Les leçons de 1933 et la lutte contre le fascisme aujourd'hui

Lancement réussi de la campagne électorale de l'IYSSE à l'Université Humboldt de Berlin

Le 9 janvier, l'IYSSE (International Youth and Students for Social Equality – Etudiants et jeunes internationalistes pour l'égalité sociale) de l'Université Humboldt de Berlin a tenu la première réunion de sa campagne pour les élections au Parlement étudiant de cette année. Une soixantaine d'étudiants ont assisté à la réunion, intitulée « Les leçons de 1933 et la lutte contre le fascisme aujourd'hui ».

Sven Wurm, porte-parole de l'IYSSE à l'Université Humboldt (UH) et l'un des six candidats de l'IYSSE, a commencé par expliquer pourquoi l'organisation de jeunesse du Comité international de la Quatrième Internationale (CIQI) plaçait la lutte contre le fascisme et la discussion des leçons de l'histoire au cœur de sa campagne électorale. Alors que la grande majorité de la population rejetait la politique du néofascisme, a-t-il dit, l’extrémisme de droite, en Allemagne comme dans le monde, avaient été renforcés.

Cela était devenu particulièrement clair à l’UH ces dernières années. Après que les étudiants eurent critiqué les positions d'extrême droite du professeur Jörg Baberowski (qui remettait par exemple en question la cruauté d'Hitler et faisait de l’agitation contre les réfugiés), l'administration de l'université avait défendu le professeur et menacé les étudiants qui s'élevaient contre lui.

Entre-temps, à la demande du parti d’extrême droite Alternative pour l'Allemagne (AfD), la présidente de Humboldt, Sabine Kunst, du Parti social-démocrate (SPD), poursuit les étudiants en justice afin d'obtenir la publication d'une liste complète des étudiants actifs dans le RefRat, comme on appelle l'administration des étudiants à l’UH. Baberowski lui-même a incité ses partisans fascistes à attaquer des réunions d’étudiants de gauche.

« Dans ces conditions, il est crucial de tirer les leçons de l'histoire de ce pays et de discuter des raisons pour lesquelles la lutte contre la guerre et le fascisme exige encore une fois aujourd'hui une perspective socialiste », a dit Wurm. C'est pourquoi l'IYSSE avait invité le rédacteur en chef de l'édition allemande du World Socialist Web Site, Johannes Stern, à parler de ces questions.

Stern a souligné dans ses remarques qu'aujourd'hui, comme auparavant, il existait un lien étroit entre la montée des forces d'extrême droite et la crise capitaliste. Ce n'est que dans le sillage de la Grande Dépression qui a commencé en 1929 et de l'appauvrissement massif de la petite-bourgeoisie que le Parti nazi a pu devenir un parti de masse.

Mais Hitler n'avait pas été en mesure d'amener la majorité des électeurs derrière lui. Il a été porté au pouvoir en janvier 1933 par une conspiration d'État dirigée par l'ancien chancelier Franz von Papen et le président Paul von Hindenburg. Puis, le 24 mars 1933, tous les partis bourgeois du Reichstag votèrent en faveur de la Loi d'habilitation, qui sanctionnait l'établissement de la dictature nazie.

Stern a expliqué les fondements politiques et sociaux du fascisme allemand. Le capital financier et la grande industrie allemands avaient donné le pouvoir à Hitler et aux nationaux-socialistes pour écraser la résistance de la classe ouvrière et empêcher une révolution sociale. Il a cité l'essai de Léon Trotsky, Qu'est-ce que le national-socialisme ? : « Une fois le programme des illusions petites bourgeoises réduit à une pure et simple mascarade bureaucratique, le national-socialisme s'élève au-dessus de la nation, comme la forme la plus pure de l'impérialisme […] la véritable mission historique de la dictature fasciste, implique la préparation de la guerre ».

