France: le gouvernement met fin aux exigences de distanciation sociale dans les écoles alors que les cours vont reprendre

Le gouvernement Macron a publié de nouvelles directives pour la réouverture des écoles début septembre qui réduisent les exigences en matière de distance sociale pour les enseignants et les élèves.

Le document a été discrètement produit le 9 juillet et aurait été distribué aux établissements d’enseignement le 20 juillet, sans aucune annonce publique. Les médias ont cité le document pour la première fois au cours du week-end.

Les nouvelles lignes directrices stipulent que « dans les espaces clos (salles de classe, ateliers, bibliothèques, réfectoires, cantines, internats, etc.), la distanciation physique n’est plus obligatoire lorsqu’elle n’est pas matériellement possible ou qu’elle ne permet pas d’accueillir la totalité des élèves ». Comme de nombreux enseignants l’ont fait remarquer sur des médias sociaux, étant donné que les salles de classe contiennent généralement jusqu’à 35 élèves, la règle selon laquelle l’éloignement sera supprimé si «la totalité des élèves ne peut être accueillie» signifie qu’elle ne s’appliquera nulle part.

Les élèves de plus de 11 ans sont tenus de porter un masque s’ils ne peuvent pas maintenir une distance d’un mètre les uns par rapport aux autres. Les enseignants ne sont tenus de porter un masque que s’ils sont «à moins d’un mètre» des élèves. Cela contredit directement les preuves scientifiques selon lesquelles le virus se propage par le biais de particules vaporisées qui se propagent bien au-delà d’un mètre dans l’air. Les nouvelles lignes directrices ajoutent une exception pour les enseignants des crèches pour jeunes enfants, qui ne sont plus tenus de porter un masque sous aucune condition.

Plus aucune restriction n’est requise concernant le brassage d’élèves entre les classes ou les niveaux différents, qui limitent normalement la propagation du virus entre les élèves d’une même école. Les lignes directrices indiquent simplement que les écoles « organisent le déroulement de la journée et des activités scolaires pour limiter, dans la mesure du possible, les regroupements et les croisements importants ».

Enfin, aucune exigence d’organiser des transports publics supplémentaires n’est précisée pour limiter les contacts physiques entre les élèves.

Cette analyse des plans de rentrée scolaire met en évidence le caractère frauduleux et essentiellement meurtrier de la politique du gouvernement Macron. Le gouvernement poursuit cette politique en sachant parfaitement qu'elle accélérera la résurgence du virus dès la réouverture des écoles en septembre. Les élèves seront infectés, de même que leurs parents ; les membres de la famille et les enseignants attraperont le virus par leur intermédiaire et beaucoup d'autres personnes mourront à cause de cette politique.

Ces directives ont suscité une vive indignation parmi les enseignants sur les médias sociaux. Des centaines de commentaires ont été publiés par des enseignants sur le groupe Facebook «Stylos Rouges» au cours des deux derniers jours. «C'est une honte», a écrit Jean-Paul, «On parle de respect des mesures sanitaires même en extérieur, et là, en classe, aucune mesure de protection... Scandaleux... Assassins».

«La distanciation n'est plus obligatoire lorsqu’elle n'est pas possible en clair. Alors soyons plus clairs: plus de distanciation et laissons les jeunes se contaminer entre eux», a commenté Isa. «Et surtout laissons les contaminer les adultes», a répondu Mary.

«Il est évident qu'à la rentrée, il y aura de nombreux clusters qui toucheront les élèves et les professeurs de prime abord», a déclaré Mina. «Il y en a déjà eu un dans mon établissement en juin alors que tout le monde était masqué et tenait ses distances. Il va falloir s'attendre à de nombreuses fermetures localisées et non plus généralisées.»

Le gouvernement Macron n’a pas tenté d’expliquer la contradiction évidente entre l’assouplissement des mesures de distanciation sociale dans les écoles et l’admission d’une résurgence du virus en France et en Europe.

Le nombre total de cas a maintenant dépassé les 20 millions dans le monde, avec plus de 700.000 morts. Pour l’Europe, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a publié ce week-end une nouvelle mise en garde contre une résurgence des cas dans les pays ayant assoupli les mesures de confinement depuis le printemps. L’Espagne est passée d’un taux d’infection quotidien moyen de 132 en juin à plus de 1.500 dans les dix premiers jours d’août.

