Perspectives

Manifestation du 9 février contre les fermetures d’usines automobiles à Detroit

Le programme et la stratégie pour défendre les emplois

Le 9 février, l’Autoworker Newsletter (Bulletin d’information des travailleurs de l’automobile) du WSWS et le comité directeur de la Coalition des comités de base organisent une manifestation devant le siège de General Motors à Detroit, dans le Michigan.

Il s’agit de la première manifestation organisée d’opposition de la base aux projets de GM visant à fermer cinq usines aux États-Unis et au Canada, ce qui aura des conséquences dévastatrices pour des milliers de travailleurs, leurs familles et les communautés dans lesquelles les usines sont situées, notamment: Hamtramck, Michigan; Lordstown, Ohio; et Oshawa, Ontario.

La manifestation est animée par un programme et une stratégie clairs. Ce n’est pas un appel à GM et à ses dirigeants, mais un appel aux travailleurs pour qu’ils expriment leur force et leur détermination à se battre en formant des comités de base, indépendants des syndicats contrôlés par les entreprises, gérés par cadres privilégiés et totalement corrompus.

Elle exigera l'arrêt immédiat de toutes les fermetures d'usines, l'abolition du système de rémunération et d'avantages sociaux à deux niveaux, la transformation de tous les travailleurs intérimaires en travailleurs à temps plein permanent et la réembauche de tous les travailleurs licenciés et persécutés. En opposition au régime dictatorial pratiqué par les cadres supérieurs des usines, elle se battra pour la démocratie et le contrôle ouvrier de la production et la transformation des géants de la construction automobile en entités publiques, gérés sur la base des besoins sociaux et non du profit privé.

La manifestation aura lieu dans des conditions de lutte de classe croissante aux États-Unis et dans le monde entier. Les élites capitalistes, déchirées par des conflits internes entre factions d’ordre géopolitique, sont unies dans leur offensive contre la classe ouvrière, grâce à laquelle elles ont amassé des fortunes sans précédent. Partout dans le monde, les capitalistes sont engagés dans une restructuration mondiale de l'industrie automobile servant de fer de lance d'une nouvelle redistribution de la richesse de la classe ouvrière aux riches.

La contre-révolution sociale de la classe dirigeante se heurte à une résistance croissante. Dans les jours qui ont suivi l'annonce initiale de la manifestation, des dizaines de milliers de travailleurs à Matamoros (Mexique), à la frontière américano-mexicaine, ont déclenché une grève sauvage. Les travailleurs ont formé des organisations indépendantes et ont défilé sous le slogan «Le syndicat et l'entreprise tuent la classe ouvrière». La grève, qui menaçait d’interrompre la production de l'industrie automobile nord-américaine, a démontré l’existence des intérêts communs des travailleurs américains, canadiens et mexicains.

Terrifiés par la perspective d’une lutte unifiée des travailleurs de part et d’autre de la frontière américano-mexicaine, les grands médias et les syndicats ont complètement occulté les informations sur la grève à Matamoros. Les travailleurs américains de l'automobile, informés de la lutte par le biais du World Socialist Web Site, ont répondu avec un ferme soutien en faveur d'une offensive commune contre les constructeurs automobiles. «Nos frères et sœurs du monde entier nous font appel pour prendre part à ce combat», a écrit un ouvrier de l'usine de montage de Toledo Jeep au WSWS.

Le premier mois de 2019 a été marqué par une série de luttes de classe majeures en Europe, en Asie, en Afrique et en Amérique latine, notamment une grève de 13.000 travailleurs de l'automobile en Hongrie, des centaines de milliers d'enseignants et d'autres employés du gouvernement au Tamil Nadu, en Inde, et de manifestations de masse de travailleurs au Soudan et au Zimbabwe. En France, les manifestants de «gilet jaune» ont été rejoints par des «stylos rouges» pour protester contre l’état déplorable de l'éducation publique.

