Cinq travailleurs de la santé canadiens meurent en une semaine alors que les infections à la COVID-19 augmentent rapidement dans tout le pays

Les infections à la COVID-19 continuent de grimper en flèche au Canada à un rythme record de plus de 7000 nouveaux cas par jour. Santé Canada a indiqué qu'au 5 janvier, 618.000 Canadiens avaient contracté le virus depuis mars dernier. Il y a eu 16.230 décès. Plus de 4000 patients atteints de la COVID-19 sont actuellement hospitalisés.

Des hôpitaux de campagne ont été ouverts en Ontario et en Alberta pour faire face à la demande qui dépasse rapidement la capacité des infrastructures hospitalières. À London, en Ontario, un camion réfrigéré a été mis en service à la hâte pour prendre le surplus de cadavres d'une morgue locale.

Au cours de la semaine dernière seulement, cinq travailleurs de la santé sont morts du virus, deux en Alberta, deux en Ontario et un au Québec.

Bien qu'il n'existe pas de système global de suivi centralisé répertoriant les décès dans des secteurs industriels particuliers, au moins 31 travailleurs de la santé sont décédés des suites de la COVID-19 au Canada. Quinze de ces décès ont eu lieu en Ontario.

À la fin juillet, les travailleurs de la santé représentaient environ 20 % de tous les cas de COVID-19 au Canada. Les travailleurs des établissements de soins de longue durée et des maisons de retraite, qui ont été l'épicentre de la pandémie au Canada, ont été particulièrement touchés. Plus de 12.000 résidents de maisons de soins infirmiers et de résidences pour personnes âgées ont péri jusqu'à présent.

Sheila Yakovishin, qui travaillait au Berkshire Care Centre à Windsor, en Ontario, a succombé au virus le 31 décembre. Yakovishin avait 60 ans et travaillait au centre depuis près de 32 ans.

Erica Hooker, directrice générale du Berkshire Care Centre, a décrit Yakovishin comme un membre dévoué et bien-aimé de la communauté. «Malgré ses autres problèmes de santé, Sheila a toujours persévéré et fait passer les soins des autres avant les siens. Elle avait un cœur immense, et cela se voyait chaque jour dans les soins et le soutien qu'elle apportait aux résidents et à ses collègues», a-t-elle commenté.

L'éclosion de COVID-19 a été déclarée au Berkshire Care Centre le 11 décembre. Au moins 82 patients de l'établissement ont été déclarés positifs pour le virus, ainsi que 38 membres du personnel, selon l'unité sanitaire du comté de Windsor-Essex. Au moins 7 résidents sont morts du virus depuis le début de l’épidémie actuelle. Dans toute la région de Windsor-Essex, 20 maisons de retraite et de soins de longue durée sont confrontées à des éclosions pandémiques, avec des centaines de cas actifs parmi les résidents et le personnel. Avant les vacances de Noël, trois écoles locales ont déclaré des éclosions, ainsi que plusieurs exploitations de serres.

Sheila Yakovishin était membre d'Unifor. «Au nom de notre syndicat, j'exprime les plus sincères condoléances à la famille de Sheila et à tous ceux qui l'ont connue et aimée. En ce début de nouvelle année, la pandémie de COVID-19 continue de faire rage sans contrôle dans les foyers de soins de longue durée à but lucratif de l'Ontario», a déclaré le président d'Unifor, Jerry Dias, dans un communiqué. «Il faut l'arrêter, nous devons protéger les travailleurs de la santé contre cette maladie».

Dias n'a aucun scrupule. Lui et son syndicat ont soutenu la campagne de retour au travail des travailleurs non essentiels mise en œuvre par l'élite corporative, le gouvernement provincial conservateur du premier ministre Doug Ford et le premier ministre libéral fédéral Justin Trudeau. Dias est l’un des principaux promoteurs du gouvernement libéral fédéral «progressiste» et a complimenté Ford et ses conservateurs pour avoir «ramé dans la même direction» que Trudeau, les entreprises canadiennes et les syndicats, alors même que la réponse des deux niveaux de gouvernement à la pandémie a conduit à une catastrophe totale pour les travailleurs.