Se basant sur les autres écrits de Trotsky sur l'Allemagne, Stern expliqua comment la conspiration pour remettre le pouvoir aux Nazis, malgré la grande résistance de la classe ouvrière, avait prévalu. La victoire d'Hitler avait été « la honte des dirigeants ouvriers ». Ainsi, après sa trahison historique en 1914 et son vote pour les crédits de guerre, et son rôle contre-révolutionnaire ouvert dans la Révolution de novembre 1918/1919, le SPD avait défendu la République capitaliste de Weimar et craint une révolution socialiste plus que le national-socialisme

La tâche du Parti communiste allemand (KPD) était de mobiliser les travailleurs sociaux-démocrates pour une lutte commune avec le KPD contre Hitler. Mais la politique « tout à fait erronée » du KPD déjà stalinisé l'a empêchée. Le KPD a choisi un cours en zigzag, oscillant entre la théorie ultra-gauche du « social-fascisme » et l'adaptation nationaliste aux fascistes dans le soi-disant « référendum rouge ». Cela a finalement repoussé les travailleurs sociaux-démocrates et torpillé la proposition de Trotsky pour un front uni des travailleurs contre le fascisme.

« La leçon de 1933 », explique Stern, « que le danger du fascisme ne peut être combattu que par la mobilisation indépendante de la classe ouvrière contre le capitalisme et ses défenseurs politiques est décisive ». Contrairement aux années 1930, le fascisme d'aujourd'hui n'était pas encore un mouvement de masse, mais comme par le passé, le retour des élites dirigeantes au militarisme ne pouvait se faire que par des moyens dictatoriaux contre la grande opposition de la population. « C'est pourquoi tous les partis bourgeois – de l'Union démocratique chrétienne/Union chrétienne sociale chrétienne (CDU/CSU) et du SPD au Parti de gauche et aux Verts – reprennent le programme nationaliste droitier de l'AfD et travaillent déjà étroitement en coulisses avec le parti d'extrême droite.

A la fin de ses remarques, Stern a souligné que les mêmes contradictions qui donnent naissance à la guerre impérialiste et au fascisme produisent un retour de la lutte des classes. Il a cité en exemple les grèves des enseignants américains l'année dernière, la poursuite des manifestations de masse des « gilets jaunes » en France et, plus récemment, la grève générale de deux jours de plus de 200 millions de travailleurs en Inde. Il a noté la propagation en Allemagne de protestations et de grèves contre les bas salaires, les mauvaises conditions de travail, les lois d’État policier des gouvernements régionaux et la montée de l'AfD.

« L'IYSSE et le Comité international de la Quatrième Internationale luttent pour armer l'opposition croissante parmi les travailleurs et les jeunes avec un programme socialiste », a dit Stern. Il a cité le programme du Sozialistische Gleichheitspartei (Parti socialiste pour l'égalité – SGP) pour les élections européennes: « Nous n'essayons pas d’atténuer les symptômes d'un système malade, mais préconisons bien plutôt le renversement du capitalisme... Ce n'est que si la classe ouvrière de toute l'Europe se rassemble et se bat pour les Etats-Unis d'Europe qu'une catastrophe pourra être évitée ».

Il y eut une forte réponse à la conférence et une discussion très sérieuse et animée s'engagea sur des questions concernant l’histoire, la politique et la perspective socialiste de la IVe Internationale. Les activités de la droite à l’UH et le travail de l'IYSSE sur le campus ont également été discutés. Un participant a demandé ce qui pouvait être fait outre voter pour les candidats de l'IYSSE les 23 et 24 janvier.

Wurm a répondu que n'importe qui pouvait soutenir la campagne électorale de l'IYSSE et prendre la décision consciente de devenir membre et de rejoindre la lutte pour le socialisme. « L'humanité est de nouveau confrontée à l'alternative du socialisme ou de la barbarie et la Quatrième Internationale est aujourd'hui le seul représentant authentique du socialisme », a-t-il dit.

De nombreux étudiants se sont inscrits comme contacts, pour participer à la lutte et pour soutenir la campagne de l'IYSSE.

La prochaine réunion de l'IYSSE aura lieu le 16 janvier sous le titre « Rosa Luxemburg et Karl Liebknecht: Les premiers meurtres fascistes en Allemagne. »

(Article paru en anglais le 16 janvier 2019)

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