtout connu pour avoir orchestré la première guerre du Golfe qu'il a vendue au public américain sur un tas de mensonges (une méthode employée pendant des années sous la forme d’«armes de destruction massive» par son fils pour vendre la guerre en Irak). Tout au long de ce conflit, il a supervisé la destruction de l'Irak, larguant 88.500 tonnes de bombes sur le pays, tuant des milliers de personnes innocentes. Parallèlement à cette guerre à l'étranger, il a également supervisé l'escalade brutale de la «guerre contre la drogue» sur le territoire national, qui a conduit à l'incarcération de milliers de travailleurs et de jeunes.

Ces crimes contre l'humanité ne sont pas un lointain souvenir pour de nombreux travailleurs. En fait, un examen des commentaires sous le tweet de Sanders samedi dernier révèle l'immense colère et la haine ressenties au sein de la classe ouvrière pour la présidence de Bush père. Parmi des centaines de commentaires en colère, et certains très colorés, une personne a écrit: «C'était un criminel de guerre. Il aimait les riches et se remplissait les poches. Ne louangez pas faussement quelqu'un d'aussi répugnant que GHWB juste parce qu'il est mort. S'il y a un enfer, il est là pour de nombreux crimes contre le peuple américain et le monde.» Un autre, «Honorable? Ça en dit long sur ce que vous croyez être honorable.»

Quelle est donc la signification de l'éloge quasi universel d'une telle figure parmi les membres apparemment «de gauche» et «progressistes» du Parti démocrate ? Qu'en est-il du bilan de George H. W. Bush qui sonne «honorable» et «digne» aux yeux de ces personnalités ? Qu'est-ce que cela indique sur la nature du conflit entre les deux parties ?

L'expression de solidarité envers la dynastie Bush exprimée par les dirigeants du Parti démocrate, et en particulier Warren et Sanders, exprime une vérité fondamentale de la politique bourgeoise: malgré les féroces luttes intestines entre républicains et démocrates, les deux partis sont fondamentalement d'accord sur toutes les questions fondamentales. Ils s'accordent sur une défense de l'inégalité, des «frontières fortes», de la guerre et du système sur lequel reposent leur richesse et leur position dans la société: le capitalisme. Il ne s'agit pas d'une question de moralité ou d'amitiés personnelles, mais d'un intérêt de classe partagé.

Cette réalité s'est confirmée à maintes reprises au cours des deux dernières années. L'une des premières actions du Parti démocrate au lendemain de la victoire de Trump a été d'appeler à l'accommodement et à la coopération pour assurer une «transition pacifique». Obama est allé jusqu'à proclamer que les élections n'étaient qu'une «mêlée intra-muros» dans laquelle toutes les parties étaient «dans une seule équipe», tandis que Sanders a annoncé qu'il «et d'autres progressistes sont prêts à travailler avec» Trump sur des politiques visant à «améliorer la vie des familles qui travaillent».

Le même scénario a été joué après les élections de mi-mandat de cette année. Après avoir fait un appel extrêmement limité au sentiment populaire anti-Trump, dans le seul but de le détourner sur des voies sûres pour le système capitaliste, la première chose qui importait aux démocrates à la fermeture du scrutin était de demander «l'unité». Le député de Pelosi à la Chambre, Steny Hoyer, a déclaré peu de temps après les résultats que: «Ses objectifs[Trump] sont des objectifs que nous partageons... il y a une ouverture pour que nous puissions travailler ensemble.»

Quant à Sanders, la déclaration de solidarité avec George H. W. Bush n'est pas un changement d'avis soudain. Elle s'inscrit plutôt dans la lignée de sa campagne de 2016 où il a canalisé le soutien qu'il avait gagné en faisant appel à la haine populaire contre les milliardaires, derrière la candidate méprisée de Wall Street, Hillary Clinton.

La célébration extatique de criminels de guerre comme John McCain il y a quelques mois et George H. W. Bush la semaine dernière fait partie intégrante de la campagne féroce de droite du Parti démocrate, dans laquelle il cherche activement à obtenir le soutien de la population pour les guerres futures. La campagne du Parti démocrate contre Trump s'est principalement concentrée non pas sur ses attaques fascisantes contre les immigrés ou contre les droits démocratiques en général, ni sur ses propos bellicistes, mais sur l'affirmation selon laquelle Trump n'est pas suffisamment engagé dans une politique de confrontation contre la Russie.

Les louanges dirigées vers George H. W. Bush par le Parti démocrate sont une décision politique calculée. Les travailleurs et les jeunes qui ont peut-être encore l'illusion que la «vague bleue» des démocrates saluée comme la cohorte «la plus diverse» de l'histoire devrait prendre note de ces événements et en tirer les conclusions nécessaires. La «diversité» des personnes élues aux élections de mi-mandat se résume au sexe, à l'orientation sexuelle, à l'appartenance ethnique, à l'âge et aux autres «identités». Mais lorsqu'il s'agit d'opinions politiques, elles sont remarquablement unifiées en tant que démocrates du statu quo qui n'ont aucun problème à honorer les criminels de guerre.

(Article paru en anglais le 3 décembre 2018)

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