Les systèmes de soins de santé et de soins aux personnes âgées du Canada, délibérément sous-financés depuis des décennies par tous les gouvernements, quelle que soit leur allégeance politique, croulent sous la demande. Les responsables à Ottawa et à Toronto ont admis que le traçage des contacts s'est largement effondré, ce qui a entraîné une nouvelle accélération de la transmission. Les laboratoires sont débordés, ce qui entraîne de longs délais dans l'obtention des résultats des tests. De manière scandaleuse, plus de dix mois après l'apparition du virus au Canada, les professionnels de la santé ont encore du mal à trouver des équipements de protection adéquats.

Ce sont ces conditions de travail oppressives, qui ont d’innombrables conséquences nocives sur la santé physique et mentale des travailleurs de la santé, qui ont mené à la mort tragique récente de Karine Dion, une urgentologue de Granby qui s’est suicidée.

L'état lamentable du système de santé face à une deuxième vague de pandémie que tous les experts sérieux ont averti comme étant inévitable est la responsabilité de l'ensemble de l'establishment politique.

La prétention de Ford selon laquelle son gouvernement érigerait un «anneau de fer» autour des établissements de soins de longue durée s'est révélée être un cruel canular. Lundi, le gouvernement de l'Ontario a rapporté que 219 foyers de COVID-19, soit plus d'un tiers des foyers de soins de longue durée de la province, étaient actifs.

«Le grand nombre d'infections du personnel» mettent les résidences pour personnes âgées et les maisons de soins «sous une pression énorme, les obligeant à demander l'aide de travailleurs intérimaires extérieurs», a déclaré un travailleur de la région de Toronto au World Socialist Web Site. «Ces travailleurs sont souvent mis dans une situation terrible: insuffisamment formés, mal préparés, mal payés et contraints par la nature de leur travail (et l'absence d'emploi à temps plein à un salaire décent) d'aller d'établissement en établissement, ce qui met en danger leur vie, celle de leur famille et des personnes dont ils s'occupent».

Le décès de Yakovishin, la veille du Nouvel An, fait suite à la mort, le 28 décembre, de Jose Marie Corral, 61 ans, un aide-soignant à la maison de soins continus Bethany Riverview de Calgary. Les détails concernant un deuxième travailleur de la santé albertain qui a perdu la vie ces derniers jours n'ont pas encore été publiés. Le 2 janvier, Oscar Anibal Rodriguez, un préposé aux bénéficiaires au CHSLD Saint-Antoine de Québec, est décédé. Rodriguez était à la fin de sa cinquantaine. Le gouvernement provincial qualifie de «critique» l’épidémie qui sévit à la résidence de Québec, avec plus de cent infections et douze décès au cours de l'éclosion actuelle.

Les vaccinations avaient déjà commencé à l'établissement de Saint-Antoine, mais Rodriguez n'avait pas encore reçu sa première inoculation. Moins d'un pour cent de la population canadienne a été vacciné à ce jour en raison d'un fiasco toujours en cours dans la distribution des vaccins de Pfizer et de Moderna dans tout le pays.

Le dernier décès d'un travailleur de la santé a été confirmé mardi, lorsqu'il a été annoncé que Maureen Ambersley, une infirmière auxiliaire autorisée de Mississauga, avait succombé à la maladie. Ambersley, qui a travaillé comme infirmière pendant 16 ans, est décédée mardi à l'âge de 57 ans. Elle laisse derrière elle ses deux enfants âgés de 26 et 28 ans.

Tant les travailleurs des établissements de soins de longue durée que les membres des familles des résidents ont manifesté dans les établissements durement touchés dans tout le pays. Le 2 janvier, les manifestants se sont rassemblés dans un établissement de soins de longue durée de 254 lits dans le quartier de Scarborough à Toronto pour exiger de meilleurs soins et une meilleure protection.

Lors de la deuxième vague de la pandémie, 64 des résidents du foyer sont déjà morts du virus. Au cours de la période de Noël, 77 membres du personnel ont été atteints par l'infection. Soixante autres résidents sont actuellement infectés.

Les travailleurs des résidences de soins à domicile de l'Ontario continuent de recevoir des salaires inférieurs aux normes, de travailler selon des horaires exténuants et de lutter pour recevoir les équipements de protection individuelle adéquats. Au même moment, les résidents des établissements de soins reçoivent de moins en moins de services et d'attention.

(Article paru en anglais le 6 janvier 2021)

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