Dans l‘Indiana, le comité de sécurité de la base de l'usine Faurecia Gladstone exige la réintégration d’un lanceur d’alerte

Le comité de sécurité de la base (article en anglais) de Faurecia Gladstone, récemment créé, exige la réembauche immédiate d'un lanceur d'alerte dans l'usine du centre-sud de l'Indiana. James Grady a été faussement accusé par l'entreprise d'avoir tenté d'infecter ses collègues avec le COVID-19 et a été injustement licencié à la mi-mai.

Le comité exige la réintégration immédiate de James Grady avec un rappel de salaire intégral et la cessation de tous les licenciements abusifs et autres formes d'intimidation qui sont employées par la société, qui vaut des milliers de milliards de dollars, pour faire régner la terreur dans les ateliers ici et ailleurs.

Un membre du comité a déclaré au World Socialist Web Site Autoworker Newsletter que, contrairement aux allégations de l'entreprise, Grady suivait les instructions spécifiques du directeur des ressources humaines de l'entreprise et du secrétaire du syndicat local qui lui avaient dit de reprendre le travail, le jour en question. Grady a déposé une plainte pour licenciement abusif.

La direction de l'usine pousse régulièrement les travailleurs au point d'épuisement. En mars, alors que le coronavirus commençait à se propager rapidement à travers les États-Unis, la société licencia plus de 200 personnes par SMS. Mais la production n'a jamais ralenti et les travailleurs sont souvent obligés de faire des journées de 12 heures, sept jours par semaine. Grady est bien connu dans l'usine comme un militant contre l'intimidation de l'entreprise et défenseur de la santé, de la sécurité et du bien-être de tous les travailleurs du site pendant ses dix ans en poste.

Il a récemment parlé à l’Autoworker Newsletter (Bulletin d'information des travailleurs de l' automobile) pour expliquer son cas et décrire l'intimidation systématique de l'entreprise et les violations des règles de sécurité du travail, imposées en collusion avec le syndicat International Brotherhood of Electrical Workers, (IBEW).

Fin avril, dit Grady, lui et sa famille ont été testés après que le père de son amie ait été testé positif au COVID-19. Le 5 mai, son test est déclaré positif. L’Agence de santé l'a autorisé à reprendre le travail à la mi-mai. Mais l'entreprise et le syndicat se sont associés dans le but d’exploiter la situation pour se débarrasser d'un homme qu'ils considéraient comme un lanceur d’alerte et un fauteur de troubles.

Susan, le directeur des ressources humaines de l'entreprise et George "Frankie" Ledbetter, qui selon le site Web du syndicat est le directeur commercial et le secrétaire financier de la section locale 1424 du syndicat IBEW, l'ont tous deux incité à reprendre le travail avant la date fixée par l’Agence de santé locale. Du fait qu'il avait été testé négatif entre-temps, Grady ne s’est pas préoccupé et a repris le travail.

À peine rentré dans l’usine, ils ont déclenché leur piège. «Ils ont dit que j'essayais intentionnellement de rendre les gens malades, et ils m'ont licencié», a-t-il déclaré. «Ils utilisent le COVID-19 comme moyen d’éviter toutes sortes d’obligations. »

Au cours de son histoire, l'usine a changé de propriétaire à plusieurs reprises, d'Encom à Arvin Supreme, Arvin Meritor et maintenant Faurecia. Les systèmes d'échappement fabriqués ont subi périodiquement des modifications mineures. Mais chaque changement de propriétaire a entraîné des attaques dramatiques contre les salaires, les heures de travail et la santé et la sécurité des travailleurs. Ces attaques n’ont fait que s’intensifier pendant la pandémie.

«Lorsque Faurecia a pris la relève, tout s'est déchaîné», a déclaré Grady. «Ils produisent des systèmes d'échappement coûteux et très rentables pour les véhicules légers, les véhicules utilitaires et les engins agricoles pour plusieurs entreprises.» Selon Automotive News, un véhicule sur trois en circulation est équipé par l'entreprise.

«Ils paient les gens une misère», a poursuivi Grady. «Ils doivent travailler dix jours de 12 heures d'affilée avant de prendre quatre jours de congé; et s'ils doivent s’absenter pendant un jour, la séquence de dix jours recommence, alors ils n’ont jamais de jours de repos.

