Québec: des travailleurs critiquent l’inaction des syndicats face à la dangereuse réouverture des écoles

Des millions d’élèves à travers le Canada retournent à l’école cette semaine et la semaine prochaine dans des salles bondées et mal équipées, alors que la pandémie de coronavirus continue de faire rage au pays et internationalement.

Ce dangereux retour en classe a pour seul objectif de forcer les parents travailleurs à retourner sur les lieux de travail pour alimenter les profits de la grande entreprise. Il a été conjointement orchestré par les gouvernements provinciaux et le gouvernement fédéral de Justin Trudeau.

Parmi ses promoteurs les plus ardents, on retrouve le premier ministre québécois François Legault, de la CAQ (Coalition Avenir Québec). Ce dernier a refusé d’offrir aux parents inquiets le choix de l’apprentissage en ligne, en le réservant uniquement aux enfants munis d’un billet médical. Et même après de nouvelles éclosions de COVID-19 cette semaine dans les établissements scolaires de la province, Legault continue de rejeter l’option d’une fermeture des écoles et d’un reconfinement pour éviter une contamination de masse.

Au Québec, épicentre de la pandémie au Canada, le ministère de la Santé ne diffuse pas de bilan officiel sur la progression du coronavirus dans les écoles. Mais selon des données compilées par un père de Montréal sur le site covidecolesquebec.org, plus d’une trentaine d’écoles de la province ont déjà eu au moins un cas positif.

Partout dans la province, des travailleurs, des parents et des experts médicaux ont exprimé leurs profondes inquiétudes face aux plans de réouverture des écoles:

- Un groupe de parents a envoyé une mise en demeure au ministère de l’Éducation pour exiger la mise en place de l’apprentissage scolaire en ligne. Politimi Karounis, membre de ce groupe, a dit avoir reçu des milliers de messages de parents qui se disent inquiets de la rentrée scolaire de leur enfant.

- Sarah Gibson, mère de deux adolescentes en banlieue de Montréal, a lancé une pétition qui a recueilli plus de 30.000 signatures. Réfutant les mensonges du gouvernement, le texte qui accompagne la pétition souligne que c’est «de plus en plus clair que les enfants sont aussi contagieux que les adultes». Le texte attire l’attention sur la transmission aérienne, en présence de systèmes de ventilation souvent vétustes, comme un vecteur important de la propagation du virus. Et il souligne la nécessité de tester régulièrement les élèves et le personnel scolaire.

- Un groupe de 150 médecins, épidémiologistes et autres scientifiques ont signé une lettre ouverte au gouvernement Legault qui dénonçait la réouverture des écoles. «Le plan actuel de rentrée scolaire au Québec doit mieux tenir compte de toutes les preuves scientifiques disponibles pour prévenir les éclosions dans les écoles, pour éviter de mettre en péril la sécurité de nos enfants, de nos enseignants et de nos parents, ainsi que pour prévenir une résurgence du SRAS-CoV2 (COVID-19) dans notre communauté», indique la lettre.

Au Québec comme dans le reste du Canada, les syndicats travaillent depuis des décennies avec la classe dirigeante pour imposer l’austérité capitaliste. Ils collaborent pleinement aujourd’hui à la campagne de retour au travail, se contentant d’émettre de timides critiques de la rentrée scolaire prématurée afin de camoufler leur collaboration avec les autorités.

Mais les travailleurs, dans tous les champs d’activité et sur une échelle internationale, commencent à tirer des leçons du rôle traître des syndicats.

Les commentaires suivants ont été recueillis sur les médias sociaux et proviennent d’enseignants du Québec. Ils sont particulièrement significatifs puisqu’ils critiquent sévèrement la Fédération autonome de l’enseignement, un syndicat qui s’affiche «plus militant».

- «Moi qui pensais que mon syndicat était mobilisé, finalement je me suis trompée! Il n'y a pas de système de ventilation dans nos écoles, pas de diminution de ratio, pas de visière, pas de Plexiglas, des classes sans fenêtre et en plus, au secondaire on doit désinfecter nous-mêmes chaque fois qu'on arrive dans une nouvelle classe.»

- «Nos syndicats... Oubliez ça! Il faut se mobiliser nous-mêmes et après les foutre dehors!»

- «J’ai toujours été la première à défendre la FAE, mais là, je ne comprends pas... Les profs du secondaire enseigneront dans des environnements sans fenêtre, mal ventilés... Je suis sans voix et très déçue!»

- «Ce ne sont pas des réponses qu’il faut exiger, ce sont des actions ! Voilà six mois que nous dénonçons ce problème ici même en lien avec la Covid et que nous vous demandons de ne pas laisser le gouvernement nous exposer à ce danger supplémentaire. La rentrée est déjà entamée et tout ce que je vois encore, c’est l’attitude "on attend que ça meure".»

Le Parti de l’égalité socialiste soutient que la seule façon de mettre un terme à la réouverture criminelle des écoles, et de sauver des vies, est de mettre en place des comités de sécurité formés de travailleurs de la base, en opposition aux syndicats pro-capitalistes.

De tels comités indépendants doivent demander la fermeture immédiate des écoles jusqu'à ce que la pandémie soit maîtrisée, ainsi qu’une augmentation considérable du financement de l'enseignement public afin de garantir que tous les élèves aient accès à l'enseignement en ligne et aux services de soutien nécessaires, notamment en matière de santé mentale, éducation spécialisée et sécurité alimentaire.

À ces demandes, l’élite dirigeante va inévitablement répondre qu’il n’y a «pas d’argent» pour les satisfaire. Les travailleurs doivent répliquer que les ressources existent en abondance, mais qu’elles sont détournées vers la grande entreprise et l’aristocratie financière qui, depuis le début de la pandémie, ont reçu des centaines de milliards de dollars d’Ottawa en plans de sauvetage.

La lutte contre la réouverture dangereuse et précipitée des écoles doit être associée à une mobilisation politique et la préparation d’une vaste contre-offensive ouvrière pour la défense des vies humaines. C’est pourquoi les comités de sécurité de la base dans les établissements scolaires doivent faire appel à tous les travailleurs – éducateurs, chauffeurs de bus scolaires, concierges, personnel d'entretien et autres personnels de soutien, ainsi que les travailleurs de la construction, des soins de santé, de la logistique, de l'alimentation, du commerce de détail et de la restauration.

Aux États-Unis, où des milliers d'infections parmi les enseignants et les élèves ont été signalées dans tout le pays depuis la réouverture des écoles fin juillet, plusieurs groupes d’enseignants ont pris la décision de créer des comités de sécurité de la base. Cet exemple doit être suivi au Québec et partout au Canada. Nous appelons les membres du personnel scolaire, les parents et les élèves qui sont d’accord avec un tel programme à nous contacter.

Les auteurs recommandent également:

Formez des comités de sécurité indépendants composés d'enseignants, de parents et d'élèves! [17 août 2020]

Loading