Il y a 100 ans: Les travailleurs canadiens entament une grève générale à Winnipeg

Le 15 mai 1919, plus de 30.000 travailleurs de Winnipeg, au Manitoba, ont débrayé pour appuyer une grève des métallurgistes qui avait commencé le 6 mai. Les membres de 70 sections locales, affiliées au Winnipeg Trades and Labour Council, ont voté en faveur de la grève générale, motivée en grande partie par des revendications salariales.

Le sentiment de grève était si répandu dans la population de la ville que même le service de police de Winnipeg a voté pour s'y joindre, mais il est resté en poste à la demande des dirigeants syndicaux. Au début, les livraisons de pain et de lait ont été suspendues, mais le quatrième jour de la grève, elles ont repris avec l'approbation des dirigeants.

Le One Big Union (OBU), établi à Calgary, en Alberta, en mars 1919, a eu une influence importante sur le mouvement ouvrier de Winnipeg. L'OBU était une organisation syndicaliste qui ressemblait aux Industrial Workers of the World par son programme et ses perspectives. La grève générale a commencé sous la direction d'un comité de cinq personnes.

La classe dirigeante de toute l'Amérique du Nord a été alarmée par la grève, le New York Times titrant «Le bolchevisme envahit le Canada». La grève de Winnipeg, qui faisait suite à une grève générale similaire à Seattle, dans l'État de Washington, a alimenté une panique hystérique face au danger provenant de la classe ouvrière, déjà manifestée lors de la Révolution russe et d’autres révoltes en Europe centrale.

Au fur et à mesure de la grève, l'establishment capitaliste local, qui avait mis en place un «Comité des mille» pour s'opposer aux travailleurs, exigea des mesures répressives plus sévères. Tout le service de police de Winnipeg a été congédié et remplacé par des bénévoles recrutés pour leur hostilité à la grève. Ces derniers se sont immédiatement livrés à des attaques violentes sur les lignes de piquetage. Le gouvernement fédéral canadien a envoyé la Gendarmerie royale du Canada, puis des troupes de l'armée à Winnipeg pour intimider les grévistes. Les soldats démobilisés ont commencé à parader en soutien ou en opposition à la grève.

Les employeurs des métiers de la métallurgie ont annoncé le 16 juin qu'ils traiteraient avec les membres des syndicats par l'entremise de comités élus, mais qu'ils continueraient de refuser de reconnaître le Metal Trades Council. Au même moment, les wagonniers des chemins de fer du Canadien Pacifique et du Canadian Northern Railway ont voté pour le retour au travail.

L'arrestation de huit meneurs de la grève a provoqué une nouvelle confrontation avec la police («samedi sanglant» du 21 juin) au cours de laquelle deux travailleurs ont été tués et trente blessés. Le 25 juin, le Trades and Labour Council a capitulé et a mis fin à la grève. Sur les huit dirigeants arrêtés, six ont été reconnus coupables de complot séditieux. Cinq ont été condamnés à un an de prison et à un à six mois. L'un des accusés, J.S. Woodsworth, a été jugé séparément et acquitté. L'OBU, malgré la défaite de la grève, a continué de gagner du soutien. À la fin de 1919, elle comptait plus de 41.000 membres, 101 syndicats locaux et huit organismes centraux.

(Article paru en anglais le 13 mai 2019)

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