« Quand j'étais délégué syndical, je me suis battu pour ces gens. Mais le syndicat a dit: ‘Si vous trouvez la personne sympa, vous pouvez la défendre. Si vous n'aimez pas cette personne, vous n'êtes pas obligé de le faire’. J’ai vu cela maintes et maintes fois. Le syndicat m'a dit: ‘Nous nous entendons très bien avec l'entreprise. Ne faites pas de vagues’. Alors j'ai renoncé à être délégué syndical. »

Lorsqu’il travaillait sur du matériel de soudage lourd, il a subi une déchirure des tendons dans une épaule qui a nécessité une intervention chirurgicale complexe. Il fut absent de son travail pendant 35 jours avant de reprendre, les ordonnances du médecin le restreignant à des tâches légères. Cependant, l'entreprise le réinstalla sur la même machine. Et lorsqu'il s'en est plaint au superviseur, le patron a dit: « Vous vous rendez compte que je n'en ai rien à foutre. C'est votre travail. »

Comme on pouvait s'y attendre, son épaule droite a été de nouveau blessée. Lorsqu'il s’est adressé à Ruth Means, la représentante de l'entreprise pour les blessures graves, elle a dit: « Je l'ai réparée une fois, je ne vais pas la réparer à nouveau. » En colère, mais pas surpris, Grady a déclaré: «Elle dit cela à tout le monde. Je pourrais vous donner cent noms de personnes à qui elle a dit exactement la même chose. Si vous vous blessez au travail, ils disent invariablement que vous ne l'avez pas fait chez Faurecia ».

«Que vous soyez blessé ou non, continuez à travailler. Si vous avez un membre amputé mettez-y des attaches et continuez. Je travaillais dans une usine de transformation de porcs, et la façon dont ils traitent les porcs est la même que celle réservée aux gens de Faurecia. Tant que vous rapportez à l'entreprise, vous êtes bon. Dès que vous êtes blessé ou épuisé, vous partez. Nous ne savons toujours pas qui a été infecté par le coronavirus [là-bas]. »

Même avant le coronavirus, les maladies professionnelles, en particulier le cancer, étaient courantes dans l'usine. L’Institut national du Cancer de l'Institut national de la santé écrit: «L'exposition professionnelle au chrome hexavalent en suspension dans l'air est associée à des risques accrus de cancers multiples.» Les étiquettes d'avertissement sur les fûts de fil à souder à l'usine nomment spécifiquement ce composé. À la fin de la journée, les soudeurs et les autres autour d'eux ont la peau incrustée de cette matière. La ventilation est au strict minimum et les travailleurs testent le système de ventilation avec un morceau de ruban attaché à un manche à balai.

Grady a assisté à 12 enterrements de collègues de Faurecia. Onze étaient morts d'un cancer.

Pour illustrer la cruauté de l'entreprise, il a décrit le cas déchirant d'une jeune femme debout dans l'atelier, en larmes. «Ils avaient trouvé son grand-père inanimé», dit-il. «Elle avait peur d'aller aux RH, alors je suis allé avec elle et leur ai expliqué pourquoi elle voulait partir. Les RH ont dit que si son grand-père était décédé, elle serait couverte. Mais si elle partait et qu'il ne mourait pas, elle recevrait «un blâme», une allusion au système dans lequel on licencie celle où celui qui a cumulé un nombre suffisant de « blâmes », quelles que soient les raisons.

Dans un autre cas, une femme plus âgée est restée au travail en étant malade parce qu'elle avait peur d'accumuler des blâmes pour absence au travail. Le lendemain, elle ne s'est pas présentée au travail, on l’a retrouvée morte après avoir subi une crise cardiaque foudroyante. L'entreprise l'avait littéralement épuisée jusqu’à la mort, a-t-il déclaré. «Tu sais ce qu'ils ont fait pour elle? » a-t-il demandé. « Absolument rien, même pas des fleurs, rien. »

Mais parmi les travailleurs de Faurecia, un sentiment croissant de rébellion s'installe, comme en témoigne le lectorat croissant du World Socialist Web Site et le soutien au Comité de sécurité de la base de Gladstone. «L'entreprise et le syndicat s’affairent dans l'usine pour dire à tout le monde que ce site Web n'est pas crédible», a déclaré Grady. «Même le responsable des ressources humaines de l'entreprise essaie d'inciter les gens à arrêter de lire le World Socialist Web Site. Cette entreprise marche à la peur et à l'intimidation. »

Pour envoyer des messages de soutien à James Grady, pour entrer en contact avec le comité de sécurité de la base de Gladstone ou pour aider à mettre en place un comité dans votre propre usine, contactez le bulletin Autoworker à autoworkers@wsws.org

(Article paru en anglais le 17 août 2020)

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