En France, plus de 4.500 cas se sont déclarés en trois jours. Le nombre de personnes hospitalisées est passé de 383 le vendredi à 396 le dimanche. Nicolas Peju, le directeur général adjoint du Service régional de santé d’Île-de-France a indiqué dimanche que le nombre de cas quotidiens dans cette région a dépassé 500 ces derniers jours, contre 100 à la fin du mois de juin. « Nous sommes au début d'un rebond épidémique», a-t-il déclaré.

Ce ne sont pas les considérations scientifiques qui motivent la politique de réouverture des écoles, mais la cupidité de l’élite financière et patronale française. Toute restriction doit être levée au retour complet de tous les élèves dans les classes afin de libérer les parents pour qu’ils puissent reprendre le travail et continuer à générer des profits pour le patronat. Les mêmes intérêts sous-tendent l’actuelle réouverture des écoles à l’international, par le gouvernement Trump aux États-Unis, Johnson en Grande-Bretagne, Merkel en Allemagne ou ailleurs.

Le Premier ministre français Jean Castex a explicitement déclaré qu’il n’y aurait pas de reconfinement général en France comme cela s’est produit en mars. Il a déclaré le mois dernier qu’un enfermement « brise la progression de l’épidémie, certes, mais au niveau économique et social, c’est catastrophique ». Autrement dit, la mort de dizaines ou de centaines de milliers de personnes ne peut être un obstacle pour les profits du patronat.

Le gouvernement compte sur son étroite collaboration avec les syndicats pour faire appliquer cette politique meurtrière. Les principales fédérations syndicales ont toutes clairement indiqué qu’elles ne feront rien pour empêcher la réouverture des écoles en septembre. Le syndicat SUD a publié lundi 10 août une déclaration en réponse aux dernières directives sur les écoles. Il a déclaré qu’il « se montrera très vigilant concernant l’évolution de la situation sanitaire, et appelle les personnels à tout mettre en œuvre pour protéger leur santé sur leur lieu de travail ».

Les lignes directrices scolaires justifient la fin des exigences d’éloignement en faisant référence à des «données rassurantes concernant l’impact et la transmission de la Covid-19 chez les enfants». C’est là un mensonge éhonté. Alors que les jeunes ont statistiquement moins de chances de mourir du virus que les adultes plus âgés, il n’y a pas de consensus scientifique sur le fait qu’ils transmettent le virus moins activement. Certaines études indiquent que les enfants sont des propagateurs plus actifs que les adultes. L’impact à long terme du virus sur les jeunes reste également mal compris.

Une étude récente menée en Corée du Sud était basée sur le dépistage et la recherche de près de 60.000 personnes s’étant trouvées en contact avec des personnes infectées. Ses auteurs ont constaté que pour les personnes vivant avec des patients âgés de 10 à 19 ans, 18,6 pour cent avaient contracté le virus, soit le taux de transmission le plus élevé de toutes les tranches d’âge.

Une lettre de recherche publiée le 30 juillet dans la revue JAMA Pediatrics a passé en revue les tests de 145 patients. Ces derniers présentaient des symptômes légers à modérés de COVID-19 dans la semaine suivant la contamination par le virus. Ils ont constaté que les enfants âgés de 5 à 17 ans présentaient des niveaux d’acide nucléique viral dans leurs voies respiratoires supérieures similaires à ceux des adultes. Les jeunes enfants de moins de 5 ans, cependant, avaient de 10 à 100 fois plus de SRAS CoV-2 [qui cause le Covid-19]dans leurs voies respiratoires que les groupes plus âgés. Les chercheurs notent que des études pédiatriques «ont rapporté une corrélation entre des niveaux d’acide nucléique plus élevés et la capacité de cultiver des virus infectieux».

Le développement d’une lutte contre la politique de réouverture des écoles ne peut être laissé aux mains des fédérations syndicales, qui collaborent activement avec le gouvernement Macron. Les enseignants doivent plutôt établir leurs propres comités de sécurité indépendants dans chaque école et lieu de travail, comme point de départ pour mener une offensive organisationnelle et politique indépendante qui réunisse l’ensemble de la classe ouvrière. L’organisation d’une réponse sûre et rationnelle à la pandémie signifie mener un combat politique pour un gouvernement ouvrier et une politique socialiste basée sur les besoins sociaux plutôt que sur le profit privé.

(Article paru d’abord en anglais le 12 août 2020)

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