Perspectives

Un possible vaccin contre le COVID-19 rend plus urgentes encore des mesures pour stopper la propagation du virus

L’annonce lundi par Pfizer et son partenaire allemand BioNTech que des progrès avaient été réalisés dans la mise au point d’un vaccin efficace contre le COVID-19 est un développement prometteur et encourageant. Cela rend les mesures d’urgence pour contenir la propagation du virus et sauver des vies d’autant plus nécessaires jusqu’à ce qu’un vaccin soit largement disponible.

Pfizer a annoncé que les patients participant aux essais cliniques et ayant reçu deux injections du vaccin, espacées de trois semaines, avaient connu 90 pour cent de cas de COVID-19 de moins qu’un groupe témoin. À titre de comparaison, le vaccin annuel typique contre la grippe n’est efficace qu’à 40-60 pour cent.

Ces conclusions s’appuyaient sur les données initiales d’un essai clinique comprenant plus de 43.538 participants, qui ont été examinées par un conseil indépendant mais n’ont pas encore été rendues publiques. La société veut déposer une demande d’urgence de permis d’utilisation lorsque la moitié des participants à l’étude auront été en observation pendant au moins deux mois pour des questions de sécurité, c’est à dire dans la troisième semaine de novembre.

S’il est approuvé, le vaccin de Pfizer (ainsi que celui développé par son concurrent Moderna) sera le premier vaccin à ARNm à large utilisation. Cela ouvrirait une nouvelle ère pour le traitement rapide des maladies infectieuses avec une toute nouvelle classe de vaccins à faible coût.

Les progrès réalisés dans la mise au point d’un vaccin sont une nouvelle encourageante. Toutefois, des questions et des problèmes importants demeurent.

Dans son rapport sur le vaccin, la revue médicale Stat a noté qu’«il n’y avait pas encore d’informations sur la question de savoir si le vaccin prévenait les cas graves, le type de cas pouvant entraîner une hospitalisation ou un décès. Il n’y a pas non plus d’informations pour l’instant qui indiquent s’il empêche les gens d’être porteurs du virus causant le Covid-19, le SRAS-CoV-2, sans symptômes». Ce qui serait essentiel pour déterminer l’efficacité du vaccin à réduire les taux de transmission.

Il est également trop tôt encore pour dire combien de temps le vaccin protège contre l’infection. Stat fait aussi remarquer que Pfizer et BioNTech ont annoncé des résultats que d’autres scientifiques n’avaient pas encore examinés et qui n’avaient pas encore été publiés par une revue médicale.

Pour autant que les premiers résultats se confirment, Pfizer a déclaré que même dans les meilleures conditions, seulement 50 millions de doses seraient disponibles d’ici la fin de l’année et 1,3 milliard seraient produites en 2021. Le vaccin doit être stocké à des températures extrêmement basses, ce qui pourrait rendre sa livraison extrêmement difficile dans de nombreux endroits.

De plus, la disponibilité et la distribution du vaccin seront entravées par le fait que les sociétés pharmaceutiques géantes subordonneront sa production aux impératifs de profits et par les intérêts contradictoires des États-nations concurrents.

Ceci dit, il semble bien que des progrès soient en cours. Le directeur de l’Institut national américain des allergies et maladies infectieuses, le Dr Anthony Fauci, a noté que les premiers résultats de Pfizer étaient aussi de bon augure pour le vaccin développé par la société de biotechnologie Moderna et les Instituts nationaux de la santé, sur la base d’une technologie similaire. Le ministère russe de la Santé a publié une déclaration indiquant que son vaccin Spoutnik V serait également efficace à plus de 90 pour cent.

Tout cela signifie qu’un vaccin efficace sera probablement disponible pour une large distribution dans le courant de l’année prochaine.

Les progrès réalisés dans la mise au point d’un vaccin rendent d’autant plus criminelle la politique d’«immunité collective» mise en œuvre par les gouvernements du monde entier. Alors que l’on commence à voir la lumière au bout du tunnel, l’argument qu’il serait nécessaire de «vivre avec le virus» devient absolument inacceptable.

La nouvelle du vaccin arrive au moment où la pandémie s’envole aux États-Unis et en Europe. Les États-Unis ont dépassé les 10 millions de cas et d’ici quelques jours un quart de million de personnes seront mortes dans le pays. À la date de lundi, 43 des États ont signalé 10 pour cent de nouveaux cas de COVID-19 de plus que la semaine précédente.

Malgré cette catastrophe, aucun plan n’existe pour contenir la pandémie. Le président américain Donald Trump, qui reste en fonction pendant encore deux mois et demi au moins, a publiquement préconisé une «immunité collective», tout en déclarant que la propagation de la maladie était un bien. Le président élu Joe Biden a rejeté les appels en faveur d’un confinement plus large.

Le Royaume-Uni, la France et l’Allemagne ont annoncé des restrictions mineures sur les bars et les salles de gym. Par contre, ils ont catégoriquement refusé de fermer les lieux de travail non essentiels comme les usines, et les écoles.

L’actuelle situation catastrophique créée par la pandémie est directement due au fait que la politique gouvernementale a été déterminée non pas par la santé de la population, mais par les profits. Une fois le sauvetage des banques assuré en mars, la classe dirigeante a mis en œuvre sa politique de retour au travail.

La conséquence furent des centaines de milliers de morts. Si l’on ne prend pas des mesures d’urgence maintenant, des centaines de milliers d’autres personnes mourront avant qu’un vaccin ne soit largement disponible.

Il faut mettre un terme à cette perte insensée de vies! Les entreprises non essentielles doivent être fermées, avec indemnisation complète de toutes les pertes de salaire en raison de la pandémie pour les travailleurs et de revenus pour les petits entrepreneurs. Le terrible choix entre avoir à risquer sa vie ou ses moyens d’existence n’est pas acceptable.

Là où la production est essentielle au fonctionnement de la société, des conditions de travail sûres doivent être supervisées par des comités de sécurité des travailleurs et des professionnels de la santé, sans considération des profits patronaux.

Il faut investir massivement dans les infrastructures de santé publique, notamment dans des tests universels, la recherche des contacts et un traitement gratuit pour tous. Une fois qu'un vaccin sera disponible, sa distribution devra être libre et non soumise aux profits de sociétés privées ou à la concurrence d’États nationaux.

La classe ouvrière doit maintenant intervenir pour s’assurer que des centaines de milliers de gens ne meurent pas inutilement dans les semaines et mois à venir parce que les capitalistes doivent avoir leurs profits.

(Article paru d’abord en anglais le 10 novembre 2020)

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