Aux États-Unis, une grève de 33.000 enseignants à Los Angeles est suivie d'une nouvelle vague d'agitation chez les enseignants. Un vote d'autorisation de grève sera terminé aujourd'hui à Oakland, en Californie, où des enseignants ont déjà entamé des arrêts de maladie de masse contre le projet de fermeture d'un tiers des écoles publiques de la ville. Des enseignants de Denver, au Colorado, ont approuvé une grève pour la première fois en un quart de siècle, tandis que des enseignants de Virginie ont organisé lundi une manifestation de masse dans la capitale de l’État.

La manifestation du 9 février prend son point de départ selon le principe qu'il ne peut y avoir de défense des emplois sans passer par l'organisation indépendante de la classe ouvrière. Comme l'indique la déclaration du comité directeur appelant à la manifestation, le syndicat UAW aux États-Unis et Unifor au Canada «sont des entreprises - des agences d’embauches à bas salaire et une force de police encadrant l’industrie contrôlée par des cadres qui figurent parmi les trois pour cent les mieux rémunérés.»

L'UAW et Unifor, qui collaborent depuis des décennies avec les constructeurs automobiles pour détruire des emplois et s'attaquer aux salaires et aux conditions de travail, ne font rien pour empêcher les fermetures d'usines. Face au massacre mondial des emplois de l'automobile, les syndicats n'organisent même pas une seule manifestation, et encore moins une grève.

L'UAW a publié cette semaine une vidéo pathétique mettant en lumière les concessions que le syndicat a fait passer en force en 2009 dans le cadre de la restructuration de l'industrie automobile par l'administration Obama: la réduction de moitié des salaires des nouvelles embauches, la fin des paiements des jours de chômage technique et l’élimination des prises en charge des soins dentaires et visuels pour les retraités. «Nous avons investi en vous», implore l’UAW auprès de GM, «c’est maintenant à vous d’investir en nous.» Une série d’appels de responsables de l’UAW suppliant GM d’«investir en nous» n’a pour but que de semer la démoralisation.

En fait, l’UAW a «investi dans GM» en devenant un important actionnaire de la société, ayant un intérêt direct dans l’exploitation renforcée des travailleurs de l’automobile, ce dont il a fait preuve en abandonnant de nombreuses avantages dans les accords salariaux, ceux-ci étant imposés contre l’opposition de masse des travailleurs chez GM et d’autres constructeurs d’automobiles. Le scandale de corruption qui a éclaté l'année dernière a mis en lumière le fait que les dirigeants d'entreprises «investissaient dans l'UAW» par le biais de paiements directs en échange de l'exécution par l'UAW de son rôle.

Lors de la grève des enseignants à Los Angeles, le syndicat d’enseignants UTLA et ses organisations confédérales, l'American Federation of Teachers et la National Education Association, ont fait passer en force un accord pourri pour mettre un terme à la lutte de la manière la plus manifestement antidémocratique possible. Après six jours sur les piquets de grève, l'UTLA n'a donné que quelques heures aux enseignants pour examiner le mauvais accord conclu à huis clos entre le conseil d’administration des écoles publiques et les politiciens démocrates avant de le mettre au vote.

Tant dans les manifestations des Gilets jaunes en France que les grèves au Mexique, la capacité de lutte découle du fait que les travailleurs se sont organisés indépendamment des syndicats.

L’impulsion objective des luttes des travailleurs aux États-Unis et dans le monde va vers une grève générale politique rassemblant toutes les couches de la classe ouvrière dans une lutte pour le pouvoir et contre le système capitaliste. Elle met les travailleurs en conflit avec les syndicats nationalistes et pro-entreprises, contrôlés par des cadres privilégiés dont les intérêts sont directement opposés à ceux des travailleurs qu'ils prétendent représenter.

Le World Socialist Web Site et le Parti pour l'égalité socialiste feront tout ce qui est en notre pouvoir pour promouvoir et aider au développement et à l'unification des luttes des travailleurs aux États-Unis et dans le monde entier, en reliant la montée de la lutte de classe à une perspective et programme politique socialiste révolutionnaire. Nous appelons tous les travailleurs et les jeunes à participer à la manifestation du 9 février et à envoyer vos messages de soutien.

(Article paru en anglais le 1er février 2019)

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